Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Follement injuste, juste fou ? Mortel !

par Sub lege libertas


Chère Maître Laure Heinich-Luijer,

Première secrétaire de la Conférence du stage, avocate au barreau de Paris, vous nous écrivez, à nous magistrats -à moi donc- sans aménité quoiqu’au décours d’une matinée partagée à la formation de magistrats pénalistes rue Chanoinesse, je vous connusse capable de cette « douceur accompagnée de grâce et de politesse » (Littré) pour soutenir sans faiblesse votre cause.

Votre client est mort, mort dans sa folie, mort dans sa prison, mort dans les soupçons sur son innocence que sa folie lui faisait peut-être même perdre de vue et que la justice devait pourtant présumer. Je vous cite :

M.O. s'est pendu dans sa cellule de la Maison d'arrêt de Fresnes.

Il était schizophrène.

Un collège d'experts l'avait déclaré irresponsable de ses actes et capable de s'accuser de faits qu'il n'avait pas commis.

Il existait un doute sur sa culpabilité.

Il n'existait plus de doute sur son irresponsabilité.

Votre thrène -que chacun le lise, çà ailleurs, en entier, c’est impératif- s’il se fait pamphlétaire, n’est pas un libelle ad hominem, n’en déplaise à ceux qui voudraient l’y réduire. C’est une exhortation à l’humanité, une exhortation violente, car à oublier l’urgence de l’homme sans raison dans le temps de la procédure, la mort est survenue non sans raison.

Je ne sais rien du dossier, n’en veux rien savoir et n’en dirai rien, par décence. Je ne viens pas non plus répondre à votre lettre ouverte, adressée à nous les magistrats, si répondre signifiait devoir défendre les magistrats visés dans votre dénonciation de leurs actions ou inactions, de leurs manières de faire ou non en cabinet, en chambre du conseil ou dans le couloir. Je crains de penser qu’à tous, on trouverait de louables intentions, à défaut, d’atténuantes circonstances faites de la litanie convenue des lourdeurs de la procédure, de la charge de travail, de la foi du palais, de l’imprévisibilité du geste d’un fou, d’impondérables divers, etc.

Je pourrais même biaiser en vous renvoyant à la lecture de l’article L3214-3 du Code de la santé publique, pour vous inviter à apostropher plutôt le préfet du Val de Marne qui après tout, aurait pu l’hospitaliser, ce fou trop détenu pour détenir encore le droit d’être fou ; et le directeur de la maison d’arrêt qui pouvait le saisir de cette situation, mais les fous ont tant leur place en geôle et au prétoire, qu’il n’est plus très sain d’esprit de les imaginer à l’hôpital et sans jugement. Mais vous ne pouvez raisonnablement pas vous contenter d’un avis de Ponce Pilate. Quant à déplorer ce fol attrait de notre société pour la culpabilité et l’enfermement des fous, des mineurs et autres qui rassurent les chantres d’une opinion publique enrôlée dans leurs visées idéologiques, pour réelle que soit cette inclination, vous ne pouvez supporter que cela justifie que les magistrats y succombent, l'air du temps soufflant l'esprit de la loi ; du moins aviez-vous espéré que les devoirs de leur état ne les gardassent de ce commun dérèglement.

Je reçois donc votre faire-part et dans le deuil d’un humanisme judiciaire, je vous assure comme magistrat qu’en cet instant, je suis votre confrère.

Commentaires

1. Le vendredi 5 juin 2009 à 18:38 par mad

"Je pourrais même biaiser en vous renvoyant à la lecture de l’article L3214-3 du Code de la santé publique, pour vous inviter à apostropher plutôt le préfet du Val de Marne qui après tout, aurait pu l’hospitaliser, ce fou trop détenu pour détenir encore le droit d’être fou ; et le directeur de la maison d’arrêt qui pouvait le saisir de cette situation,"

Ou le JLD qui a bien dû avoir à connaître de la remise en liberté du mis en examen, et qui, étrangement, est le seul magistrat qui n'est pas cité dans la lettre. Contrairement au juge d'instruction, qui pourtant n'y pouvait plus grand chose...

Sub lege libertas:
Soyons clair : aucun magistrat n'a le pouvoir de faire hospitaliser d'office (en psychiatrie) un malade mental. Libre ou détenu, le malade mental est hospitalisé contre son gré sur décision d'un préfet. Maître Heinich doit -j'imagine- le savoir. C'est en quelque sorte le "tacle" de ma réponse ("je pourrais biaiser"), car elle ne dit pas dans sa lettre ouverte, si elle a fait quelque démarche que ce soit auprès du directeur de la maison d'arrêt ou de la préfecture pour alerter sur la situation de son client.
Ce que j'ai ressenti -j'insiste sur ce mot- à la lecture de sa complainte, sa déploration sur la mort de son client, c'est qu'elle estimait avoir souligné auprès des magistrats qui touchaient ce dossier la situation de danger pour son client schizophrène de ne pas être pris en charge médicalement. Dans sa douleur ou sa colère après son décès, elle nous interroge sur ce que nous "magistrats" avons fait de son alarme. Il est vrai que ce n'est pas de notre compétence. Mais, l'incompétence technique interdit-elle l'humanité qui consiste à s'adresser à l'autorité compétente pour l'informer de la situation a minima ou solliciter son intervention ?
Je l'ai dit : je ne veux rien savoir de ce dossier. Je note que Maître Heinich indique que le juge d'instruction lui a dit avoir écrit une lettre (à qui je ne sais, elle ne précise pas). Je note que Maître Heinich a entendu un avocat général lui dire qu'il s'assurait de l'hospitalisation de son client à bref délai, ce que la chambre de l'instruction avait "l'air de souhaiter" (pourquoi, comment, je ne sais pas). Mais ce que je comprends c'est que Maître Heinich -avec violence, je l'ai écrit- nous exhorte à constater que finalement tout le monde (magistral) peu ou prou savait la situation de son client, convenait peu ou prou qu'il nécessitait des soins spécialisés que la maison d'arrêt ne lui offrait pas, et que pour autant le drame est advenu. Bien sûr "ce n'est pas la faute de quiconque", mais quand un avocat utilise la procédure de demande de mise en liberté pour pouvoir AUSSI attirer l'attention sur cette situation, ce n'est pas parce que la mise en liberté n'est pas la solution que pour autant il ne convient pas de s'assurer auprès des autorités compétentes que la situation va être traitée ou au moins est connue. Ce que je lis sous la plume acerbe et triste de maître Heinich c'est qu'elle pense -àtort peut-être- que ce relai n'a pas été vraiment fait avec l'urgence nécessaire, qu'au fond, personne ne s'est vraiment senti concerné. Ce souci-là, le sien est mien, voilà pourquoi je la rejoins en confraternité judiciaire et que peu me chaut que l'on puisse se réfugier derrière le code de procédure pénale ou se défausser sur le préfet.

2. Le vendredi 5 juin 2009 à 18:38 par Gascogne

Ci ce texte n'est pas une attaque ad'hominem, je ne sais pas ce que c'est. Mettre en cause un président de chambre de l'instruction en disant que sa violation de la loi a tué son client me paraît un tantinet exagéré. Et je pèse mes mots, en ce qui me concerne.
La colère n'excuse pas tout. Soit elle est de mauvaise foi lorsqu'elle pense que les juges pouvaient hospitaliser son client, soit elle est incompétente.
Mais c'est tellement dans l'air du temps, le juge bashing. Ca ne coute rien, c'est bien entendu par l'opinion publique. Et si en plus sa permet de soulager sa conscience...

3. Le vendredi 5 juin 2009 à 18:46 par Dyonis

Elle parle aussi d'un délibéré de couloir.

"Deux heures plus tard je croisais l'Avocat général dans le Palais, il m'annonçait avoir fait « un délibéré de couloir ». C'est quoi un délibéré de couloir ?

Je ne suis pas près de l'oublier. Un délibéré de couloir se pratique tellement que le magistrat en parle sans se méfier. Cela signifie que le représentant du Parquet s'est invité dans le secret du délibéré, qu'il a pris la décision avec les magistrats du siège, en violant tous les principes fondamentaux, les règles du procès équitable et de la séparation des pouvoirs. Il a bien travaillé l'Avocat général. Ils l'ont bien écouté. Voilà ce qui arrive quand les Juges se croient au dessus des lois."

C'est si fréquent que le représentant du parquet s'invite dans le secrèt du délibéré sans que l'avocat n'y ait apparemment sa place ?

Sub lege libertas:
Je l'ai écrit, ma réponse à maître Heinich n'est pas une défense ou non de ce qu'elle rapporte des agissements des magistrats dans son dossier. Sa déploration rejoint ma commisération pour ces fous en justice, l'attention qu'on leur porte, cet air du temps qui pollue l'esprit des lois et je le crains au moins inconsciemment celui des magistrats.
Pour le reste, le "delibéré de couloir" est sans doute une pratique parisienne que les brumes du Nord rendent invisibles. Il y aurait fort à dire sur ces habitudes ou travers que nous prenons tous en juridiction. Et contrairement à l'opinion commune souvent avec de louables intentions,... mais je l'ai écrit je ne veux en faire ici ni la défense ni l'illustration.

4. Le vendredi 5 juin 2009 à 18:49 par Simple citoyen

Merci, « Sub lege libertas » ! Merci de vos mots courageux et sensibles, forts de cette humilité qu'ont les Justes.

Sub lege libertas:
on se calme... retirez cette majuscule à "justes" déjà, faudrait voir quand même à pas tout confondre. Quant à mon humilité, je crois qu'écrire ici ne traduit pas chez moi cette qualité.

Vos mots ne consoleront jamais du deuil, ne répareront jamais cette horreur meurtrière. Au moins permettent-ils d'avoir (un peu) l'espoir qu'un jour, on pourra faire confiance dans la justice de notre pays.

Sub lege libertas:
Décidemment, vous avez le sens de la mesure. Ah oui, c'est vrai j'oubliais : les juges en France, c'est comme une junte birmane... De toute façon, rassurez-vous, comme d'autre je pense bien sûr que la justice chinoise est un modèle...

5. Le vendredi 5 juin 2009 à 19:08 par Pax Romana

@ Gascogne (2) :

Ne vous en déplaise, je ne vois pas d'argument ad hominem là dedans. En revanche, je n'apprécie pas plus que vous le style provocateur et exagéré de ce billet, et je trouve complètement délirantes les accusations d'assassinat qui s'y trouvent. Celle qui a écrit ce billet semble dévorée de narcissisme et de fiel, au point d'en perdre le sens commun.

Sub lege libertas:
On est d'accord, sa lettre ouverte est outrancière, dans l'outrance de la colère et de la tristesse. Ce n'est pas ad hominem, c'est ab irato ! En fait, c'est écrit avec la fièvre du Dies irae dies illa ! ou l'angoisse du De profondis clamavi ad Te Domine ! du Psaume 130
Je n'en fais pas mystère au début de ce billet-courrier, j'ai eu l'occasion d'échanger avec maître Heinich en d'autres temps. Je pense avoir perçu son humanisme et son implication dans la défense pénale. Mon attention à sa lettre ouverte repose par contraste avec son aménité, sur le sentiment intense que j'ai eu de sa douleur ou de son désarroi pour que sa péroraison finale atteigne une telle violence.

6. Le vendredi 5 juin 2009 à 19:35 par GNTB

@ Gascogne (2)

Pourquoi le(s) juge(s) n'avait-il aucune possibilité de pousser le préfet à l'HO si la situation psychiatrique confirmée par les expertise (si cela s'avère exacte) suggérait qu'il y avait un risque auto-agressif important ?

Sub lege libertas:
c'est le sens de ma réponse sous le commentaire numéro 1... La décision appartenait légalement au préfet mais un juge d'instruction , un procureur au besoin à qui il transmet les pièces, peut l'alerter. Mieux -et c'est un souvenir professionnel- à réception de l'expertise d'irresponsabilité d'un détenu, un juge d'instruction a sollicité mes réquisitions sur l'opportunité de missionner un expert en urgence pour répondre à la question poser par l'article L3214-3 du Code de la santé publique sur la question de son hospitalisation d'office. J'ai dit oui. Le juge avait le surlendemain par fax l'avis du psychiatre sollicitant une HO et à la demande du juge tenu par le secret de l'instruction, j'ai transmis au prefet qui a pris l'arrêté d'hospitalisation en UMD (autrement dit en secteur psy pour prisonnier ou ex-detenu irresponsable notamment) dans l'heure ! Ensuite, en respectant les délais légaux de cloture de l'information judiciaire, un non lieu a été prononcé mettant fin au mandat de dépôt mais pas à l'hospitalisation d'office... C'est cet humanisme judiciaire là que je défends, avec d'autres mots que maître Heinich, mais sur lequel nous nous retrouvons !

Merci

7. Le vendredi 5 juin 2009 à 20:35 par mademoiselle dudue

@ Gascogne et Pax Romana Vous êtes exactement de ces magistrats les plus médiocres et pathétiques que l'on éxècre! vivement votre retraite que vous ne jugiez plus qui ou quoi que ce soit! Fort heureusement, vous n'êtes pas majoritaires dans les juridictions. D'autres que vous, dont l'auteur du billet, ont bien plus de retenue et d'intelligence. Cette avocate a eu raison! et l'auteur du billet méritent d'autres commentaires que ceux que vos esprits atrophiés par la suffisance peuvent produire.

Sub lege libertas:
Euh ? je mérite variment le votre, de commentaire ?
Vous venez d'illustrer le style du libelle ad hominem.
Je vous rassure concernant l'évaluation de ma retenue et mon intelligence, il faut une mesure que vous ne possédez pas.

8. Le vendredi 5 juin 2009 à 20:39 par Le Justicier

Gascogne, vous n'êtes qu'un sous-produit de l'ENM. Je suis sur que vous êtes le genre de fonctionnaire à encabaner le jour les clients que vous vous tapez la nuit.

Sub lege libertas:
Je crains de vous inquiéter mais comme Gascogne, je suis un déchet de la rue Chanoinesse et de sa filiale bordelaise.
Quant à vos certitudes sur les gens, si la flatulence est une école philosophique, vous êtes le Socrate des pétomanes.

9. Le vendredi 5 juin 2009 à 20:53 par Philonous

C'est quand même fou qu'un billet dont le ton n'est en rien provocateur amène ce flot d'insultes. Sur le fond, peut-être faudrait-il en connaître plus sur le fond de l'affaire avant de déchaîner les passions. Au passage, je ne vois pas en quoi ce qu'ont dit Gascogne ou Pax Romana permettrait d'affirmer que ce sont des juges médiocres (ou pire, selon certains...).

10. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:27 par mademoiselle dudue

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image.Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

11. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:37 par Mouns

Merci, j'ai énormément appris à la lecture de ce billet concernant l'enfermement des personnes atteintes de maladies psychiatriques et mentales. Navrée que la situation dans nos prisons à ce sujet ne semble pas évoluer.

12. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:41 par VEO

J'ai l'honneur d'être l'ami de mon Confrère, l'auteur de ces lignes. Pour que, mesurée comme je la sais, rigoureuse comme je la connais et honnête comme je la perçois, elle ait pu écrire ce texte, dites vous bien que n'importe lequel de ceux qui la commentent aurait, à sa place, eu des envies de meurtre plutôt que de libelle. La réalité a une dureté que ceux qui ne la perçoivent qu'au dessus de leurs claviers ne sauraient percevoir. La justice, également, a parfois une absence d'humanité dont personne, hors ceux qui la fréquentent quotidiennement, ne peut témoigner.

Sub lege libertas:
Je suis estomaqué par la violence de certains commentateurs, que je ne vois habituellement pas ici... Je crois que vous confortez ma réponse sous le commentaire n°5...

Serviteur...

13. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:47 par valentine

Le juge est calme et l'avocat est orageux.
L'avocat est un révolté permanent, le juge est d'une stabilité a toute épreuve.

C est probablement inscrit dans leur fonctions respectives.
C est probablement nécessaire et souhaitable.
C'est probablement le role de l'avocat que de tenter inlassablement d'ébranler le juge, et le role du juge d'ecouter ce qui lui est dit tout en restant impassible et dépassionné.

Il n'y a pas si longtemps, Dadouche nous avait gratifiés d'un billet extraodinaire de recul, de sagesse et de professionalisme sur l'affaire (o combien sensible) d'Outreau, sans pour autant manquer d'humanisme ou de délicatesse.

Personnellement, je préfèrerais toujours ce type de billet à la diatribe débridée d'une jeune secrétaire de conférence _ même si ce qu'elle a fait, c'est faire son travail avec passion, ce qui ne me parait pas blamable.

Gascogne, vous avez tout mon soutien, celui d'une citoyenne lambda pas juriste pour deux sous, qui a appris a connaitre et apprécier le travail des juges et leurs qualités humaines.

Eolas, tout mes remerciements d'arriver a faire cohabiter ces deux camps sur votre blog.

14. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:48 par Girondin

Une avocate qui a peut être touché une misère de l'aide juridictionnelle est en colère parceque son client est mort. gloire à elle !!!

Pas besoin d'une énième réforme de la procédure pénale française si les juridictions et sourtout la chambre de l'instruction ont les moyens matériels et humains de remplir leur office.

Mais là l'auteur du billet s'attaque aux mentalités, au moule BURGAUD enseigné par l'ENM, à l'esprit de soumission ou de confirmation.

Hier soir et ce soir elle ne dormira pas contrairement aux magistrats de la Chambre (une chambre c'est fait pour dormir).

Robes noires contre robes qui brillent, nous nous touchons nos clients, même quand ils puent.

Bonne nuit à toi consoeur, restes en colère et outrancière (pour certains unter hominem) et reposes toi demain, ce n'est pas fini...

15. Le vendredi 5 juin 2009 à 21:59 par Le Justicier

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image.Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

16. Le vendredi 5 juin 2009 à 22:07 par Annkikine

Ne cessera jamais de m'étonner la capacité qu'ont les avocats à faire croire aux quidams tout ce qu'il est de leur intérêt de faire croire. Et la capacité illimitée des quidams d'avaler tout cela comme si la parole de l'avocat était celle de l'objectivité. Alors que précisément, c'est une parole on ne peut plus subjective, et intéressée. Les mots utiles à leur client, pas plus, pas moins. C'est ce qui fait la grandeur de l'avocat, certes, mais aussi la limite de son discours. J'admire de nombreux avocats pour leur talent et leur humanité, mais la moindre des choses est de toujours garder présent à l'esprit que leur rôle n'est pas de retracer la vérité d'un dossier, si tant est que quiconque puisse y arriver. Ils sont là pour servir les intérêts de leur client, sa vérité, ce qu'il souhaite exprimer ou faire croire, en vérité ou en mensonges. Tout autant en mensonges qu'en vérité. La seule parole objective, et la plus précise, sur une affaire donnée, est celle du magistrat. Car il n'a nul intérêt particulier à servir. Malheureusement, il n'a pas le droit à la parole, ou si peu. Et son silence, contraint, est pris, tantôt pour de la lâcheté, tantôt pour de l'inhumanité, tantôt pour du mépris. Jamais pour ce qu'il est : la retenue nécessaire à sa crédibilité même de serviteur de la Justice, son impartialité. Ce qui ne cessent d'appeler à la haine contre les magistrats ne font qu'attiser les flammes d'une rancoeur destructrice dignes des pires heures de notre histoire, une rancoeur fondée sur du rien, sur de l'irrationnel, sur de la rumeur qui devient fausse vérité à force d'être martelée. Je rêve que tous ceux là se remettent à faire usage de leur esprit critique face à la soupe qui leur est servie chaque jour, par les medias et les politiques notamment. Et qu'ils se demandent pourquoi ces derniers sont si ravis et empressés de la leur donner à avaler, cette soupe rance et froide...

17. Le vendredi 5 juin 2009 à 22:14 par moi

Bonsoir,

J'avais un bon ami qui s'est suicidé il y a quelques années. Le pauvre était également schizophrène, ce que je n'ai su que bien après l'avoir connu. Il a commencé de déraper lorsque, pour rejoindre sa petite amie, il a dû déménager pour l'Italie. Le changement a été trop important, il a perdu ses repères qui seuls, au prix d'efforts de tous les instants, appris-je par sa famille plus tard, lui permettaient de garder la tête hors de l'eau.

Je me souviens de l'avoir eu au téléphone après une première tentative de suicide aux barbituriques; sauvé par le docteur qu'il ne comprenait pas, il ne semblait pas réaliser la gravité de son geste et affichait même une certaine fierté, celle de l'enfant qui a fait une grosse connerie et qui, comme pour s'en départir, feind de l'ignorer et la considérant comme une sorte de jeu.

Puis, une semaine plus tard, alors que je l'avais exhorté quotidiennement à prendre ses "pillules qui rendent amorphe", sa dulcinée/veuve qui m'apprend qu'elle l'a découvert pendu à une poutre de sa maison le midi même, en rentrant des courses. Ce qui me frappa doublement, par la perte d'un ami, et par l'empathie qui me faisait imaginer ce que la demoiselle avait dû endurer.

Difficile d'exprimer les sentiments qui m'ont parcouru à ce moment, sachant que je connaissais le risque qu'il encourrait après sa première tentative, du fait de son absence totale de remord ou de recul par rapport à son premier acte manqué, et, qu'impuissant car à 1500 km de là, je savais que sa vie ne tenait qu'à un fil...

Alors je pense savoir ce que cette avocate a ressenti, ce sentiment d'impuissance atroce qui s'est emparé d'elle, alors qu'elle sentait en son for intérieur que la catastrophe était imminente. Qu'elle veuille en faire porter la responsabilité aux magistrats, qui, trop blasés par leur quotidien, ou n'ayant jamais rencontré ce genre de situation de façon personnelle et ne pouvant donc pleinement en appréhender la gravité, c'est un choix que je ne saurais pleinement supporter. Mais un peu néammoins, car il est vrai que le magistrat a la réputation d'être dur de coeur, et le commentaire de Gascogne ci-dessus, même s'il est logiquement et professionnellement pertinent, manque singulièrement de compassion.

Mon témoignage sur la question, mais c'est vrai que la réalité a un caractère souvent impitoyable, et il n'est pas toujours évident de le prendre de plein fouet. C'est pourquoi je pense qu'il faut aborder la lettre de cette avocate avec indulgence, en la gardant à l'esprit pour le prochain cas, car comme l'auteur l'indique plus haut, si l'on s'adresse à l'autorité compétente, les choses peuvent aller plus vite, et le drame évité.

18. Le vendredi 5 juin 2009 à 22:31 par mademoiselle dudue

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

19. Le vendredi 5 juin 2009 à 22:32 par Marcus Tullius Cicero

3. Le vendredi 5 juin 2009 à 18:46, par Dyonis

Elle parle aussi d'un délibéré de couloir.

....

"C'est si fréquent que le représentant du parquet s'invite dans le secrèt du délibéré sans que l'avocat n'y ait apparemment sa place ?"

1.

Non ce n'est pas fréquent, c'est tout simplement totalement interdit, juridiquement, légalement, déontologiquement, ... et je ne vois pas quel magistrat du parquet se serait permis de pénétrer dans une salle de délibéré pour participer à un délibéré, ou pire encore qu'un délibéré se serait déroulé dans un couloir en présence d'un magistrat du parquet !

Comme l'indique, à juste titre, Gascogne, le "juge bashing" est devenu le dernier sport national, en attendant de devenir discipline olympique.

2.

Par ailleurs, feint-on d'ignorer que la situation d'un détenu en maison d'arrêt est en premier lieu du ressort de la maison d'arrêt. Des consultations avec des psychiatres se déroulent quotidiennement en maison d'arrêt. En cas de danger particulier (je parle notamment de danger psychiatrique), par exemple un détenu qui fait l'objet de bouffées délirantes, d'une crise de schizophrénie, etc, il est transféré en hôpital psychiatrique à l'initiative de l'administration. L'administration saisit en effet le préfet aux fins de placement en hospitalisation d'office (HO). Une fois cette mesure prise, ce n'est qu'après que le JLD, et/ou le JAP, et/ou le Parquet sont informés de la situation. La mesure d'exécution de peine peut de ce fait être rapportée (c'est à dire suspendue). La personne incarcérée est ensuite transférée lorsque la mesure de HO cesse, en UHSA (Unité hospitalière spécialement aménagée), sorte de prison hôpital psychiatrique.

La difficulté, c'est qu'à l'heure actuelle les services pénitentiaires sont inondées d'alertes (ou de fausses alertes psychiatriques, ou de personnes incarcérées qui menacent de se pendre), et qu'une fois encore on demande à des hommes (ici les personnels de la pénitentiaires) de vider l'eau de la mer avec une petite cuillère.

3.

Perdra t-on un jour cette manie détestable de chercher parmi les magistrats (ou les personnels qui concourent à la justice) qui n'en peuvent (et ne sont pourtant pas dénués de cœur) les boucs émissaire des aspirations schizophrènes (sans mauvais jeux de mots), entre ceux qui veulent voir tout le monde en prison (y compris les fous) et ceux qui ne supportent pas que l'on mettent les délinquants et les criminels en prison ?

Je ne me souviens pas de grandes manifestations de protestations lorsque la loi sur le "procès des fous" (LOI n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental) (à la suite de l'affaire des infirmières de PAU décapitées par un schizophrène) a été promulguée ...

Lorsque j'exerçais moi-même le noble et indispensable métier d'avocat, je ne me vengeais pas sur le (ou les) magistrat(s) qui ne m'avai(en)t pas donné raison. J'essayais de comprendre ce que j'avais raté, comme voie, possibilité, recours, pour envisager de faire autrement et mieux, si possible.

Je n'ignore pas que répondre froidement comme je le fais, c'est risquer de faire accroire l'idée que les magistrats manqueraient d'humanité. Mais je n'envisage pas à mon tour de me couvrir la tête de cendres pour sacrifier à la nouvelle religion de la repentance et du compassionnel. Chaque jour et chaque nuit, des milliers de magistrats essayent, difficilement, dans l'incompréhension, la haine, de faire tourner un peu moins mal notre société.

Vaste combat...

20. Le vendredi 5 juin 2009 à 22:45 par désiré

bravo au commentaire 19.

je trouve vraiement pitoyable le ton de certains commentaires!!!!!

21. Le vendredi 5 juin 2009 à 23:08 par Lucas Clermont

Les magistrats sont affaiblis par quelques politiciens qui mettent en relief des comportements isolés, complaisamment relayés par les médias et voici qu'une avocate se joint à la meute. Naturellement, aucun comportement abusif d'avocat marron ne tue jamais personne ! Imagine-t-on la pression sur la profession d'avocat si sous le coup de l'émotion on pointait les comportements isolés de quelques uns.

22. Le vendredi 5 juin 2009 à 23:46 par Sursis à statuer

OK, c'est pas la faute des magistrats. Par définition.

D'ailleurs c'est jamais la faute à personne, sinon à pas de chance.

Rappelez-moi juste un détail : chaque année il y a combien de juges qui se flinguent dans leur cabinet, en pourcentage du nombre de détenus sans jugement qui se pendent ?

Ah bon ? Tant que ça ?

23. Le vendredi 5 juin 2009 à 23:52 par FuManchu

Loin d'Alger-la-Blanche : C'est le syndrome d' "A vous de juger" on dirait ! Ils ont en ce début de WE pluvieux l'esprit hargneugneux et la langue... pendue.

24. Le vendredi 5 juin 2009 à 23:58 par MB

Sub - vous permettez que je vous appelle Sub ?- n'avez-vous pas encore votre propre Troll Detector, qui pourrait se régaler ici ?

Admettons que le texte de maître Heinich, s'il est plein des omissions que vous relevez, n'en est que plus efficace et sert ainsi son propos...

25. Le samedi 6 juin 2009 à 00:13 par Rachel

Bonsoir,

On espere que sa famille saisira la Cour europeeene des droits de l'homme pour faire condamner la France de la violation des articles 2 et 3 de la Convention et probablement 5-3 et 5-4 (delibere de couloir).

N'oublions jamais que la CEDH peut decider de mesure provisoire (art 39) et/ou de communiquer en urgence la requete a la France (art 40) dans les cas d urgences.

Le depot de Paris n est toujours pas ferme ce soir...les hurlements des detenus en manque et desespere dans l attente du medecin de SOS medecin a 3h du mat doivent se faire entendre...Honte a ceux qui les ont defere!

26. Le samedi 6 juin 2009 à 00:18 par Jeanjean

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

27. Le samedi 6 juin 2009 à 00:34 par Morthibus

Stupéfiant !

Voici un nouvel aspect de la vie de notre justice ...

Et quels échanges à fleurets non mouchetés !

Vu de l'extérieur ... celà laisse une impression désagréable.

28. Le samedi 6 juin 2009 à 00:39 par Merci, Mademoiselle Dudue

Je suis très régulièrement ce blog. Je ne puis que regretter la constante brutalité des interventions signées Gascogne. Et je pèse mes mots.

Celle d'aujourd'hui est dans la ligne, seulement un peu plus manifeste que la moyenne. Mais en gros, c'est toujours le même potage : arrogance, corporatisme, violence verbale, toujours sûr de "son" droit, toujours prêt à en découdre, toujours en défense.

Un impulsif de première qui répond souvent avant même d'avoir compris ce qu'il lit. Le contre-sens n'est pas rare. Je n'ai pas oublié celui, particulièrement lamentable, qu'il fit à propos d'une émouvante chronique de Maître Mo. Parce que celui-ci évoquait un trio déglingué (une droguée entre deux gendarmes, je cite de mémoire), ledit Gascogne ne pouvait que comprendre "offense aux trois juges".

Bref un bon représentant de ce style de vie qui s'énonce : surtout ne jamais s'interroger sur soi, ses propres obscurités, noirceurs et faiblesses. Souhaitons lui que la vie l'y aide.

29. Le samedi 6 juin 2009 à 00:54 par malpa

@ Sub Lege Libertas

Trolldetector doit être en train de mouliner à vide. Le problème, c'est que le troll est dans le billet. Un beau troll : subtil, pondéré, humain, avec des imparfaits du subjonctif en plaqué chrome mais un troll quand même.

30. Le samedi 6 juin 2009 à 00:58 par le concierge

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

31. Le samedi 6 juin 2009 à 01:57 par Bardamu

Je ne comprends pas non plus les flots d'acrimonie qui se sont déversés sur nos magistrats, en particuliers ceux qui nous font le privilège de côtoyer ces lieux. Tenez bons les amis !

Petite pique néanmoins : le subjonctif imparfait de la première phrase du billet est inutile et insinue une ambiguïté sertie de joliesse. Il sert en effet à exprimer une irréalité du passé, or ici Sub Lege rappelle l'amabilité qu'il a connue naguère chez l'avocate auteur de la bisbille - sinon je ne comprends pas. Il eût donc fallu écrire "que je vous connus" (passé simple), tout simplement. Car si "l'air du temps souffle l'esprit de la loi ", il ne saurait renverser celui de la conjugaison : je veille aux vis !

32. Le samedi 6 juin 2009 à 02:03 par Bardamu

Mlle Dudue, vos accusations à l'égard de Gascogne sont infondées. Je n'ai pas l'habitude de prendre sa défense, ici elle s'impose. On ne peut lui reprocher sa "brutalité", à la limite ses ellipses qui rendent ses billets un peu sibyllin au néophyte.

33. Le samedi 6 juin 2009 à 02:14 par valentine

@ bardamu #32

Bien d'accord avec vous. Il faudrait commencer par relire la "lettre a mon fils" avant de parler de brutalité a tort et a travers. Ou certains commentaires...sous le billet notable "ca se passait comme cela", par exemple.

34. Le samedi 6 juin 2009 à 04:44 par Marcel

Excusez-moi Bardamu, mais si je relève effectivement des flots d'acrimonie envers les magistrats, je ne peux que constater, pour ma part, qu'elles arrivent en réponse à des flots d'acrimonie en provenance directe des magistrats, qui agressent cette avocate, l'attaquant, au delà de ses propos, directement sur sa personne. L'accusant, aussi, à mots à peine couverts, d'être une menteuse pure et simple qui invente des histoires sur la vie de son tribunal dans le seul but de faire haïr les magistrats : la théorie du complot a ses limites et je constate que ceux qui l'accusent de mentir n'étaient pas sur les lieux, contrairement à elle.

Ce que je vois, et je partage l'avis du commentaire 28, c'est une position "défensive" de mauvaise foi : on a touché au collègue, donc à l'institution, il y a crime de lèse majesté, et comme il est inimaginable qu'un magistrat ait mal agi, c'est donc forcément que l'accusatrice est une menteuse psychopathe sanguinaire idiote.

Les propos de Gascogne ou même de Marcus, pour propres, polis et bien écrit qu'ils soient, me paraissent guère moins violents, guère moins injustifiés, guère moins insultants, et guère plus honnêtes intellectuellement que ceux d'une mademoiselle dudue.

Haaaa la théorie du "juge bashing", comme c'est confortable pour garder l'illusion d'une Institution parfaite composée exclusivement de gens parfaits, éventuellement susceptibles de faire une erreur, mais jamais ô grand jamais, de commettre un abus... On pourrait croire en une foi débordante en l'humanité, et à une candeur sympathique, si le propos n'était pas exactement inverse à l'égard des délinquants réels ou supposés et, depuis aujourd'hui, à l'égard des avocats, "de mauvaise foi ou incompétents".

On ne me retirera pas de l'esprit que partir du principe que c'est forcément l'avocat qui est "de mauvaise foi ou incompétent", et jamais le juge, ça relève bel et bien du corporatisme primaire.

Et quand un homme est mort, et que c'est l'avocat qui s'est battu en vain pour l'éviter, je trouve cela d'une indécence que les "flots d'acrimonie envers les magistrats" sont loin d'égaler.

35. Le samedi 6 juin 2009 à 07:01 par Le concierge

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

36. Le samedi 6 juin 2009 à 07:04 par Passant

L'avocat est le juriste qui choisit la liberté de ses causes et des moyens.

Le magistrat est celui qui choisit une certaine servitude dont il ne peut au vu des études qu'il doit accomplir pour le devenir ignorer qu'elle est fort éloigné de l'intérêt public ou même de qui que ce soit.

Alors, que voulez-vous : si le chien qui pisse sur la jambe de l'avocat l'insulte effectivement, ce n'est pas le lampadaire qui doit se sentir insulté de l'odeur d'urine que sa fréquentation de la population canine produit, mais l'institution que le lampadaire n'existe que pour servir.

A moins bien entendu que la corporation des juges ne veuille endosser la responsabilité du détail de la loi et des formes de la gouvernance ?

37. Le samedi 6 juin 2009 à 07:42 par Véronique

Pour ma part je salue le courage professionnel de Maître Heinich-Luijer à mettre en cause une machinerie judiciaire avec ses pratiques de couloir non pas parce que cette machinerie aurait tué son client, mais parce que, comme le précise bien Sub lege libertas dans sa réponse au post 1, :

tout le monde (magistral), peu ou prou savait la situation de son client, convenait peu ou prou qu'il nécessitait des soins spécialisés que la maison d'arrêt ne lui offrait pas, et que pour autant le drame est advenu.

Je sais gré à Sub lege libertas d'avoir accusé réception du faire part de Maître Heinich-Luijer et d'y répondre avec les mots de son billet.

Maintenant, ce qui me pose question dans la lettre de Maître Heinich-Luijer:

Son client souffrait de schizophrénie

Maître Heinich-Luijer écrit:

Un collège d'experts l'avait déclaré irresponsable de ses actes et capable de s'accuser de faits qu'il n'avait pas commis.

L'expert vous avait alerté sur le fait qu'il « relève de soins intensifs menés par une équipe polyvalente et aguerrie dans la prise en charge de ces pathologies ».

J'imagine quand même que là, il ne s'agit pas d'expertises psychologiques à deux balles dont nous avons appris à nous méfier, terriblement. Mais d'un diagnostic médical réalisé par des psychiatres, c'est à dire des médecins praticiens expérimentés de la folie.

Vous avez dit que certainement pour plus tard ce serait vrai. Pour après.

Après quoi ?

C'est ce Pour après qui me pose souci.

Je le traduis, peut-être à tort, Après le procès.

D'une façon simpliste, je peux l'admettre volontiers.

J'ai du mal à saisir la décision de poursuite de l'instruction que j'interprète comme la volonté du tribunal de porter le dossier jusqu'au procès. Alors que, réserve faite évidemment que je ne m'appuie que sur le faire-part de Maître Heinich-Luijer, une autre issue judiciaire, compte tenu de l'état de santé mental de son client constaté par des psychiatres, était envisageable.

La question, pour moi, importante, que pose le faire-part de Maître Heinich-Luijer, et que Sub lege libertas aborde en conclusion de son billet est celle d'un jusqu'au boutisme, jusqu'au procès.

Je ne dis pas que les éléments du faire-part de Maître Heinich-Luijer sont suffisants - très, très loin de là - pour trancher quoi que ce soit dans ce cas particulier. Mais je pense que ce jusqu'au boutisme peut, peut-être, éclairer la lenteur, le différé et le sentiment d'éparpillement de la prise de décision de l'hospitalisation.

38. Le samedi 6 juin 2009 à 07:42 par madame pipi

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

39. Le samedi 6 juin 2009 à 08:32 par Annkikine

@ Mademoiselle Dudue, commentaire 18 :

Si c'est de moi qu'il s'agit qui suis censée être un esprit étroit abruti de séries TV, parce que j'ai osé dire qu'il arrivait aux avocats de mentir pour soutenir la parole de leur client, je vous rassure :

J'ai été avocate pendant 10 ans, je suis désormais magistrat depuis 10 ans. J'ai donc la "prétention" (puisque dès qu'on essaie de parler du quotidien du magistrat et de l'extrême difficulté de sa tâche, on est tout de suite suspect d'arrogance et d'inhumanité) de savoir un peu de quoi je parle.

Si je me permets de prendre un peu de distance avec le contenu de cette lettre, c'est parce que je ne vois pas au nom de quoi on devrait accréditer l'ensemble des ressentis exprimés dans ce courrier comme étant réellement ce qui s'est passé. S'il suffit d'accuser ainsi publiquement X ou Y pour que toute la meute s'excite en se disant, bon sang mais c'est bien sûr, encore un coup de ces salauds de magistrats, sans s'interroger un seul instant, sans prendre au moins un demi-centimètre de distance, eh bien, ça s'appelle juste du lynchage.

Et tous ceux qui sont si prompts à accuser les magistrats de tout et son contraire, démontrent que ce sont précisément eux qui font preuve d'arrogance et de suffisance, dans cette certitude aveugle d'avoir raison sans connaître le début du commencement des dossiers sur lesquels ils s'expriment.

Pour le reste, et dirais-je même, l'essentiel : le magistrat que je suis (et je ne vois pas pourquoi je devrais en avoir honte), reçoit aussi tous les jours des gens qui souffrent, s'interroge tous les jours sur la meilleure décision à prendre et ses conséquences pour l'ensemble des parties en présence, dort mal souvent en remâchant ses dossier entre 2 et 5h du matin, doute très souvent, mais pour autant, doit décider quoi qu'il lui en coûte parce que c'est la loi et qu'il n'y a pas d'autre choix.

C'est toute la différence avec le métier d'avocat, qu'encore une fois, j'ai aussi pratiqué et adoré. Le magistrat ne peut pas refuser de dossier. Ne peut pas refuser de décider au prétexte que le dossier lui paraît extrêmement complexe à déméler, ou que sa décision, quelle qu'elle soit, fera nécessairement du dégât d'un côté ou de l'autre. Il doit trancher. Il est là pour ça. Et dans sa tête et dans son coeur, ça bouillonne et ça doute et ça se serre et ça pleure souvent...

Cela dit pour les haineux, que de toute façon je n'espère pas convaincre puisqu'il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.

40. Le samedi 6 juin 2009 à 08:37 par Simple citoyen

@Mamz'elle Dudue, Je crois que vous avez tort... « Sub » s'est trouvé dépassé, par des réactions peut-être incontrôlables, de ses confrères et de ses lecteurs : il a eu, du coup, une réaction de solidarité de corps attristante, certes, mais parfaitement humaine (oui, Sub, même les Justes ont des faiblesses !). D'où ses remarques tardives, et effectivement affligeantes.

Au fait, est-ce qu'il n'existe pas, non seulement dans la loi, mais de le simple fait d'être une personne douée d'une élémentaire humanité, une obligation de secourir son prochain, de lui venir en aide, d'empêcher qu'il meure, au delà des misérables artifices et diverses palinodies de procédure agités ici par les professionnels de la profession ? On a laissé mourir un homme, on laisse mourir des gens, des décisions de justice, nombreuses et pas seulement au pénal, entraînent la mort d'autrui : telle est la simple, brutale et cruelle vérité.

Pour les autres, ceux qui pleurnichent au supposé Juges bashing : le jour où vous admettrez que si tant de gens, parmi ce « peuple » au nom duquel vous êtes supposé dire la loi, ont envers vous un sentiment de colère mélangé de mépris, ce n'est pas tout à fait sans raisons... le jour où vous comprendrez ça, disais-je, peut-être que l'idée de justice aura fait un grand pas dans ce pays.

(Pardonnez la longueur de ce post, mais parfois on en a ras la patate.)

41. Le samedi 6 juin 2009 à 09:14 par patrice lafonk

euh.... excusez moi,

comment quelqu'un déclaré d'irresponsable pénalement peut-il se retrouver en prison?

merci

42. Le samedi 6 juin 2009 à 09:15 par didier specq

Faute de soins appropriés, un détenu schizophrène est mort en prison. Son avocate hurle. Chapeau bas.

Ceci dit, les juges ont-ils les moyens d'exiger, dans l'heure qui suit, l'hospitalisation forcée d'un schizophrène? La réponse est: "non". Les magistrats peuvent seulement alerter le préfet.

Tout cela montre tout de même à quel point le pouvoir judiciaire (je sais, ça n'est qu'une "autorité" mais ça devrait être un "pouvoir" dans son domaine étroitement délimité de compétence) est faible face à l'administration.

Vendredi soir, en comparution immédiate à Lille, comparaît une grand-mère roumaine qui aurait jeté sur le sol à plusieurs reprises un bébé. D'après la médecine légale (alertée par la police elle-même alertée par des acheteurs dans une zone commerciale où ces familles de nomades mendiaient), le bébé n'a presque rien, voire rien.

Mais, on s'aperçoit à l'audience que le bébé n'est pas représenté, que les parents ne sont pas là, que l'essentiel (qu'est devenue la victime?) n'a pas de réponse certaine. La présidente (pourtant saisie en urgence puisqu'après tout, c'est la philosophie de la comparution immédiate) n'a que le pouvoir de désigner un administrateur ad hoc. Il s'agit d'un bébé de quelques semaines mais le pouvoir judiciaire est très limité face à l'administration. Les juges ne peuvent même pas juger puisque la victime n'est pas représentée (la grand-mère -qui conteste l'accusation et qui a expliqué qu'elle avait une soixantaine de petits enfants- a été remise en liberté sous contrôle judiciaire).

Autre exemple. Une circoncision tourne mal à Tourcoing sur un bébé de 7 jours. Elle a été opérée par un homme qui se dit médecin. Le bébé se vide de son sang et les parents -une semaine plus tard- vont le sauver en le portant directement au CHR. Il était moins une. Ce sont les parents qui portent plainte et se mettent sous la protection de la loi.

L'affaire a été jugée à Lille le jeudi 4 juin et le jugement sera prononcé le 1er juillet. En réalité, l'administration ferme les yeux sur ces rituels. Le réquisitoire écrit du procureur de la république demande la condamnation de celui qui a pratiqué la circoncision à domicile pour deux motifs: exercice illégal de la médecine et blessures involontaires. Mais, à l'audience, le procureur (la plume est serve mais la parole est libre) demande la relaxe. Un peu, il faut le dire, à la surprise générale.

Bref, un bébé a failli mourir mais on explique aux parents qu'il ne s'est rien passé de mal. Et donc que tout peut continuer dans la clandestinité. Sans doute pour ne pas froisser certains musulmans qui pratiquent la surenchère (normalement, la circoncision ne concerne pas les bébés mais plutôt les enfants autour de 6-7 ans).

Je donne ces deux exemples à dessein. Dans les deux cas, il s'agit de bébés en danger, bref de victimes victissimes puique ces bébés ne peuvent réagir. Dans les deux cas, face à l'administration, que peuvent les juges? Pas grand-chose apparemment.

43. Le samedi 6 juin 2009 à 09:23 par Ferdydurke

@ Gascogne

Je ne crois pas que ce texte relève de l'attaque ad hominem. Me Laure Heinich-Luijer interpelle des magistrats sur l'attitude qu'ils ont eue et les choix qu'ils ont faits. Elle ne les traite pas de "salauds", d' "incapables" ou d' "assassins" (ce qui constitueraient des attaques ad hominem).

Vous êtes plus proche qu'elle de ce type d'attaque ("Soit elle est de mauvaise foi (...) soit elle est incompétente.") qui par définition vise la personne et ses capacités.

L'outrance, la violence et l'agressivité de sa colère - également pleine de douleur, d'humanité et de désarroi - peuvent lui être reprochées. Même si toute colère est ainsi, effectivement cela n'excuse pas tout.

Que vous lui reprochiez de mettre en cause un président de chambre d'instruction et de pratiquer le juge-bashing, est probablement fondé mais de là à la soupçonner de soulager sa conscience et d'incompétence... Hum.

44. Le samedi 6 juin 2009 à 09:26 par Marcus Tullius Cicero

22. Le vendredi 5 juin 2009 à 23:46, par Sursis à statuer

OK, c'est pas la faute des magistrats. Par définition.''

D'ailleurs c'est jamais la faute à personne, sinon à pas de chance.

Rappelez-moi juste un détail : chaque année il y a combien de juges qui se flinguent dans leur cabinet, en pourcentage du nombre de détenus sans jugement qui se pendent ?

Ah bon ? Tant que ça ?''

Que savez vous des gens qui se suicident ?

J'en ramasse, avec les policiers et les gendarmes de mon ressort en moyenne deux à trois par personne, je cherche toujours à comprendre ... Il n'y a que très rarement des lettres d'explications (ce n'est pas comme dans les films...).

Chez les magistrats il y en a autant que dans le reste de la population, mais on en fait pas une affaire de société. Il y a en ce moment même un magistrat, médiatiquement mis en cause récemment, qui lutte entre la vie et la mort, mais sa famille n'a pas convoqué la presse...

Des magistrats meurent parfois à la tache, sont tués (RENAUD, BORREL), se tue (BOULOUQUE et d'autres encore), mais dans la discrétion et la sobriété.

La sobriété, est une valeur singulièrement perdue dans notre civilisation.

Non vraiment vous ne savez rien.

45. Le samedi 6 juin 2009 à 09:27 par Maboul Carburod....z

Les grandes douleurs ne doivent-elles pas rester muettes ?

Quand il est légitime de s'interroger sur une mort qui aurait pu être évitée, certes non.

Ce que nous ne saurins pas dans ce dossier, ce sont les démarches qui ont pu être envisagées et engagées pour permettre la sortie en Hospitalisation d'Office du mis en examen.

Etait-il acceptable de faire sortir ce détenu gravement malade de détention sans qu'il soit immédiatement transféré à un centre spécialisé ?

Là est aussi la question avec la question du temps de réponse de l'administration préfectorale.

Le délibéré de couloir est effectivement une faute professionnelle. Mais, en l'espèce, en était-ce un uo bien un avis donné après la décision rendue pour que le ministère public, prévenu de la réponse de la chambre d'instruction, mette en place auprès du Préfet les procédures de signalement permettant l'hospitalisation d'office ?

Voilà le sens de ma réserve avec tout le respect pour la douleur des uns.

Quand à la colère, elle est toujours mauvaise conseillère.

46. Le samedi 6 juin 2009 à 10:08 par Laure Heinich-Luijer

Cher Sub lege libertas, Merci de votre soutien, croyez bien que je sais l'apprécier, d'autant plus que vous êtes magistrat et qu'il vous vaut manifestement quelques commentaires difficiles... Je prends votre dernière phrase, magnifique, comme un cadeau.

47. Le samedi 6 juin 2009 à 10:22 par Le Justicier

Sub lege libertas appuie nonchalament sur un boitier muni d'un gros bouton rouge. Aussitôt, une gigantesque enclume tombe du ciel et écrabouille le Troll qui se dit, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendra plus. un texte 'Commentaire modéré par troll détector™' surplombe l'image. Maitre Eolas, l'air courroucé, une batte de base ball cassée sous la force d'un impact récent, regarde à ses pieds un troll assommé, qui tient encore à la main de multiples masques de carnaval. Un commentaire surplombe l'image : Même IP, pseudos différents… Trollicus clonicus, modéré par Troll Detector™

48. Le samedi 6 juin 2009 à 11:04 par Philonous

@46 Le "Justicier": Vous pourriez peut-être la laisser en juger, elle n'a visiblement pas besoin de vos conseils. Ici, normalement, on essaie d'argumenter son point de vue, pas d'insulter. Je crois que vous confondez vengeance et justice, car tout ce que vous exprimez ici, avec excès de surcroît, c'est votre colère... Même si les propos des magistrats ici présents ne vous conviennent pas, vous n'avez pas à en venir à une réaction aussi excessive♠. Essayez d'expliquer votre position, vous aurez plus de chances de convaincre. En l'état, vous ne faites visiblement que vous défouler, ce dont vous ne sortez pas grandi, ni ceux que vous voudriez défendre.

@Madame Dudue: "Quant à ceux qui pétris des stéréotypes de séries TV qu'ils doivent regarder à merci, qu'ils continuent à rester avec leurs certitudes de petits esprits: les avocats ne sont pas malhonnêtes, les juges ne sont pas des anges tombés du plafond de la chapelle sixtine. Je n'appelle pas à la haine ni à quoi que ce soit d'autre que l'honnêteté intellectuelle et n'en trouve que très peu dans ces commentaires." Je ne sais pas qui vous voulez désigner par là. Je pense que ce blog doit pouvoir permettre de sortir de ces préjugés... En tout cas, j'espère qu'on peut ne pas être d'accord être d'accord avec vous et ne pas rentrer pour autant dans cette catégorie. Le problème est que, même si je trouve les réactions de Pax Romana et Gascogne excessives (parce qu'ils se sentent agressés, donc répondent à l'agression), la vôtre ne l'est pas moins, pour les mêmes raisons. Et la discussion n'en sort pas grandie. Je comprends que vous vouliez défendre Maître Heinich-Luijer, mais il y a une manière plus mesurée de le faire, qui ne laisserait pas les lecteurs de ce blog comme des spectateurs en train de compter les points devant un combat d'arène. Finalement, les propos de l'auteur du billet restent les plus mesurés...

49. Le samedi 6 juin 2009 à 11:16 par Lucas Clermont

@ Laure Heinich-Luijer

Au moins «les commentaires difficiles» ont le mérite de pointer cette nécessité pathologique de transformer les magistrats en boucs émissaires, en utilisant le mécanisme de toujours dans le cas d'un bouc émissaire : la généralisation d'un acte isolé qui se fonde de surcroît sur des faits tendancieux. Vous y contribuez par le pathos de votre courrier à Rue 89.

J'imagine que lorsque les différents acteurs comprendront qu'avocats, magistrats, policiers ne sont pas les casse-pieds et les abusifs des uns et des autres, mais qu'au contraire ils ont le même problème d'une justice et d'un maintien de l'ordre gérés de manière démagogique, avec peu de moyens (c'est combien l'aide juridictionnelle ?), avec des traitements différents selon les statuts sociaux différents des justiciables, peut-être que les choses avanceront.

50. Le samedi 6 juin 2009 à 11:22 par annkikine

puis-je savoir pourquoi mon dernier commentaire, posté il y a plus de deux heures, n'a pas été publié ? (Il était beaucoup plus pacifique que plusieurs postés depuis...)

Eolas:
Parce qu'aujourd'hui, ma fille m'a fait un merveilleux cadeau : une grasse matinée.

51. Le samedi 6 juin 2009 à 11:29 par Bziaou

Je trouve que finalement, ici, ceux qui défendent Maître Heinich-Luijer le font fort mal, et décrédibilisent leur combat.

Lorsqu'on se bat, on ne doit pas injurier, mais argumenter. C'est la base, me semble-t-il, de tout débat. En ce sens, les attaques ad hominem contre les quelques juges qui viennent commenter n'ont pas leur place.

Ils répondent qu'ils ne sont pas responsables de ce qui s'est passé, puisque c'était le préfet qui devait prononcer l'hospitalisation d'office. Il y avait des réponses à cet argument, et certains ont d'ailleurs répondu sur un ton tout à fait normal (ils auraient du alerter le préfet).

Ils considèrent que la lettre est une attaque ad hominem contre les juges qui ont touché de près ou de loin à l'affaire : il aurait fallu reprendre cette lettre, mot à mot, en faire une analyse de texte, et leur prouver le cas échéant le contraire.

Bref, abandonner les préjugés (les juges sont des irresponsables inhumains et les avocats des truands) et les insultes, et commencer à réfléchir. Visiblement, c'est trop difficile.

52. Le samedi 6 juin 2009 à 11:33 par La Boétie

Je ne crois pas qu'on puisse se contenter d'un constat d'impuissance navré en réponse à l'interpellation de cette avocate dont la colère est lègitime et l'action courageuse (Voltaire, en colère, n'a pas nuancé ses attaques dans l' affaire Calas, il a cogné direct au gros calibre et notamment sur le parlement de Toulouse). S'il y a vraiment eu un rapport d'expert concluant à la maladie mentale (donc rédigé par un médecin), il me semble que, sauf à chipoter, cela vaut certificat médical. Or l'art D398 du CPP prévoit que les détenus atteints de troubles mentaux ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire. Il prescrit qu'au vu d'un certificat médical circonstancié, il appartient à l'autorité préfectorale de faire procéder dans les meilleurs délais à leur hospitalisation d'office... Ce texte est rédigé à l'indicatif, donc il n'offre pas de choix. Il me semble que toute autorité ayant ce certificat entre les mains (juge, procureur, directeur d'établissement) doit le transmettre au préfet et que celui-ci doit procéder etc... Je ne suis même pas sûr que la restriction mentionnée à l'art D 393 (accord préalable du juge d'instruction) soit applicable au cas du détenu atteint de troubles mentaux. Par conséquent, si un médecin avait établi par écrit que le détenu était atteint de troubles mentaux, il n'y avait pas de fatalité et on pouvait agir sans délai et sans les "secours" de la chambre de l'instruction. En tous cas, il faudrait que cette affaire nous serve à définir une réaction efficace dans de tels cas et au moins à répondre à la question : qui peut saisir le préfet? Il me semble que s'il est le premier à avoir le certificat médical, le juge d'instruction peut le faire, qu'il n'a nullement besoin des réquisitions du parquet ni de passer par le truchement de l'administration pénitentiaire. Idem pour le directeur de l'établissement s'il en a connaissance en premier.

53. Le samedi 6 juin 2009 à 11:49 par mad

Merci à Annkikine en 16, merci beaucoup à Marcus Tullius Cicero en 19.

@ Sub lege libertas, sous 1 : je comprends bien votre point de vue, mais je continue à ne pas comprendre pourquoi le seul magistrat qui avait un certain pouvoir sur la remise en liberté de son client n'ai pas été même cité.

Au contraire d'ailleurs, la formulation de plusieurs passages entretient la confusion. « ''La dernière fois que j'ai demandé sa mise en liberté c'était en avril. J'ai demandé qu'il soit hospitalisé. Vous m'avez répondu qu'on n'était pas pressé. Ce n'était pas vos jours qui étaient comptés.'' »

Je pense que ce sont ces raccourcis qui ont déclenché la réaction épidermique de Gascogne et d'autres, ce que je comprends très bien, ayant eu la même la première fois que j'ai lu ce texte.

Au maître des lieux : je constate avec peine que finalement, les commentateurs sont partout un peu pareil, et je commence à croire que la seule chose qui empêche vos commentaire de dégénérer est un maniement ferme de la batte-à-clous ...

54. Le samedi 6 juin 2009 à 12:16 par Eolas

Bienvenue au Troll Detector™ de sub lege libertas. C'est moi qui l'ai déchaîné, car les commentaires injurieux étaient de plus le fait d'une seule et même personne. S'abaisser à recourir à des commentaires grossiers faute de savoir les exprimer et qui plus est changer de pseudos pour faire style on est plusieurs à penser comme ça est le fond de la lâcheté et de l'inanité intellectuelle. Ces choses n'ont rien à faire ici.

55. Le samedi 6 juin 2009 à 12:48 par Juristouille

Et un billet intéressant de plus!

En lisant les commentaires j'ai été supris toutefois de voir nombre d'entre eux censurés au nom d'une adresse IP différente; je veux dire qu'un tel nombre me parait étonnant. Est ce que par hasard il ne s'agissait pas d'un ordinateur public d'où plusieurs personnes ont pu alternativement faire usage? Bon courage à Troll Detector en tout cas ;-)

Eolas:
Effectivement, il est possible que 5 personnes différentes se soient simultanément retrouvées dans le même Cyber café encore ouvert à 1 h du matin, et s'y soient retrouvées le lendemain dès 7 heures, aient lu le même billet et aient toutes été prises d'une irrépressible envie d'insulter son auteur, Gascogne, et les magistrats dans une unanimité rageuse. Ou pas.

56. Le samedi 6 juin 2009 à 12:57 par patrice lafonk

rebonjour, les magistrats ne peuvent placer d'office en hospitalisation, mais ils peuvent enjoindre à quelqu'un de se placer sous la médication d'un établissement de soin (injonction thérapeutique) en matière d'ILS...

encore une fois (cf 41), que faisait cette personne en détention, puisqu'elle a été déclarée irresponsable pénal. y a un truc que je pige pas...

merci

57. Le samedi 6 juin 2009 à 13:21 par henriparisien

Je vais essayer de résumer ce que j’ai compris avec mes mots de keskidi.

On a un drame à trois acteurs, justice, administration et avocat et risque de suicide important d’un détenu.

L’administration est saisie mais ne répond pas. Peut-être parce qu’elle estime le risque exagéré et qu’elle est mithridatisée par une myriade de demandes peut fondées. L’avocat instrumentalise une demande de mise en liberté, non pas pour que le détenu soit libéré mais pour que l’administration soit obligée de demander l’internement d’office dans une structure plus adapté.

Les juges semblent convaincus de la pertinence de la démarche de l’avocat – même s’il s’agit d’un bricolage – mais se rangent finalement à l’avis du procureur exprimé hors audience- nouveau bricolage – qui promet qu’un arrangement va être trouvé avec l’administration.

Cet arrangement met un peu trop de temps à se traduire dans les faits et il y a mort d’homme.

Il y a eu mort d’homme parce qu’il y a eu trop de bricolage. La justice est souvent représentée par une balance. Des fois, il est nécessaire de soutenir cette balance par une ficelle. Mais à chaque fois qu’on ajoute une ficelle, on multiplie les risques de rupture de l’édifice.

A mon avis, la ficelle de trop, c’est le délibéré de couloir. Celui qui n’existe pas. J’ai beaucoup de respect pour les magistrats. Je sais qu’ils font un travail indispensable pour la collectivité dans des conditions difficiles.

Mais je reste persuadé – et la lecture de ce blog ou de celui de Blier me conforte régulièrement – que les avocats sont perçus comme des adversaires plus que des partenaires par l’administration mais aussi par les magistrats.

Et c’est comme ça que j’analyse la tribune de maître Heinich-Luijer. Vous – les avocats – êtes obligés d’avaler régulièrement des couleuvres. D’avaliser par votre présence des procédures et des méthodes qui rognent les droits de la défense.

Vous le faites parce que c’est votre métier et que ce faisant, vous aider malgré tout vos clients.

Mais des fois, ça dysfonctionne grave.

Vous avez tout mon respect.

58. Le samedi 6 juin 2009 à 13:39 par désiré

Ouf troll detector s'est réveillé!!!!!!

La même personne............re ouf je commençais à m'inquieter sur les fréquentations de ce blog pourtant très respectable

59. Le samedi 6 juin 2009 à 14:36 par Leslie/Elsie

Moi aussi. J'étais habituée au ton très courtois de ce blog.

Cependant, dans cette histoire, je crois qu'on touche du doigt les limites de la retenue. On est humain. on a le droit de craquer. Il ne me choque pas qu'une personne choquée par les incohérences et les insuffisances du système passe un peu la mesure quand il s'agit d'alerter sur les conséquences des décisions de justice. Il ya quand même eu mort d'homme.

Eolas:
On a le droit de craquer. Mais ailleurs. Et prendre prétexte de la mort de quelqu'un dont a jamais soupçonné l'existence de son vivant pour injurier des personnes est méprisable, et rien d'autre.

Par contre, je comprends aussi que la majeure partie des magistrats, surchargés de travail, ne veulent pas être considérés comme de grands méchants loup. Ni avocate, ni magistrate, j'ai la curieuse impression que, des deux cotés, il ya, au fond, le même raz le bol dû aux manques de moyens, et aux indélicatesses des quelques abrutis internes (Yen a, je suppose, comme dans toutes les professions, sachant que la bêtise est la seule chose équitablement répartie sur terre avec l'intelligence...).

Diviser pour régner, dit on...

60. Le samedi 6 juin 2009 à 14:49 par cavejien

Que tous les avocats de Laure HEINICH-LUIJER s'attardent sur le commentaire n°46.

Leurs montées d'hormones devraient rapidement se calmer.

A défaut de stabilisation, je demanderai aux Préfets concernés une HO à leur encontre, dans une structure équipée d'un écran et d'un clavier fictifs ;-)

J-1...........

61. Le samedi 6 juin 2009 à 14:50 par la plèbe

Magistrat Gascogne

Incompétente ou de mauvaise foi, l'avocate révèle un travers commun ou courant à tout le moins? Et cette opinion publique, si ignorante qu'elle ne décèle aucune ficelle, car a contrario portée par l'air du temps et au jeu de l'épaule et jetée d'opprobre sur la magistrature? Mais vous, droit dans vos bottes et comme le I de la Loi, vous avez le courage de dénoncer la victime expiatoire que vous refusez d'être. Une victime. Victime d'abord d'un manque de moyens et d'un système politico-administratif qui entrave votre action. Victime de la malignité des avocats. Victime d'une opinion venant d'un peuple belliqueux et ignare. Une victime.

Vous allez finir par avoir besoin d'un avocat pour vous défendre!

Sans rire, vous apercevez-vous à quel point vous êtes méprisant Gascogne?

Plus sérieusement, l'offusqué, le pompeux diffamé du haut de sa haute fonction intemporelle... A ce jeu, vous faite de cette fonction un clergé régulier, méprisant l'immanence par laquelle viendrait toute critique nécessairement impropre à destination. Que je sache, si la loi vous protège, elle ne vous confère pas, monsieur le juge, la transcendance que vous semblez vous attribuer en faits.

Le respect de la procédure est votre meilleur argument, peu importe donc les dommages collatéraux, y compris funestes. Ah du moment que le Texte est respecté, que voulez-vous qu'on y fasse à la mort de cet homme. Cela ne nous concerne pas! Je suis là pour faire appliquer la loi moi, pas pour faire du social !!!

Et citant la dite loi, vous voyez bien que les magistrats n'ont strictement rien à voir avec une décision préfectorale. Veuillez donc passer votre chemin et vous adresser à qui de droit. Deuxième porte à droite, escalier B, c'est la préfecture.

On s'en contentera alors, nous la plèbe. Merci monsieur le juge.

62. Le samedi 6 juin 2009 à 15:02 par Ferdydurke

la plèbe est très verbeuse cette année...

Eolas:
La plèbe a toujours aimé les tribuns.

63. Le samedi 6 juin 2009 à 15:05 par Marcus Tullius Cicero

55. Le samedi 6 juin 2009 à 12:57, par patrice lafonk

rebonjour, les magistrats ne peuvent placer d'office en hospitalisation, mais ils peuvent enjoindre à quelqu'un de se placer sous la médication d'un établissement de soin (injonction thérapeutique) en matière d'ILS...

encore une fois (cf 41), que faisait cette personne en détention, puisqu'elle a été déclarée irresponsable pénal. y a un truc que je pige pas...

1.

En fait moi, "il y a un truc que je pige pas", c'est simplement ce qui s'est passé.

La lettre de cette avocate est tout simplement pas claire, le pathos ayant privé de lisibilité l'enchainement des faits ayant conduit son client à se donner la mort.

Ainsi, je ne comprends pas les circonstances : ce client avait-il été jugé, était-il en détention provisoire ou incarcéré ?

Dans le cas d'un client non encore jugé, la saisine du JLD se conçoit, et en cas de refus de mise en liberté, la référence à la Cour dans le cadre d'un appel est plausible.

Si son client avait été jugé et condamné, s'agissant d'une exécution de peine, le suivi était du ressort du Juge d'application des peines.

Cependant, à partir du moment ou cet homme était sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire et qu'un psychiatre le déclarait "fou" au cours de sa peine, le directeur de la Maison d'arrêt devait saisir le Préfet d'une demande de placement en hospitalisation d'office. Le parquet en était alors ensuite informé tout comme le JAP, et l'on suspendait la peine.

Dans tout les cas, l'attaque contre le Juge d'instruction, est incompréhensible. Cela ressemble à une forme de crise de nerf sur papier timbré, complaisamment relayé par les médias, qui n'ont pas été plus curieux que cela.

2.

En second lieu, il convient de ne pas tout mélanger. L'injonction thérapeutique en matière de stupéfiants que vous évoquez, n'a strictement rien à voir avec un placement en hospitalisation d'office.

Dans un cas il s'agit d'un mode de poursuite alternative pour éviter le passage devant le tribunal à un toxicomane plus victime que délinquant, dans l'autre c'est une mesure extrêmement coercitive et dans tout les cas, la loi prescrit à l'un (parquet) et à l'autre (Préfet) quel est son domaine de compétence et ses pouvoirs.

On ne fait pas ce que l'on veut mais ce que la loi commande.

3.

J'imagine que si cette avocate a informé l'autorité judiciaire (JAP, JLD, Parquet...) de la situation de son client, une expertise psychiatrique a dû être ordonnée - à supposer que la maison d'arrêt ne se soit pas rendu compte elle-même de la situation (ce qui m'étonnerait fort, sachant que les détenus difficiles font l'objet d'un suivi attentif) - et que dans tout les cas le psychiatre de la maison d'arrêt (les psychiatres sont des médecins responsables, totalement indépendant de l'administration pénitentiaire, et qui détestent tout comme nous, voir leurs clients se suicider) a réagi.

4.

Comme la mort, le suicide est un problème compliqué, intime qui appartient à chaque homme - dans la "Reine morte", Montherlant, écrivait que « ... le suicide est le dernier acte par lequel un homme puisse montrer qu'il a dominé sa vie ...» - , de sorte que le principe de chercher à rendre à tout prix responsable quelqu'un du suicide d'une personne que l'on a aimé, apprécié, est peut-être un moyen d'exorciser sa peine, mais ce n'est pas le bon.

Ainsi, cet homme s'est il suicidé par désespoir d'être incarcéré, ou parce qu'il était en proie à un accès de folie ?

Question de la question, faudra t-il désormais renoncer à incarcérer quelqu'un déprimé par la peine de prison qui lui a été infligée alors qu'il a commis un crime ? Dans ce cas, quelle sera désormais la sanction que pourra infliger la société à un criminel ?

5.

Bref, je n'ai compris ce qui s'est passé dans le cas de ce pauvre homme, et un peu de clarté de la part de son avocat, plutôt que l'invective des magistrats, nous aurait certainement permis de comprendre et peut-être de voir s'il était possible d'anticiper pour l'avenir.

64. Le samedi 6 juin 2009 à 15:17 par Lancien

Cher Maître, Certes, le sujet est bouleversant et les sensibilités de chacun s'en trouvent exacerbées. Je l'avoue humblement en préambule, mon vocabulaire est pauvre, mon niveau d'études on ne ne peut plus sommaire et mes doigts de plus en plus malhabiles sur un clavier. Sur d'autres sites, il advient que je me fasse l'avocat du (pauvre) diable et c'est pourquoi j'interviens aujourd'hui. "S'abaisser à recourir à des commentaires grossiers faute de savoir les exprimer et qui plus est changer de pseudos pour faire style on est plusieurs à penser comme ça est le fond de la lâcheté et de l'inanité intellectuelle." Ne pensez-vous pas incliner quelque peu vers un certain élitisme ? Non point que j'approuve le nauséabond, mais l'insulte est au primaire ce que la langue de bois est aux politiques, à la différence près qu'il s'agit pour le premier d'un passage à l'acte, aussi maladroit soit-il, tandis que le second jouit , grâce à son immobilisme, d'une aura sans commune mesure avec le néant de la pensée qui caractérise son discours. Je n'ai pas l'intention d'entamer ici un long débat sur la notion d'adresse IP, en voie de devenir une donnée personnelle, mais je ne peux que compatir et m'apitoyer sur le sort de ceux qui ont pour certains le courage, et pour d'autres l'incurie de ne pas avancer masqués. Pourquoi la stupidité des élites vaudrait qu'elle soit récompensée par un prix Busiris sous un pseudo, alors que l'imbécilité la plus ordinaire ne mériterait que la censure ? Il est, me semble-t-il, un exemple flagrant de personnage qui use et abuse de pseudos pour manier l'insulte et la provocation. Vous n'ignorez pas que le simple fait de traiter un ces pseudos de menteuse vous conduit au 36. Dans ce contexte, votre appréciation des rustres serait pédagogique. Etait-ce là le fond de votre pensée et votre véritable motivation?

65. Le samedi 6 juin 2009 à 15:35 par Marcel

@Lucas Clermont: Vous n'avez pas le sentiment que peut-être si tant de gens "généralisent", c'est parce qu'ils ont constaté un tout petit peu trop d' "actes isolés", et surtout beaucoup trop de collègues qui les soutiennent aveuglément et font tout pour tenter de les justifier, pour continuer à croire que ça ne relève pas d'une certaine pratique ou d'une certaine mentalité plus courante que ce qu'on aimerait ?

Quand Maître Heinich-Luijer dit que "Un délibéré de couloir se pratique tellement que le magistrat en parle sans se méfier", vous n'avez pas le sentiment qu'elle contredit l'hypothèse d'un acte totalement isolé ?

Mais bon, d'après Gascogne et Marcus, c'est forcément une menteuse, alors c'est vrai que ce n'est pas très grave...

66. Le samedi 6 juin 2009 à 16:42 par Gascogne

Vous avez raison, Marcel, la plèbe et les autres. Droit dans mes bottes, incapable de me remettre en cause, nécessairement corporatiste puisque j'essaye d'expliquer mon métier depuis des mois sur ce blog, si pédant et agressif, je ne peux que donner l'image de la justice et des juges (que je ne suis plus, accessoirement), tels que vous aimez les haïr. J'ai beau travailler ce jour, devoir encore travailler demain, loin des miens, pour faire fonctionner ce système que vous trouvez si plein de magistrats remplis de morgue, victimes de rien, j'ai beau m'escrimer depuis des mois pour tenter grâce à ce blog d'expliquer le fonctionnement d'une justice si mal comprise, et si mal décrite par certains de ceux qui la connaissent pourtant si bien, rien n'y fait, ou cela y fait trop. J'en prends acte.

67. Le samedi 6 juin 2009 à 17:01 par Lucas Clermont

@ Marcel

Non, non, généraliser c'est un travers très commun, contre lequel on doit se prémunir soi-même. On tombe d'autant plus facilement qu'on en a envie de croire quelque chose, et que les médias entretiennent les préjugés. Notez au passage que pour des motifs commerciaux, la quête d'une meilleure audience, les médias ont tout intérêt à caresser le spectateur dans le sens du poil, c'est à dire de ses préjugés, ce qui enclenche un cercle vicieux. Que des magistrats soient incompétents, malhonnêtes, psychorigides, fainéants, et cetera, ou que simplement ils puissent commettre des erreurs c'est indéniable. Il en est de même pour toutes les professions.

Quant au «délibéré de couloir qui se pratique tellement que le magistrat en parle sans se méfier», ça précisément je n'y crois pas. Parce que c'est grave, et que ce serait dénoncé, la pratique, de façon plus fréquente par les avocats ou les autres magistrats. Tout au plus pourrait-on extrapoler de ce que déclare Maître Heinich-Luijer que ce magistrat est coutumier du fait. Ça ne fait pas d'elle une menteuse, mais une personne bouleversée par la mort de son client ; mais sa lettre est inacceptable.

68. Le samedi 6 juin 2009 à 17:05 par Lucas Clermont

@ Gascogne

Il est difficile de ne pas se blesser à la lecture de quelques commentaires. Il y a hélas que la communication par internet désincarne les êtres et qu'on se retrouve, très vite, publiant, à ne pas percevoir la violence de ses propos ; tandis que le destinataire les prend de plein fouet.

Votre entêtement à expliquer, y compris votre âpreté sont au contraire précieux pour comprendre le labyrinthe du monde judiciaire. Merci !

69. Le samedi 6 juin 2009 à 17:15 par Julocello

Pour ma part je sais gré à MT Cicero en 63 d'avoir clairement exposé les questions qu'un mékeskidi comme moi ne parvenait à formuler.

Cher SL Libertas, pardonnez-moi, mais : faire part de votre affliction en accusant réception de la lettre de Me Heinich-Luijer sans chercher à expliquer le déroulement de la procédure était un bel appât à trolls anti-magistrats (dont vous sembler par ailleurs déléguer la police au maître des lieux :) )

70. Le samedi 6 juin 2009 à 17:37 par De Minimis

Le magistrat devient-il la nouvelle victime expiatoire?

Prochaine réforme du Code de l'Organisation judiciaire:

"À chaque fois que les récoltes seront mauvaises, que l'équipe de football phare du ressort de la Cour d'appel concernée perdra, qu'un dysfonctionnement de la Justice en France sera relevé, un magistrat du siège ou du parquet, désigné par le Président de la Cour d'appel, devra être exposé à la vindicte populaire et enchaîné aux grilles du Palais de justice jusqu'à ce que mort s'en suive".

Une question trotte dans ma tête d'imbécile: combien, parmi ceux et celles qui ont publié des commentaires insultants et stériles, sont du genre à hurler à la peine de mort pour les pédocriminels ou les tueurs d'enfants? Combien hurlent contre les magistrats qui ne donnent pas la peine maximale dans le cas où la culpabilité est reconnue?

Une autre question: Si "M.O." avait été effectivement coupable, et qu'il s'était suicidé après le jugement prononçant sa culpabilité. Combien de ceux et celles qui s'insurgent contre la magistrature française se seraient fendus d'un commentaire autre que "de toute façon il l'a bien mérité" ou "ça fait un salaud de moins"?

71. Le samedi 6 juin 2009 à 17:53 par Jojo

N'y a-t-il pas un petit détail qui manque dans tous ces commentaires ? Ce ne sont pas les magistrats de la chambre de l 'instruction qui exécutent leurs propres décisions. C'est l'avocat général qui en a la charge. C'est à lui qu'il incombe de prendre contact avec l'administration préfectorale, s'il l'estime opportun, pour obtenir un placement pschiatrique. Cela se pratique couramment en cas de non lieu pour irresponsabilité pénale. Et c'est l'intérêt général, y compris celui de l'intéressé... Au moment où il est remis en liberté, il est pris en charge sur le plan médical.

Si cette démarche n'est pas entreprise ou ne prospère pas, que peut faire la chambre de l'instruction ? Remettre en liberté un individu dangereux sans aucun suivi médical assuré ?

Ces questions avaient nécessairement été débattues à l'audience. L'avocat de la personne détenue devait donc s'attendre à un suivi de la part de l'avocat général.

Dans un tel contexte, fallait-il comprendre le "délibéré de couloir" comme une pure et simple tentative de convaincre les magistrats de renoncer à une mise en liberté ?

Il manque vraiment quelques éclaircissements dans cette affaire.

72. Le samedi 6 juin 2009 à 18:10 par didier Schneider

"j'ai beau m'escrimer depuis des mois pour tenter grâce à ce blog d'expliquer le fonctionnement d'une justice si mal comprise, et si mal décrite par certains de ceux qui la connaissent pourtant si bien, rien n'y fait, ou cela y fait trop. J'en prends acte."

Allez déconne pas Gascogne, Va pas t'tailler les veines,

va pas laisser les trolls, du site, prendre les rênes,

Eh Gascogne r'tourne à ta perm,

et prépare nous tes coms'

nous on n'te dit pas 'la ferme!'

tu vaux plus qu'les pov'pommes....

73. Le samedi 6 juin 2009 à 18:59 par valentine

@ Gascogne

Vous n'etes pas "droit dans vos bottes", mais exigeant et perfectioniste. Quant a ceux qui attendent des magistrats qu'ils mettent leur sensibilite et leur compassion au premier plan , je crois qu ils ne mesurent pas les consequences que cela aurait .
Les contributeurs de ce blog ont toujours fait preuve d'humanite. Il faut juste savoir lire toutes leurs lignes et s'en impregner...

Merci Gascogne

74. Le samedi 6 juin 2009 à 19:59 par Cyber Cola

On ne voit pas un avocat demander l'hospitalisation d'office de son client. Ce n'est pas nécessairement illégal, c'est contraire à la déontologie. Un avocat représente son client il ne doit pas aller contre la volonté de son client. Or,une HO est nécessairement contraire à la volonté du malade. Au mieux l'avocat peut essayer de convaincre le malade d'accepter les soins. C'est naturellement difficile à mettre en œuvre lorsque le client, même s'il est volontaire, est en détention.

L'administration pénitentiaire peut demander au préfet l'HO. Le procureur peut aussi saisir le préfet. La maison d'arrêt est sous le contrôle du procureur. Si le directeur craint qu'il ne s'agisse d'une simulation, le procureur, qui est un peu dans le secret de l'instruction et connaît les résultats de l'expertise psychiatrique, peut demander au directeur d'informer le préfet. Il a aussi les moyens de l'en dissuader.

Il n'est pas contesté que le procureur s'opposait au traitement médical.

L'avocate a fait la seule chose qu'elle pouvait : demander aux juges d'arbitrer entre le procureur et son client. Les juges ont tranché en faveur du procureur.

On constate, à postériori (c'est toujours plus facile), qu'ils se sont trompés.

Après, c'est comme pour tous les justiciables. On fait des choix dans la vie. Conduire après un repas un peu arrosé par exemple. D'habitude on arrive bien à la maison. Mais, pour peu qu'on explose toute une famille qui faisait tranquillement du vélo, on trouvera toujours un procureur (souvent suivi par les juges) qui vous dira : "hé bien payez maintenant".

La sanction, là, c'est un "bashage" médiatique par la plèbe (mon dieu quelle horreur !). Naturellement la famille (ici les collègues des magistrats défaillants) se serre les coudes autour du délinquant. Elle le connaît bien. Elle sait qu'au fond ce n'est pas un mauvais bougre. Elle trouve toujours la sanction exagérée.

C'est humain.

75. Le samedi 6 juin 2009 à 20:03 par La plèbe

Il est vrai que la plèbe a toujours aimé les tribuns. C'est toute logique que l'on compte parmi eux un grand nombre d'avocats. Gascogne. J'ai lu je crois tous vos billets ou presque. (cela pour vous donner l'occasion à peu de frais de conclure que je n'ai rien compris). L'occasion m'est donnée de m'en montrer reconnaissant.
Mais la victimisation dessert votre entreprise. Et davantage encore comme vous le fites, en villpendant sèchement une avocate indignée par la mort de son client en de telles circonstances.
Je prends conscience qu'en vous parlant de la sorte je me trompe. Et je vous prie de bien vouloir m'en excuser. Réaction sans raison, pris par ce sentiment d'injustice, face à une réaction blessante et froide.
Je me trompe doublement. Envers l'homme, pour la rareté de son geste, ses ecrits, le temps consacré à expliquer. Envers le magistrat ensuite, qui exerce une fonction si nécessaire à notre démocratie qu'il récolte péniblement les déficits les plus passionnés.
Je vous souhaite courage, nous avons besoin de vous.

76. Le samedi 6 juin 2009 à 20:31 par pendragon

etonnant qu'autant de professionnels du droit s'étripent à fleurets mouchetés, ou à la hache ...

magistrat ou avocat (mon doux métier) nous savons que la réalité est une représentation - tous parleront de vérité judiciaire, imparfaite, parfois incohérente, voire grossière....

mais jamais de verité nue nimbée de lumière....

donc, il est possible que mon confrère heinich ai raison, et que les magistrats aient par cette regrettable pratique du délibéré de couloir aggravé - par le délai imposé - la psychose de son client, et favorisé l'autolyse

ou qu'elle se reproche de ne pas avoir su convaincre les juges, ou pas fait assez pour défendre son client

ou les deux à la fois (cad responsabilité partagée).

bref, nous sommes auxillaires de justice, nous avons tous preté serment, alors essayons d'elever le débat

et de garder vivant un espace réel d'échanges

quant aux jaipasplusreflechiqueca, aux jyconnairienmaisj'encause, aux trolls du café du commerce du coin, qu'ils n'hésitent pas à aller at home pour voir si j'y serai par hasard, je veux dire le site de tf1.fr ou effectivement le juge bashing est un art majeur (y compris pour une crème fouettée renversée)

77. Le samedi 6 juin 2009 à 20:33 par lilly66

remerciions la dernière voix entendue par cet homme?

78. Le samedi 6 juin 2009 à 20:54 par Sub lege libertas

Je m'auto-commente, car je viens de finir de vous lire, tous...

Merci à Maître Eolas d'avoir sorti mon troll détector des limbes, bien qu'il ait encore une tête très anonyme (je vous fais une proposition rapidement).

J'ai un sentiment d'amertume, mais certains d'entre vous ont su garder ce ton et ce questionnement que j'aime ici...

Mon avis ne vaut pas plus que celui d'autres collègues ou avocats ou mekeskidis qui en argumentent un ici. Le désaccord ne justifie pas l'ordure.

In fine, ce billet était une effraction : je vous ai donné à lire un courrier que j'aurai pu envoyer directement à son destinaire. Je l'ai fait car il répondait à une lettre ouverte. Je devais penser comme Maître Laure Heinich Luijer qu'un tiers lecteur pouvais y trouver témoignage singulier d'un moment de notre vie professionnelle et de la violence des sentiments qu'elle nous fait endurer, des proximités ou divergences intellectuelles au delà des statuts. Cela pouvait conduire ce tiers lecteur à l'agacement du voyeur involontaire qui peut s'exprimer avec courtoisie voire ironie ou à l'étonnement du spectateur impromptu qui peut conduire à la réflexion.

Je le referai car je ne désespère pas du réveil de l'esprit, comme Don Juan qui fait l'aumone "pour l'amour de l'humanité".

Si le mépris pour les épistoliers s'empare des tiers lecteurs, que ne se contentent-ils pas pour l'exprimer du silence. Ils y gagneraient du temps, n'ayant perdu que celui d'une lecture insane à leur yeux. Qu'ils relisent alors Chateaubrilland qui se déclarait "économe de son mépris car il y avait trop de nécessiteux."

Faute d'être certain qu'il fallait que tous mes lecteurs manifestassent leur avis, je ne me réjouis donc égoïstement que de la réception du commentaire n°46.

79. Le samedi 6 juin 2009 à 22:25 par Fantômette

Cher Sub Lege Libertas,

Permettez-moi de m'en réjouir avec vous.

80. Le samedi 6 juin 2009 à 23:06 par Gascogne

@ La Plèbe : si vous êtes bien le même commentateur, merci pour le dernier commentaire. Il me touche...vraiment. Pour le reste, trop de fatigue nerveuse ne tue malheureusement pas la fatigue nerveuse. Je continue comme je peux, mais pour en avoir discuté pas plus tard que ce soir, je crois que la magistrature, vu le contexte, il va falloir que je réfléchisse à y rester plus longtemps. Je n'ai aucune envie que mon fils ait plus tard honte de moi, vu l'opprobre générale.

81. Le samedi 6 juin 2009 à 23:10 par Marie-Christine BLIN

Eolas,

en commentaire 55, tu nommes Sub Lege Libertas Gascogne ... ce serait bien de rendre à César ce qui est à lui.

82. Le samedi 6 juin 2009 à 23:27 par valentine

@ marie-chritine blin #81

Il s'agit, je crois, d'une énumération et non d une apposition

83. Le dimanche 7 juin 2009 à 01:35 par anne l

Maître Heinich Luijer est l'avocate d'un détenu qui était gravement malade. Sa maladie était psychiatrique mais c'est bien un malade qui était en détention. Elle a signalé la situation, a assisté son client et a constaté que rien, concrètement, n'a été fait. Cet homme est mort. C'est insupportable pour un avocat d'alerter les juges et de ne pas être entendue dans une telle situation. Elle le dit. Elle le crie. Qu'elle se trompe de cible; qu'elle le dise maladroitement; qu'elle soit injuste. Peut-être. Mais un tel décès, en détention, est insupportable. Qu'elle ait tort ou raison, saluons au moins cette capacité d'indignation et ce refus de l'inacceptable. Mourir en détention, ce n'est pas seulement une statistique annuelle. Merci maître Heinich de le rappeler et merci à Sub Lege Libertas pour l'humanité de sa dernière phrase. Pour certains commentateurs le mot fraternité ne doit plus figurer dans la devise nationale.

84. Le dimanche 7 juin 2009 à 08:04 par Véronique

@ Gascogne

Vous savez, ce qui heurte c'est le sentiment que parmi les magistrats qui sont en charge de l'affaire, aucun ne semble envisager l'idée que le décision d'hospitalisation qui, certes relève de la compétence et du pouvoir du préfet, cette décision, de toutes façons, n'interviendrait pas sans une position clairement exprimée par le ou les magistrats. Je ne sais pas lequel, d'un point de vue de la fonction, du procureur, du JI, du JLD, du président de la chambre d'instruction, a la plus grande latitude pour interpeller le préfet.

Alors on se dit, peut-être à tort , que le différé dans l'interpellation du préfet - si bien entendu, on ne s'appuie que sur ce qu'a écrit l'avocate - répondait à une logique et à un enjeu qui dépassaient de trop le cas particulier de ce prévenu.

Je ne pense pas une seconde que pour un juge d'instruction il soit facile et simple d'envisager une conclusion de non lieu que l'hospitalisation, d'une certaine manière, annoncerait. Je ne pense pas non plus une seconde que pour un procureur cette perspective soit facile et simple à valider.

Mais il y a un moment où on se dit que si, bien sûr, il y a le directeur et le psychiatre de la maison d'arrêt, que si, bien sûr, la décision d'hospitalisation relève du préfet, on ne peut s'empêcher de penser qu'en réalité ceux qui ont la clé décisive de l'affaire sont les magistrats.

...la violence des sentiments qu'elle nous fait endurer, des proximités ou divergences intellectuelles au delà des statuts... (Sub lege libertas - post 78)

Au-delà de la lettre de Maître Heinich-Luijer et du billet de Sub lege libertas, j'ai envie d'ajouter que la violence de la tension entre soi et soi, le moment où il faut choisir et décider avec gravité et contre soi, 'est, à mes yeux, ce qui fait l'extrême valeur de votre métier. Cette responsabilité-là.

85. Le dimanche 7 juin 2009 à 09:22 par Marcus Tullius Cicero

84. Le dimanche 7 juin 2009 à 08:04, par Véronique''

Vous savez, ce qui heurte c'est le sentiment que parmi les magistrats qui sont en charge de l'affaire, aucun ne semble envisager l'idée que le décision d'hospitalisation qui, certes relève de la compétence et du pouvoir du préfet, cette décision, de toutes façons, n'interviendrait pas sans une position clairement exprimée par le ou les magistrats. Je ne sais pas lequel, d'un point de vue de la fonction, du procureur, du JI, du JLD, du président de la chambre d'instruction, a la plus grande latitude pour interpeller le préfet.

1.

Je sais que certains ont du mal à le croire (vu la teneur parfois burlesque des courriers que l'on reçoit au parquet, indifféremment adressés : au Procureur, au Garde des Sceaux, au Président de la République, à Ingrid Bettencourt - j'affirme que c'est vrai - parfois même menaçant - "si vous ne me donnez pas raison j'alerterai le Président de la République et la Presse..." - ), toutefois les magistrats ne sont pas investis de tous les pouvoirs de la création ...

2.

Non il n'y a pas de "copinage" entre les magistrats et les Préfets.

Dès lors, si l'on est informé de ce que l'un de nos "clients " est "fou" et surtout dangereux pour lui-même et/ou pour autrui (critères simplifiés du placement en HO), nous ne pouvons qu'alerter l'administration préfectorale, comme le directeur de la maison d'arrêt, le commissaire de police, le maire, etc.

En revanche, tout médecin - et c'est le cas du médecin ou du psychiatre de la maison d'arrêt - à le pouvoir de faire placer en HO une personne qui répond aux critères ci-avant énoncées, ce qui met automatiquement en branle le dispositif juridico-administratif de l'hospitalisation d'office.

3.

Si l'avocat dans le cadre d'une visite à son client incarcéré (ou détenu ? Personne ne m'a encore expliqué sous quel régime se trouvait cette personne dans l'affaire qui nous occupe et pourtant ce n'est pas faute de le demander, cf. mes posts sous 19. et 63.), se rend compte d'un état délirant et inquiétant, et cela se remarque, il n'est nul besoin de provoquer une audience devant une Cour d'appel (?? toujours pas compris le cadre juridique), mais de faire appel au bon sens et de prévenir la maison d'arrêt !

4.

Pour être complet et illustrer mon propos par un exemple précis, il y a quelques temps nous avons eu le cas d'un individu ayant étranglé sa compagne.

Son casier judiciaire mentionne plusieurs condamnations, et il est en récidive légale. Sans surprise, il est placé en détention provisoire. L'instruction révèle cependant que l'individu souffre de schizophrénie, est sous traitement et suit d'ailleurs correctement son traitement (en d'autres termes, et c'est le plus inquiétant, malgré un traitement adéquat parfaitement suivi, il a étranglé sa compagne !).

Le lendemain de son placement en DP, la maison d'arrêt le fait placer en HO.

Le préfet prend un arrêté confirmant la HO. Il est alors transféré en unité spécialisée (UHSA).

Pendant ce temps, deux experts désignés par le JI l'examinent et le déclare irresponsable de ses actes, par application de l’article 121-1 du Code pénal, qui dispose :

« N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes''.

La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime.'' »

J'ai donc requis le non lieu pour irresponsabilité pénale, le JI a suivi mes réquisitions et pris une ordonnance de non lieu.

Il a ensuite alerté le Préfet (en fait confirmé au Préfet ce qu'il savait antérieurement par ses services) de manière à ce que l'ex mis en examen soit pris en charge par l'administration et que son hospitalisation forcée se poursuive, jusqu'à ..... nul ne le sait.

86. Le dimanche 7 juin 2009 à 10:26 par Fantômette

@ Marcus Tullius Cicero,

Je crois que nous nous posons la même question, à savoir, que s'est-il passé pour qu'il en soit nécessaire d'en arriver là, et où s'est situé exactement le blocage - il y a tout de même bien eu quelque part un blocage, puisque la place de ce détenu était en HP, que tout le monde semblait en convenir, et que pourtant, il n'y était pas.

Mais d'un point de vue d'avocat, la question à laquelle je ne trouve pas de réponse est la suivante : si je me trouve un jour dans la situation de ma consœur, un client en détention provisoire, des rapports psychiatriques inquiétants, l'intime conviction que cet homme est suicidaire et présente un danger sérieux pour lui-même.

Tout le monde le sait, et il est toujours détenu.

Qu'est-ce que je fais ? Quels outils procéduraux sont à ma disposition pour le sortir de détention ? Comment puis-je tout mettre en œuvre pour mettre fin à une incarcération qui, à ce stade, ne peut que contribuer à aggraver le risque d'un passage à l'acte suicidaire ?

Et je parle bien d'outils procéduraux - d'un recours juridictionnel. J'entends bien qu'il faut que les personnes susceptibles de prendre cette décision aient eu connaissance du problème. Je ne pense pas qu'en l'occurrence, ce n'ait pas été le cas. Mais rien ne bouge. Qui dois-je saisir ? Sur quel fondement ?

87. Le dimanche 7 juin 2009 à 10:58 par Véronique

@ Marcus Tullius Cicero

A priori, je pense que la personne dont il est question dans la lettre de Maître Maître Heinich-Luijer était en détention provisoire.

La dernière fois que j'ai demandé sa mise en liberté c'était en avril. J'ai demandé qu'il soit hospitalisé.''

Vous m'avez répondu qu'on n'était pas pressé. Ce n'était pas vos jours qui étaient comptés.

J'ai fait appel de votre refus.

Nous sommes le 7 juin, avril ne me paraît pas si loin.

Au sujet de ce que vous nous expliquez, ce qui pour moi peut faire une différence entre le cas dont vous nous parlez et le cas de la lettre, c'est le fait qu'un directeur d'une maison d'arrêt ait pris une décision d'alerte au préfet. Ce qui ne semble pas avoir été le cas pour le client de Me H-L. D'une certaine façon, pardon de le dire ainsi, vous avez été soulagé - épargné - du poids et de la tension de la prise de décision d'alerte, je veux dire de la toute première initiative, difficile, ingrate, ouverte à la critique et à la contestation, mais qui enclenche l'hospitalisation.

Toujours dans l'a priori, en fonction de ce qu'écrit Me H-L, le directeur de la maison d'arrêt et le médecin n'ayant pas pris, l'initiative de l'alerte, Le JI et le procureur de la lettre n'ont pas eu - encore pardon, mais je ne trouve pas le mot qui conviendrait - votre chance.

D'un point de vue général, une absence d'initiative chez des acteurs pénitentiaires est-elle suffisante pour exonérer des magistrats de prendre une initiative ?

Par ailleurs, il me semble quand même que pour l'avocat, l'interlocuteur naturel, évident, celui qui va de soi est le ou les magistrats. Le travail et le suivi de son dossier - sa défense - se situent entre lui (l'avocat) et les acteurs de l'instruction de son dossier. Ce sont eux, je pense, dans l'esprit de l'avocat, qui sont les plus à même d'intervenir dans le devenir judiciaire de son client, les décideurs naturels.

Enfin, où lisez-vous dans mon post l'idée ou le soupçon de copinage entre magistrats et préfets ?

88. Le dimanche 7 juin 2009 à 11:16 par Véronique

@ Marcus Tullius Cicero

Fantômette explique très bien quand elle évoque des outils procéduraux - d'un recours juridictionnel que pour un avocat, le débat pour lui est avant tout d'ordre judiciaire et juridique.

Là, l'interlocuteur naturel et spontané est le ou les magistrats.

89. Le dimanche 7 juin 2009 à 12:52 par jalmad

@MT Cicero 63 : certes, le courrier de Me Heinich est elliptique, mais enfin, les choses sont claires : instruction préparatoire, détention provisoire. Sinon, pourquoi s'adresser au juge d'instruction et à la chambre de l'instruction ? et, désolée, mais si certes, je ne comprends pas le silence fait sur le JLD (à moins qu'il ait mis en liberté sur demande de mise en liberté, puis référé détention, et infirmation par la chambre ??), Me HL a bien raison quand même de viser le Juge d'instruction aussi : je rappelle qu'il a tout de même le pouvoir de mettre en liberté sous, contrôle judiciaire le cas échéant ; c'est donc le premier à se prononcer sur une demande de mise en liberté.

Toute juge d'instruction que je suis, et sans savoir quelle aurait été ma décision, saisie d'une telle demande de mise en liberté (il est trop facile de refaire l'histoire après coup, et sans les pièces du dossier) je suis moi aussi aux côtés de Me HL et de son indignation. Car enfin, si c'est au Préfet qu'incombe une hospitalisation d'office, c'est bien à nous, Procureur, Juges d'instruction, des Libertés et de la détention, puis chambre de l'instruction, dans de pareilles situations, de nous interroger sur le maintien ou non en détention provisoire d'un mis en examen. L'existence d'une expertise concluant à l'irresponsabilité pénale n'est pas anodine et milite en faveur d'une mise en liberté ; ensuite, au Préfet de prendre ou non ses responsabilités (ce qui nécessite en effet qu'il ait été averti, mais il semble que le Parquet s'en est chargé dans cette affaire).

Pour autant, une telle expertise au dossier doit-elle, ipso facto, conduire à une remise en liberté ? J'aimerais pouvoir répondre oui sans hésiter, mais encore faudrait-il avoir plus d'éléments sur le dossier, et comme je l'ai dit, c'est trop facile de refaire l'histoire après coup.

Véronique se pose, à mon sens, fort justement en 37 la question du "jusqu'au boutisme", c'est à dire la poursuite d'une procédure malgré une telle expertise concluant à l'irresponsabilité pénale. Oui, cela pose question. Mais la réponse en est : d'une part, les experts n'ont pas autorité pour déclarer quelqu'"un irresponsable pénalement, et l'on peut tout à fait imaginer qu'une contre-expertise, vu la gravité des faits, sera ordonnée (ou est déjà au dossier ?), cette contre-expertise pouvant éventuellement conclure à l'inverse, à savoir responsabilité pénale (avec atténuation de la responsabilité) ; surtout, désormais, la LOI nous OBLIGE, depuis la réforme du 9 mars 2004, à continuer d'instruire ! c'est la nouvelle rédaction de l'article 177 du CPP :

Lorsque l'ordonnance de non-lieu est motivée par l'existence de l'une des causes d'irresponsabilité pénale prévue par le premier alinéa de l'article 122-1, les articles 122-2, 122-3, 122-4, 122-5 et 122-7 du code pénal ou par le décès de la personne mise en examen, elle précise s'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.

Donc, même si l'on sait qu'on va aller vers un non-lieu pour cause d'irresponsabilité pénale, il faut continuer à instruire, pour pouvoir, dans notre ordonnance de non-lieu, préciser s'il existe des charges suffisantes contre l'irresponsable. Certes, dans ces cas là, la mise en liberté est possible, et paraît même évidente.

Sauf que. Sauf que vous ne savez pas si une HO va prendre le relai (c'est la compétence du Préfet) dès la mise en liberté et si oui (vous avez alerté le Préfet, et il semble bien que vous avez eu son écoute), combien de temps elle va durer, donc vous pouvez vous poser la question des garanties de représentation aux actes de la suite de la procédure (avec éventuellement le droit encore pour les parties civiles de demander une nouvelle expertise psychiatrique), et, de façon particulièrement saillante, celle de la réitération d'une infraction souvent gravissime. Et vous savez qu'on ne vous épargnera rien : vous vous rappelez du cas de Bonnal dit le Chinois, remis en liberté dans le cadre d'une instruction d'une affaire qui s'est achevée par un acquittement (ce qui démontre que cette décision de remise en liberté n'était pas "irresponsable", bien au contraire), mais qui a commis un nouveau crime, ou bien de ce JAP qui devait, selon N Sarkosy "payer" pour la libération conditionnelle d'un homme ayant commis un crime quelques temps après sa sortie. Les fameuses "injonctions contradictoire" : mets en liberté le présumé innocent (ou, dans notre cas, le "présumé irresponsable pénal") d'un côté, et de l'autre "tu es irresponsable d'avoir libéré cet individu que tu devais nécessairement savoir dangereux".

Voilà, tout ce que, moi, j'aurais en tête au moment de statuer sur la demande de mise en liberté de Me HL, et, franchement, je ne sais pas ce que j'aurais fait, même si, avec le recul, je me dis que c'est notre rôle de nous abstraire de ces insidieuses pressions, de la politique du principe de précaution qui ne doit pas intervenir en matière de détention provisoire, et, surtout, après l'avoir alerté et si l'on ne voit toujours rien venir de sa part, mettre le Préfet face à ses responsabilités. Car, pour avoir été également Juge des Tutelles, je sais que certains Préfets, s'ils peuvent se défosser sur un tiers pour éviter l'HO (la prison, par exemple ! ou alors le recours à la procédure d'hospitalisation sur demande d'un tiers), ne se privent pas.

90. Le dimanche 7 juin 2009 à 13:47 par Véronique

Je veux juste ajouter que, selon la formule consacrée - hélas -, pour des késkidis, un commentaire comme par exemple celui de Jalmad ou celui de MTC, c'est ce qui fait le grand intérêt de ce blog.

Je comprends mieux aussi grâce aux explications de Jalmad et de MTC la réaction de colère de Gascogne. Mais ce qu'il faut bien comprendre c'est que le késkidi ne peut pas imaginer toute la(les) complexité(s) du chemin que peut prendre une décision judiciaire.

Et puis, pour finir, ce qui m'a beaucoup remuée dans la lettre de Me H-L, c'est cela:

A la Chambre de l'instruction, je leur ai dit que je venais plaider pour que ce ne soit pas de ma faute...

Cette phrase a emporté mon adhésion, car de suite elle s'est confondue dans mon esprit avec une phrase de Bernard Frank que je trouve très juste et que je pense avoir déjà évoquée:

On écrit parce que quelque chose ne va pas. Pour dire qu'on n'est pas coupable.

Je pense que Gascogne, c'est également cela, en fait, qu'il voulait nous dire.

91. Le dimanche 7 juin 2009 à 14:00 par Arthur

Je ne sais rien des rotagonistes de cette affaire excepte ce que j'ai pu lire, la lettre et ce blog Il apparait neanmoins que les differents interlocuteurs de l'avocate ( si j'ai bien suivi c'est une avocate ) aient ete au mieux sourds et aveugles, au pire irresponsables ... Une question, est-ce souvent le cas ou avons-nous la le pire exemple d'entetement face a l'entetement ( justifie malheureusement ) d'une avocate desemparee face a une situation gravissime de ce que nous pouvons trouver dans notre justice ? Heureusement les suicides en rison de personnes ayant des maladies mentales ne sont pas legions, mais le risque existant n'est-il jamais pris en compte ?

92. Le dimanche 7 juin 2009 à 14:01 par annkikine

Merci beaucoup à Jalmad en 89 pour ce dernier message très éclairant sur l'extrême difficulté de la prise de décision judiciaire dans ce type de dossier (et tant d'autres...)

On passe notre temps à tenter de l'expliquer, pas pour passer pour des plaintifs permanents, mais parce que c'est tout simplement LA réalité.

Croyez bien que si les choses étaient si simples et que la meilleure décision à prendre, dans l'intérêt de TOUTES LES PARTIES, apparaissait de manière si lumineuse, telle la vierge Marie à Bernadette (pardon d'avance à ceux qui prendront cela pour de l'humour mal placé), le magistrat la prendrait, cette décision.

Nous n'avons aucun intérêt à prendre des décisions sans queue ni tête, sans raison ni justification, et encore moins à emmerder le monde pour le plaisir.

Peser les conséquences, dans leur ensemble, de la décision à prendre, c'est toute la difficulté de ce métier.

Un métier que je persiste à aimer passionnément, malgré ou peut être à cause de ces difficultés, et que je fais du mieux que je peux, tous les jours de la semaine, et souvent WE compris.

Un métier dont je suis lasse qu'il déclenche des haines aussi basses, qui vont parfois jusqu'à des appels au meurtre abominables et glaçants (cela dit en passant pour Fabrice, dont j'espère qu'il aura lui aussi un jour le droit de reprendre une vie normale sans garder ce costume grimaçant d'ennemi public numéro un), contre des gens qui font, pratiquement tous, ce métier extrêmement exigeant du mieux qu'ils peuvent.

Et dont aucun des loups hurlants ne peut prétendre qu'il aurait fait mieux ou différemment s'il avait dû traiter de pareils dossiers.

Voilà c'est dit. Et détrompez-vous, je ne suis pas une espèce de machine grise qui bouffe des pages de code à longueur de journée en jetant à peine un coup d'oeil dédaigneux à mes semblables.

C'est même tout l'inverse...

93. Le dimanche 7 juin 2009 à 14:09 par annkikine

@ Arthur en 91 :

Précisément, vous ne savez RIEN de ce dossier à part ce qu'UNE SEULE partie en a dit.

Et malgré cela, vous employez des termes "sourds, aveugles, irresponsables, entêtement, gravissime..."

C'est cela qui m'horripile à force.

Moins j'en connais sur un sujet, et plus je me permets d'avoir une opinion tranchée et tranchante sur les personnes en cause.

Mais de quel droit à la fin ?

Celui qui sait qu'il ne sait pas en sait décidément beaucoup plus que celui qui croit savoir...

94. Le dimanche 7 juin 2009 à 15:10 par Marcus Tullius Cicero

86. Le dimanche 7 juin 2009 à 10:26, par Fantômette

Qu'est-ce que je fais ? Quels outils procéduraux sont à ma disposition pour le sortir de détention ? Comment puis-je tout mettre en œuvre pour mettre fin à une incarcération qui, à ce stade, ne peut que contribuer à aggraver le risque d'un passage à l'acte suicidaire ?

1.

Si votre client est incarcéré, c'est le JAP qui provoquera une expertise (il est fort probable qu'il en prendra l'initiative, si vous lui fournissez des éléments précis).

En allant discuter avec le magistrat du parquet compétent pour l'exécution des peines, on arrive souvent au même résultat (le parquet est un magistrat ce n'est pas l'ennemi. Je vous assure que ma porte est ouverte à tout les avocats de mon ressort et d'ailleurs).

2.

Si votre client est en DP, le JI, le JLD ou le magistrat du parquet peuvent alerter l'autorité préfectorale. Là aussi il ne faut pas hésiter à parler, expliquer ce qui se passe (convaincre quoi, c'est votre métier et en règle générale vous le faites bien), un courrier motivé permet généralement de s'assurer que ce n'est pas une voie de recours déguisée ou un stratagème pour faire sortir quelqu'un de manière déguisée (exemple Pierre BODEIN, qui a joué les fous pour pouvoir s'échapper de l'hôpital psychiatrique, plus facilement que d'une maison d'arrêt, et commettre 4 nouveaux crimes !).

Voila j'ai été au plus simple, sachant que vous avez également la faculté de vous adresser directement à l'autorité administrative.

95. Le dimanche 7 juin 2009 à 15:37 par Marcus Tullius Cicero

89. Le dimanche 7 juin 2009 à 12:52, par jalmad

@MT Cicero 63 : certes, le courrier de Me Heinich est elliptique, mais enfin, les choses sont claires : instruction préparatoire, détention provisoire. Sinon, pourquoi s'adresser au juge d'instruction et à la chambre de l'instruction ? et, désolée, mais si certes, je ne comprends pas le silence fait sur le JLD (à moins qu'il ait mis en liberté sur demande de mise en liberté, puis référé détention, et infirmation par la chambre ??), Me HL a bien raison quand même de viser le Juge d'instruction aussi : je rappelle qu'il a tout de même le pouvoir de mettre en liberté sous, contrôle judiciaire le cas échéant ; c'est donc le premier à se prononcer sur une demande de mise en liberté.

J'ajoute à l'ensemble de ce commentaire pertinent, le fait qu'il est extrêmement délicat, notamment en raison du contexte actuel, d'imaginer remettre en liberté un schizophrène (ayant tué) en liberté, sauf à aimer les faits divers ...

96. Le dimanche 7 juin 2009 à 15:57 par La plèbe

@ Gascogne

Je confirme l'origine pour les commentaires.

97. Le dimanche 7 juin 2009 à 16:12 par jalmad

@MT Cicero 94 : oui, c'était le sens de la suite de mon post. Mais, je pense que si on a alerté le Préfet de l'imminence d'une probable décision de mise en liberté, des faits pour lesquels la personne est mise en examen, et des conclusions de l'expertise psychiatrique sur l'irresponsabilité pénale par courrier versé au dossier, en faisant habilement comprendre au Préfet qu'il aurait également à rendre des comptes en cas de "fait divers", je pense que l'HO sera prise. C'était ce que j'entendais par "mettre le Préfet face à ses responsabilités". Mais encore une fois, j'ai bien conscience qu'il est facile aujourd'hui de donner ce type de leçons, et je me garderais bien d'avoir un avis tranché en l'absence de connaissance plus précise du dossier. Et, juste autre chose : pas un "schizophrène (ayant tué)" : un "schizophrène présumé innocent". En outre, dans son courrier, Me Heinich évoque le fait que les experts indiquent que son client, du fait de sa pathologie, pouvait avoir reconnu des faits non commis. Maintenant, là encore, peut-être y-a-t-il d'autres éléments au dossier sur le fond.....

98. Le dimanche 7 juin 2009 à 16:17 par Ferdydurke

@ Gascogne

L'opprobre n'était pas générale. Comme de coutume, elle a surgi de sa tanière en premier et ses hurlements ont couvert toute autre parole. Désormais que Troll Detector lui a coupé le sifflet, nous donnerez-vous votre avis sur le fond, à l'image de vos confrères ?

Sur le fond, hein... ;-)

99. Le dimanche 7 juin 2009 à 16:39 par GRANTUMU

Ca fait deux jours que j'essaye de poster sur ce thème. Je n'y arrive pas. 15 ans qu'une poignée de Gascogne corrompt ma vie professionnelle; que je n'arrive pas à laisser dans mon bureau quand je le quitte; qui me fait me comporter comme un cochon avec mes proches.

Je vais virer votre site de mes favoris et me contenter de mon quotidien judiciaire pour déprimer.

Je continuerai de le recommander aux mékeskidis.

100. Le dimanche 7 juin 2009 à 18:19 par DMonodBroca

Nous sommes un pays démocratique. La loi de la République est élaborée par nos représentants. La justice est rendue au nom de peuple français...

Aussi, quand un détenu se suicide dans une prison de la République, je me sens, un peu, responsable.

Et je me dis que, si nous avons aboli symboliquement la peine de mort en l'enlevant du code pénal, nous ne l'avons en réalité par abolie dans les faits. Et que nous aurions bien tort de nous en laver les mains.

101. Le dimanche 7 juin 2009 à 20:05 par Fantômette

@ Marcus Tullius Cicero,

Bien sûr, le JAP si nous sommes dans le cas d'un détenu condamné, mais ici, je fais l'hypothèse qu'il s'agit d'une détention provisoire - l'affaire en était encore visiblement en cours d'instruction.

Merci de vos indications. J'y ajouterai également l'administration pénitentiaire, un peu prioritairement, si j'ai des raisons de craindre un passage à l'acte suicidaire imminent.

Mais il ne s'agit pas là de recours juridictionnels.

Il me semble très plausible en l'occurrence que l'ensemble de ces intervenants, y compris d'ailleurs la Préfecture, aient été informés (je suppose que ça aura été le réflexe du juge d'instruction que de leur écrire, et l'explication de la référence à ce courrier).

Faisons l'hypothèse que cela a été fait - et rien ne bouge.

Que faire ?

Quelle procédure juridictionnelle peut être utilisée ?

Je n'ai pas tellement envie d'entendre qu'il n'y a rien à faire dans ce cas-là, qu'à s'en remettre à la bonne volonté de l'administration hospitalière psychiatrique. Qu'est-ce que je fais si elle traine ? Si je n'ai aucune nouvelle ?

Mon interlocuteur naturel, celui qui décide et qui impose sa décision, c'est l'autorité judiciaire.

Qui plus est, il s'agit d'un mis en examen, et il s'agit de sa liberté individuelle. L'autorité judiciaire est la gardienne des libertés individuelles. Comment pourrait-elle se satisfaire de n'être pas compétente pour prendre une décision - et je parle bien d'une décision juridictionnelle ?

102. Le dimanche 7 juin 2009 à 20:13 par Fantômette

@ annkikine,

Vous avez raison de rappeler qu'un avocat est partial (et je suis certaine que vous ne nous en faites d'ailleurs aucun grief). Mais je voudrais juste attirer votre attention sur le fait qu'on peut être partial et avoir raison. L'impartialité n'est pas un gage de justesse, pas plus que la partialité d'une prise de position n'en fausse nécessairement le bien fondé.

103. Le dimanche 7 juin 2009 à 20:34 par mad

@ Fantômette, 101, Certes, mais au vu de certains commentaires (plus tellement ici depuis l'averse d'enclumes, mais quand même), il était bon de mentionner qu'elle n'est pas parôle d'évangile ...

104. Le dimanche 7 juin 2009 à 21:14 par Marcus Tullius Cicero

96. Le dimanche 7 juin 2009 à 16:12, par jalmad

Et, juste autre chose : pas un "schizophrène (ayant tué)" : un "schizophrène présumé innocent"

Je ne comprends pas la remarque.

Quand je parle d'un schizophrène qui a tué, c'est parce qu'il a commis l'acte. Il bénéficie certes de toute une série de droits : droit de la défense, présomption d'innocence,..., mais cette présomption d'innocence est une présomption simple qui s'efface devant la preuve contraire.

Or, quand l'individu est pris sur le fait (ce qui était le cas de mon schizophrène) il n'est plus présumé innocent. Ceci ne veut pas dire qu'il est responsable ou jugé. Je suis bien d'accord pour dire qu'il faudra ensuite éventuellement une déclaration de culpabilité (ou d'irresponsabilité) par un juge, mais parler dans ce cas de présomption d'innocence ne me semble pas la formule la plus adéquate.

105. Le dimanche 7 juin 2009 à 21:19 par Marcus Tullius Cicero

100. Le dimanche 7 juin 2009 à 20:05, par Fantômette

Qui plus est, il s'agit d'un mis en examen, et il s'agit de sa liberté individuelle. L'autorité judiciaire est la gardienne des libertés individuelles. Comment pourrait-elle se satisfaire de n'être pas compétente pour prendre une décision - et je parle bien d'une décision juridictionnelle ?

Je n'ai évidement pas qualité pour changer la loi. Si vous souhaitez un recours juridictionnel, à mon sens ce sera devant le TA (c'est souvent une voie ignorée des avocats, sans que je sache pourquoi).

Mais, je pense sincèrement que si vous exposez le problème correctement, que vous ne cherchez pas à instrumentaliser le magistrat du parquet ou le JI, ils feront le nécessaire pour que l'autorité préfectorale bouge.

106. Le dimanche 7 juin 2009 à 21:39 par jalmad

@MT Cicero 103 : pardon, je pensais que vous parliez du client de Me HL, et ma remarque était en lien avec le fait qu'elle souligne dans sa lettre que doute sur sa culpabilité il y avait. Mais apparemment vous faisiez référence à un autre cas.

107. Le lundi 8 juin 2009 à 10:16 par Guile

En lisant tous les commentaires sous ce post, j'ai un sentiment de malaise. J'ai du mal à comprendre pourquoi, de manière aussi vive, une forme de colère impressionnante est sortie. D'un coup, on dirait que le juge est devenu le nouveau danger pour les autres, le nouvel ennemi du bien. D'autres, tout en nuançant le propos, ont quand même toujours, en arrière plan, ce discours curieux à l'égard du magistrat.

Le juge français serait arrogant, "un pur produit de l'ENM", déshumanisé etc... Ces discours sont, à mon avis, dangereux. Mais ils sont fondés sur des faits précis, et à chaque fois, parce que c'est comme ça que la France fonctionne, un événement = un bashing en règle contre la profession concernée par l'affaire.

Avant Outreau, les boulettes et errements judiciaires n'intéressaient aucun média, alors qu'aujourd'hui, la moindre ordonnance incomprise ou mal rédigée est épluchée et critiquée.

Je ne sais pas si c'est positif, mais ce que je crois, c'est que tous ces discours, d'amalgame contre les juges, sont finalement les mêmes que ceux envers les fonctionnaires, ou ceux envers d'autres professions, jugées par une partie des français, comme des "privilégiés".

j'ai le sentiment que le culte de l'égalité fait perdre la raison à beaucoup de mes concitoyens. De plus, ce manque de cohésion nationale est entretenu par le gouvernement. Cela a commencé pendant la campagne présidentielle, et cela continue aujourd'hui. La jalousie devient décomplexée et se nourrit des fautes des uns et des autres.

108. Le lundi 8 juin 2009 à 10:27 par Minghella

Commençons par rappeler quelques éléments : effectivement, on suppose (cf Fantômette) que le préfet a été saisi. Généralement, la prise de décision du préfet est rapide. Ce n'est naturellement pas lui qui la prend, mais un attaché, tout ce qu'il y a de plus courageux, ce qui explique que c'est généralement pris dans les 2 heures. Là, donc, c'est flou.

La question, ce n'est pas une défaillance de la justice, de ses serviteurs ou de je ne sais qui. Je l'ai dit à plusieurs reprises, et ça m'a fatigué, d'ailleurs, qu'à ce niveau là, la faiblesse de la défense des magistrats s'est illustrée pour ce qu'elle est, lors des Dati's shows : assez faible. A la "vicitimisation" généralisée, les magistrats ont plaidé la victimisation de leurs fonctions. Dommage. Je le redis encore, les magistrats sont dans une position amusante : celle d'être les gardiens d'un fonctionnement vertical dans une société qui ne l'est plus. Qu'ils ne le comprennent pas, ce n'est pas grave -je ne demande pas à un magistrat d'être intelligent, je lui demande simplement d'être magistrat, ce qui, tristement, je constate à les lire ici, ne leur suffit pas-, mais lorsque le retour de la musique qu'ils portent se fait méchante, ils s'étonnent. Là encore, c'est leur affaire. Je rappelle encore, la société verticale qui leur est chère, personnellement, je ne la défends pas -au contraire-, mais je regrette que des gens si brillants, qui ont passé un concours si prestigieux (ih ih ih... bref...) ne se rendent pas compte que le "au nom du peuple français" se fera toujours plus horizontal, ce qui me plait beaucoup personnellement, pas de mouchoir pour pleurer les fonctions fictives de l'Autorité, avec le Père, le Magistrat, l'Instituteur et nianiania.

... un brin de décalage ne nuira pas.

40 000 lits dans les hopitaux psychiatriques de supprimés en 20 ans.

Aboutissent sur le bureau de nos chers amis de la magistrature ce qui n'aurait jamais dû y être. Précisément parce que ce n'est pas leur travail.

Cette avocate, dont je peux parfaitement comprendre la colère, demande aux magistrats de faire état de leur subjectivité, en clair elle les met au pied du mur pour qu'ils répondent de leur position. Non celle de magistrat mais de sujet.

Or, un magistrat n'est pas sujet de sa décision. Et, pour ce qui me concerne encore, et dans la logique simple aussi, il n'a pas à l'être.

Quand ils jouent à l'être, nous voyons les dégâts et le pathos, y compris ici. Le dégrés 0 de l'élaboration intellectuelle. Ils jouent, et c'est triste. L'indigence de leur métaphysique prend, alors, effectivement, des allures pathétiques. On parle rapidement des stylos à bille qui manquent en juridiction, des moyens qui manquent aussi, etc... Non parce que l'essence du magistrat est bête, c'est nul de dire ça, mais plutôt en raison de ceci que rendre les magistrats bêtes (au sens de la bêtise classique), on finit à ce qu'ils répondent sur ce plan. C'est dommage, mais n'est pas sujet qui veut même quand il a passé un gros concours.

Ce métier de s'occuper des fous, figurez vous, justement, ce n'est pas celui des magistrats. Et ce n'est pas non plus le métier des experts qui les serve. Un expert expertise, il ne fait pas de soin clinique (même s'il en fait par ailleurs, mais entendons nous bien, la position de l'expert n'est pas une position de soignant).

Justement, un mot : les magistrats et les experts. Comme les magistrats sont comme tout le monde, qu'il leur faut au moins les bretelles et les ceintures, on s'amuse aux expertises.

Qu'en résulte-t-il ? Du n'importe quoi, encore.

Pourquoi ? Parce que rencontrer un fou dans le cadre d'une demande faite par l'autorité judiciaire -qui, par ailleurs opère à un sérieux tri chez les experts, ce serait amusant d'en raconter un peu plus- fait que tout le monde se rencontre dans un esprit de connivence.

Les experts jugent, et les magistrats font de la métaphysique.

Bravo, mais les fous relèvent du soin. Donc, ni de l'expert ni du magistrat.

Cordialement,

Minghella

109. Le lundi 8 juin 2009 à 12:12 par Véronique

@ Guile

Une lettre est publiée par un avocat. Un magistrat y répond. Des commentateurs réagissent, certains questionnent, d'autres injurient, d'autres, enfin, expliquent.

Aux commentaires écrits pour accuser, des réponses sont apportées. Ceux qui postent les messages faits pour mordre et pour blesser en multipliant les pseudos sont explosés.

Vous ne voyez là que la traduction d'une prétendue hostilité généralisée contre les magistrats, révélatrice d'une fronde anti privilégiés.

Il y a une chose que je souhaiterais que vous envisagiez. Un commentaire, pour peu que celui qui l'écrit soit intéressé par le sujet du billet, demande du temps, de la concentration et du soin. Pour celui qui commente, il y a aussi l'idée d'essayer d'être au plus près de ce que l'honnêteté intellectuelle lui commande.

Perso je trouve plutôt sain qu'un espace d'échanges comme celui-ci permette à des magistrats, puisqu'il s'agit d'eux dans ce billet, et à des justiciables de se parler.

Et très franchement, dans le domaine de la justice et dans bien d'autres domaines, même si l'émotion et l'affectivité s'expriment très souvent avant la raison, quand quelqu'un explique, éclaire, guide par le haut, l'agressivité et le trop émotif disparaîssent au profit de l'effort de compréhension.

110. Le lundi 8 juin 2009 à 12:23 par Sub lege libertas

Encore un auto-commentaire (cf. commentaire n°78) pour vous dire à tous depuis le commentaire 79 que je suis heureux de retrouver cette qualité d'échange...

J'avoue par la même que j'ai la flemme de répondre individuellement à chacun, mais je vois qu'entre vous avec courtoisie vous avez su débattre. Merci

J'ai failli fermer les commentaires samedi soir. Je ne regrette pas de m'être abstenu. Message plus personnel à mon cher Gascogne (commentaire n°80) : ce n'est pas la bétise crasse de la foule qui doit nous abattre. Maintenant cher Gascogne, je te concède que l'air du temps qui corrompt tant l'esprit de la loi et le souhait de caporalisation des parquets pour ne pas dire de la magistrature me font me poser des questions du même ordre.

Allons, résistons encore un peu, le sommeil de la raison ne peut être perpétuel...

111. Le lundi 8 juin 2009 à 12:43 par Pax Romana

@ mademoiselle dudue (7) et Philonous (48) :

Désolé de vous décevoir, mais je ne suis pas magistrat, et ne me sens donc pas attaqué.

En revanche, je suis logicien, m'efforce d'être raisonnable et poli, et n'aime pas les logorrhées irrationnelles et outrancières comme cette lettre commise par un avocat qui me semble avoir perdu la dignité que, me semble-t-il, elle avait solennellement juré d'avoir en l'exercice de ces fonctions. À mon sens, une telle lettre mériterait des poursuites disciplinaires.

112. Le lundi 8 juin 2009 à 14:26 par Pax Romana

@ Fantômette (101) :

« Mon interlocuteur naturel, celui qui décide et qui impose sa décision, c'est l'autorité judiciaire. »

Là, voyez, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Votre interlocuteur naturel, dans le genre de situation que vous décrivez, me semble être le médecin du centre de détention.

Sub lege libertas:
çà se discute, en pure logique (domaine que vous connaissez bien). Je m'explique :
l'avocat d'un mis en examen n'a aps un mandat de réprésentation générale de la personne. Il a, comme on dit, un mandat ad litem. C'est à dire, qu'en accord avec son client, il peut diligenter tout acte de procédure tout recours prévu dans le cadre de l'instance en cours.
Or dans le cas qui nous occupe, l'avocat apprend procéduralement (notification de l'expertise du collège d'experts) que son client est irresponsable pénalement. En bonne logique, cette appréciation ne porte que pour le moment où les faits sont commis. Une telle expertise ne signifie pas nécéessairement que le mis en examen est dangereux pour lui même ou pour autrui à l'heure où l'avocat apprend le résultat de l'expertise. Deux problèmes doivent alors être traités :

- 1) L'irresponsabilité pénal doit conduire à la cloture du dossier, mais comme l'a rappelé plus haut un intervenant précis (jalmad commentaire n°89) la loi désormais oblige à instruire totalement l'affaire, même si très rapidement on sait que l'auteur présumé, pour faire court, est fou ! Donc notre avocat de fou est, d'une part, dans l'intérêt de son client obligé de demander au juge d'instruction la cloture de l'information qui entraînera de jure la fin du mandat de dépot de son client s'il est détenu ; mais il sait, d'autre part, que le juge pourra la refuser pour des raisons légales de poursuites d'instruction pour établir totalement les faits. Dès lors, et c'est totalement inapproprié socialement mais c'est dans l'intérêt judiciaire du mis en examen qu'assiste l'avocat, il ne reste que la demande de mise en liberté pour rappeler que quand on est fou, on ne peut être privé de sa liberté pour des raisons pénales : on peut certes relever le cas échéant de l'enferment psychiatrique donc du soin contraint mais ça n'a rien à voir avec la prison. Or comme l'a très justement relevé Marcus Tullius Cicero cette demande de mise en liberté d'une part peut être rejetée pour des motifs de poursuite d'enquête, car même -surtout ?- un fou est susceptible d'entraver l'enquête, d'autre part la remise en liberté d'un gars que l'on soupçonne non sans quelques raison d'avoir commis un crime ne s'ordonne pas simplement pour respecter "un pur esprit de la loi" (ce que j'aimerais dans l'absolu) s'il n'y pas de garanties sociales que le fou ne va pas être contrôlé dans sa folie (les humanistes purs diraient être soigné au besoin sous la contrainte).

-2) A partir de là se pose la question de l'hospitalisation d'office ou non du "fou irresponsable" (je fais court). Et là cher logicien, l'avocat n'est plus dans le champ de son mandat ad litem. Mieux, il me semble même qu'il est à l'encontre de l'intérêt de son client, vu non pas socialement ce n'est pas la mission de l'avocat, mais personnellement. Si l'on parle de soins sous contrainte, c'est bien qu'on suppose que la volonté du "fou" n'y adhère pas. Or l'avocat du fou pourra très légitimement être missionné par son client à ce moment là (c'est à dire quand on parle de la décision préfectorale d'internement) pour exercer les voies de recours légales contre cette décisons. EN BONNE LOGIQUE, vous ne pourvez pas exiger de l'avocat qu'il demande au préfet de statuer sur l'hospitalisation d'office de son client, alors qu'il devrait être amené à la contester.
Mais me dites-vous et si le client est d'accord ? Dans ce cas ce n'est plus une hospitalisation sous contrainte mais une hospitatisation libre. Certes la difficulté semble disparaître, mais je vous signale qu'il suffit que le "fou" revienne sur sa volonté de soins et on se retrouve dans le même dilemne...

Tout cela n'interdit pas l'avocat de dialoguer avec l'administration pénitentiaire ou le médecin psychiatre de l'établissement (et ils le font, je peux en témoigner), mais cette correspondance n'a aucune efficatité ni légale ni procédurale. En outre, il est vraisemblable - toujours dans la logique de son mandat- que l'avocat ne soit missionné par son client que pour se plaindre soit de son enfermement, soit de ses conditions, soit de la nature des soins qu'il reçoit ou non. Que peut faire de plus un avocat légalement ?

113. Le lundi 8 juin 2009 à 14:58 par Pierre DEGOUL

Eolas avait évoqué cette lettre que l'on ouvre un jour, distraitement, mécaniquement, et qui vous annonce le suicide d'un client. Cela m'est arrivé. Mais c'était un appel téléphonique du père. Au delà des considérations juridiques presque obsènes ( qui fallait-il alerter? qui était responsable? ), l'avocat maudit le juge bien sur; il se maudit aussi de ne pas avoir pu éviter ce qu'il pressentait, de ne pas s'être précipité à la maison d'arrêt le lendemain du mandat de dépôt... Il se maudit aussi de vivre dans un pays qui accepte des conditions de détention pour des Hommmes qui vaudrait à tout propriétaire d'un animal familier de comparaitre en correctionnel pour des faits de mauvais traitements. Il maudit ces juges qui vous glissent pour se débarasser de vous, avec un naturel désarmant, dans les couloirs de l'instruction, entre deux portes, que cela ne fait "que 4 mois que Monsieur MACHIN est en détention". Il maudit et il est sans doute excessif; pas assez en fait. Je t'embrasse Laure.

114. Le lundi 8 juin 2009 à 14:59 par Guile

@ Véronique: Mon topo sur la "colère" est lié aux commentaires les plus virulents, pas tous les commentaires. Meme si je parlais de mon ressenti après avoir tout lu.

Mais je suis d'accord avec vous, c'est sans doute l'émotion qui a guidé certains propos outranciers.

Mais selon vous, il n'y pas "d'ambiance" contre cette catégorie de français??? (je parle des magistrats)

Je pense quand même qu'un petit quelque chose, dans le ton, et dans le fond, est "anti juge" (pour faire simple), dans le discours ambiant.

115. Le lundi 8 juin 2009 à 15:34 par Saucisse Héros

Ce petit club d'enrobés est décidément pathétique.

Sub lege libertas:
Enrobé ? bah plus c'est gros plus ça passe.. et puis au moins on ne se dérobe pas antithétiquement !

Je conteste que Mademoiselle Dudue ait été injurieuse. C'est d'autant plus facile à dire que plus personne ne peut la lire. En fait, elle fut dérangeante, dérangeante pour votre pseudo-rationalité, qui filtre toutes les émotions, pour mieux pouvoir s'auto-absoudre de ses manques.

Sub lege libertas:
L'absolution relève du Très Haut, et vous n'êtes pas confesseur par manque de miséricorde...
La lecture de Pascal vous en apprendrait plus sur les liens du coeur et de la raison.

Vous aimez bien les bons vieux clichés d'antan, si confortables. Naguère en effet c'était l"esclave, puis le nègre, puis la femme qu'on écartait du droit à la parole. Parce que, voyez vous, ces gens là sont les victimes de leurs émotions, ils ne savent pas se tenir.

Sub lege libertas:
Imaginez en plus que le magistrat soit une femme, noire, esclave de la légalité... mais je ne vous sens pas d'affinité avec Sammy Davis Junior ou Coluche.

Et il convient, c'est l'essence même de la magistrature, de reconstruire rationnellement le monde, à travers un beau dossier de papier. Ce n'est pas moi qui le dit, et le déplore, c'est M.Bliger himself, encore tout récemment. Sinon, si on perd la maitrise du verbe, le monde (notre monde, hein ?, toutes ces références qui nous soutiennent, et que nous défendons becs et ongles), s'écroulera. Et nous avec.

Sub lege libertas:
Reconstruire rationnellement le monde à travers un beau dossier de papier ? Pouah : vive le juge arbitraire abdiquant la raison, oracle de couloir sans délibération, donc.

Ici le justiciable standard doit apprendre à tenir sa tasse de thé, le petit doigt levé, sinon il aura droit à l'étiquette "troll" et à l'enclume. On ne va pas se laisser déborder par la vraie vie, que diantre. Donc dehors, le troll, c'est à dire celui qui nous dérange.

Sub lege libertas:
Sur l'enclume, cent fois tu forgeras le fer de tes arguments... alors tu pourras porter l'estocade !

Il n'y en a qu'un qui peut troller à sa guise ici, et qui ne s'en prive guère, c'est celui dont le point G cogne. Mais celui là, on l'aime, on lui pardonne ses innombrables provocations, on lui donne du Cher Kicogne, c'est le Troll de la Famille.

Sub lege libertas:
Aïe on s'essaye à la figure de style, sans style mais dans ta figure ! Pif Paf. Si sot héraut de sa cause, saucisse héros nous scie de s'élever si haut parmi les zéros... Youpi, je suis poête !

Et puis vous vous croyez si importants. Alors que vous connaitrez, à peu près tous, le destin du héros de "La Fanfarlo" de Beaudelaire. Chouchou 1er vous donnera la croix, et vous engraisserez. Mais toujours avec les bonnes manières, en "logicien" (sic), et "avec des arguments" 1. 2. 3. 4.

Sub lege libertas:
Et pour finir la référence cuistre à la première nouvelle de Charles BAUDELAIRE, dont on ne sait même pas orthographier le nom ! Mais c'est plus BEAU !
Plus d’une personne se demandera sans doute pourquoi nous faisons une place dans notre galerie à un esprit que nous jugeons nous-même si incomplet. C’est non-seulement parce que cet esprit si lourd, si criard, si incomplet qu’il soit, a parfois envoyé vers le ciel une note éclatante et juste, mais aussi parce que dans l’histoire de notre siècle il a joué un rôle non sans importance.. Pédantisme baudelairien contre cuistrerie : il n'y a pas une once de Petrus Borel dans votre note

Paix à vos cendres.

116. Le lundi 8 juin 2009 à 15:38 par parquezaco

A mon collègue Sub lege libertas,

bonjour,

je ne sais pas comment vous faites pour accepter avec autant d'aisance qu'un avocat se serve d'une tribune publique pour contester une décision de justice ou, plutôt, régler ses comptes avec l'institution.

Sub lege libertas:
Avec autant d'aisance, cher collègue ? Allons, revenons y encore un peu : j'ai d'emblée dit l'absence d'aménité (dont je rappelle la définition de Littré) dans la lettre ouverte de Maître Heinich. Je n'ai donc trouvé ni douceur, ni grâce, ni politesse dans son propos. Et delà est né mon malaise et non mon aisance. Pourquoi ? Car, ayant croisé l'intéressée (je l'indique également, et c'est pourquoi plus qu'un autre magistrat je me suis senti concerné par ce courrier certes ouvert), j'ai été saisi par l'écart entre ce que j'avais perçu de la personnalité de cette avocate - et d'autres qui la connaissent plus personnellement ont ici conforté mon opinion sur ses qualités - et la violence de son propos. J'ai d'ailleurs aussi relevé cette violence (paragraphe 3)

Bien, et alors ? Alors au lieu d'en rester à cette claque reçue à la première lecture, j'ai voulu plutôt que de réagir épidermiquement par un concert d'indignation au nom de la défense de la magistrature, j'ai voulu essayer de comprendre la racine de cette violence d'expression, chez quelqu'un qu'a priori je ne rangeais pas dans la catégorie des gueulards de prétoire (que je ne déteste pas forcément pour achever de vous embarasser), ni dans celle des dénonciateurs monomanes d'une magistrature toujours vicieuse perverse ou sournoise (salut à R* D*) à leurs yeux (qui ne me font ni chaud ni froid, me considérant comme un pervers textuel, obsédé par le vice légal et sournoisement soumis à son commandement).
Qu'ai-je compris ? Rien peut-être, mais -et je l'ai dit pour calmer les éructations de certains (voir notamment avant le commentaire 78)- mon avis ne vaut pas plus que celui de tout autre (dont le votre), de tout ceux qui viennent argumenter. Voilà pourquoi je me suis demandé, et j'ai développé dans ce billet en toute sincérité (naïveté, si vous préférez), ce qui me permettait de rejoindre en confraternité de robe Maître Heinich. Cette singularité de regard, non dénuée d'un esthétisme provocateur (j'assume), en ce que j'abolis ainsi la violence du propos de Maître Heinich pour lui trouver un fond riche au delà de sa forme, visait à conduire à un autre débat -qui finalement à lieu essentiellement depuis le commentaire 79- que celui de la défense de l'institution judiciaire ou de la discipline des avocats...

Rassurez vous, si l'on ne peut compter sur moi pour l'union corporatiste dans la dénonciation, l'un de nos syndicat s'en est chargé, ayant adressé au garde des Sceaux un communiqué demandant à mots couverts des poursuites disciplinaires contre l'auteur de cette lettre ouverte. Je n'ai pas besoin de me substituer au Garde des Sceaux pour demander au Procureur Général de Paris de saisir l'instance disciplinaire du Barreau de Paris, si ça lui chante..., et ce conformément aux dispositions de l'article 187 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, pris en application de l'article 23 de la Loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, article relatif à la discipline des avocats.
Je ne doute pas que Maître Heinich, qui n'a pas besoin de moi pour connaître son droit disciplinaire, a mesuré les enjeux de la sa publication, en deçà même des questions relatives à l'application de la loi sur la presse de 1881. Soit dit en passant, si de telles poursuites disciplaires voire pénales étaient diligentées, elles conduiraient aussi l'institutuion qui défend légitimement son honneur à exposer sa position sur le délibéré de couloir par exemple... je ne suis pas sûr de savoir qui sortirait grandi de tout cela. Pour ma modeste part, ne me prenant ni pour le Bâtonnier de Paris, ni pour le Procureur Général dudit lieu, j'ai voulu donner mon singulier point de vue et pourquoi pas le dire (in fine dans ma dernière phrase) un témoignage de fraternité compassionelle en humanisme, dussè-je être maudit comme magistrat (je n'ai jamais prétendu non plus à l'exemplarité).

Ce qu'écrit cette avocate n'est que sa version des événements et le juge d'instruction qu'elle incrimine publiquement sans autre forme de procès ne lui répondra rien dans la presse.

Je n'ai décidément ni votre grandeur d'âme ni votre plume.

Sub Lege Libertas:
pour votre âme, je m'en remets au Très Haut ne doutant pas de sa miséricorde à vous combler. Pour la plume, vous vous défendez (votre "peuple dévoré d'exaltations immédiates" in fine propose une image stylistiquement audacieuse... lachez vous ! ;-) )

Mais comme vous, jamais je n'oserais mettre en cause dans les médias le travail d'un avocat, en forme de règlement de comptes.

J'aimerais que ce genre de tribunes vaines, unilatérales et vindicatives cesse de fleurir mais hélas! je crains que l'émotionnel tienne lieu de réflexion à tout un peuple dévoré d'exaltations immédiates.

117. Le lundi 8 juin 2009 à 16:19 par Véronique

@ Guile

Si vous lisez les post 114 (Saucisse Héros) et 115 (parquezaco), on peut penser que ce sont des commentaires antagonistes. Mais en réalité, pour moi, ils se ressemblent totalement et se confondent.

Pour le premier ce qui est mis en avant c'est l'idée d'une magistrature arrogante, emmurée et captive dans ses dossiers papier, qui s'exclue et se protège de la vraie vie.

Pour le second c'est l'idée de la foule hurlante - l'opinion - qui ne comprend rien à rien, le peuple dévoré d'exaltations immédiates.

Pour moi ces deux commentaires sont de l'émotif à l'état pur. Quand le préjugé et le jugé, une fois pour toutes, prennent toute la place .

J'ai envie de dire que l'un annule l'autre, et inversement.

A ce que vous appelez le sentiment anti juge répond le sentiment anti opinion profane.

Je pense qu'il faut être singulièrement de mauvaise foi intellectuelle pour considérer que tout est dit de cette affaire dans la lettre de Me H-L. Mais je pense aussi qu'il faut être singulièrement à côté de la plaque et enlisé dans un conformisme de plomb pour reprocher à Sub lege libertas un billet comme le sien.

118. Le lundi 8 juin 2009 à 17:01 par parquezaco

à Véronique

sauf à croire que tout ce qui est écrit est la réalité (ce que jamais un magistrat normalement contitué n'admettra), il ne peut y avoir d'opinion que forgée sur la dialectique et la confrontation des thèses; à défaut l'avis de l'observateur sur tel ou tel sujet est bancal comme s'il lui manquait une jambe.

Or, l'opinion publique dirigée contre une décision de justice ou le magistrat (nécessairement car médiatiquement) coupable de l'avoir rendue ne se fonde généralement que sur les données fournies par la partie le plus intéressée à faire porter le chapeau à autrui.

Les exemples abondent, ne trouvez-vous pas?

119. Le lundi 8 juin 2009 à 17:30 par Guile

@ Véronique: Il me semble que je ne suis ni "singulièrement de mauvaise foi intellectuelle", ni "singulièrement à côté de la plaque", puisque je ne défend aucune de ces deux thèses...

Je suis ravi de lire ce genre de billet, d'autant qu'ils mettent en avant les limites du système. Dans le même temps, je trouve les réactions "qui accusent" les uns ou les autres "au nom de ce qu'ils sont" (juge, citoyen, ou autre), relativement simplistes.

Mais de mon point de vue, c'est dans l'air du temps. On stigmatise une profession, en n'ayant comme seul élément, un membre de celle-ci (même cent d'entre eux, ce n'est pas probant). Idem pour les professeurs qui ont eu leur lot d'insultes.

Tout le monde tombe dans ce genre de panneau, moi le premier parfois, mais je constate que ce billet a fait naître des réactions violentes.... De toute part.

120. Le lundi 8 juin 2009 à 18:16 par Bombay

Mon Cher Confrère,

Et en écrivant ces mots je suis heureux de les adresser tant à Sub lege libertas qu’à Maître Laure Heinich-Luijer, grâce à sa très belle conclusion. Je voudrai cependant dire quelques mots à l’auteur de cette lettre qui suscite tant de commentaires.

J’ai été très touché par votre lettre, j’ai été touché par ses excès, par sa colère, par son authenticité, bref par son humanité. J’ai, il y a tout juste un an, connu un peu de ce que vous traversez. Un de mes clients s’est pendu dans sa cellule de la maison d’arrêt. Comme vous, depuis des mois, j’alertais le juge d’instruction et le parquet. J’ai appris son décès dans la presse, comme le juge d’instruction d’ailleurs. J’ai écris au Procureur de la République pour m’en indigner. Il n’a sans doute pas jugé utile de me répondre.

Je comprends et d’une certaine manière je partage la violence que vous ressentez. Je ne ferai pas de grandes phrases, je n’en ai pas envie. Certains des commentaires qui me précèdent parlent d’eux-mêmes. Il y a des certitudes qui cachent de l’indifférence et cette indifférence est insupportable alors que l’on parle de justice.

Face à cela il ne nous reste qu’une chose, défendre. Défendre sans cesse. L’objet de ce commentaire est simplement de vous dire combien par votre lettre vous faites honneur à notre robe car vous défendez. Contre l’indifférence et son cortège d’inhumanité vous défendez. Dans cette défense vous défendez une certaine conception de la justice comme nous devrions tous, avocats et magistrats, le faire et comme certains d’entre nous, avocats ou magistrats, le faisons.

Alors merci.

Pour finir, permettez-moi simplement de vous livrer ces quelques mots de FITZGERALD qui représentent pour moi certains de nos combats : « On devrait pouvoir comprendre que les choses sont sans espoir et cependant être décidé à les changer »

En espérant qu’ils vous portent,

Je vous prie de me croire, Mon Cher Confrère, votre bien dévoué.

121. Le lundi 8 juin 2009 à 18:37 par Véronique

@ parquezaco

Ce que je pense profondément c'est que plus les magistrats expliqueront une décision judiciaire contestée, voire violemment contestée dans les médias, plus l'opinion, non pas forcément approuvera la décision - du reste au sujet d'une décision judiciaire, l'approbation ou le désaccord de l'opinion n'a pas lieu d'être -, mais je pense qu'elle sera dans une logique de compréhension. Et surtout, je pense que l'opinion acceptera de considérer que les choses, jamais, ne sont aussi simples et faciles que ce que l'opinion médiatique ou politique veut bien en dire .

Et pourquoi ne pas envisager l'idée que les juges dont les décisions sont contestées ou violemment contestées dans le débat public répondent publiquement à ces mises en cause.

Si par exemple, Me H-L a écrit son texte avec l'idée que les magistrats mis en cause dans sa lettre sont de toute façon contraints au silence et au secret sur le dossier, alors son initiative est totalement déloyale.

Par exemple, je trouve très sain que le juge en charge de l'affaire de Tarnac se soit exprimé publiquement.

122. Le lundi 8 juin 2009 à 19:05 par Véronique

@ Guile

Je ne pense pas que ce soit une question d'anti juge, d'anti truc ou d'anti machin.

Je crois qu'il faut considérer qu'il y a aujourd'hui, par la force et l'évolution des choses, un besoin de compréhension quand des décisions judiciaires sont contestées dans le débat public.

123. Le lundi 8 juin 2009 à 19:43 par cazo

Dans nos vies, et aussi dans les métiers "de gens de robe", dans et de la misère, nous avons pleuré sur des hommes qui s'étaient donnés la mort et nous avons peur pour ceux qui pourraient être tentés de le faire. Le côté de la barre n'y change rien. Nous avons la responsabilité de notre humanité, mais pas celle de tous les maux.

124. Le lundi 8 juin 2009 à 20:01 par Dadouche

@ Véronique

La voie naturelle de contestation des décisions judiciaires, ce sont les voies de recours juridictionnelles, pas le "débat" (qui n'a souvent de débat que le nom et tient généralement plutôt du soliloque ou du choeur antique) médiatique.
Et la seule voie de "réponse" des juges, c'est la motivation des décisions.

Sub lege libertas:
Oui, chère collègue, Mille fois oui : mais le malheur dans le cas elliptiquement exposé par Maître Heinich, c'est qu'elle est déjà en appel à la Chambre de l'instruction et que la motivation (certainement convenable j'en suis sûr de l'arrêt de rejet) a été précédée d'un bizarre conciliabule de couloir ou se télescopent un ressenti de l'audience (elle pense la Chambre favorable à son appel), des assurances verbales d'un membre du parquet qui viennent la rassurer sur une décision qui serait finalement contraire, mais qui n'empêcherait pas d'autres démarches pour parvenir à... l'hospitalisation, mais finalement le suicide.


Répondre hors des enceintes judiciaires sur une décision d'espèce est à mon sens un abaissement, non pas dans un sens péjoratif, mais en ce sens que le juge doit être au dessus de la mêlée, avoir une vue d'ensemble pour prendre sereinement sa décision.

Un juge pris à partie n'est plus justement qu'une partie parmi les autres.

Qu'un débat plus général s'engage, que des magistrats (ou des avocats...) expliquent les mécanismes de prise de décision, les possibilités légales, les enjeux, les contraintes, les conditions matérielles d'exercice, c'est autre chose et le débat public est alors salutaire.
C'est pourquoi je déplore certaines tendances récentes que je considère comme des dérives : la personnalisation à outrance (c'est une décision du juge Machin), la citation des juges d'instruction comme témoin lors des audiences de jugement, la violation permanente du secret de l'instruction avec copie de PV à l'appui dans les magazines.

La réaction du juge d'instruction de l'affaire Coupat était intéressante. J'imagine qu'il a du ressentir très vivement des mises en cause qu'il considérait comme injustes et contraires à la réalité du dossier. J'observe cependant que sa "version" a été peu entendue hormis le jour de sa publication et que cette publication a simplement contribué à le faire descendre dans une mêlée où, à mon sens, il n'avait rien à faire. Et cette publication sera très certainement utilisée pour contester son instruction. Vous aurez compris que je ne trouve pas cela très sain. Et je trouve carrément malsain le contexte qui l'a poussé à recourir à cette extrémité.


Je peux comprendre la colère de Maître Heinich- Luijer, ce sentiment d'impuissance qu'elle exprime.
Son texte me heurte parce qu'elle sait pertinemment que les magistrats dont elle met implicitement en cause l'humanité et le professionnalisme ne pourront pas lui répondre, parce que sa violence dépasse ce qui me paraît audible dans un débat.
Je n'ai d'ailleurs pas le sentiment (mais peut-être me trompé-je) qu'elle cherchait à lancer un débat. A vrai dire, je m'interroge encore sur ce qui l'a poussée à exprimer cette rage (encore une fois compréhensible) de cette façon, par ce biais.

Sub lege libertas:
Oui encore, chère collègue, et si vous allez (re)lire ma réponse sous le commentaire n°115, vous verrez que c'est cette même interrogation qui m'a conduit à ce singulierbillet...


Et il y aurait eu bien des façons, en exposant le même dossier, de lancer un débat de fond nécessaire sur un ton permettant la discussion. Ce texte écrit avec les tripes n'a entraîné que des réactions viscérales.

Et on finit par oublier, même dans les échanges en ces lieux, qu'au coeur de tout cela, il y a un homme qui est mort alors qu'on aurait du le soigner, y compris en prison.

125. Le lundi 8 juin 2009 à 20:34 par marie

Ce "délibéré de couloir" me laisse sans voix... c'est pour moi un parfait exemple de ce que la quasi symbiose entre le siège et le parquet a de profondément destructeur pour la séparation des pouvoirs qui est quand même la base même de l'état de droit. J'imagine que c'est en plus une pratique non codifiée, invisible donc, incontrôlable, inattaquable. Encore un signe de la profonde misère de notre système judiciaire.

126. Le lundi 8 juin 2009 à 21:27 par Lucas Clermont

@ Dadouche

Je prolonge juste ce que vous écrivez : on finit par oublier que les conditions de détention — qui sont les seuls paramètres que l'on peut objectivement incriminer— perdurent ; c'est à dire que ces conditions qui sont responsables de plusieurs dizaines de suicide par an perdurent ; qu'elles perdurent pour tous les détenus qui n'iront pas jusqu'au suicide mais connaîtront l'interminable souffrance qu'elles engendrent.

Je crois que l'indifférence n'est pas du côté de qui s'insurge contre cette lettre : elle est un écran de fumée, elle contribue à porter l'attention sur un cas, désigner des boucs émissaires de manière tendancieuse, déplaisante, et l'on ne pose pas le problème sur le fond. Simplement parce que le pathos annihile la raison.

Sub Lege Libertas:
Maître Heiniche n'est sans doute pas raisonnable -par quiconque, même par elle même- lorsqu'elle écrit (é-crie, si l'on veut une herméneutique lacanienne) son texte. Oui, et si alors nous sommes dérangés par tout ce que vous dites avec raison sur la détention, ses conditions, les suicides, c'est justement parce que ça ne ressemble pas à une antienne connue, souvent répété avec une fausse commisération qui ce termine par le répons : "faisons une grande loi péntitentiaire".

127. Le lundi 8 juin 2009 à 23:22 par Marcus Tullius Cicero

124. Le lundi 8 juin 2009 à 20:34, par marie

Ce "délibéré de couloir" me laisse sans voix... c'est pour moi un parfait exemple de ce que la quasi symbiose entre le siège et le parquet a de profondément destructeur pour la séparation des pouvoirs qui est quand même la base même de l'état de droit. J'imagine que c'est en plus une pratique non codifiée, invisible donc, incontrôlable, inattaquable. Encore un signe de la profonde misère de notre système judiciaire.

J'imagine que vous n'avez pas eu le temps de lire ma réponse sous 19.

Je ne sais pas ce qu'est un délibéré de couloir, car je n'en ai jamais vu, ni entendu parler.

128. Le lundi 8 juin 2009 à 23:28 par salah

Pour pouvoir semer la zizanie avec un billet sur ce blog ,un billet qui parvient à déloger les ‎camps de retranchements classiques et prévisibles ,il faut être adroitement tordu .Sub Lege ‎Libertas l’est. Pour avoir amplifié la colère de Maître Laure Heinich-Luijer ,je dis à lui et à ‎elle : Bravo !

Sub lege libertas:
Vous êtes un lecteur adroitement critique. bien vu et merci.

Un chaleureux bravo pour pour leur courage .‎ Après lecture ,il me semble qu’il est difficile de faire l’économie d’une réflexion sur le sens ‎‎,le territoire,les limites de tout actant dans l’univers judiciaire lorsqu’il y a un échec. Car c’est ‎un échec lorsqu’on a été amené (institutionnellement parlant )à intervenir sur la destinée d’un ‎malade qui se trouve en prison et qu’on a été saisi par son avocate sur son état avec l’éventualité de son ‎suicide - je suppose qu’elle a dû argumenter dans ce sens- ceci en se laissant emporter par un ‎autisme méprisant comme s’il était la la position de règle et que sortir de la routine est une exception.‎ Pire que l’erreur d’appréciation professionnelle ,je désigne le mépris .Si dans l'erreur il y a de l'incométence dans le mépris il y a la suffisance .Un magistrat qui cherche à être au dessus ‎de la mêlée ,tel que le revendique Dadouche ,ne peut que subir les effets d'optique par l'éloignement .Et comment il ferait un juge de proximité pour être au dessus de la mêlée ? Il ferait comme au rugby ? ‎

129. Le mardi 9 juin 2009 à 05:19 par valentine

Bon; en résumé, Maitre Heinich-Luijer a eu un accès de rage...

130. Le mardi 9 juin 2009 à 07:58 par Véronique

@ Dadouche

Je suis bien consciente que ma suggestion pourrait entraîner des conséquences sur la façon de rendre la justice dont je ne maîtrise pas toute la portée. Un mieux, c'est vrai, devient très vite l'ennemi du bien.

Alors sans parler du juge, le parquet, lui, peut répliquer publiquement à un avocat, faire valoir et faire entendre ce qui s'est passé du point de vue de sa chronologie, de ses contraintes et de ses obligations .

Sub lege libertas:
Très juste : article 11 du Code de procédure pénale, qui légalise ce droit de communiquer malgré le secret de l'enquête ou de l'instruction. Mais comme vous le dites "Un mieux, c'est vrai, devient très vite l'ennemi du bien":
Ainsi naquit "la langue de chêne" (vous savez, cet arbre sous lequel la justice se rend). En effet, cette communication est loin de la parfaite spontaneïté : c'est une expression institutionnelle... et d'ailleurs parfois le Parquet en use pour laisse entendre le mal qu'il pense du juge d'instruction qu'il a saisi (si si c'est possible...).

Maintenant, concernant le(s) juge(s), je pense qu'être contesté, et parfois violemment contesté, à longueur de temps dans les medias par telle ou telle intervention publique, médiatique ou politique, ou par tel ou tel groupe de pression, sans pouvoir y répondre n'est pas un gage de sérénité dans la prise de décision. Il faut quand même être sacrèment solide dans sa tête pour savoir rester serein et au-dessus de la mêlée.

Et puis oui, le trio justice, politique, medias avec l'opinion en embuscade est un trio infernal. Mais je pense qu'aujourd'hui, la justice ne peut pas faire comme si cela n'existait pas.

131. Le mardi 9 juin 2009 à 10:02 par Flo

Votre style d'écriture est très difficile à déchiffrer et il faut s'y reprendre à 3 fois pour comprendre vos phrases. En fait, c'est même désagréable.

Je n'irais pas jusqu'à dire que votre style d'écriture est aussi caricatural que celui de M. Barbier de l'Express, mais l'élégance du style ne résidera jamais dans une complexité inutile.

Sub lege libertas:
Bien. Votre sensibilité de lecteur vous porte vers un style plus simple, des phrases moins chantournées. Je vous accorde que le style ne réside pas nécessairement dans la complexité des constructions ou du vocabulaire. Vous trouvez ce billet trop artificiel, manquant de naturel dans l'expression. Je veux bien l'entendre : trop d'imparfait du subjonctif, de subordonnées enchassées ou antéposées, de mot précieux, etc. Vous voyez, je reçois la critique. Ferai-je mieux à l'avenir ? je l'espère pour votre agrément. Une question alors : si je le sais, pourquoi ai-je eu recours à cette préciosité ridicule à vos yeux ? La réponse est sans doute en partie dans l'analyse que salah propose dans la première phrase de son commentaire n° 128. J'admets que vous n'avez pas senti l'adresse qu'il me prête.

132. Le mardi 9 juin 2009 à 10:09 par moi

@sub lege veritas

Je vous trouvais intéressant depuis la lecture de votre second billet, mais d'avoir lu vos diverses interventions depuis, je vous trouve bien... arrogant, pédant, fat... Qu'elle est fine la limite entre l'humour et la lourdeur, n'est-il pas?

Sub lege libertas:
C'est évidement le lecteur qui fixe cette limite. Je serais vraiment arrogant, pédant et fat si je me défendais de lourdeur pour affirmer mon humour.

Plus je lis les billets de ce blog, plus j'ai de sympathie pour les avocats, et moins je souffre les juges et les procureurs. Qu'il est confortable de toujours trouver satisfaction par une pirouette stylistique, afin de se cacher la vraie vie - comme le disait un commentateur ci-dessus, que vous avez juste tourné en ridicule - et par là même, de se sentir tellement supérieur car maniant le verb(iag)e mieux que la moyenne, mais sans l'humanité qui fait que ces avocats semblent tellement plus légitimes.

Je ne suis qu'un "mékeskidi"; donc j'imagine que mon avis vous laisse indifférent, que vous êtes déjà en train de mitonner un de ces jeux de mots puérils dont vous nous avez affligés ci-avant, pour mieux retourner à vos séances d'auto-congratulation. Après tout, ce qui importe, c'est de se sentir justifié, serein, et confiant dans ses appréhensions !

Sub lege libertas:
Lisez un peu mes réponses en 116 et 131. Je ne vous demande pas d'être convaincu, ni de m'apprécier. Etre lu est déjà un privilège. Merci d'être un lecteur critique : l'êtes-vous ?

Salutations

133. Le mardi 9 juin 2009 à 10:19 par Minghella

Commençons par rappeler quelques éléments : effectivement, on suppose (cf Fantômette) que le préfet a été saisi. Généralement, la prise de décision du préfet est rapide. Ce n'est naturellement pas lui qui la prend, mais un attaché, tout ce qu'il y a de plus courageux, ce qui explique que c'est généralement pris dans les 2 heures. Là, donc, c'est flou.

La question, ce n'est pas une défaillance de la justice, de ses serviteurs ou de je ne sais qui. Je l'ai dit à plusieurs reprises, et ça m'a fatigué, d'ailleurs, qu'à ce niveau là, la faiblesse de la défense des magistrats s'est illustrée pour ce qu'elle est, lors des Dati's shows : assez faible. A la "vicitimisation" généralisée, les magistrats ont plaidé la victimisation de leurs fonctions. Dommage. Je le redis encore, les magistrats sont dans une position amusante : celle d'être les gardiens d'un fonctionnement vertical dans une société qui ne l'est plus. Qu'ils ne le comprennent pas, ce n'est pas grave -je ne demande pas à un magistrat d'être intelligent, je lui demande simplement d'être magistrat, ce qui, tristement, je constate à les lire ici, ne leur suffit pas-, mais lorsque le retour de la musique qu'ils portent se fait méchante, ils s'étonnent. Là encore, c'est leur affaire. Je rappelle encore, la société verticale qui leur est chère, personnellement, je ne la défends pas -au contraire-, mais je regrette que des gens si brillants, qui ont passé un concours si prestigieux (ih ih ih... bref...) ne se rendent pas compte que le "au nom du peuple français" se fera toujours plus horizontal, ce qui me plait beaucoup personnellement, pas de mouchoir pour pleurer les fonctions fictives de l'Autorité, avec le Père, le Magistrat, l'Instituteur et nianiania.

... un brin de décalage ne nuira pas.

40 000 lits dans les hopitaux psychiatriques de supprimés en 20 ans.

Aboutissent sur le bureau de nos chers amis de la magistrature ce qui n'aurait jamais dû y être. Précisément parce que ce n'est pas leur travail.

Cette avocate, dont je peux parfaitement comprendre la colère, demande aux magistrats de faire état de leur subjectivité, en clair elle les met au pied du mur pour qu'ils répondent de leur position. Non celle de magistrat mais de sujet.

Or, un magistrat n'est pas sujet de sa décision. Et, pour ce qui me concerne encore, et dans la logique simple aussi, il n'a pas à l'être.

Quand ils jouent à l'être, nous voyons les dégâts et le pathos, y compris ici. Le dégrés 0 de l'élaboration intellectuelle. Ils jouent, et c'est triste. L'indigence de leur métaphysique prend, alors, effectivement, des allures pathétiques. On parle rapidement des stylos à bille qui manquent en juridiction, des moyens qui manquent aussi, etc... Non parce que l'essence du magistrat est bête, c'est nul de dire ça, mais plutôt en raison de ceci que rendre les magistrats bêtes (au sens de la bêtise classique), on finit à ce qu'ils répondent sur ce plan. C'est dommage, mais n'est pas sujet qui veut même quand il a passé un gros concours.

Ce métier de s'occuper des fous, figurez vous, justement, ce n'est pas celui des magistrats. Et ce n'est pas non plus le métier des experts qui les serve. Un expert expertise, il ne fait pas de soin clinique (même s'il en fait par ailleurs, mais entendons nous bien, la position de l'expert n'est pas une position de soignant).

Justement, un mot : les magistrats et les experts. Comme les magistrats sont comme tout le monde, qu'il leur faut au moins les bretelles et les ceintures, on s'amuse aux expertises.

Qu'en résulte-t-il ? Du n'importe quoi, encore.

Pourquoi ? Parce que rencontrer un fou dans le cadre d'une demande faite par l'autorité judiciaire -qui, par ailleurs opère à un sérieux tri chez les experts, ce serait amusant d'en raconter un peu plus- fait que tout le monde se rencontre dans un esprit de connivence.

Les experts jugent, et les magistrats font de la métaphysique.

Bravo, mais les fous relèvent du soin. Donc, ni de l'expert ni du magistrat.

Cordialement,

Minghella

134. Le mardi 9 juin 2009 à 11:05 par m.anuel

les deux derniers commentaires sont bien désolants en ce qu'ils n'évoquent pas un instant le fond mais se complaisent à critiquer la forme et le style, semblant convaincus que la vraie vie ne peut être exprimée qu'au travers d'un vocabulaire pauvre et d'une grammaire balbutiante.

J'ai l'impression de lire là l'expression de personnes indéracinables dans leurs certitudes et qui prêtent à l'autre une pratique d'auto congratulation et auto justification dans laquelle ils semblent se complaire avec volupté.

Ils auront craché leur pauvre venin, s'en seront sentis fort satisfaits, abandonnant la dépouille de leur proie pour rechercher la suivante.

135. Le mardi 9 juin 2009 à 11:11 par Guile

@ moi et manuel: Je dois avouer, qu'en lisant les réponses des réponses et les diffréntes avis des intervenants, je commence à penser comme vous.... Sans aller jusqu'à dire qu'ils sont inhumains ou méprisants, car je crois plutôt le contraire. Mais sur le style, c'est parfois.... fatiguant.

136. Le mardi 9 juin 2009 à 11:23 par Pax Romana

@ Sub lege libertas (sous 112) :

Avant de poursuivre cet intéressant échange, je voudrais préciser aux fâcheux que ce qui suit est un exercice de pure logique et qu'il est inutile de hurler à l'inhumanité des arguments qui s'y trouvent.

Les prolégomènes étant faits, venons-en à l'exercice. Précisément, selon moi, le fait que l'avocat ait uniquement un mandat ad litem de son client exclut qu'il dispose d'une voie de recours juridictionnelle dans ce cas précis. Si l'avocat se soucie du sort de son client et du fait que celui-ci soit un danger pour lui-même, c'est en tant que personne, pas en tant qu'avocat mandé ad litem : en tant qu'avocat mandé ad litem, il devrait applaudir des deux mains le moyen astucieux trouvé par son client pour éteindre l'action publique à son encontre. Qu'il fasse les demandes que vous exposez dans votre paragraphe 1 est normal, mais celles-ci peuvent être rejetées, de même que les procès peuvent être perdus. Et j'approuve parfaitement le fait qu'une éventuelle hospitalisation d'office n'a pas à être demandée par l'avocat dans le cadre de son mandat ad litem, au contraire. Tout au plus peut-il la suggérer comme alternative à la détention, mais si la loi ne donne pas au juge le pouvoir de la prononcer, je ne peux concevoir qu'ensuite l'avocat s'en prenne au juge, surtout avec autant d'hybris que l'auteur de la lettre que vous avez eu l'obligeance de nous relayer.

Par ailleurs, vous touchez un point intéressant lorsque vous dites que l'avocat est mandé ad litem, « c'est-à-dire qu'en accord avec son client, il peut diligenter tout acte de procédure tout recours prévu dans le cadre de l'instance en cours ». En bonne (?) logique, on aurait envie de dire qu'une fois que l'avocat a appris que son client est fou, il ne devrait plus pouvoir le représenter, puisque l'accord du client lui fait défaut, celui-ci n'étant pas en mesure de le donner validement. Et si l'on part du principe que l'avocat continue de représenter les intérêts de son client dans ce cas, il n'est plus mandé par lui, mais par la société... et cela change un peu la nature de son mandat, n'est-ce pas ?

Sub lege libertas:
Tss Tss. toujours d'un point de vue de pure logique, l'incapacité juridique du majeur protégé ne lui permet pas de consentir, soit. Mais, si l'on reste au niveau formel, l'incapable majeur doit juridiquement être représenté par un tuteur. Formellement alors, si la procédure de tutelle a été mise en oeuvre, c'est le tuteur qui s'accordera avec l'avocat sur le maintien de son mandat et sur les actes qui en découlent. Il reste un intérêt privé, même si le tuteur désigné est un organisme d'Etat ou public, plutôt qu'une personne physique ou une personne morale de droit privé. La nature du mandat ne change donc pas, elle repose sur une "fiction juridique" qu'est la représentation de la personne protégée par son tuteur. A ce titre d'ailleurs la loi a été récemment modifiée, obligeant en cas de poursuite contre un incapable majeur sous tutelle à mettre en cause le tuteur

Pour conclure, la solution logique à tout ceci serait de donner au juge, et non au préfet, le pouvoir de décider d'une hospitalisation d'office. Mais cela n'étant pas le cas, je répète que je ne peux comprendre la haineuse diatribe irrationnelle contre les juges que ce cas suscite chez l'avocat du malheureux. Qu'elle s'en prenne à son député.

137. Le mardi 9 juin 2009 à 11:25 par Pax Romana

@ Gascogne :

Si vous voulez un exemple d'argument ad hominem, allez voir 131 (commentaire signé Flo) et 132 (commentaire signé moi). Bien à vous.

138. Le mardi 9 juin 2009 à 11:32 par Pax Romana

@ Saucisse Héros (115) :

« Je conteste que Mademoiselle Dudue ait été injurieuse. C'est d'autant plus facile à dire que plus personne ne peut la lire. »

Vous pouvez encore lire son commentaire 7. Et, nonobstant les fausses allégations et fautes de grammaire qui s'y trouvent, il est injurieux.

139. Le mardi 9 juin 2009 à 12:32 par VIEUX ROBIN

Je répète la bonne question : que faisait ce type en prison si on admet qu'il était irresponsable ?

Est ce au préfet de l'en sortir ?

140. Le mardi 9 juin 2009 à 13:19 par Mike

Bon OK, après toute cette belle prose grimaçante et près de 140 commentaires, les magistrats ont exprimé leur lassitude du juge bashing, les justiciables rancuniers leur fiel, les avocats leur compréhension, les gens normaux leurs doutes et les énergumènes leurs crânes dégarnis à l'enclume.

Reste que le propos de Me Heinich-Luijier, dont on se fout de savoir s'il sied ou non à la bienséance, contient une accusation grave, directe, non voilée : y a-t-il eu, oui ou non, un délibéré de couloir? Le procureur a-t-il usé d'arguments auxquels Me Heinich-Luijier n'a pu répondre?

On peut dire d'hommes et de femmes, qui n'ont su prévenir le drame de la mort d'un être humain, qu'ils n'ont pas pris les bonnes décisions au bon moment. On ne peut pas dire qu'ils ont commis une faute, juridiquement en tout cas. Malin qui pourrait dire qu'il aurait fait mieux à leur place.

En revanche, si délibéré de couloir il y a eu, il y a eu faute. Et faute grave.

Dans ce cas en particulier, parce que Me Heinich-Luijier aurait peut être pu, si le Procureur avait exposé ses arguments à l'audience, convaincre les juges que ces arguments n'étaient pas de poids face à l'urgence de la situation et à l'imminence du péril. Peut-être, sans doute.

Au delà de ce cas en particulier, parce que la justice se saborderait elle-même, parce qu'elle donnerait elle-même raison à cette frange de l'opinion qui rêve de l'annihiler.

L'accusation est grave, directe, non voilée.

Il est dans l'intérêt de tous que la véracité des faits soit recherchée et, si vérité peut être faite, que justice soit rendue, aux magistrats injustement mis en cause ou à elle-même.

141. Le mardi 9 juin 2009 à 14:29 par pendragon

@mike 139

oui c'est grave, mais comme nombre de choses graves qu'on voit passer en tant qu'avocat dans et hors les enceintes judiciaires

s'en remettre (seulement) à l'emotion ne servira à rien, et notamment n'apporte pas des propositions de solutions - cela dit en écrivant, on en revient toujours à la question du budget de la pénitentiaire

142. Le mardi 9 juin 2009 à 14:56 par Flo

@ m.anuel

Vous n'avez qu'une impression, effectivement. Vous portez des accusations gratuites dénuées de tout fondement : qui vous parle de vocabulaire pauvre et de grammaire balbutiante?

Il me semble au contraire qu'à trop vouloir en faire sur le style, on en perd beaucoup sur le fond et, même, on le dessert en le rendant inutilement compliqué d'accès.

Certes, dans le métier d'avocat qui est le nôtre (enfin, je parle pour moi, pas pour vous), l'éloquence est une grande qualité, mais j'ai le tort de penser que les plus belles choses sont celles qui sont dit le plus simplement et le plus clairement possible.

C'est un blog juridique, pas un concours de style.

Sub lege libertas:
Soit, mais ce n'est pas non plus le répertoire Dalloz... Il me semble que le Maître de ces lieux écrit sous "Journal d'un avocat", "Instantanés de la justice et du droit". Je ne prétends à rien d'autre et parfois le café instantané, c'est mauvais... (vous n'êtes pas obligés de rire)

@Sub Lege Libertas : vous aurez facile de me répondre que je n'ai quà ne pas lire vos billets : effectivement, c'est ce que je fait, car disposant de peu de temps dans mes journées de travail, les premières phrases de vos billets suffisent à me rebuter et à passer au billet suivant. C'est dommage, car ce que vous avez par ailleurs à dire est, je n'en doute pas un instant, du plus grand intérêt. A cet égard le succès de ce blog tient beaucoup au style très accessible, vivant et agréable à lire de son auteur.

Sub lege libertas:
Il faut savoir. Si vous me lisez (et vous le faites, ne vous déplaise de l'avouer), vous avez le droit d'être rebuté par mon style et de le dire, puisque le privilège du lecteur de blog est de répondre ! A ce sujet, je vous ai répondu en 131, posément. Mais si vous ne me lisez pas, alors que vous pensez que je pourrais être intéressant, pourquoi perdez-vous le temps de commenter ? t comment vous autorisez-vous même à ne pas douter un instant que j'ai à dire des choses du plus grand intérêt ?

143. Le mardi 9 juin 2009 à 17:07 par Mike

@ pendragon 141

Ah bon, d'accord, je ne savais pas. Si en tant qu'avocat vous voyez des choses graves dans et hors le enceintes judiciaires, c'est différent. Ouf, on a eu peur.

Et si en plus, en tant qu'avocat, le seul problème que vous identifiez, en écrivant, concerne les moyens alloués à la pénitentiaire, re-ouf, tout va mieux.

L'émotion me submerge...

144. Le mardi 9 juin 2009 à 19:05 par jalmad

@ minghella 133 : pas sûre d'avoir tout compris malgré mon concours super dur en poche (j'en suis ! même pas honteuse, en plus !), mais je crois être d'accord avec certaines de vos assertions : les magistrats, c'est pas leur métier de soigner les fous ; les experts, même les plus sérieux, dont on sait qu'ils rendent un avis sur un entretien de quelques heures en pareille matière, ça interroge, etc... OK, super, on a mis le doigt sur des sacrés pbs.

Mais, quand une personne commet un crime ou un délit, à qui revient-il de dire si cette personne relève de la Justice ou des soins ? on le tire aux dés ? c'est pas aux Juges ? pas aux experts ? alors, à qui, aux soignants ? sûrement pas, répondront ces derniers à juste titre !

le fait est que les choses sont loins d'être parfaites d'un point de vue théorique, et très criticables d'un point de vue pratique (état des services de psychiatrie, manque d'experts, état des prisons, lenteurs de la justice, etc...). Mais jusqu'à maintenant, c'est ce que le législateur avait considéré comme étant "le moins pire". Un équilibre, certes insatisfaisant, mais qui faisait un certain consensus, semblait trouvé.

J'ai déjà parlé plus haut d'une évolution récente de la loi qui oblige le Juge d'instruction à poursuivre les investigations même lorsqu'il sait qu'il a affaire à quelqu'un qui va être déclaré iresponsable ; pis encore, la loi prévoit également désormais depuis le février 2008 (la même loi que la rétention de sûreté) une audience spéciale devant la Chambre de l'instruction pour débattre de "fou" "pas fou" "fou mais pas trop" ; ce n'est pas le rôle de la Justice ? Bien d'accord avec vous. Nous étions nombreux, dans le monde judiciaire et médical, à le hurler ! car ces dispositions contenaient en germe, ajouté à ce que nous savons des conditions carcérales et de l'absence d'accès aux soins en détention, le type de drame dont nous parlons ce jour. J'espère que Me HL hurlait avec nous, et qu'elle saura élargir le débat, une fois la colère et l'amertume passées. Car je l'ai déjà dit : sa colère est légitime ; c'était à nous, les magistrats, de ne pas laisser s'éterniser la situation de ce détenu, même si, et je n'y reviens pas car je me suis déjà expliquée sur ce point, c'est facile à dire aujourd'hui.

Donc si je résume, lorsqu'un Juge d'instruction sent qu'il va aller vers l'irresponsabilité, non seulement il doit continuer à instruire, mais en plus, il va renvoyer son dossier devant une Cour qui va tenir une audience, etc.... Savez vous pourquoi ? allez vérifier les journaux de l'époque pour vérifier que je n'exagère pas, mais parce que N. Sarkozy voulait, suite à un fait divers atroce, un procès pour les fous. Il l'a eu ! Ils étaient où les commentateurs indignés de ce blog ? et vous savez quoi ? avec la rétention de sûreté, je vous en prédis un sacré paquet de suicides de malades derrière les barreaux !

145. Le mardi 9 juin 2009 à 20:15 par ranide

Bien sûr, la charge est violente. Elle ne pouvait pas ne pas heurter les magistrats qui fréquentent ou contribuent à ce blog (et sans doute les autres).

Mais tout de même, un homme est mort en détention provisoire, maintenu sous main de justice bien que reconnu irresponsable par un collège d'experts, pour les besoins d'une instruction à laquelle qu'il était hors d'état de collaborer, puisque capable, du fait de sa maladie, de s'accuser faussement d'un crime (qui peut-être n'a pas eu lieu).

L'absurdité est révoltante.

Et elle ne l'est pas moins parce la loi commande aujourd'hui de juger les fous (mais commande-t-elle vraiment de les maintenir en détention provisoire et de retarder leur hospitalisation ?), ou parce que le directeur de la maison d'arrêt, le médecin de la maison d'arrêt auraient pu obtenir du préfet le placement aussi bien que le procureur ou le juge de l'application des peines.

La facilité avec laquelle le corps judiciaire reçoit, accepte les développements procéduraux les plus absurdes et finalement se résigne à les considérer comme des dégâts collatéraux somme toute admissibles et inévitables, explique à mon avis la colère, violente, de Me HL.

Merci à Sub lege libertas et à Jalmad.

146. Le mercredi 10 juin 2009 à 00:48 par Parité

Chère Laure, Je t'admire et te remercie pour tout.

147. Le mercredi 10 juin 2009 à 09:48 par m.anuel

Si je m'en réfère à ce que j'entends dans les tribunaux depuis plusieurs mois, très peu de magistrats "acceptent les développements procéduraux les plus absurdes et finalement se résignent à les considérer comme des dégâts collatéraux somme toute admissibles et inévitables".

Il ne s'agit pas de les exonérer de leurs responsabilités, mais de se souvenir qu'ils ne sont pas les auteurs des lois qu'on leur demande d'appliquer, lois de plus en plus absurdes, mal rédigées, mal préparées, dont le seul but semble être de s'adresser aux électeurs sans s'intéresser à leur utilité ou leur efficacité.

En outre, lorsqu'ils maintiennent en détention et que la personne s'avère innocente, on parle de nouveau fiasco judiciaire, et lorsqu'un crime est commis par un récidiviste ou un fou qui n'avait pas sa place en prison et a été libéré, on traite les magistrats d'incapables.

J'avais l'impression que ce blog avait un but pédagogique en donnant la parole aux intervenants du monde judiciaire, mais il semble, singulièrement avec ce bilet, devenir une occasion pour beaucoup de monde de se défouler sur les juges. Et ces derniers semblent avoir toujours tort, qu'ils s'expriment ou restent silencieux.

Je commence à voir là se dessiner l'action de sabotage de l'autorité judiciaire menée depuis de longs mois par le pouvoir politique en place, qui parvient tranquillement à instiller dans l'opinion publique la conviction que les juges ne servent plus à grand chose, que leur statut est obsolète, pour enfin les voir obéir au pouvoir politique et leur ôter définitivement toute vélléité de s'attaquer aux puissants.

148. Le mercredi 10 juin 2009 à 10:06 par gao qiu

Certes, on peut mettre en cause la multiplication des détentions provisoires, ou la poursuite de l'instruction malgré l'irresponsabilité du mis en examen, et la volonté des politiques et de l'opinion publique (comme semblent l'oublier certains commentateurs) qui y ont conduit. Certes on peut critiquer l'état des prisons, désastreux, et pas seulement du point de vue de la CEDH. Ce sont là des faits irréfutables.

Mais les prémisses de l'argumentation de la lettre ouverte me semblent fragiles, sinon faussées. Car du fait que notre homme était fou, ne découle pas forcément le fait qu'il se soit suicidé. Devons-nous sinon considérer les X détenus à s'etre suicidés cette année comme fous? Bien sur, la folie le rendait plus "fragile", plus susceptible de recourir au suicide. Mais il me semble difficile de réduire ce cas à une manifestation de folie, quand le suicide dans les prisons françaises prend des allures de phénomène de masse (sinon proportionnellement, au moins quantitativement).

Pour ce qui touche au "délibéré de couloir", je l'ai pour ma part compris comme le fait d'avoir discuté de l'affaire au préalable, pas d'avoir pris une décision derrière le dos de l'avocat. Bien sur, si accord "secret" il y a eu, il s'agit d'une faute. Mais j'attendrai d'avoir plus d'informations sur le sujet avant de donner un avis tranché.

Enfin, sur un point tout à fait différent, s'il est vrai que SLV peut etre parfois pédant dans ses billets, trouver son style agréable ou non dépend des inclinaisons personnelles. Personne ne vous demande de l'imiter, ni meme de l'apprécier. Quand à insinuer que le "peuple" serait incapable de le comprendre, je crois que ce n'est là rien que la majeure partie de la population ne soit en mesure d'appréhender. Il me semble que c'est cette "critique", bien plus que le billet de SLV, qui fait preuve d'arrogance et de hauteur.

149. Le mercredi 10 juin 2009 à 10:42 par parquezaco

Les mêmes qui s'offusquent de ce prétendu "délibéré de couloir?" ne seraient-ils pas ceux qui se plaignent de l'excessive solitude du juge, de son enfermement dans sa tour d'ivoire, de l'absence de cohérence de l'action judiciaire??

Allons, allons... voulez-vous interdire au juge tout contact avec autrui, y compris avec les avocats hors débat contradictoire??

Voulez-vous le remplacer par une machine isolée du monde?

Ce n'est pas sérieux pas plus que ne sont acceptables les procès d'intention faits aux uns et aux autres dans des tribunes médiatiques.

150. Le mercredi 10 juin 2009 à 10:58 par VEO

@ parquezaco

La loi prévoit que l'accusation ne participera pas au délibéré. Cela vise à assurer l'indépendance dudit délibéré. Vouloir justifier un "délibéré de couloir" en parlant de la solitude des juges, c'est à peu près aussi pertinent que de justifier un meurtre en parlant de la surpopulation.

151. Le mercredi 10 juin 2009 à 11:08 par pendragon

@143 mike

j'ai du mal m'exprimer,

je ne dis pas que cela n'est pas grave, ca l'est

mais que simplement, si on se laisse submerger par l'emotion des dysfonctionnements du système, judiciaire ou pas, on court acheter une corde.....

et que oui, la plupart des problèmes que l'on évoque ici tiennent à une absence honteuse de moyens de l'institution...

l'essentiel reste donc, dans mon métier ou ma vie perso, d'essayer de garder cet équilibre fragile entre émotion, ressenti face à une injustice profonde, et rationalisation de ce ressenti pour ne pas laisser ma raison guidée par mes seuls sentiments ...

donc sorry si j'ai pu apparaitre pour ce que je ne pense pas etre...

152. Le mercredi 10 juin 2009 à 11:26 par Fantômette

@ VIEUX ROBIN (139)

Jalmad a répondu à votre question à ses commentaires 89 et 144.

153. Le mercredi 10 juin 2009 à 11:31 par Guile

@manuel en 147: Je n'aurais pas dit mieux, vous avez exprimé mon sentiment sur le décalage instilé par le pouvoir en place, entre les juges et les citoyens.

Je considère également que cette analyse s'applique à d'autres "catégories" de français... Mais c'est un autre débat qui ne concerne pas ce billet.

154. Le mercredi 10 juin 2009 à 12:32 par gao qiu

@150

Loin de moi l'idée de me substituer à Parquezaco, mais il me semble que ce qu'il essayait de dire, c'est que jusqu'à preuve du contraire (sissi, la présomption d'innocence s'applique aussi aux magistrats), le fameux "délibéré de couloir" n'avait été qu'une banale conversation entre magistrats.

Par conséquent, cela contribuait à démontrer qu'un magistrat n'a pas la science infuse et éprouve parfois le besoin de discuter d'une affaire avec un collègue. Tout l'inverse du stéréotype du magistrat "sur de lui et dominateur" que certains individus martèlent depuis la publication du billet de SLV.

S'il s'avère par la suite qu'il s'agissait d'un sombre complot du ministère publique, nul doute que vous aviez raison, bien entendu.

155. Le mercredi 10 juin 2009 à 12:47 par Véronique

@ m.anuel et Guile

Il reste que concernant la lettre de Me H-L, le parquet peut y répondre. Comme l'a confirmé Sub lege libertas.

Le parquet peut y répondre, même en évitant la forme et la langue de bois style communication institutionnelle.

Maintenant, pour les non avertis de la chose judiciaire, quelqu'un peut-il expliquer ce qu'on appelle un délibéré de couloir ?

156. Le mercredi 10 juin 2009 à 14:16 par Guile

@ Véronique: Le délibéré de couloir c'est une discussion, hors de tout cadre institutionnel, entre le procureur (ou membre du parquet) et les magistrats du siège, au sujet d'une affaire dont ils sont tous protagonistes.

C'est un peu le OFF de la justice pénale, sauf que c'est parfaitement interdit, et irrespectueux pour la défense, qui, par définition n'y participe pas.

En principe, le parquet ne doit pas chercher à convaincre les magistrats du siège, hors de son réquisitoire. Une fois qu'il a donné ses arguments, la défense présente les siens, et ensuite le délibéré, entre magistrats de la formation de jugement, peut commencer. Plus personne ne peut intervenir, ce moment leur appartient.

Ce système garanti l'égalité des armes, si cher à la CEDH, et à tout juriste qui se respecte...

157. Le mercredi 10 juin 2009 à 14:23 par bernadic

A Véronique

généralement le magistrat du Parquet en charge du dossier ne répond rien du tout.

Si'il devait y avoir une "réponse "du parquet elle serait nécessairement institutionnelle, donc mesurée (présomption d'innocence, procès équitable, secret de l'enquête etc etc) donc langue de bois.

Par ailleurs, il ne faut pas confondre les discussions que tout (bon) parquetier devrait avoir avec ses collègues, les avocats et les justiciables eux-mêmes avec les délibérations, nécessairement secrètes, des juges.

Il n'est pas anormal qu'avant le procès le procureur fasse savoir au juge qu'il requerra telle ou telle mesure, pas plus qu'il est utile que l'avocat prévienne qu'il sollicitera ci ou ça (exemple: dispense d'inscription de al condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire), ni que le juge réunisse tout le monde pour faire connaître la direction qu'il donnera aux événéments.

C'est une saine concertation.

Les esprits chagrins sont toujours ceux qui voient le mal partout et qui voudraient, en fin de compte, des procès désincarnés.

Dans l'affaire Outreau il a été reproché, me semble-t-il, au juge d'avoir agi seul et au procureur de ne pas avoir suffisamment éclairé son collègue.

Alors que veut-on exactement???

158. Le mercredi 10 juin 2009 à 15:20 par Marguerite

à Véronique, sur le délibéré de couloir. Cela peut recouvrir deux situations, une qui est acceptable mais entraîne suspicion et fantasmes un peu stupides, et une qui est rigoureusement proscrite. Dans l'un et l'autre cas il s'agit d'une discussion entre les juges qui jugent et l'un des autres protagonistes du procès: avocat du prévenu, avocat de la victime ou ministère public, hors la présence des autres et hors audience. Lorsque ça se passe AVANT l'audience, c'est histoire de prendre la température ou d'affuter au mieux ses futurs arguments, genre "entre gens de bonne compagnie, on décortique un peu le truc, on est d'accord mon client est un imbécile, je ne dirais pas ça devant lui mais... ou bien: on est d'accord, le type n'est pas fiable, mais de là à", on essaie de tirer un peu de son côté, personnellement je déteste ça mais ce n'est pas répréhensible, puisque tous les éléments seront repris à l'audience. Ce qui est rigoureusement proscrit et inacceptable, c'est lorsque ça se passe entre la fin de l'audience et le moment où la décision est prise par les juges, dans leur délibéré, c'est à dire dans le couloir après la suspension si le délibéré est rendu sur le champ, ou plus tard, pendant le délai que le Président a indiqué à l'audience. Evoquer entre soi le dossier à ce moment là, hors la présence des autres, serait une infamie, la pire infamie étant que l'absent soit l'avocat de la défense, puisqu'il a la parole en dernier d'après la loi, c'est à dire que la dernière impression laissée sur les juges doit être la sienne. Et, pour les juges qui jugent, se laisser aller à laisser faire sous couvert de convivialité au lieu d'y mettre aussitôt le holà serait de la même infamie. Je précise que, si j'en ai déjà entendu parler de manière théorique, je n'en ai jamais été témoin, et si vous lisez bien les commentaires il semblerait que ce soit le cas de l'ensemble des magistrats qui ont commenté. Depuis cette lettre nous en avons parlé entre nous et je n'ai pas rencontré de collègues qui en aient été témoins, bien que je doive dire que beaucoup croient la chose possible, en théorie. J'espère avoir été claire

159. Le mercredi 10 juin 2009 à 15:39 par marguerite

respectueusement à Guile, ce que vous dites vaut autant pour les avocats que pour le parquet, et ma remarque n'est pas théorique.

160. Le mercredi 10 juin 2009 à 16:05 par ranide

@ m.anuel

Ca me paraît un peu court de ne voir dans les réactions virulentes parfois injustes qui se déclarent choquées par ce suicide en maison d'arrêt, une enième manifestation de "juge bashing".

Je remarque d'ailleurs que les toute premières réactions virulentes émanent de magistrats, qui ont déclenché des commentaires violents jusqu'à l'intervention de troll détector.

Il reste que MO n'aurait pas dû se trouver en détention lorsqu'il s'est suicidé. Je ne dis pas que c'est la détention qui l'a tué. Je ne dis pas qu'hospitalisé, il n'aurait pas réussi à mettre fin à ses jours. Je dis seulement qu'il y avait de meilleures chances qu'il ne passe pas à l'acte s'il avait été hospitalisé ; et compte tenu des conclusions pressantes du collège d'experts, je ne comprends pas quelle nécessité procédurale ou légale pouvait retarder son hospitalisation, ou si vous préférez comment on peut expliquer que l'hospitalisation justifiée médicalement ait paru moins impérative que la poursuite de l'instruction jusqu'à son terme.

Il est heureux qu'il se trouve encore des avocats, des magistrats ou des citoyens qui ne font pas partie du monde judiciaire pour s'indigner de cette affaire.

Contrairement à vous, j'ai plutôt l'impression sur le terrain que la résignation gagne. Et pas seulement chez les magistrats, mais aussi chez les avocats.

Les commentaires exaspérés de certains magistrats et de certains de mes confrères avocats qui ont pris violemment le parti de Me H-L sont pour moi une nouvelle manifestation de la lassitude, de l'impuissance, de la résignation qui gagne le monde judiciaire.

Si ce blog a une vocation pédagogique, alors l'explication ne doit pas porter sur des questions accessoires ou périphériques (la possibilité ou l'opportunité d'engager des poursuites disciplinaires contre Me H-L ; les moyens de la justice et la charge de travail des magistrats, parce que dans le cas présent ce n'est pas vraiment le problème ; la possibilité pour d'autres intervenants que les magistrats qui ont connu du dossier de provoquer l'hospitalisation).

L'impression dominante que j'ai ressentie en lisant les commentaires c'est que seuls Sub lege libertas et Jalmad ont essayé de donner une explication, de maintenir à ce blog sa vocation pédagogique en explicitant les injonctions contradictoires auxquels les juges sont soumis, par le fait des politiques qui instrumentalisent la justice, qui légifèrent trop et mal, par la pression de l'opinion publique.

Je vous rejoins dans votre analyse selon laquelle on instille dans "l'opinion publique que les juges ne servent plus à grand chose", et cela se manifeste de multiples façons :

- le sentiment de plus en plus communément répandu que tout est dit lorsque l'enquête de police est achevée ; - le procès public qui a essentiellement une visée thérapeutique pour les victimes (la loi du 25 février 2008 en est une belle illustration) ; les peines pénales qui résultent d'un traitement quasi-administratif (notamment par les ordonnances pénales dont on nous promet qu'elles pourront bientôt portées sur de la prison ferme) ; - les lois qui réduisent comme une peau de chagrin la marge d'appréciation et de décision des juges (à vrai dire pour suivre un peu les débats législatifs, je n'ai pas le sentiment que le législateur soit beaucoup mieux traité par le pouvoir exécutif que l'autorité judiciaire) ; - la délégation de plus en plus fréquente de la fonction de juger à des intervenants qui ne sont pas magistrats (les délégués du procureur, les médiateurs, les conciliateurs) ; - les tribunaux qui sont transformés en véritables bunkers : pour ce qui est de mon tribunal, l'instruction et le parquet deviennent difficilement accessibles même pour les avocats.

Et je n'attends pas beaucoup de progrès pour la justice des réformes de procédure qu'on nous annonce.

Sur tous ces points, je vous rejoins.

Simplement, il me semble que la pédagogie doit conduire à répéter ces explications malgré le découragement et la lassitude plutôt qu'à refuser le débat en dénonçant un "juge bashing".

Je voudrais dire enfin à Gascogne, à Parquezado, à Grantumu et aux autres que ce découragement qui s'est emparé d'eux, gagne aussi les avocats parce qu'ils ne peuvent défendre que devant des magistrats visibles, sereins et libres de leur décision. Je crois vraiment que la violence de certains commentaires d'avocats a la même origine que la virulence de certains commentaires de magistrats.

161. Le mercredi 10 juin 2009 à 16:33 par Lucas Clermont

@ Votre point de vue serait juste s'il s'agissait d'un cas désincarné, du suicide de X, pour lequel on examinerait les dysfonctionnements qui conduisent à cette situation. On serait alors dans un des registres de ce blogue, la pédagogie. Sauf que ce n'est de cela dont il s'agit. Nous sommes face à un cas précis, présenté de manière tendancieuse (du fait de l'émotion) ; en outre, les magistrats que l'on peut reconnaître sont publiquement associés à cette mort. Nous sommes bien dans le cadre d'un épisode de l'attaque systématique de décisions de magistrats.

Les réactions viscérales des magistrats, je les comprends parce ces attaques construisent l'image du magistrat. Ça doit être plutôt pénible à vivre, cette image, aussi bien professionnellement que dans sa vie privé. En tant que citoyen c'est particulièrement préoccupant parce que cela revient à affaiblir ce contrepouvoir nécessaire à un bon fonctionnement de la démocratie.

162. Le mercredi 10 juin 2009 à 18:07 par Minghella

A à Jalmad,

Oui, j'approuve ce que vous dites en grande partie.

Compte tenus des problèmes aujourd'hui posés, évidemment, nous nous trouvons à nous poser des questions auxquelles nous n'aurions pas à répondre, dans le cadre judiciaire.

Car, dans le même que le soin psychiatrique, soyons clairs, l'enfermement, est devenu chose rare, l'irresponsabilité est de moins en moins utilisée. Je tiens la question de l'enfermement liée à la question de l'irresponsabilité.

Une fois que c'est parti, comme on dit, aucune raison pour que le symptôme s'arrête.

Ce que le législateur a considéré de "moins pire" -et c'est vrai que les textes, à la base, sur cette question, ne sont pas idiots, et qu'il m'est arrivé de le constater pour certains de mes patients-, c'était à une époque bien différente, sur le plan psychiatrique, qu'aujourd'hui. Si mes souvenirs sont bons, la dernière réforme date de 1992. Autant dire des siècles. Et pour connaître de mes collègues psys qui ont participé au trois définitions (altération du discernement, etc... je passe pas le temps, cf code santé publique), je peux vous dire que ça pleure tout ce que ça peut de voir comment les choses tournent.

Cordialement,

Minghella

163. Le mercredi 10 juin 2009 à 18:12 par ranide

@ Lucas Clermont

Je n'aurais pas posté de commentaire sans l'assurance donnée par l'auteur du billet et deux ou trois autres commentateurs que Me H-L avait une pratique professionnelle rigoureuse et honnête.

Je comprends moi aussi les réactions viscérales des magistrats.

Mais il me semble que ce qui doit interpeler dans cette lettre ouverte, plus que tout, c'est ce suicide survenu absurdement dans une prison. Je ne suis pas seul à l'avoir ressenti ainsi ; sinon, Sub lege libertas n'aurait probablement pas donné ce billet.

Il n'y a pas de "cas désincarné" en matière de justice ; il n'y a que des "cas précis", humains. Je ne suis pas si sûr que vous que ce "cas précis" soit rapporté de manière tendancieuse.

Je me suis pour ma part essentiellement attaché aux éléments objectifs qui ont été donnés : - une détention provisoire de 18 mois ; - les conclusions du collège d'experts.

Il y a encore 10 ans, MO ne se serait pas suicidé en détention, parce que pour moi il est certain qu'il aurait été interné avant son suicide ; entre l'hospitalisation d'un détenu présumé innocent et l'achèvement de l'instruction, il n'y aurait pas eu de débat : la priorité aurait été donnée à l'hospitalisation.

Ce qui a changé aujourd'hui c'est le contexte légal et l'esprit du temps. Voyez-vous, ce qui me heurte profondément, c'est précisément que la mort absurde de MO ne puisse pas être imputée à la défaillance individuelle d'un magistrat, ou pour le dire autrement qu'un juge d'instruction, un juge des libertés, une chambre de l'instruction, un magistrat du parquet puisse en conscience, dans le respect de la loi et de ses prérogatives, donner dans un cas comme celui-là, la priorité à l'instruction.

Je préfére la justice d'il y a 10 ans (qui n'était pas parfaite non plus). En le disant, je ne crois pas manquer au respect dû aux décisions de justice et aux magistrats ; je ne crois pas non plus qu'en ne le disant pas, j'aurais contribué au bon fonctionnement de la démocratie. C'est sans doute sur ce point seulement que nous divergeons.

164. Le mercredi 10 juin 2009 à 20:12 par jalmad

Je rejoins Ranide sur toute la ligne.

Et, autant je peux comprendre la lassitude et la colère de certains collègues : être montrés du doigt quand on a le sentiment d'avoir fait du mieux qu'on a pu (et je ne doute pas une seconde que ce fut le cas des JI, JLD et magistrats de la Chambre ; même le fameux "délibéré de couloir", quelqu'il ait été, était sûrement animé des meilleures intentions du monde), c'est dur. Quand on nous demande tout et son contraire. Et là, ça commence à faire beaucoup. Et Me HL, elle n'y est pas allée de main morte.

Mais enfin, si elle éprouve une telle colère, elle, avocate, décrite par ceux qui la connaissent ici comme quelqu'un qui fait son métier avec passion et de façon loyale, n'est-ce pas parce que justement encore, elle a habituellement confiance en ses juges ? parce qu'elle a encore une haute opinion de la justice de son pays ? Vous n'y voyez donc aucune sincérité ? du Juge bashing pour qui, pour quoi ? Elle y gagne quoi, Me HL, hormis des futures mauvaises relations avec plein de magistrats ? Peut-être suis-je trop naïve.

Mais peut-être faut-il savoir parfois s'incliner devant la colère lorsqu'elle est légitime, et lui passer ses excès. Et essayer d'expliquer les élements que nous devons prendre en compte au moment de nos décisions ; et nous remettre en question, inlassablement.

Je prends comme un compliment l'aveu de Ranide qui explique qu'il préférait la Justice pénale de son pays il y a 10 ans : il y a 10 ans, quand les décisions des Juges étaient moins encadrées ; quand les Parquets n'avaient pas la bride au cou ; quand les avocats avaient moins de pouvoir pour agir dans le cadre de l'instruction, et quand la Justice n'était pas comme aujourd'hui sous le feu des projecteurs. C'est à dire quand nous, magistrats, avions peut-être plus de pouvoirs, mais pouvions en faire usage avec peut-être plus de sérénité. Quelle marque de confiance.

Et puis, arrêtons les faux semblants : les "et p't'êt que de toutes façons, même en liberté, il se serait suicidé", les "le délibéré de couloir, en était-ce vraiment un au sens ethymologique du mot?", etc.... Je ne veux même pas le savoir. Le fait est qu'un malade psychiatrique dont la place n'était plus en détention, y est resté trop longtemps. En soi, il y a de quoi être indigné. Il ne s'agit pas de montrer du doigt qui que ce soit, j'ai longuement expliqué que cette décision de maintien en détention, j'aurais sans doute pu la prendre ; il s'agit de dire : non, ce n'est pas acceptable et nous magistrats, à l'avenir, ne cherchons plus à "bidouiller", à satisfaire la chèvre (le Préfet, les unités médicales de maison d'arrêt...) et le chou (les besoins de la poursuite de mon instruction, prévenir l'éventuel fait divers qui pourrait m'être imputé si il sortait de détention sans qu'une HO ne prenne le relai...), et recentrons nous sur les fondamentaux : une personne relevant de soins psychiatriques lourds, qui sera probablement déclaré irresponsable, n'a pas sa place en maison d'arrêt. Et après, à chacun son taf.

165. Le mercredi 10 juin 2009 à 20:26 par Véronique

Merci à Guille, bernadic et Marguerite qui ont eu la gentillesse de répondre pour expliquer précisément en quoi un délibéré de couloir est contraire à l'éthique judiciaire.

@ bernadic

Ben, en fait, à Outreau on a surtout reproché que les conclusions des JI - je ne sais pas le terme exact pour désigner le document - soit une sorte de photocopie du dossier présenté par le procureur à la cour d'assises - là non plus, je ne sais pas le terme exact pour désigner le document -.

En gros, ce qui a été reproché ce n'est pas un manque de communication entre les JI et le procureur mais un trop de communication. Trop de communications...trop convergentes, si vous préférez.

@ Lucas Clermont

Nous sommes bien dans le cadre d'un épisode de l'attaque systématique de décisions de magistrats.

Même si bernadic a écrit que généralement le magistrat du Parquet en charge du dossier ne répond rien du tout, il n'empêche que rien n'interdit à un Parquet de répondre et de faire valoir sa position s'il se sent très gravement et injustement attaqué par un avocat.

Je ne dis pas du tout que ne pas répondre équivaudrait à valider la lettre de Me H-L. Je dis simplement que le Parquet peut répliquer.

Donc, parler d'attaque systèmatique des décisions des magistrats comme vous l'écrivez, m'apparaît excessif.

166. Le mercredi 10 juin 2009 à 22:49 par Fantômette

@ Pax Romana,

Je vous rejoins quant à votre conclusion. Je crois qu'il serait cohérent avec les principes fondamentaux de notre système judiciaire qu'une décision d'hospitalisation d'office puisse être prise par l'autorité judiciaire, qui a pour mission constitutionnelle d'être la gardienne des libertés individuelles. Si l'on raisonne platement, une décision d'hospitalisation d'office est une décision qui prive contre son gré celui dont elle est l'objet de sa liberté. Cela suffit à mon avis à rendre indispensable l'intervention de l'autorité judiciaire.

Mais effectivement, dans les textes, tel n'est pas le cas.

Maintenant, concernant votre analyse au com 136,

Il vous manque peut-être un élément juridique pour affiner un peu votre position. L'avocat doit invoquer tout moyen de fait ou de droit susceptible d'être opérant dans le cadre de la défense des intérêts de son client. Ce principe résulte de la jurisprudence relative à la responsabilité professionnelle de l'avocat.

Et le mot "responsabilité" est ici un mot redoutable et central.

Dans la lettre de ma consœur, il est un passage qui n'a pas souvent été relevé dans les commentaires, et qui m'a frappée - celui où elle mentionne avoir précisé lors de la plaidoirie devant la chambre de l'instruction qu'elle avait engagé cette procédure pour pouvoir se dire qu'elle ne serait pas responsable du suicide de son client - un suicide qu'elle avait vu venir et qu'elle redoutait.

L'impression que cela me donne (je vous accorde qu'il s'agit là d'une impression subjective) est qu'elle a elle-même engagé la responsabilité des magistrats qui l'écoutaient - dont elle avait pu croire qu'ils l'avaient entendue. Ce qu'elle leur a dit dans sa plaidoirie, à bien y réfléchir, n'était pas beaucoup moins violent que sa lettre ouverte.

Ce détenu, qui est mon client, je m'en sens responsable. Pour l'instant. Il est fragile. Il est malade. Et il est peut-être innocent. Sa place n'est pas en prison. Nous le savons tous. En sortant d'ici, pour ma part, j'aurai la conscience tranquille, car j'aurais tout fait - vraiment tout - pour que cet homme, dont la place n'est pas en prison, en sorte. La décision vous appartient. Et cette décision sera la vôtre.

Sa lettre, les propos qu'elle y tient, sont la suite logique de sa plaidoirie.

Et l'institution judiciaire s'est retrouvée coincée - proprement coincée.

Parce qu'elle accepte - ici, une nouvelle fois - de prendre sur elle la défaillance des autres administrations, des autres institutions.

Hasardons une hypothèse sur le contenu du fameux "délibéré de couloir".

Si ce détenu sort, il ne sera pas mis en HP. Il sera dehors. Parce qu'il n'y a pas de place en HP actuellement. Laissons un peu de temps au préfet.

Et l'institution judiciaire a décidé. Elle a pris cette responsabilité - contrainte, bien sûr, forcée de faire un choix qui n'était qu'un choix par défaut. Mais qui restait un choix.

Parce qu'elle a pris à sa charge un problème qu'il ne lui appartient pas de résoudre, pire encore, qu'elle ne peut pas résoudre - le manque de place en hp, par exemple. Je rejoins donc complètement la position de Jalmad à ce titre.

167. Le mercredi 10 juin 2009 à 23:35 par ranide

@ Jalmad

Comment il m'a dit déjà Gascogne l'autre jour ? Ah oui, j'aime quand un magistrat me donne raison. Je ne rajoute pas comme il l'a fait qu'avec un moral plutôt bas, je suis amené à me contenter de peu, car je sais me tenir à ma place d'avocat obscur et pour tout dire provincial :-) A la vérité, je suis comme vous un grand naïf. J'ai besoin de faire confiance à mes magistrats et je suis même sincèrement convaincu que la très grande majorité d'entre eux sont dignes de confiance. Pourtant dans mon petit tribunal j'en ai vu passer en 20 ans des juges : des très connus qui montaient ou qui descendaient dans la carrière, des pas connus du tout et qui ne le deviendront jamais, des qui avaient fait l'ENM et des qui l'étaient devenus sur dossier.

Oui vous m'avez bien compris : pour moi, le risque de dégât collatéral est finalement plus limité lorsque l'on fait confiance aux juges (même si je suis conscient que le risque de défaillance individuelle, d'erreur d'appréciation aux conséquences dramatiques, n'est pas nul) et que la Chancellerie défend ses juges, que lorsqu' on les enferme dans un système dans lequel leur décision est contrainte. Pour moi, la justice c'est du cas par cas et c'est précisément ce qui la distingue de l'administration.

168. Le jeudi 11 juin 2009 à 00:55 par Mike

@ parquezaco en 149

Il est proprement atterrent de vous lire vanter tous les bienfaits du délibéré de couloir.

Vous avez sans doute raison, ce doit être les mêmes personnes qui, le nez sur le désastre, demeurent, du haut de leurs certitudes et suffisance, autistes au respect le plus élémentaire des droits et balaient les critiques d'un allons, allons, ce n'est pas sérieux et refusent d'y voir autre chose que des procès d'intention.

169. Le jeudi 11 juin 2009 à 07:10 par Véronique

@ Fantômette

Au sujet de votre hypothèse.

Le raisonnement que vous envisagez - pas de place dans l'immédiat en hôpital - serait pour moi recevable à la condition que la chambre d'instruction informe clairement l 'avocat de l'élément ou des éléments qui motivent son refus.

Ce qui, selon la lettre de Me H-L, n'a pas été formalisé.

Ils ont rejeté la demande de mise en liberté, sans explication, comme si l'audience n'avait jamais existé.

Par ailleurs, le procureur - je pense - au moment de l'audience, peut faire valoir un élément comme celui par exemple très concret d'absence de place dans l'immédiat.

Les juges peuvent prendre en compte cet élément et considérer que oui, le décalage en temps entre la mise en liberté et l'hospitalisation est un obstacle pour accèder ici et maintenant à la demande de l'avocat.

Penser cela, est-ce trop naïf ou trop empreint d'ignorance de ce qu'est une audience devant un chambre d'instruction ?

Et l'institution judiciaire a décidé. Elle a pris cette responsabilité - contrainte, bien sûr, forcée de faire un choix qui n'était qu'un choix par défaut. Mais qui restait un choix.

Parce qu'elle a pris à sa charge un problème qu'il ne lui appartient pas de résoudre, pire encore, qu'elle ne peut pas résoudre - le manque de place en hp, par exemple. Je rejoins donc complètement la position de Jalmad à ce titre. (votre post)

Oui. Mais en même temps, toujours en suivant votre hypothèse, l'institution judiciaire, selon moi, ne peut pas faire comme si l'élément manque de place n'existait pas.

Jalmad écrit que peut-être elle aurait opéré le même choix. Dans votre hypothèse, je pense au plus honnête de moi-même, que j'aurais beaucoup hésité et probablement choisi une solution d'attente, parce j'aurais été convaicu, peut-être et sans doute à tort, que la priorité pour ce monsieur était d'être hors circuit et hospitalisé. J'aurais fait confiance au rapport du psychiatre insistant sur sur le fait que ce monsieur

"relève de soins intensifs menés par une équipe polyvalente et aguerrie dans la prise en charge de ces pathologies".

.

170. Le jeudi 11 juin 2009 à 13:12 par Pax Romana

@ Fantômette (166)

Quelque chose me dérange toujours dans ce que vous dites, même si j'ai l'impression que nos analyses se rejoignent sur beaucoup de points.

Certes la place de cet individu n'était pas en prison, et que cela concerne le juge, garant des libertés individuelles. Mais accordons-nous en l'espèce à dire que sa place n'était pas non plus en liberté sans surveillance, et que cela concerne le juge, qui ne peut pas ignorer les nécessités qu'impose l'ordre public.

Admettons que le juge en ait parfaitement conscience, et estime que la place qui convenait était en hôpital psychiatrique. Cependant, la loi ne permet pas au juge de prendre une telle décision, qui est du ressort du préfet.

Dès lors, du point de vue du juge, qui doit attendre que le préfet prenne cette décision (et pense honnêtement que s'il ne l'a pas déjà prise, c'est du fait d'un manque de places), quelle est l'alternative ?

Elle est bien simple : soit il prononce le maintien en détention, et l'individu potentiellement dangereux pour lui-même et les autres reste un peu surveillé en attendant son placement d'office, soit il prononce la remise en liberté et, tel Ponce Pilate, dit au préfet que c'est lui que cela regarde maintenant.

Je trouve également la lettre de votre confrère malhonnête intellectuellement dans le sens où, en tant qu'avocat, elle ne peut ignorer que le juge doit prendre en compte l'ordre public, et doit tenir compte de cela dans sa plaidoirie. Or, c'est un point qu'elle semble ne pas du tout aborder, ne serait-ce que pour indiquer au juge qu'à son avis les risques que posent cette remise en liberté pour les autres doivent céder le pas face à l'inacceptable maintien en détention d'un irresponsable qui ne pourra être poursuivi de toute façon.

Par ailleurs, en rédigeant tout ceci, je me suis posé une question, à laquelle vous pourrez peut-être répondre : votre confrère aurait-elle pu, avec quelque chance de succès, s'adresser à la justice administrative (en référé, peut-être ?) pour contraindre le préfet à ordonner l'internement (en admettant qu'elle sache ne pouvoir obtenir de libération et qu'elle considère que c'est dans l'intérêt de son client d'être interné plutôt que détenu) ?

171. Le jeudi 11 juin 2009 à 17:07 par bernadic

A Pax romana

permettez-moi d'ajouter que l'avocate auteur du billet d'humeur aurait pu elle-même provoquer l'hospitalisation de son client en milieu psychiatrique et qu'elle n'avait pas forcément besoin de saisir la justice.

C'est un tiers comme un autre et l'hospitalisation à la demande d'un tiers est courante.

Mais c'est plus aisé de tout attendre de l'Etat.

172. Le jeudi 11 juin 2009 à 22:24 par Fantômette

@ Pax Romana,

Je crois que nous nous rejoignons en effet dans l'analyse de la problématique, telle qu'elle a pu être posée aux magistrats.

Du point de vue de la défense, nous avons en détention un mis en examen, souffrant de troubles psychiatriques suffisamment aigus pour que des experts se prononcent sur la nécessité de lui faire suivre des traitements adaptés (par parenthèses, et pour nourrir un peu plus la complexité du débat, cette conclusion n'est pas à la mode chez les experts-psychiatres, qui se posent parfois très lucidement la question de savoir s'ils souhaitent vraiment récupérer cet expertisé dans leur hôpital, plutôt que de le laisser en prison), qui, en souffrant au moment des faits, devrait voir rendre à son encontre une décision de non-lieu, et dont la pathologie est de nature à faire naître un doute sur la culpabilité réelle, ou à tout le moins, sur la fiabilité de ses aveux antérieurs.

Ce sont trois bonnes et juridiques raisons de le faire sortir de détention.

A ces trois excellentes raisons, vient s'en rajouter une quatrième, qu'il faut tout simplement rattacher à l'exercice par son avocat de ses qualités d'humanité (un devoir déontologique de l'avocat, rappelée par les termes de son serment). Le maintien en détention de son client est non seulement contestable sur un plan juridique, mais il entraîne un risque accru de passage à l'acte suicidaire.

Les magistrats de la chambre de l'instruction, mis au pied du mur par une plaidoirie qui s'était précisément donnée pour objectif - à mon sens - de les mettre au pied du mur, ont pris la mesure de l'ensemble de ces éléments, suffisamment pour qu'eux-mêmes, si l'on en croit les termes de la lettre ouverte, en conviennent. J'ajouterai que cela me semble à tout point du vue plausible, compte tenu de ce qui leur était mis entre les mains.

Je crois que nous nous suivons parfaitement jusqu'ici.

Si nous laissons de côté, dans le cadre de notre discussion, la question du délibéré de couloir (qui n'est cependant pas accessoire, et qui a pu à elle seule - à mon avis - pousser ma consœur à la rédaction de cette lettre ouverte), je vous rejoins également sur la légitimité des juges à prendre en considération la nécessité de sauvegarder l'ordre public dans le cadre de leur arrêt.

La question qu'il nous reste à résoudre est donc celle de savoir s'il appartient bien à l'autorité judiciaire de dégager de ses responsabilités une autorité préfectorale qui, in fine, dispose seule du pouvoir de prendre l'unique décision qui s'impose.

Je n'ai pas de réponse précise à votre question finale. C'est une question que j'ai également lancé sous ce billet, mais aucune réponse n'ayant été apportée, je reste avec l'impression persistante qu'aucun recours juridictionnel n'est possible.

Je peux vous proposer malgré tout ces quelques pistes de réflexion.

Pour commencer, comme il a été dit plusieurs fois, l'avocat se mettrait en délicatesse avec l'autorité disciplinaire s'il engageait une procédure contre la volonté de son client. Et par hypothèse, une hospitalisation d'office se fait contre le gré de la personne hospitalisée. Premier problème.

Vous allez répondre : mais s'il en va de l'intérêt de son client ?

Je crains que vous ne soyez sur le point de confondre deux notions différentes, l'irresponsabilité pénale d'une part, et l'incapacité juridique d'autre part. MO souffrait de problèmes psychiatriques sévères, mais pour autant, rien ne dit qu'il était devenu incapable. Et tant que son client est capable, l'avocat ne peut pas aller contre sa volonté clairement exprimée.

Elle aurait pu tenter de l'inciter à solliciter son hospitalisation s'il avait été libre - mais je ne suis pas certaine que cela marche dans le cas d'un détenu.

Et c'est là, me semble t-il, un autre obstacle, et de taille.

Je ne suis pas spécialiste du code de la santé publique, et si je me trompe, j'espère que quelqu'un viendra rectifier, mais il me semble que dès lors que la question de l'hospitalisation d'une personne détenue est posée, la seule procédure applicable soit bien celle des articles L3214-1 et suivants du CSP, qui ne prévoient tout simplement pas l'intervention d'un tiers quelconque.

La décision semble relever de la seule autorité préfectorale, sur le fondement d'un certificat médical circonstancié.

Il me semble donc que, pour pouvoir éventuellement avoir accès à la procédure d'hospitalisation d'office, ou sur demande d'un tiers, il fallait que ce mis en examen soit préalablement libéré.

Un dernier mot, à ce sujet, contrairement à ce que dit Bernardic, je ne suis pas certaine qu'une demande d'hospitalisation faite par un avocat à l'encontre de son client soit de toute façon recevable (au-delà du problème déontologique rappelé ci-dessus). Ce n'est pas n'importe quel tiers qui peut exiger l'hospitalisation d'office de qui lui semblerait pouvoir en tirer profit (et il faut s'en féliciter). Je note qu'il semble résulter de la jurisprudence sur la notion de "tiers y ayant un intérêt" que ce fameux tiers doit pouvoir exciper, en plus de l'intérêt qu'il a à agir, d'une connaissance antérieure à la manifestation de ses troubles du sujet. Ce ne serait pas le cas en l'espèce.

Une telle demande serait donc de toute façon vouée à l'échec, me semble t-il.

173. Le jeudi 11 juin 2009 à 22:34 par jalmad

Je pense que Fantômette est très proche de la réalité avec cette hypothèse "Si ce détenu sort, il ne sera pas mis en HP. Il sera dehors. Parce qu'il n'y a pas de place en HP actuellement. Laissons un peu de temps au préfet.".

C'est en cela que je dis que les magistrats intervenus dans ce dossier ont certainement agi en pensant prendre une solution à la fois raisonnable, justifiée par le droit (les critères légaux "ordre public", "nécessités de l'instruction", etc...), et pensant même être également de l'intérêt du mis en examen lui-même (à la limite, et je dis cela sans aucun cynisme, en se disant qu'il sera plus en sécurité à l'intérieur de la prison que dehors sans soin).

Encore une fois, je ne veux pas passer pour une donneuse de leçons, ma réflexion avance au gré de nos discussions, parce que je peux prendre du recul sur un dossier (dont j'ignore au demeurant toujours le détail) qui ne m'est pas passé entre les mains.

Mais je pense que le raisonnement est fossé : "laisser le temps au Préfet", c'est là que le bas blesse. Et bien non, justement, c'est peut-être cela qu'il ne fallait pas accepter : le prévenir du cas en amont en lui annoçant l'immente éventualité d'une mise en liberté pour lui laisser un temps suffisant, de l'ordre de quelques jours, oui ; mais pas plus ; pas les 5 semaines dont parle Me HL dans sa lettre. Le mettre au pied du mur, le Préfet.

Je m'explique : lorsqu'un forcené se retranche dans une barre d'immeuble avec des armes et menace de tuer tout le monde (je prends cet exemple, mais ça pourrait être n'importe quoi), qu'il est finalement interpelé mais que son état est jugé par un psychiatre incompatible avec une mesure de garde à vue, que fait l'institution judicaire ? rien, car elle ne PEUT rien faire. Et figurez-vous que dans ce genre de situations, le Préfet prend l'HO dans la minute ! Mes collègues parquetiers qui assurent la gestion de ces interfaces ne démentiront pas. Et nous, le monde judiciaire, on attend bien sagement que l'HO soit levée pour reprendre le cours de notre procédure (je schématise, la procédure peut avancer, mais pas d'audition de l'hospitalisé et certainement pas d'incarcération).

Tout ça pour dire qu'en cas d'urgence, le Préfet peut-être très réactif ; c'est l'essence même d'ailleurs de la mesure d'HO que d'être prise en urgence, puisque, si ce n'est pas urgent, c'est que peut-être l'HO n'est-elle pas si nécessaire que ça, n'est-ce pas ?

Sauf que la notion d'urgence est toute relative ; je gage par exemple que si un type est détenu, elle lui paraît moins prégnante au Préfet, cette urgence ; il peut se dire "oh, quoi, les Juges ne vont pas me le mettre dans la nature comme ça....". Et c'est là, je crois, qu'il ne faut pas céder : un présumé innocent détenu, dont des experts viennent nous dire qu'il devrait être déclaré irresponsable, qu'il a besoin de soins étayés qu'un établissement pénitentiaire ne peut lui donner, et qui pourrait s'accuser de faits non commis, et bien c'est une urgence, et ce ne devrait pas être négociable.

Je ne sais pas si vous allez comprendre le parallèle, mais je vais essayer d'être claire. Lorsque j'étais Juge des tutelles, j'ai, pendant toute une première partie de ma pratique, accepté de "céder" sur un tas de choses, et ce parce que je pensais, qu'au final, ces compromis avec les principes allaient dans l'intérêt du majeur protégé dont il s'agissait. Bien sûr, je ne me le formulais pas comme ça à ce moment là, mais aujourd'hui, c'est ainsi que je ne peux qu'analyser ces situations. Et j'ajoute que très peu de personne sont assistées d'un avocat dans cette matière ; et les media se contrefoutent de ce que font les Juges des tutelles dans le secret de leur cabinet. Le Juge est seul face à sa décision. Pourtant, on y parle d'avortement thérapeutique, de consentement à mariage ou adoption, de gestion d'un budget au quotidien, de choix d'aller en maison de retarite ou de rester chez soi.

Exemples :

- un jeune, qui a un peu de mal avec la gestion de son budget, mais surtout un sacré problème de boisson, m'est adressé par le service social pour une mesure de curatelle ; strictement parlant, il ne relève pas de la curatelle : pas de troubles psy, bien quelques dettes, mais en même temps il gagne 600 euros par mois et doit faire 60 km par jour pour se rendre à son boulot à mi-temps, et puis quand il a un souci, il n'hésite pas à solliciter le service social de secteur (et franchement, je vous parle du cas "type" vu des dizaines de fois). Et bien ce jeune, lorsque je le reçois, il m'explique que si je lui mets pas cette curatelle, l'OPHLM ne lui accordera pas de délais pour apurer ses 6 mois de loyers de retard et ve l'expluser, ou ne lui donnera pas de logement, ou encore la commission de surendettement refusera son dossier. Il n'invente rien, j'ai vu des courriers en ce sens d'OPHLM ou de la commission de surendettement.

- un homme sous tutelle doit se faire opérer en urgence pour un problème n'engageant certes pas son pronostic vital, mais, si l'opération intervient tardivement, il y a des risques de complication, et pendant ce temps, il souffre le martyre. L'hôpital vous faxe en urgence une autorisation d'opérer, sans vous fournir le moindre renseignement sur la pathologie, les soins envisagés, le bilan bénéfices/risques liés à l'opération. Bref, ils veulent une autorisation en blanc. Ils sont toubib, ils savent, pas vous.

Et bien, disais-je, dans un premier de temps, je "cédais" : je les mettais les curatelles, je les signais les autorisations d'opérer malgré le peu d'info que j'avais ; car après tout, un bon Juge des tutelles, il doit agir dans l'intérêt de son majeur protégé, et l'intérêt de ces personnes n'est-il pas d'avoir un toit, un plan de surendettement qui va les laisser souffler, de ne pas souffrir, d'avoir les soins appropriés dans les meilleurs délais ?

Et puis j'ai réagi, je me suis dit stop, c'est trop grave. Une curatelle, c'est trop grave ; c'est extrêmement attentatoire aux libertés : c'est de l'assistanat pour tous les actes de la vie civile, c'est la gestion du budget au quotidien par un tiers ("un scooter ? mais vous n'y pensez pas ! bien trop cher ! comment ça, vous êtes isolé socialement au fond de votre trou ! bon, d'accord, alors soit vous déménagez en ville, soit il va falloir arrêter de fumer pour financer l'assurance du véhicule. Les 5.000 euros d'héritage laissés par papa ? ah mais vous n'y pensez pas, il est bloqué sur un compte productif d'intérêts à 4,5 % pendant 8 ans, et ce n'est pas dans votre intérêt de casser ce plan !"). Alors non, je regrette, mais j'arrête de cautionner tout cela : je décroche mon téléphone, je discute avec la commission de surendettement et l'OPHLM en essayant de leur expliquer mon point de vue, mais ils ne le comprennent pas....Qu'à cela ne tienne, je change ma pratique quand même. Peut-être que des personnes, du fait de ma pratique, se sont vu refuser logements et plans amiables de surendettement ; je ne le saurai jamais, et si tel est le cas, j'en suis désolée. Mais pas responsable. Et je crois, avec le recul, que c'est cette décision qui était celle d'un Juge indépendant, garant des libertés individuelles.

Nouvelle demande de blanc seing d'un toubib pour une opération ? qui se fout de moi car il m'a fait le coup il y a 15 jours déjà et j'avais essayé de déployer trésor de pédadogie en lui faxant tous les textes de loi applicables, en lui expliquant la procédure, en lui expliquant que bien évidemment, le tuteur et moi-même ne pouvions donner un avis éclairé qu'avec un minimum d'explications, en lui rappelant (un comble quand même) le code de déontologie qui impose à un médecin, en cas d'urgence et d'impossibilité d'obtenir un consentement, de prodiguer les soins ? qu'à cela ne tienne, je lui faxe une ordonnance de refus de consentement à l'opération, motivée sur trois pages, lui rappelant ce que je lui avais expliqué 15 jours avant au téléphone. Marrant, j'ai appris que le toubib, après avoir assailli mon standard téléphonique, s'être vu notifer par mes soins que NON, je ne reviendrai pas sur cette décision, et sans doute après m'avoir copieusement insultée, avait opéré dans l'heure.

voilà, j'ai été longue, merci à ceux qui auront pris le temps de me lire jusqu'au bout. Mais je crois que ces questions touchent ce qui, dans notre quotidien, fait à la fois la difficulté et la noblesse de notre rôle de juge.

174. Le jeudi 11 juin 2009 à 23:02 par Fantômette

@ Jalmad,

Je n'ai pas eu l'occasion de vous remercier de vos commentaires, aussi lucides qu'éclairants. Je vous rejoins à 100% à propos de votre post 173.

Le principe devrait toujours être de laisser les problèmes entre les mains de ceux qui ont le pouvoir, les moyens et l'autorité pour les résoudre.

175. Le vendredi 12 juin 2009 à 08:03 par Véronique

@ jalmad

Merci pour votre commentaire qui a le grand mérite de placer le lecteur à un endroit où la perspective permet de la hauteur.

Et je crois, avec le recul, que c'est cette décision qui était celle d'un Juge indépendant, garant des libertés individuelles.

Mais je pense aussi que la décision d'un Juge indépendant, garant des libertés individuelles - ici le refus d'un trop peu d'explications d'un médecin pour autoriser comme ça, d'un coup d'un seul une opération, ailleurs un refus de mise en liberté en raison, peut-être, d'un manque de place dans un hôpital, ici et maintenant -, doit être expliquée et motivée formellement.

Et l'institution judiciaire a décidé. Elle a pris cette responsabilité - contrainte, bien sûr, forcée de faire un choix qui n'était qu'un choix par défaut. Mais qui restait un choix. (Fantômette - post 166)

Selon moi, la décision et le choix ne respectent véritablement les libertés individuelles que lorsque ils sont assumés pleinement, et en toute clarté et transparence.

Refuser à Me H-L sa demande de mise en liberté dont tout le monde convient, dans l'hypothèse de Fantômette, que cette mise en liberté n'était qu'une sorte d'outil juridique pour permettre une hospitalisation adaptée à l'état de santé de son client, devait être, selon moi, expliquée et motivée au-delà de deux ou trois cases cochées sur un formulaire.

Ce n'est pas même pas ou plus le volte face de la chambre d'instruction relaté par Me H-L qui est en cause ici, c'est l'idée du rejet par la chambre d'instruction de la demande de mise en liberté, sans explication, comme si l'audience n'avait jamais existé.

Je pense simplement qu'on garantit mieux l'indépendance du juge et les libertés individuelles quand le juge sait s'expliquer d'abord clairement et nettement à lui-même le pourquoi de sa décision, et quand le juge sait redire clairement et nettement à l'avocat ou au justiciable le pourquoi de telle ou telle décision.

176. Le vendredi 12 juin 2009 à 08:44 par Humstel

Que le Monstre Spaghetti Volant nous protege des juges dada.

177. Le vendredi 12 juin 2009 à 09:20 par sissi

J'ai lu le texte de ma consoeur qui m'a beaucoup touchée. On ne peut qu'y sentir la colère naturelle ressentie face à l'injustice, face au sentiment d'impuissance de celui qui a tout fait pour éviter un drame qu'il voyait venir mais s'est heurté à un mur judiciaire...

Je suis en revanche très choquée de la réaction de Gascogne, qui, en quelques lignes truffées de fautes d'orthographe, alterne mépris et arrogance. Mépris, en parlant de l'auteur de ce texte en disant "elle"... Arrogance en présumant que Madame Heinich-Luijer serait soit incompétente soit de mauvaise foi, et qu'il n'y a pas d'autre solution...Ce qui est non seulement totalement inexact mais encore empreint, pour le coup, d'une grande mauvaise foi...Car si les magistrats n'ont pas le pouvoir d'hospitaliser quelqu'un d'office, ce sont bien évidemment eux qui peuvent enclencher ce processus en saisissant le préfet et en ordonnant une mise en liberté. Il ne me semblait d'ailleurs en l'espèce que personne ne contestait cela... Cette réaction de la part d'un magistrat, ancien magistrat ou que sais-je encore ne me laisse guère d'espoir ...

Heureusement Sub Lege Libertas, vous me rassurez, en faisant preuve d'une grande humanité et d'une compréhension éclairée, sans pour autant vous priver de manifester certains désaccords. Merci...

178. Le vendredi 12 juin 2009 à 12:12 par Fantômette

@ Véronique,

Bien entendu, une décision motivée a plus de chances d'être comprise qu'une décision qui tombe comme un couperet.

Mais l'illisibilité apparente de l'arrêt, tel qu'il tombe sur ma consoeur, et (surtout) sur son client, n'est pas le seul problème. Le problème est celui de la déloyauté du procédé qui a consisté dans le fait de communiquer des éléments de faits à la chambre de l'instruction en cours de délibéré, sans que la défense n'en ait connaissance, et donc, ne puisse y répondre. Qui plus est dans le cadre d'un appel, c'est-à-dire pour une décision qui ne sera plus susceptible de recours.

Pour autant que mon hypothèse sur la teneur des éléments nouveaux invoqués par le MP soit exacte, je n'en nie pas la pertinence. Je ne nie pas d'avantage le fait que les conseillers pouvaient prendre la décision qu'ils ont prise sur ce fondement-là.

Mais la défense aurait du pouvoir en avoir connaissance, afin d'y répliquer.

Jalmad propose elle-même une réplique en défense qui me semble parfaitement recevable - et à laquelle je m'associerai sans hésitation.

Nous savons tous que la préfecture sait prendre des décisions rapides, à condition qu'on la mette face à l'impérieuse nécessité d'en prendre une. Si nous lui épargnons de subir elle-même la contrainte de l'urgence, elle sera tentée de n'en tenir pas compte - ou en tout cas, vous en prendrez le risque. La réalité de ce dossier est que nous sommes dans une situation d'urgence, d'extrême urgence. Ne vous laissez pas tenter de la camoufler derrière une incarcération qui n'est plus ni juste, ni utile - et de prendre ainsi à votre charge une responsabilité que vous n'avez pas pour fonction d'assumer.

Les conseillers se seraient-ils laissés convaincre ou non, nous ne le savons pas, et nous ne le saurons jamais.

Mais ils se sont privés d'entendre la défense sur cette question précise, et sauf à nier que la défense pénale présente le moindre intérêt, cela suffit à rendre leur décision moins bien fondée que celle qu'ils auraient pu prendre.

179. Le vendredi 12 juin 2009 à 13:20 par jalmad

il y a eu un pb quand j'ai posté, je retente, mais si ça fait doublon, hésitez pas à couper !

@ Veronique : vous avez tout à fait raison, motiver une décision judiciaire est une obligation, une saine obligation qui permet aux justiciables de comprendre les décisions qu'on leur impose.

Parfois aussi de faire passer des messages ; mais cela, c'est mon avis et une pratique personnelle que je n'adopte que ponctuellement, lorsque la situation me semble le permettre, et depuis peu de temps (disons depuis que je me sens suffisamment à l'aise et lorsque je pense avoir une idée assez fine de mes délais, d'où je vais, ce que je cherche dans une procédure, etc...). Mais, je le dis tout de suite, certains de mes collègues, peut-être à juste titre, condamneraient cette pratique en disant que je joue à un jeu dangereux en prenant à demi-mot des engagements que je ne pourrai peut-être pas tenir (survenance d'un élément nouveau ; retard d'exécution par un service d'enquête, etc...). Par exemple, j'ai une demande de mise en liberté que je rejette et je saisis le JLD ; je motive bien évidemmet mon refus par les critères légaux qui me semblent adaptés et qui fondent ma décision, mais, si je pense qu'en effet cette détention ne devra pas durer trop longtemps derrière, je glisse une ou deux phrases expliquant (sauf nécessité absolue de secret, risque de consertation, etc...évidemment !) rapidement mais précisément les actes de procédure en cours qui motivent la poursuite de la détention et dans quel délai j'estime qu'ils devraient pouvoir s'accomplir, ou alors si c'est le cas, qu'en l'état il n'y a pas de projet convaincant de sortie présentant des garanties de représentation, ou alors qu'un éloignement conséquent du lieu d'habitation des victimes paraît nécessaire, etc....Bref, SI L'AVOCAT SAIT LIRE ENTRE LES LIGNES, il devrait comprendre qu'en cas de demande de mise en liberté après ces actes, ou avec un projet de sortie plus étayé, ou en proposant un éloignement, ou que sais-je, ce devrait-être gagné (au moins pour le Juge d'instruction).

Mais ça, comme je vous l'ai dit, c'est ce que je fais aujourd'hui, et dans certains cas précis.

Mais, pour reprendre mes histoires de curatelle : lorsque je les prononçait ces curatelles de "complaisance", pensez-vous que je visais au rang de mes motifs "attendu que la personne risque l'explusion en cas d'absence de curatelle car l'OPHLM exerce un odieu chantage" ou encore "attendu que la commission de surendettement estime qu'un RMIste seul et sans enfants ayant 2.000 euros de dettes de loyers, fioul, facture de garage, est un incapable majeur à qui on ne peut pas faire confiance et qui, sans curateur, ne respectera pas son plan amiable de surendettement et ira tout claquer au PMU" ??? euh, non...pas vraiment. De l'habillage juridique on fait : on parle de "prodigalité" (c'est un des critères de la curatelle), on insiste bien sur le fait que la personne elle-même souhaite la mesure, etc....

et bien là, je pense que quand Me HL parle d'une décision "sans explication", c'est un abus de langage, ou plutôt dans le sens figuré, car, je ne doute pas une seconde que la décision est motivée en droit, et parfaitement motivée par la Chambre ; je pense qu'elle parle du décalage entre ce qu'elle a pu ressentir après les débats à l'audience et les motifs de la décision ; comme un ressenti d'"habillage juridique" en fait. Outre, en effet, ce pb souligné à juste titre par Fantômette d'impossibilité de répliquer à un élement (délai supplémentaire nécessaire pour le Préfet), non mis dans le débat, à supposer, bien évidemment, que cet élément at été donné à l Chambre par le Parquet hors audience avant le délibéré et a pesé sur la décision (j'estime que les propos de Me HL ne sont pas suffisamment clairs pour me faire une opinion sur ce point, même si je la soupçonne d'aucune mauvaise foi, et à vrai dire, j'ai déjà expliqué qu'à mes yeux ce point était "accessoire" au pb).

180. Le vendredi 12 juin 2009 à 13:30 par Véronique

@ Fantômette

J'ai bien saisi le caractère très gravement contraire à l'éthique et à la règle judiciaires, attentatoire aux droits de la défense d'un délibéré de couloir.

Ce que je ne saisis pas dans cette affaire telle qu'elle est relatée par Me H-L, c'est le pourquoi du délibéré du couloir. Dans mon esprit, si le procureur était opposé à la mise en liberté de ce monsieur, l'argument du pas de place en hôpital dans l'immédiat pouvait tout à fait être dit à l'audience. Je pense également que du point de vue du juge cet argument pouvait être pris en considération. Sans que personne ne puisse réellement leur reprocher cette décision.

Donc, très simplement simplistement, je ne vois pas la nécessité pour le procureur de cacher à l'avocat durant l'audience un élément comme celui du manque de place.

Vous plaidez la situation d'urgence, d'extrême urgence. Ce monsieur était en détention provisoire depuis 18 mois. A mon avis, dans l'esprit des juges, le caractère d'urgence de la situation pouvait être pas mal dissout par la durée du temps déjà passé en détention par ce monsieur. D'autant plus que ni le médecin de la prison, ni le directeur de la prison n'ont pas, de leur côté, alerté sur le risque suicidaire du client de Me H-L.

181. Le vendredi 12 juin 2009 à 14:16 par jalmad

@Veronique

je ne vois pas la nécessité pour le procureur de cacher à l'avocat durant l'audience un élément comme celui du manque de place.

Vous avez tout à fait raison, et c'est ce qui explique à mon sens les réactions heurtées de pas mal de mes collègues sur ce point : même à supposer etc....(je vous la refais pas, hein?), je suis prête à mettre mes mains au feu que le Ministère public n'était animé d'aucune intention maligne à l'égard de la Défense (sinon d'ailleurs, il se serait bien gardé d'aller s'en vanter après auprès d'elle !). Mais, comme on dit, l'enfer est pavé de bonnes intentions.

Je vous le refais en clair :

ATTENTION, CECI EST UNE FICTION :

le Président : "l'affaire est mise en délibéré à après-demain", d'un air manifestement bien embêté de celui qui vraiment, a conscience qu'on a affaire à un cas épineux.

Me HL s'en va remplie d'espoir.

L'Avocat Général remonte dans son bureau, lui aussi très embêté, car sentant bien que cette situation est délicate, sensible à la nécessité pour MO d'avoir accès aux soins appropriés, mais convaincu, non sans doute sans raison, que le remmettre dehors sans s'assurer du relai de l'HO, serait irresponsable ; il décroche son téléphone, appelle la Préfecture et se fait expliquer que "oui oui, ce cas a été signalé, c'est en cours, mais il n'y a pas de place actuellement ; c'est une question de jours, nous avons bien compris l'urgence de la situation". Puis il croise le Président de la Chambre, ou l'un des conseillers, et lui fait part de cette communication téléphonique. Sans penser à mal.

La décision est rendue. L'avocat Général va voir Me HL pour la "rassurer" sur le sort de son client, en lui disant que le Préfet devrait réagir d'ici quelques jours.

182. Le vendredi 12 juin 2009 à 15:33 par Fantômette

@ Véronique,

Pas plus que Jalmad je ne suspecte l'Avocat Général d'avoir sciemment caché l'existence de ce problème à l'audience pour pouvoir en parler en tête à tête avec les conseillers. Je suis d'accord avec vous, cela n'aurait aucun sens et si telle avait été son intention, il n'en aurait évidemment pas parlé à l'associée de Me H-L. La fiction imaginée par Jalmad est parfaitement plausible, et en tout état de cause, l'explication la plus simple est que l'information lui a été communiquée à lui-même après l'audience et en cours de délibéré.

Et le problème redevient alors celui de l'inertie de l'administration et des moyens de faire peser sur elle l'obligation de trouver rapidement une solution.

A propos de l'urgence, je n'entends pas votre argument.

Alors selon vous, dès lors que quelqu'un aurait passé plusieurs mois ou plus d'un an en prison, il n'y aurait plus d'urgence à l'en sortir, quasiment par définition ? Vous me surprenez. A priori, l'urgence venait d'un risque suicidaire accru, pour des raisons tenant à la pathologie du détenu. Dès lors qu'un ensemble d'éléments nouveaux venaient s'accumuler qui tendaient à fragiliser la légalité du maintien en détention et à faire naître un doute sur la culpabilité du prévenu, la logique qui voudrait que "au point où il en est, ce n'est pas un petit mois supplémentaire qui va changer grand chose" est une logique dont je veux même pas supposer qu'elle puisse effleurer l'esprit des conseillers.

183. Le vendredi 12 juin 2009 à 15:51 par biarnes

Des si, des conjectures et des procès d'intention.

Vous puvez toujours refaire le monde!

184. Le vendredi 12 juin 2009 à 15:51 par biarnes

Des si, des conjectures et des procès d'intention.

Vous pouvez toujours refaire le monde!

185. Le vendredi 12 juin 2009 à 20:15 par Véronique

@ jalmad

et bien là, je pense que quand Me HL parle d'une décision "sans explication", c'est un abus de langage, ou plutôt dans le sens figuré, car, je ne doute pas une seconde que la décision est motivée en droit, et parfaitement motivée par la Chambre ; je pense qu'elle parle du décalage entre ce qu'elle a pu ressentir après les débats à l'audience et les motifs de la décision ; comme un ressenti d'"habillage juridique" en fait.

Je ne doute pas moi non plus que la décision ait été motivée en droit. Mais je pense vraiment que même si l'avocat peut lire entre entre les lignes, ce qui est écrit, est écrit. Il reste que les juges devraient, selon moi, détailler leur raisonnement pour mettre en évidence les éléments qui les conduisent à choisir telle ou telle position. Ne serait-ce que pour fortifier pour eux-mêmes leur décision.

Si l'argument manque de place est recevable d'un point de vue d'ordre public, mais également d'un point de vue nécessité d'un encadrement médical et de soins, et d'un encadrement tout court pour la personne, il me semble préférable que les juges développent les éléments du dossier qui, selon eux, les conduisent à privilégier telle ou telle option.

Et puis, dans l'hypothèse Fantômette et dans la vôtre, quand bien même l'avocat général aurait appris après coup l'impossibilité d'une hospitalisation pouvant prendre de suite le relais de la détention, ce qui est dit, est dit. Après l'audience, c'est trop tard.

Dans votre hypothèse, le respect des règles de droit - ne pas priver un avocat d'une information essentielle à la résolution de la question posée - imposait, selon moi, que la décision de la chambre d'instruction ne soit pas validée par les magistrats présents. Je pense que les juges pouvaient décider qu'il leur était impossible de prendre une décision, compte tenu de l'information transmise après coup par l'avocat général.

Mais je sais pas si se déclarer dans l'impossibilité de rendre une décision est judiciairement envisageable et possible.

@ Fantômette

J'ai voulu dire que 18 mois de détention sans autre observation ou alerte ( médecin de la prison, directeur de la prison) que celle de l'avocat peut laisser penser aux juges que le caractère d'urgence, voire d'extrême urgence quant au risque de suicide, n'est peut-être pas aussi prégnant que ce que l'avocat peut en dire.

Et que oui, 18 mois d'instruction et de détention ont pu avoir comme conséquence de banaliser le dossier.

L'expert ( vous) avait alerté sur le fait qu'il « relève de soins intensifs menés par une équipe polyvalente et aguerrie dans la prise en charge de ces pathologies ».(lettre de Me H-L)

L'expert alerte là sur le fait que ce monsieur était gravement malade, schizophrène, et sur le fait que sa pathologie nécessitait une prise en charge de qualité. Je pense que le propos de l'expert est de suggérer fortement la voie de l'irresponsabilité pénale. Je ne pense pas que son propos signifie à coup sûr que le risque de suicide soit imminent.

186. Le vendredi 12 juin 2009 à 22:32 par Sissi

@ Véronique : donc, si je vous suis, le fait que son avocat, qui le connaît, qui a l'occasion de le visiter en prison, indique : "A la Chambre de l'instruction, je leur ai dit que je venais plaider pour que ce ne soit pas de ma faute, le jour où il se suiciderait, je voulais les mettre en face de leur responsabilité'" ne suffit pas à ce que l'on prenne au sérieux un risque imminent de suicide? C'est dommage, je trouve, de considérer que, parce que cela vient "seulement" d'un avocat, cela n'est pas une très réelle alerte à prendre très au sérieux...La preuve, en l'espèce, cela l'était...

187. Le samedi 13 juin 2009 à 07:30 par Véronique

@ Sissi

A la Chambre de l'instruction, je leur ai dit que je venais plaider pour que ce ne soit pas de ma faute, le jour où il se suiciderait, je voulais les mettre en face de leur responsabilité

Vous savez, cette phrase est comme un coup de poing. C'est là, pour moi, lisant la lettre de Me H-L, que j'ai pris, je pense, une mesure du drame et du malheur humains qui se sont joués ce jour-là pour ce monsieur et pour son avocat. La simplicité du ton de la phrase qui authentifie un total désespoir.

Car ce qui pour moi saute à l'esprit et au coeur dans cette phrase, c'est la très grande solitude professionnelle de Me H-L. Terriblement seule et terriblement consciente que quelque chose de très grave pouvait, allait arriver, à son client.

Nous, nous connaissons l'issue de l'histoire.

Sauf à considérer que les magistrats de l'épisode chambre d'instruction soient des glaçons ambulants, des sortes de machines à rendre des décisions, ce que je ne pense pas une seconde. Parce que très simplement l'épisode chambre d'instruction, y compris l'épisode avocat général tentant de relativiser auprès de l'avocat le refus de la CI qui sont relatés par Me HL, indiquent pour moi qu'au fond, le malheur de ce drame réside dans l'idée, l'hypothèse, que toutes les données de la question posée ce jour-là, n'étaient pas maîtrisées comme il aurait fallu qu'elles le soient par l'ensemble des magistrats présents.

Quand je dis à Fantômette que du point de vue du juge, l'analyse de l'avocat est non corroborée par des observateurs en situation de proximité avec ce monsieur, je pense que je suis dans un raisonnement propre à un juge qui recherche à mettre en évidence l'aspect concordant de faits, de témoignages ou d'observations qui lui permettent de fiabiliser son analyse.

je voulais les mettre en face de leur responsabilité

Je pense que la responsabilité pour les juges, ce jour-là, n'était pas seulement et strictement celle liée au devenir judiciaire de ce monsieur, mais que d'autres impératifs, qu'on le veuille ou non, qu'on l'accepte ou non, étaient aussi en jeu.

Je suis désolée d'utiliser des mots qui pourraient laisser penser que nous sommes dans une sorte de fiction et d'enjeu, au sens de jeu. Mais je ne trouve pas les mots qui conviennent pour exprimer ce que je voudrais dire. L'utilisation de l'italique exprime mon malaise.

188. Le samedi 13 juin 2009 à 12:18 par Fantômette

@ Véronique,

J'aurais du mal à croire que seule l'avocate de MO avait perçu le risque d'un passage à l'acte suicidaire imminent.

Elle ne le voyait que ponctuellement. L'administration pénitentiaire l'avait à l'œil tous les jours. Qui plus est, ce détenu souffrant de pathologies psychiatriques sérieuses, il est évident qu'il était a fortiori surveillé assez étroitement. Il était médiqué. Il devait donc également voir un psychiatre intervenant en détention, pour le renouvellement de ses ordonnances et éventuellement vérification de ce qu'il suivait le traitement. Il est probable qu'il voyait également un psychologue, et plus généralement, le personnel médical de l'établissement public de santé, très probablement.

Ce risque suicidaire était fort vraisemblablement corroboré par d'autres sources que la seule voix de la défense.

D'ailleurs, ni les conseillers à la chambre de l'instruction ni l'avocat général n'ont contesté l'existence du risque, ou de l'urgence d'ailleurs.

189. Le samedi 13 juin 2009 à 13:31 par Véronique

@ Fantômette

Je pense juste que si tel avait été le cas, du moins si Me HL avait eu même le moindre écho quant à une observation ou à un constat établi par l'administration pénitentiaire au sujet d'une situation préoccupante, voire très préoccupante, liée à l'état psychologique et/ou psychique de son client, Me HL, sans hésiter une seconde, l'aurait écrit dans sa lettre.

190. Le dimanche 14 juin 2009 à 02:29 par Mike

En réaction à certains posts (notamment en réponse à Jalmad en 181), je crois nécessaire de revenir sur la question du délibéré de couloir et démontrer que, loin de constituer un élément accessoire dans ce dossier, elle y tient au contraire un rôle central et critique.

Le témoignage de Jalmad m'apparaît hautement instructif et je le prendrai comme point d'appui de ma réflexion, non seulement parce qu'elle affirme que cette question du délibéré de couloir est à ses yeux accessoire, mais parce que, parallèlement à cette affirmation, elle développe son analyse de ce cas à partir de deux séries de considérations fondamentales.

Je résumerai ces deux considérations de la manière suivante, en essayant de mon mieux d'être fidèle à ses propos:

  1. Les magistrats, tant ceux de la formation de jugement que le Procureur ne sont animés par aucune intention maligne mais agissent de bonne foi selon ce que leur dicte leur sentiment de justice
  2. Le sentiment de justice des magistrats est déterminé par une balance des intérêts qu'il leur appartient de faire entre, d'une part, les droits et l'intérêt de l'individu incarcéré et, d'autre part, un ensemble de considérations (que j'appellerai par commodité l'intérêt général) qu'ils ne peuvent ignorer (ordre public, risque pour la personne elle-même, manque de moyens, demandes du Préfet, etc.).


La conclusion de Jalmad est tirée de son expérience personnelle. Telle que je la comprends, elle consiste à dire que certains éléments mis dans le plateau de la balance du côté de l'intérêt général ne sont pas légitimes à y figurer du point de vue du droit mais que les juges ont tendance à céder aux contraintes qu'ils représentent et à les prendre en compte dans leur décision. Selon Jalmad, c'est en résistant à ces contraintes extrinsèques au droit stricto sensu que la décision prise est le mieux celle d'un Juge indépendant, garant des libertés individuelles.

Mon propos n'est pas de contester cette partie de l'analyse. Je crois que Jalmad a raison sur le point 1 et que les juges, tout comme le Procureur, agissent avec les meilleurs dispositions d'esprit et ne tendent que vers leur sentiment respectif de justice.

Je peux également accepter le point 2 de l'analyse de Jalmad, tel qu'elle le tempère en conclusion, et qui ressemble à ce que l'on pourrait appeler une théorie de l'utilitarisme moyen de la justice : la décision qui doit être prise est celle qui suggère le meilleur résultat utilitaire pour la société et qui ne sacrifie pas excessivement les droits de l'individu, c'est à dire celle qui contrebalance ces droits par les seules considération contraires juridiquement légitimes.

Ce que je soutiens, en revanche, c'est que cette analyse (conclusion comprise) n'est pas compatible avec l'affirmation concomitante du caractère secondaire du respect du contradictoire et du délibéré de couloir.

Reprenons le cas (dramatique) à l'origine de cette discussion avec la grille de lecture de Jalmad : les juges, au moment ils statuent, déterminent la décision qui leur paraît la plus conforme à la théorie de l'utilitarisme moyen.

Les juges n'ont cependant, à ce moment, aucune certitude que leur décision est effectivement celle qui est le plus conforme à cette théorie. Le résultat de leur décision ne pouvant se révéler, par définition, que dans le futur, il peut parfaitement s'avérer qu'ils se sont trompés.

En l'espèce, si les juges avaient pu connaître le résultat final de leur décision, ils ne l'auraient pas prise parce qu'elle sacrifie de manière excessive les droits essentiels de l'individu. Conformément au point 1 et à la conclusion de l'analyse de Jalmad, en effet, aucun magistrat n'aurait accepté que la balance penche du côté de l'intérêt général si dans l'autre plateau figurait la mort certaine de l'individu incarcéré. En tout cas, ils n'auraient pas accepté cette issue s'il n'y avait pas dans le plateau de l'intérêt général d'autres considérations plus éminentes que celles qu'il y avait dans le présent cas.

Il importe ici de faire une distinction : le fait que le résultat final de la décision prise ne s'avère pas conforme au résultat escompté n'invalide pas pour autant la théorie de l'utilitarisme moyen de la justice. Pour que cette théorie soit respectée, il faut et il suffit que, au moment où les juges statuent, cette décision apparaisse objectivement comme celle le plus apte à atteindre cet objectif au regard des éléments dont disposent les juges. En ce sens, les juges ont un droit à l'erreur.

C'est là que s'intercale la question du délibéré de couloir et son importance cruciale dans la détermination de la décision la plus juste, c'est à dire celle qui fera le mieux la balance des intérêts avant que le voile ne soit levé sur le résultat final de cette décision.

Parce que ce résultat final ne peut que faire l'objet d'un pari, le débat contradictoire constitue l'étape charnière au cours de laquelle les jeux doivent être fait. C'est là que se dessine la consistance des intérêts et droits qui vont figurer dans le plateau de l'intérêt individuel de la balance des magistrats. C'est là que l'individu et son avocat vont mesurer la consistance de l'intérêt général défendu par le parquet et tenter de convaincre le juge que la balance doit pencher de leur côté. Ce débat est une sorte de lutte, dans laquelle les juges doivent demeurer neutres et se contenter de tenir la balance.

Dans ce schéma, le débat contradictoire est primordial : tout ce qui intervient après ce débat et qui n'est pas porté à la connaissance de l'individu prive illégitimement ce dernier de la possibilité de défendre ses droits et intérêts face aux intérêts concurrents.

Ceci explique l'attachement du droit à la procédure contradictoire et le fait que tout avocat normalement constitué ne peut supporter, au sens viscéral du terme, sa violation.

Ici s'impose une deuxième distinction : le fait que le résultat final d'une décision prise en méconnaissance des droits de la défense s'avère le plus conforme au résultat escompté n'est pas apte à faire regarder cette décision comme conforme à la théorie de la justice. Les jeux sont faits avant la levée du voile d'ignorance.

C'est à ce point que l'analyse de Jalmad est à mon sens érronée.

Ce qui précède explique que l'on invalide des décisions conformes au sentiment d'équité mais prises au terme d'une procédure inéquitable. Le processus de décision, en tant que pari sur un résultat final, est en effet une question centrale et la seule qui permet de garantir qu'une décision est juste, c'est à dire conforme à la justice.

Si les magistrats ont un droit à l'erreur quant au résultat final d'une décision, il n'ont aucun droit à l'erreur quant au processus de détermination de cette décision. Il s'agit d'une faute grave et, en l'espèce, pour reprendre les termes de Marguerite, d'une infamie.

191. Le dimanche 14 juin 2009 à 16:45 par jalmad

@Mike 190 je vous suis totalement dans votre démonstration, et je reviens juste sur le terme "accessoire" que j'ai employé pour qualifier ce délibéré de couloir : je n'utilisais pas ce qualificatif (certes maladroit) pour dire que ce type de procédé, parce qu'animé d'une bonne intention, n'était pas criticable et qu'il ne fallait pas s'en offusquer, ou encore qu'il n'a eu aucune incidence sur la décision finale. Je disais cela dans le sens où je considère, qu'EN SOI, votre théorie dite d'utilitarisme moyen est une abdication du Juge lorsqu'elle aboutit à faire primer des considérations pratiques sur les libertés individuelles ; ce point m'apparaissait central dans la discussion, et, peut-être avoir été plus déterminant dans la décision des juges successifs que ce problème de violation du contradictoire (mais je peux me tromper, et, en effet, on ne le saura jamais dans la mesure justement où la défense est privée de droit de répliquer).

Je pense que si vous relisez l'ensemble de mes post, vous verrez que je n'essaye pas de me "raccrocher" aux branches ; j'ai bien évidemment acquiescé aux développements de Fantômette sur ce point ; et lorsque j'ai dit que c'est sans doute sans malignité qu'avait agi l'Avocat Général, ce n'était pas pour banaliser ou justifier ce procédé, mais simplement pour essayer d'expliquer qu'il n'y a pratiquement jamais les gentils d'un côté, et les méchants de l'autre qui s'assoient allègrement sur les droits de la Défense ; c'était le sens de l'expression "l'Enfer est pavé de bonnes intentions" que j'employais.

Que les avocats s'offusquent viscéralement d'une telle atteinte au contradictoire, je trouve cela non seulement normal, mais salutaire ; je suis de ces juges d'instruction qui déplorent que la majorité des avocats n'interviennent pas plus au cours de l'information (en termes de demandes d'actes, etc...), et que certains sont trop complaisants à l'égard de l'autorité judiciaire (vous savez, ceux qui s'excuseraient presque de soulever une nullité à l'audience) !

192. Le dimanche 14 juin 2009 à 16:45 par jalmad

@Mike 190 je vous suis totalement dans votre démonstration, et je reviens juste sur le terme "accessoire" que j'ai employé pour qualifier ce délibéré de couloir : je n'utilisais pas ce qualificatif (certes maladroit) pour dire que ce type de procédé, parce qu'animé d'une bonne intention, n'était pas criticable et qu'il ne fallait pas s'en offusquer, ou encore qu'il n'a eu aucune incidence sur la décision finale. Je disais cela dans le sens où je considère, qu'EN SOI, votre théorie dite d'utilitarisme moyen est une abdication du Juge lorsqu'elle aboutit à faire primer des considérations pratiques sur les libertés individuelles ; ce point m'apparaissait central dans la discussion, et, peut-être avoir été plus déterminant dans la décision des juges successifs que ce problème de violation du contradictoire (mais je peux me tromper, et, en effet, on ne le saura jamais dans la mesure justement où la défense est privée de droit de répliquer).

Je pense que si vous relisez l'ensemble de mes post, vous verrez que je n'essaye pas de me "raccrocher" aux branches ; j'ai bien évidemment acquiescé aux développements de Fantômette sur ce point ; et lorsque j'ai dit que c'est sans doute sans malignité qu'avait agi l'Avocat Général, ce n'était pas pour banaliser ou justifier ce procédé, mais simplement pour essayer d'expliquer qu'il n'y a pratiquement jamais les gentils d'un côté, et les méchants de l'autre qui s'assoient allègrement sur les droits de la Défense ; c'était le sens de l'expression "l'Enfer est pavé de bonnes intentions" que j'employais.

Que les avocats s'offusquent viscéralement d'une telle atteinte au contradictoire, je trouve cela non seulement normal, mais salutaire ; je suis de ces juges d'instruction qui déplorent que la majorité des avocats n'interviennent pas plus au cours de l'information (en termes de demandes d'actes, etc...), et que certains sont trop complaisants à l'égard de l'autorité judiciaire (vous savez, ceux qui s'excuseraient presque de soulever une nullité à l'audience) !

193. Le lundi 15 juin 2009 à 12:46 par Fantômette

@ jalmad

"...EN SOI, votre théorie dite d'utilitarisme moyen est une abdication du Juge lorsqu'elle aboutit à faire primer des considérations pratiques sur les libertés individuelles ; ce point m'apparaissait central dans la discussion, et, peut-être avoir été plus déterminant dans la décision des juges successifs que ce problème de violation du contradictoire"

Il me semble qu'il y a donc bien ici une divergence d'opinions avec Mike (mais, Mike, si je me trompe sur ce que vous vouliez dire, n'hésitez pas à rectifier).

Dans son post, Mike introduit une considération supplémentaire, liée à la temporalité judiciaire, qui est celle du bon moment, du timing, qui vient complexifier la discussion sur la question de savoir s'il était opportun ou de prendre en compte les contingences matérielles entourant une éventuelle remise en liberté du mis en examen.

Si je vous suis, jalmad, vous avez utilisé le terme accessoire pour qualifier le délibéré de couloir, non dans une acception destinée à en amoindrir l'importance, mais pour renvoyer à l'idée qu'il s'agit d'un problème secondaire, au sens littéral de ce qui vient en second. Dans vos différents posts, vous insistez surtout sur le risque qu'il y a à laisser les contingences matérielles primer sur les impératifs juridiques.

L'opinion de Mike est symétrique à la vôtre, en ce sens où, tout en acquiesçant à votre position sur ce point, il insiste en réalité sur ce qui, à ses yeux, est bien primordial, et non pas secondaire : le moment où l'ensemble des éléments qui serviront au juge à se déterminer et voir de quel côté penche la balance est le moment de l'audience.

L'audience, c'est "l'horizon des évènements" - pour le ministère public, comme pour les avocats, une limite indépassable. Pour une raison qui tient, non seulement à la procédure pénale et ses principes directeurs, mais également aux limites et aux contraintes inhérentes à la fonction de juger.

Par parenthèse, pour répondre à Véronique sur ce point, les juges n'ont pas le droit de refuser de juger, ce serait un déni de justice, c'est rigoureusement interdit.

La Cour, saisie, doit répondre. Elle pèse le pour et le contre, et tranche. Mais elle doit renoncer à avoir tous les éléments qui lui permettraient de trancher en toute connaissance de cause, car la toute connaissance de cause est ce vers quoi l'on tend, mais qu'à défaut de ne jamais atteindre, on doit se contenter de poursuivre. Le moyen de la poursuivre et de l'approcher au plus près, dans notre théorie judiciaire, c'est le débat contradictoire.

La tergiversation n'étant évidemment pas envisageable, il est donc bien primordial - au sens littéral de ce qui vient en premier - de clôturer contradictoirement le débat.

Avant de savoir si tel intérêt, si tel argument, a vocation à entrer en ligne de compte dans la décision du juge, il faut l'intégrer au débat.

Je crois que là se situe précisément le point de bascule entre votre opinion et celle de Mike.

194. Le lundi 15 juin 2009 à 13:39 par Marguerite

et si l'avocat général reçoit une info complémentaire qui pourrait changer la décision et qu'en son âme et conscience il estime devoir porter à la connaissance des juges au cours du délibéré, il peut, tout comme les avocats, demander une réouverture des débats, par une courte note qu'il communique aussi à son (ses) contradicteurs, qui peuvent s'y associer ou s'y opposer, puis la juridiction décide de se contenter des débats qui se sont déroulés devant elle ou de les réouvrir. On a tous les outils, je crois.

195. Le lundi 15 juin 2009 à 13:57 par jalmad

@Fantômette :

j'assaye de vous la refaire en clair : accessoire au sens de secondaire, oui et non.

ce que je voulais surtout dire au départ, c'est qu'indépendamment de ce pb de délibéré de couloir, Me HL aurait de toutes façons eu, à mes yeux, toute légitimité pour être en colère car la décision de maintien, au vu de l'expertise, interroge (cf mes précédents développements). Ce que je voulais aussi surtout éviter, c'est que le débat se focalise uniquement sur la réalité ou non de ce délibéré de couloir, avec camps retranchés des "qui y croient" et des "qui y croient pas", étant précisé que je me suis hasardée à une hypothèse sur ce point, mais que j'estime que les termes du courrier de Me HL sont trop vagues popur savoir précisément ce qui s'est passé.

Puis, en y réfléchissant, j'ai pensé que cette décision aurait de toutes façons été prise même si ce délai d'attente pour le Préfet avait été mis dans le débat et la Défense en mesure de répliquer. Juste parce que je sais que ça soulage énormément et que ça facilite l'abdication déjà évoquée lorsqu'on peut se dire "ce n'est que l'affaire de quelques jours".

Puis, en effet, aujourd'hui, je me rends à vos arguments (Mike, si tu nous lis !), car en y resongeant, je sais bien qu'il y a rarement une cause unique dans une prise de décision, qu'on pèse chaque élément qui peut parfois même se révéler à double tranchant (ainsi de la durée de DP de 18 mois : je vous suis mais je suis aussi Véronique : à la fois 18 mois, ça fait long de DP et ça augmente le risque, mais à la fois, on a vite fait de se dire que depuis 18 mois qu'il y est, on n'a pas eu de tentative de suicide...), et qu'au final, lorsqu'on est en pareille matière, dans un tel cas, une Défense bien envoyée peut emporter la conviction, et que, oui, vous avez raison, priver celle-ci de réagir sur ce soit-disant relai de l'HO dans les meilleurs délais, a dû peser.

196. Le lundi 15 juin 2009 à 15:12 par Véronique

@ Mike, Fantômette, Marguerite, Jalmad

Le journal Le Parsien http://www.leparisien.fr/creteil-94000/l-avocate-du-detenu-suicide-clame-sa-colere-05-06-2009-537504.php a publié un article sur cette affaire le 5 juin dernier.

Je pense qu'il est intéressant d'en prendre connaissance.

Ce qui me paraît important de citer de l'article.

" « Depuis plusieurs semaines, il était en détention ordinaire. Pire, alors que des experts avaient clairement dit qu’il relevait des soins intensifs et qu’il était dangereux pour lui-même, on l’a laissé seul dans une cellule du grand quartier. » " (Me HL au Parisien)

" Selon le parquet de Créteil, il n’y a pas eu une mais deux expertises. « La première a conclu à une responsabilité atténuée du suspect, la deuxième estimait, au contraire, qu’il n’était pas accessible à une sanction pénale », indique le procureur. Le juge d’instruction a donc demandé un troisième avis.Entre-temps, Laure Heinich-Luijer a déposé une demande de remise en liberté. Celle-ci sera rejetée en première instance, puis de nouveau, en appel, le 24 avril, devant la chambre de l’instruction."

" M. O. était en détention provisoire depuis un an et demi. « Il faisait régulièrement des allers-retours avec l’unité psychiatrique », indique son avocate. "

" Le suspect n’aurait été entendu qu’une seule fois par le juge d’instruction. Pour son avocate, cela signifie que « le magistrat savait très bien que l’affaire se solderait, de toute façon, par un non-lieu psychiatrique ». "

@ Fantômette et Marguerite

Merci pour les explications pour ma question au sujet de l'obligation pour les juges à rendre une décision.

@ Jalmad

Compte tenu de l'article du Parisien, je suis plus encline à considérer aujourd'hui que la lettre de Me HL traduit un décalage entre un ressenti d'audience et l'audience elle-même.

197. Le lundi 15 juin 2009 à 23:39 par Fantômette

@ Véronique,

Lu, je vous remercie. Mais cet article ne vient pas vraiment éclairer l'affaire d'un jour nouveau, et je ne vois pas ce qui motive votre inclination à considérer que le problème pourrait être du à la mauvaise interprétation d'une impression d'audience.

198. Le mardi 16 juin 2009 à 08:17 par Véronique

@ Fantômette

Pour des raisons d'emploi du temps il m'est difficile de répondre à votre post dans l'immédiat. Je le ferai dès que possible.

199. Le mardi 16 juin 2009 à 14:44 par Mike

@ Jalmad

J'ai compris que vous placiez votre critique à un autre niveau que la mienne et que vous l'envisagiez indépendamment de la question du délibéré de couloir (présentée en ce sens, et en ce sens seulement, comme accessoire à votre propos).

En réalité, et comme vous le dites dans votre post 195, mon sentiment est que les deux niveaux de critiques sont intimement liées et que, d'une certaine manière, la seconde a constitué le vecteur de réalisation de la première.

Je m'explique.

La première critique qui peut être adressée à la décision judiciaire est celle que vous faites : elle consiste à dire que certaines considérations d'ordre matériel ne devraient pas entrer en ligne de compte lorsqu'un juge statue sur une affaire qui met en cause des libertés individuelles. Cette critique porte sur la consistance de l'intérêt général pris en compte par les juges et vise à disqualifier un certain nombre de motifs qui ont justifié la décision et qui sont considérés comme étant non légitimes.

Je partage votre critique sur ce point et, peut-être avez-vous raison, sans ces considérations pratiques, la décision n'aurait pas été ce qu'elle fut et nul ne se préoccuperait du délibéré de couloir.

Mais cette critique n'épuise pas la difficulté dans ce cas, parce qu'il nous faut malgré tout admettre que les considérations qui ont été prises en compte dans le plateau de la balance de l'intérêt général, qu'il fut légitime ou non de les y intégrer, n'étaient en tout état de cause pas suffisantes pour l'emporter sur les droits individuels de la personne incarcérée, si ces droits avaient été correctement appréhendés.

L'absence de clairevision, je l'ai dit, n'est pas en soi une faute et nul ne peut prétendre qu'il aurait été plus perspicace s'il avait été à la place du juge (ou, plus exactement, il ne pourrait que le prétendre). Mais si nous ne pouvons pas exiger de nos juges qu'ils parviennent à la bonne réponse, nous devons exiger à tout le moins qu'ils s'y emploient de la bonne manière.

Or, l'audience et le débat contradictoire constituent, précisément, le lieu et le moment où les droits et intérêts en présence peuvent et doivent être appréhendés par les juges. Peut-être la Chambre de l'instruction n'aurait-elle jamais été convaincue par l'avocat du prévenu. Mais que le débat ait pu se poursuivre hors la présence (incarnée) du prévenu dans les couloirs du Palais de Justice, que le Procureur (de bonne foi) soit parvenu à relativiser les propos de Me L. H.-L., qu'il puisse exister un doute sur le fait que, sans ce délibéré sauvage, la décision aurait été autre, replace nécessairement cette question au centre du débat.

200. Le mardi 16 juin 2009 à 14:53 par Mike

Et nous sommes d'accord!

201. Le mardi 16 juin 2009 à 18:40 par Fantômette

@ Mike,

Nous avons un accord ! Excellent !

Je vous propose de rédiger le protocole, et nous le ferons homologuer par jalmad.

202. Le mardi 16 juin 2009 à 19:35 par Véronique

@ Fantômette

Ce qui m'incline à reconsidérer l'aspect du ressenti d'audience c'est le fait que dans l'article du Parisien comme dans un article publié le 10-06 par Libération au sujet de cette affaire, il ne soit pas nulle part question du délibéré de couloir qui constituait le coeur de l'attaque de la lettre de Me HL.

Cette suspicion d'un délibéré de couloir a fait l'objet ici des commentaires des plus sévères quant à la décision de la chambre d'instruction.

Je ne m'explique pas le fait que ces deux journaux, commentant la lettre ouverte de Me HL, passent sous silence la mention de Me HL d'un délibéré de couloir qui, selon elle, aurait inversé la nature de la décision de la chambre d'instruction en violant une règle fondamentale de l'équité et du respect des droits de la défense.

Par ailleurs, le procureur indique que deux expertises ont été réalisées. Une troisième était en cours. Je pense que Me HL aurait dû mentionner dans sa lettre ces éléments.

203. Le mercredi 17 juin 2009 à 12:31 par sissi

Véronique, encore une fois, vous me semblez mettre en cause la parole d'un avocat, qui n'a strictement rien à gagner dans l'affaire, d'une façon étonnante. Les propos tenus par "Me HL" quant au "délibéré de couloir" seraient à mettre en doute dans la mesure où ni Libération ni le Parisien n'en font état...Eh bien...C'est inquiétant, à ce stade, de remettre en cause la parole d'un "acteur" d'un fait, au prétexte que la presse n'évoque pas une partie de ce fait...

204. Le mercredi 17 juin 2009 à 18:57 par jalmad

@Sissi : je pense que ce que voulait dire Véronique, c'est que ce n'est pas nécessairement cette hitore de délibéré de couloir qui a le plus suscité l'ire de Me HL ; mais nulle part je ne lis sous sa plume qu'elle pense que Me HL a menti ; qu'elle a été imprécise sur d'autres éléments oui, mais pas qu'elle aurait inventé quoique ce soit. Ne cherchez donc pas des ennemis partout : allez relire tous les post de Véronique, vous y verrez développés trésors de nuances, prise en compte des arguments présentés par tous les acteurs de la discussion, etc....et, personnellement, lire ceci sous la plume d'un keskidi, ça me remonte le moral ! @Mike et Fantômette: voyez quand vous voulez qu'savez convaincre ! ps : homologuer un accord, mouais, passe encore, du moment que vous ne venez pas m'emm....avec une demande de "donner acte" (pour les keskidis : blague de juriste, désolée).

205. Le mercredi 17 juin 2009 à 19:35 par Véronique

@ Sissi

C'est inquiétant, à ce stade, de remettre en cause la parole d'un "acteur" d'un fait, au prétexte que la presse n'évoque pas une partie de ce fait...

C’est une lettre de colère. Une lettre dont le ton accusatoire et la violence tranchent avec les manières d’ordinaire plus feutrées et stratégiques du monde de la justice. Une avocate, maître Laure Heinich-Luijer, accuse trois magistrats. Elle leur reproche la mort de son client, Karim O., décédé à la prison de Fresnes, dimanche 31 mai. Karim O., 39 ans, était schizophrène.

1er paragraphe de l'article de Libération. Il s'agit bien pour la journaliste d'informer de l'existence de la lettre de Me HL . Très curieusement la journaliste ne fait pas mention dans son article du délibéré de couloir qui constitue tout de même l'élément central de l'accusation de Me HL.

Dans une lettre ouverte publiée sur le site Rue89, Laure Heinich-Luijer dénonce la « soumission » du président de la chambre de l’instruction au parquet et plus généralement l’autisme de la justice. (Le Parsien)

Où lisez-vous dans cette phrase la suspicion d'un délibéré de couloir ?

Je veux bien qu'une lettre ouverte soit écrite pour dénoncer l'autisme et la soumission des juges en mentionnant l'existence d' un délibéré de couloir pour définitivement disqualifier ces juges-là. Je ne comprends pas que quelques jours plus tard alors que des journalistes relaient lettre l'élément central de l'accusation ait disparu.

Je veux bien aussi que ces deux journalistes n'aient pas saisi la charge de la dénonciation. Mais au point de ne pas la mentionner du tout, je reste quand même très perplexe et très interrogative.

206. Le mercredi 17 juin 2009 à 19:54 par Véronique

@ Sissi

Et Jalmad exprime très bien pour moi que je ne pense pas une seconde que Me HL ait menti.

Si vous reprenez la chronologie, Karim s'est suicidé le 31 mai. Me HL publie sa lettre le 1er juin.

Alors oui mille fois, malheur, désespoir, colère, ce 1er juin, Me HL en larmes avec et pour toujours, dans sa tête et dans coeur:

je leur ai dit que je venais plaider pour que ce ne soit pas de ma faute, le jour où il se suiciderait, je voulais les mettre en face de leur responsabilité

Voilà.

207. Le mercredi 17 juin 2009 à 22:02 par Fantômette

@ Jalmad

Arf. Le donner acte était mon plan B.

:-)

208. Le mercredi 17 juin 2009 à 22:15 par Fantômette

@ Véronique,

Pour ma part, je ne serai pas surprise que les journalistes n'aient pas abordé ce point pour ne pas complexifier leur propos en le "juridicisant" un peu trop (ouiiiii, je sais, barbarisme).

Le terme "délibéré de couloir" n'est pas immédiatement compréhensible. Il aurait fallu expliquer qu'après l'audience des plaidoiries, l'avocat général a été discuter avec les conseillers, en leur apportant des éléments nouveaux.

- Oui, et donc ?

- Ah, mais monsieur, c'est tout à fait interdit.

- Ah bon.

S'ils n'avaient dit que cela, le scandale que cela peut représenter pour l'avocat qui en a été victime n'est pas perceptible aux profanes. Il aurait fallu en passer par des développements plus longs.

Se contenter de dire : "cet homme était malade, il était suicidaire, il n'avait pas sa place en prison, on l'y a maintenu, il y est mort", est plus simple mais au point d'en être inexact.

Donc pour ma part, la lecture de ces articles ne modifie aucunement la vision que j'ai de cette histoire.

209. Le jeudi 18 juin 2009 à 00:42 par sissi

@ Véronique : je suis désolée, je dois mal vous comprendre, et navrée si j'ai mal interprété vos propos. Mais je ne comprends toujours pas ce que vous tirez comme conséquence du fait que les journalistes n'évoquent pas le délibéré de couloir. Le fait que, comme vous le dites à nouveau, rendant compte de cette lettre, ils ne fassent pas mention de ce délibéré de couloir implique quoi, selon vous? En quoi est ce important de relever cette omission? Surtout dans la mesure où la mention de ce délibéré de couloir figure incontestablement dans la lettre.

210. Le jeudi 18 juin 2009 à 05:48 par Véronique

@ Fantômette

Je ne suis pas d'accord avec vous.

Je reprends le 1er paragraphe de l'article de Libération. A mon avis Ondine Millot, la journaliste, pouvait sans difficulté et sans plomber son paragraphe informer ses lecteurs - lesquels, au passage, sont des personnes aptes à la lecture - du délibéré de couloir mentionné par Me HL dans sa lettre ouverte.

En gras ce que j'ajoute dans le paragraphe.

C’est une lettre de colère. Une lettre dont le ton accusatoire et la violence tranchent avec les manières d’ordinaire plus feutrées et stratégiques du monde de la justice. Une avocate, maître Laure Heinich-Luijer, accuse trois magistrats d'avoir rendu leur décision de maintien de détention en fonction d'éléments non communiqués à l'avocate et non débattus lors de l'audience qui examinait sa demande de mise en liberté. Dans le jargon des palais de justice, ce off est nommé un délibéré de couloir. Maître Heinich-Luijer reproche aux magistrats la mort de son client, Karim O., décédé à la prison de Fresnes, dimanche 31 mai. Karim O., 39 ans, était schizophrène.

211. Le jeudi 18 juin 2009 à 06:49 par Véronique

@ sissi

En quoi est ce important de relever cette omission? Surtout dans la mesure où la mention de ce délibéré de couloir figure incontestablement dans la lettre.

Je ne comprends pas qu'un article normalement fait pour informer ne mentionne pas l'élément qui constitue la base du parti pris, l'axe principal, d'un J'accuse d'une lettre ouverte.

La seule conséquence que je tire de l'absence de mention du délibéré de couloir dans les articles est l'idée (l'hypothèse) que Me HL sur cette question a adopté vis-à-vis des journalistes une position de prudence et de retrait.

Le fait que la mention du délibéré de couloir figure inconstestablement dans la lettre aurait dû, selon moi, du point de vue du journaliste et de sa mission d'information, être repris clairement dans les articles.

Ou alors il faut considérer que le parti pris éditorial du journal dans cet article est d'illustrer - pardon pour le terme - la question du suicide en prison et/ou celle rebattue et rebattue et - encore pardon - cliché, préjugé, presque lieu commun de l'autisme des magistrats, leur froideur, leur manque d'humanité, etc., etc.

Mais là nous ne parlons plus de la lettre, en tant que telle, de Me HL.

ps: Aliocha et Didier Specq pourraient peut-être éclairer. Allô Aliocha, Allô Didier ...!

212. Le jeudi 18 juin 2009 à 23:29 par didier specq

Délibéré de couloir? Pourquoi les journalistes ne le mentionnent pas? Parce que c'est compliqué à expliquer? Peut-être.

Personnellement, j'écris à Lille, sur des affaires de Lille et du ressort de la Cour d'Appel de Douai. Imaginons qu'une affaire similaire de suicide en prison éclate dans "mon" secteur. Je pense que si je connais l'avocate (et qu'elle me semble sérieuse), je m'en fais l'écho mais que, effectivement, je ne parle pas de ce délibéré de couloir.

Pourquoi? Parce que je suis incapable de le prouver.

Je peux dire, en tant que journaliste, que ce suicide est sans doute dû au manque de prise en compte de la maladie mentale de l'incarcéré. Pas de problème puisque je peux le prouver: évidemment, cette maladie joue un rôle essentiel.

Dans les assertions les plus violentes, je cite l'avocate sans problème, j'ajoute quelques conditionnels mais le "délibéré de couloir" improuvable me pose un problème de crédibilité par rapport à mes lecteurs et à mes sources habituelles: il faut que mes lecteurs et mes sources sachent que, grosso modo, à par les approximations inévitables, je m'efforce de dire quelque chose qui s'approche de la réalité prouvable.

A mon avis, c'est pour cette raison que les journalistes présumés "sérieux" n'évoquent pas ce délibéré de couloir.

Moralement, je m'interdirai sans doute de l'évoquer même avec un conditionnel: c'est trop grave.

Je vous donne un exemple. Récemment, un site d'information parisien se fait l'écho d'une bisbille à Lille avec trois avocats. Le site ajoute que ces avocats sont accusés aussi de réactions antisémites. Et, pour faire "pro", ce site se contente de dire que, consultés téléphoniquement, les avocats en question démentent. Pour moi, c'est une saloperie: l'accusation est tellement grave que, même démentie, il en reste fatalement quelque chose.

C'est pour cette raison que, même si une avocate lilloise sérieuse le proclame dans une affaire similaire, je ne me ferais pas l'écho, même au conditionnel, d'une accusation aussi grave contre des magistrats.

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