Par Gascogne
La fréquentation de ce site prédispose plus aux Busiris qu’aux satisfécits, mais pour une fois que l’occasion se présente, autant ne pas faire la fine bouche…
Petit rappel des faits pour ceux que la torpeur estivale aurait perturbés dans le suivi de l’actualité judiciaire.
Acte 1 : le procès dit du “gang des barbares” n’était-il pas terminé que l’avocat des parties civiles, Me Szpiner, indiquait déjà tout le mal qu’il pensait des réquisitions de l’avocat général, Philippe Bilger, qui avait eu le malheur de ne pas réclamer la peine maximale pour l’ensemble des accusés.
Acte 2 : Une fois les peines prononcées par la Cour d’Assises, légèrement inférieures à celles requises pour un certain nombre de condamnés, Me Szpiner exige que le Garde des sceaux demande au procureur général de Paris de faire appel, ce droit lui étant refusé. Le Ministre obtempérera.
Acte 3 : Mais comme cela ne devait pas encore le satisfaire, il s’est semble-t-il décidé à régler quelques comptes par voie de presse interposée , traitant certains confrères de “connards de bobos de gauche” et l’avocat général de “traitre génétique”.
Me Szpiner expliquera simplement que ses propos ont été sortis de leur contexte, tout en maintenant les termes de “traitre génétique” qui font référence à la condamnation pour collaboration du père de Philippe Bilger.
Il est étonnant comme un avocat qui a eu sa carte d’un parti politique majoritaire et qui a l’oreille d’un président de la République semble pouvoir s’autoriser beaucoup de choses. Il est encore plus hallucinant qu’un homme de Loi qui prête un serment bien particulier peut invectiver et insulter comme bon lui semble un autre homme de loi qui a prêté un serment tout aussi particulier, ainsi que ces propres confrères, sans que personne ne réagisse.
Personne, pas tout à fait, puisque outre le procureur général de Paris qui a demandé des poursuites disciplinaires au Bâtonnier de Paris, le sous-secrétaire d’État à la Justice s’est fendu d’une intervention dans le Nouvel Observateur.
Alors merci M. Bockel pour cette plaidoirie pour une justice apaisée.
Sauf que…
Sauf que cet article laisse un goût amer pour plusieurs raisons.
N’était-ce pas à votre ministre de tutelle de monter au créneau ? Sauf, bien sûr, à considérer qu’elle ne pouvait que difficilement intervenir contre un avocat qui a été un membre éminent du RPR, dont la ministre de la Justice a été la secrétaire générale. D’autant plus si l’on ajoute que ladite ministre a semblé plus influencée par l’argumentation de l’avocat en question, représentant d’un intérêt particulier, que par celui de l’avocat général, en charge en ce qui le concerne de l’intérêt général.
Sauf à penser également que les liens existant entre Me Szpiner et le président de la République compliquent nécessairement la tâche.
Alors merci, Monsieur le Secrétaire d’État, de cette intervention dans la presse. Merci d’avoir pris la défense de la Justice, ce que n’a pas su faire votre ministre de tutelle, face à des attaques de plus en plus fréquentes, et de plus en plus choquantes, de ceux qui confondent leur image médiatique avec l’intérêt de la société, voire de leur propre client.
Car après tout, pourquoi se gêner dans ces attaques ad hominem ? Pourquoi ne pourrait-on dire que l’ignominie peut être génétique lorsque l’exemple vient de si haut ? Pourquoi ne pourrait-on se prendre pour l’avocat de la société lorsque l’on confond les intérêts privés avec l’intérêt public, les hautes sphères de l’Etat n’étant pas plus épargnées ?
J’ai eu beau critiquer (c’est mon travers principal) Philippe Bilger à de nombreuses reprises, les attaques dont il fait actuellement l’objet me laissent sans voix. Car elles ne servent pas l’intérêt de la famille Halimi, ce que je pourrais à la limite comprendre à défaut de l’accepter. Et je ne parle même pas de l’intérêt de la Justice, dont on s’est visiblement fort éloigné, dans cette affaire comme dans bien d’autres.