Contre-feu
Par Gascogne le dimanche 13 septembre 2009 à 18:15 :: Commensaux :: Lien permanent
Par Gascogne
J’ai déjà eu l’occasion sur ce blog de dire tout le bien que je pouvais penser de certains syndicats de policiers et des raisonnements à l’emporte-pièce dont ils nous gratifiaient de manière périodique.
Et en matière de lutte contre la récidive, les délais de l’article 132-10 du code pénal n’étant pas encore écoulés, je m’en serais voulu de manquer cette nouvelles sortie de route du secrétaire général de Synergie, Bruno BESCHIZZA.
Ainsi donc, alors que les chiffres de la délinquance sont en augmentation dans certains secteurs “d’activité”, et pendant que les remontées de bretelles médiatiques sont mises en scène, le syndicat policier a trouvé le moyen de détourner l’attention du français lambda qui aurait pu se demander comment en sept années d’activité et de lois répressives, les chiffres de la délinquance peuvent encore augmenter.
Alors quel bouc émissaire, cette fois ? Après les juges d’instruction schizophrènes, les juges des enfants laxistes, c’est au tour du juge de l’application des peines d’entrer en scène[1]. Si les chiffres sont mauvais, c’est que les aménagements de peine favorisent la récidive…
Les libérations anticipées ordonnées par les JAP ont certes déjà donné lieu à polémique, mais je dois reconnaître que l’argument selon lequel un aménagement de peine pousse à récidiver, je ne l’avais pas vu arriver, si ce n’est dans quelques commentaires récents qui trouvaient la procédure d’aménagement de peine prévue par l’article 723-15 du code de procédure pénale stupide.
Foins d’études diverses et variées, un peu de pragmatisme et quelques considérations en vrac sur l’aménagement de peines :
- Entre une sortie sèche de prison, sans emploi, sans logement, et en fin de peine sans suivi, et une sortie prise en charge, avec éventuellement un logement social, diverses obligations et un suivi judiciaire, laquelle va avoir le plus de chances d’entraîner une récidive ?
- Entre des sorties encadrées pour faciliter le maintien des liens familiaux, mis à mal par le choc carcéral, et le détenu qui ne trouve personne à sa sortie, qui verra sa réinsertion facilitée, avec la limitation des risques de récidive que cela implique ?
- Qui démontre le plus sa propension à respecter les “règles” entre celui qui pendant plusieurs mois réintègre le soir son quartier de semi-liberté et celui qui sort à la date initialement prévue ?
- Entre une victime qui doit faire exécuter une décision sur intérêts civils par ses propres moyens contre un ex détenu dont elle ne peut connaître l’adresse, et une victime qui se verra contactée par les services d’insertion et de probation dans le cadre d’une obligation d’indemniser qui, si elle n’est pas respectée, renverra l’intéressé derrière les barreaux, laquelle a le plus de chances d’être au moins partiellement indemnisée ?
- Entre un toxicomane, ou un criminel sexuel, ou un alcoolique, qui sort sans suivi, et celui qui doit justifier dans le cadre d’un aménagement de peine de rendez-vous réguliers avec un psychiatre, un psychologue, un alcoologue, lequel a le plus de probabilités de rechuter ?
- Entre le citoyen qui a quelques mois ou quelques années d’emprisonnement au dessus de la tête, qu’il risque de voir révoqués en cas de mauvais comportement, et celui qui n’a rien à craindre en plus d’une comparution devant un tribunal en cas de passage à l’acte, n’y en a-t-il pas un sur lequel la pression judiciaire est plus forte ?
- Question subsidiaire : pour quel motif nombre de détenus refusent les aménagements de peine comme la libération conditionnelle et préfèrent aller jusqu’au bout de leur emprisonnement (pas plus tard que cette semaine, j’ai demandé à un détenu qui souhaitait bénéficier d’une semi-liberté s’il ne préférait pas une libération conditionnelle : j’ai eu droit à un refus catégorique) ?
Alors bien sûr, les aménagements de peine ne sont pas la solution idéale, et il existera toujours des personnes qui récidivent, parce qu’elles vivent dans l’instant, parce qu’elles sont malades, parce que le passage à l’acte est un mode de vie, parce que la misère les pousse à voler, parce qu’elles ne peuvent intégrer aucune des règles de vie sociale qui font de nous de bons citoyens, parce que, parce que… L’aménagement de peine porte pari sur l’avenir, et il est certain que ce pari est d’autant moins risqué que le condamné présente encore, malgré plusieurs mois ou plusieurs années d’emprisonnement, quelques éléments positifs (famille qui l’attend, emploi possible, logement, soins d’ores et déjà suivis en détention…). Mais il reste malgré tout un pari.
Que l’on ne détourne pas l’attention sur ce qui reste une avancée dans toutes les sociétés civilisées, dont pas une n’a envisagé un instant de revenir en arrière au sujet des aménagements de peine, et pas seulement parce qu’elles sont “droitdelhommistes”, mais simplement parce qu’elles ont compris, d’expérience, qu’il était de leur propre intérêt d’encadrer les sorties de prison. Cela donne trop une désagréable impression d’instrumentalisation.
Notes
[1] Le syndicat Synergie n’avait visiblement pas d’auvergnat sous la main
Commentaires
1. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:35 par Vincent
2. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:39 par Naja
3. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:46 par maya60
4. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:50 par sylvain
5. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:54 par Naja
6. Le dimanche 13 septembre 2009 à 18:57 par didier specq
7. Le dimanche 13 septembre 2009 à 19:14 par Véronique
8. Le dimanche 13 septembre 2009 à 19:21 par tinotino
9. Le dimanche 13 septembre 2009 à 19:45 par Naja
10. Le dimanche 13 septembre 2009 à 19:56 par tinotino
11. Le dimanche 13 septembre 2009 à 20:08 par marsan
12. Le dimanche 13 septembre 2009 à 21:30 par Lucca Clermont
13. Le dimanche 13 septembre 2009 à 23:00 par folbec
14. Le dimanche 13 septembre 2009 à 23:32 par ophise
15. Le dimanche 13 septembre 2009 à 23:53 par XS
16. Le lundi 14 septembre 2009 à 09:13 par cap-justice
17. Le lundi 14 septembre 2009 à 09:35 par Koudou
18. Le lundi 14 septembre 2009 à 09:46 par cap-justice
19. Le lundi 14 septembre 2009 à 10:10 par tinotino
20. Le lundi 14 septembre 2009 à 11:25 par cap-justice
21. Le lundi 14 septembre 2009 à 13:32 par Forza
22. Le lundi 14 septembre 2009 à 14:22 par cap-justice
23. Le lundi 14 septembre 2009 à 15:24 par Mussipont
24. Le lundi 14 septembre 2009 à 15:41 par cap-justice
25. Le lundi 14 septembre 2009 à 17:36 par tinotino
26. Le lundi 14 septembre 2009 à 17:56 par cap-justice
27. Le lundi 14 septembre 2009 à 18:02 par Forza
28. Le lundi 14 septembre 2009 à 18:11 par Véronique
29. Le lundi 14 septembre 2009 à 18:12 par laloiC
30. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:02 par shane
31. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:10 par cap-justice
32. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:12 par cap-justice
33. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:17 par Shane
34. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:39 par tinotino
35. Le lundi 14 septembre 2009 à 19:44 par tinotino
36. Le lundi 14 septembre 2009 à 20:44 par Lexisa
37. Le mardi 15 septembre 2009 à 08:15 par Véronique
38. Le mardi 15 septembre 2009 à 17:19 par PMB
39. Le mercredi 16 septembre 2009 à 07:28 par Emilie, CIP
40. Le mercredi 16 septembre 2009 à 08:14 par Véronique
41. Le mercredi 16 septembre 2009 à 09:40 par laloiC