Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

La réforme de la carte judiciaire

Mes confrères de province, ceux de Metz en tête, manifestent leur mécontentement à l'annonce d'un projet de réforme de la carte judiciaire, dont les détails n'ont pas encore été révélés par le gouvernement. Cette affaire risquant d'entraîner pas mal de remue-ménage ces prochains mois, je vous propose de faire un petit point de la question.

Cette réforme n'est pas un coup de tonnerre dans un ciel bleu : elle figurait au programme de Nicolas Sarkozy, que j'avais détaillé en son temps.

1. La carte judiciaire, qu'est ce que c'est ?

En un mot : c'est ça.

En plusieurs mots, il s'agit de l'organisation géographique de la justice : en gros, comment chaque parcelle du territoire est rattaché à un et un seul tribunal (en fait, il y a plusieurs types de tribunaux selon les affaires, mais chaque parcelle de territoire est rattaché à un et un seul tribunal de chaque type : il n'y a aucun chevauchement).

la carte judiciaire est différente de la carte administrative, qui divise la France en régions, département, arrondissements, cantons et communes. La France a ainsi 26 régions et 100 départements, tandis qu'elle a 35 cours d'appel et 191 tribunaux de grande instance. La différence n'est pas totale, car elle repose sur les communes (aucune commune n'est divisée entre deux tribunaux de grande instance) et fait en sorte de suivre les limites des départements. Notons au passage qu'il existe une deuxième carte judiciaire, celle des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, mais elle n'est pas concernée par la réforme, et je ne devrais même pas utiliser le terme de "judiciaire" s'agissant des tribunaux de l'ordre administratif, car il s'agit de deux ordres totalement séparés, avec leurs propres juges, leurs propres procédures, et leur propre cour suprême (cour de cassation pour le judiciaire, Conseil d'Etat pour l'administratif). Ca fait partie des exceptions françaises. Je vous en reparlerai, c'est promis.

L'unité de base de la carte judiciaire est le tribunal de grande instance. C'est la juridiction de droit commun, c'est à dire qu'elle connaît de tous les procès, sauf ceux que la loi attribue à d'autres tribunaux spécialisés, qu'on appelle juridictions d'exception (ce qui n'a aucun sens péjoratif)[1]. Le tribunal correctionnel, qui juge les délits, est une des chambres du tribunal de grande instance. C'est auprès du tribunal de grande instance qu'est organisé le ministère public, sous les ordres d'un procureur de la République.

Mais un tribunal de grande instance n'en vaut pas un autre. Il y en a des petits et des grands. Certains tribunaux de grande instance n'ont qu'une, deux ou trois chambres (on les appelle des hors-classes), tandis que celui de Créteil en a 13, Bobigny en a 17, et Paris en a 31.

Certains départements ont un seul tribunal de grande instance (Les Yvelines, TGI de Versailles), d'autres, de taille similaire en ayant trois (la Seine et Marne, TGI de Melun, Meaux et Fontainebleau), le département le mieux fourni étant le Nord, avec sept tribunaux de grande instance (Lille, Dunkerque, Hazebrouck, Douai, Cambrai, Valenciennes et Avesnes sur Helpe).

2. Pourquoi la modifier ?

L'idée de départ est d'aligner les deux cartes, administratives et judiciaire. Un département = un tribunal de grande instance, une région = une cour d'appel. L'argument est triple : la simplicité, le vieillissement de la carte judiciaire, et l'efficacité par la concentration de moyens.

Les deux premiers laissent franchement dubitatifs.

Un seul tribunal de grande instance par département, c'est plus simple sur la carte, mais pour les justiciables et les auxiliaires de justice, je doute que ce soit plus simple de s'y rendre. Après tout, l'Etat lui-même a jugé utile d'ajouter une ou deux sous préfectures par département : c'est que l'unicité de la préfecture posait des problèmes.

Mais le vieillissement de la carte, là, l'argument est inopérant. La carte judiciaire date de 1958. Comme la Ve république, ferais-je remarquer, et comme la Vieille Dame, elle a été modifiée à de nombreuses reprises, notamment avec la créations des tribunaux de grande instance de Nanterre, Bobigny, Créteil au début des années 70, et de la cour d'appel de Versailles en 1975. Dire que cette carte date de 1958 est donc faux.

Mais surtout en quoi, au nom de l'obsolescence, faudrait-il aligner une carte dessinée en 1958 sur une carte dessinée... en 1790 ?

Reste l'argument de l'efficacité. Il s'agit pour le gouvernement de regrouper les tribunaux de grande instance pour en regrouper les moyens et diminuer, voire supprimer les tribunaux de grande instance hors classe (trois chambres ou moins) au profit de tribunaux plus gros. Idem avec des cours d'appel (on parle de celles de Grenoble, Nîmes, Agen et Pau, qui seraient supprimées pour être regroupées avec Lyon, Aix en Provence Montpellier, et Bordeaux pour les deux dernières) (Mise à jour : Bourges serait aussi menacée, et serait regroupée avec Orléans). Cela s'inscrit notamment dans la logique de la réforme votée en mars dernier qui prévoit en 2010 la collégialité de l'instruction, ce qui suppose un minimum de trois juges d'instruction par tribunal, or le principe est qu'un tribunal de grande instance a autant de juges d'instructions que de chambres. Les Tribunaux de grande instance à une ou deux chambres ne pourront pas instaurer un collège de l'instruction, et pour ceux à trois chambres, il suffira qu'un poste soit vacant pour risquer de paralyser l'instruction.

Vis à vis de l'administration, c'est aussi nettement plus simple : un préfet, qui représente l'Etat au niveau du département, aura comme interlocuteur un seul procureur de la République. Mais ne pourrait-on pas obtenir le même résultat par une simple réorganisation du parquet, avec un procureur à compétence départementale, les parquets des tribunaux étant dirigés par des procureurs adjoints ou toute autre dénomination que l'on pourrait leur donner ? Mais j'anticipe un peu : voyons à présent les objections soulevées à l'encontre du principe de cette révision.

3. Les objections à la révision de la carte.

Elles sont de plusieurs natures, et de valeurs inégales. Aucune n'est à mes yeux suffisantes pour condamner cette réforme : l'Etat a le droit de s'organiser comme il le veut et de modifier son organisation, à charge pour lui que cette modification améliore les choses.

Il y aura des résistances locales, notamment de la part des élus. Paxatagore l'exprime très bien :

dans les villes de taille moyenne, un tribunal est une administration à forte visibilité. Les édiles locaux tiennent à avoir leur tribunal, signe de l'implication de l'Etat sur leur territoire. Un tribunal en soi apporte pas mal de notabilités, puisqu'à chaque tribunal correspond un barreau et donc des avocats. Le tribunal, comme d'autres administrations, ce sont des emplois. En soi, un tribunal n'apporte que peu d'emplois, mais la disparition d'un tribunal va servir à d'autres administrations de prétexte pour se concentrer d'avantage et aller dans de plus grandes villes.

Pour les barreaux locaux aussi, c'est une mauvaise nouvelle. Un barreau est rattaché à un tribunal de grande instance. La suppression du TGI imposera la fusion avec un autre barreau, et pour beaucoup un déménagement, puisque le cabinet qui était à deux pas du palais va se retrouver à plusieurs dizaines de kilomètres de celui-ci. Et pour un avocat, il vaut mieux être proche du palais que du domicile de ses clients, que l'on voit fort peu à son cabinet. La suppression d'une cour d'appel avec maintien d'un TGI n'est guère mieux, puisque cela suppose une forte diminution de l'activité judiciaire. Mais je reconnais que cet argument n'a guère de valeur comme objection, car cette réforme n'est pas faite pour le confort des avocats : nous sommes des professions libérales et nous devons nous adapter au fait du prince. Il sera aisé pour le gouvernement de le balayer en invoquant les résistances corporatistes. Le président de la république le fera très bien en invoquant sa qualité d'ancien avocat.

Se pose aussi le problème du point de vue du quotidien, et de la proximité géographique de la juridiction. Même si un citoyen se rend rarement au tribunal (il peut même désigner un avocat pour le faire à sa place), il vaut mieux qu'il puisse le faire aisément. Surtout que les bureaux d'aide juridictionnelle se trouvent au sein du tribunal de grande instance : ce sont donc les populations les plus défavorisées qui se rendent le plus souvent au tribunal. Les avocats, eux, sont de toutes façon contraints à la mobilité. On ne plaide pas que devant le tribunal de grande instance : on va aussi dans les tribunaux d'instance, aux conseils de prud'hommes et au tribunal de commerce qui sont souvent dans d'autres locaux que le tribunal de grande instance, aux maisons d'arrêt, qui sont de moins en moins en centre ville (heureuses les quelques villes qui ont une maison d'arrêt à quelques rues du Palais, comme Niort, par exemple).

Mais il serait souhaitable que les tribunaux restent en centre ville, à défaut, il sera indispensable que des transports en communs soient prévus pour bien desservir le tribunal, et on en est loin actuellement, même en région parisienne : le tribunal de grande instance de Créteil en est un exemple, situé à 500m d'une station de métro, sans aucune ligne de bus qui le desserve.

Il restera enfin les objections les plus fortes, mais qui ne seront pas contre le principe de la révision, seulement contre un aspect précis de cette révision : l'opportunité de la disparition de telle ou telle juridiction. Ici, la parole est à mes confrères et aux magistrats et greffiers concernés. Ne l'étant pas moi même, la région parisienne fonctionnant déjà depuis trente ans sur le principe un département = un tribunal de grande instance (sauf la Seine et Marne), je ne prétendrai pas avoir d'avis tranché sur la question.

4. Et ça va coûter combien ?

Alors, là, cher. Très cher. Parce que regrouper les tribunaux, c'est bien, mais encore faut-il de la place pour accueillir les greffiers, les juges, les archives, et créer les nouvelles salles d'audience nécessaires. La revente des palais désertés ne suffira pas à financer l'aspect immobilier. En plus, je me demande si une loi constitutionnelle ne va pas devoir être votée en raison de l'inamovibilité des juges du siège, ce qui va supposer la collaboration de l'opposition socialiste. Mais ne pas avoir les moyens de ses ambitions serait ici catastrophique pour le fonctionnement de la justice. Sauf à faire, comme le relève Paxatagore à la fin de son billet, une réformette, supprimer deux ou trois juridictions par ici pour les regrouper là, et présenter ça comme la plus grande réforme qu'aura connu la justice depuis cinquante ans.

Notes

[1] Citons la juridiction de proximité pour les petits litiges (moins de 4000 €), le tribunal d'instance pour les litiges moyens (entre 4000 et 10000€), les baux d'habitation, les expulsions, les tutelles, les contrats de crédit à la consommation, les saisies sur salaire, entre autres, les conseils de prud'hommes pour les litiges individuels liés à un contrat de travail ou d'apprentissage (surtout la contestation des licenciements), le tribunal des affaires de sécurité sociale pour les litiges avec les différentes caisses de sécurité sociale, et le tribunal paritaire des baux ruraux pour citer les plus importantes.

Commentaires

1. Le lundi 25 juin 2007 à 13:05 par De passage

et les tribunaux de Commerce aussi? (dans les juridictions d'exception)

2. Le lundi 25 juin 2007 à 13:23 par Delio

Pour ne parler que des Cours d'Appel, celle d'Aix en Provence est déjà engorgée, d'où la demande répétée depuis des dizaines d'années d'en créer une à Nice qui aurait compétence sur le Var et les Alpes-Maritimes (et rendrait historiquement une Cour d'Appel qui existait jusqu'au rattachement avec la France). Au lieu de ça on voudrait adjoindre les affaires traitées par la Cour de Nîmes !!!!

Il ne s'agit pas de la goutte d'eau qui fait déborder le vase, mais plutôt du seau qui fait exploser le tonneau !

A la limite que le seul département du Nord voie ses SEPT TGI regroupés en deux ou trois (Dunkerque, Lille et Douai pour conserver une cohérence géographique tout en laissant la Cour d'Appel à Douai où elle se trouve historiquement, comme celle d'Auvergne à Riom)

3. Le lundi 25 juin 2007 à 13:28 par pjak

Il y a 181 TGI en France, pas 191

181 en France métropolitaine ; si vous ajoutez les TGI de Fort de France, Pointe à Pitre, Basse-Terre, Cayenne, Nouméa, Saint Denis de la Réunion, Saint Pierre de la Réunion, Papeete, et même s'ils n'en portent pas la titre, Mamoudzou et Saint Pierre Et Miquelon, ça fait 191.

Eolas

4. Le lundi 25 juin 2007 à 13:28 par Dam

Merci maître, une fois de plus, pour votre éclairage.
(je subodore qu'il doit manquer un '0' à 10000 dans les chiffres donnés dans la note ... )

5. Le lundi 25 juin 2007 à 13:52 par PissTroiGüt

Le coût !!C'est le talon de cette réforme, a mon avis irréalisable... Par ailleurs, je ne connais que trois tribunaux dans ma région, et déjà, ces trois là débordent, alors comment regrouper ?

Et les parlottes, chers maîtres... Bon courage pour trouver un coin de table et bonne chance pour l'attente aux machines à café !

6. Le lundi 25 juin 2007 à 13:54 par Gascogne

Concernant le "problème" de constitutionnalité lié à l'inamovibilité des juges, je ne peux que reproduire le commentaire fait chez Paxa :
"Je ne suis pas sûr qu'il y ait réellement un problème juridique puisque l'article 31 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, tel que modifié par la loi organique du 25 juin 2001 prévoit l'hypothèse de la suppression de juridiction. De là à dire que le projet de réforme de la CJ est dans les tiroirs depuis quelques temps..."
Je rajouterai d'ailleurs ce que j'ai déjà eu l'occasion de dire aux avocats du cru : la réforme de la carte judiciaire, ont est déjà dedans depuis plusieurs années, avec les pôles spécialisés, le JIRS et autres joyeusetés.

Dans ce cas, cette réforme ne relève que du décret en Conseil d'Etat, elle peut être menée rapidement. Et oui, invoquer la date de 1958 pour dire que cette carte est vieille est un argument inopérant, et en tant que tel, docilement repris par la presse.

Eolas

7. Le lundi 25 juin 2007 à 14:31 par Rouky

Merci, Maître, pour ces éclaircissements !

Cette réforme me laisse songeur : l'éloignement entre l'autorité judiciaire et ses administrés s'accentue encore, physiquement cette fois-ci.

Est-ce qu'il est possible de prévenir à l'avance de son absence à un procès, au motif que l'on n'a ni véhicule, ni argent, ni ami, pour se déplacer si loin ?

Ah, et une petite coquille : "à défait" au lieu de "à défaut".

8. Le lundi 25 juin 2007 à 14:35 par Intime Conviction

A l'heure qu'il est, le Barreau est en Révolution à Thionville, Metz et Sarreguemines :

www.intimeconviction.com/...

9. Le lundi 25 juin 2007 à 14:48 par Proteos

Pour la carte des départements qui daterait de 1790, c'est aussi vrai que de dire que la carte judiciaire date de 1958... Puisque le 91, 92, 93, 94 et 95 ont été créés en 64 et la Corse divisée dans les années 70.
Par contre, il est clair que, si un des buts à atteindre prochainement est la collégialité dans l'instruction, il ne faut peut-être pas que les juges d'instructions soient moins de 10 par tribunal...
Par ailleurs, il y a une maison d'arrêt en centre-ville à Nantes. Elle a défrayé la chronique pour la facilité déconcertante de s'en évader notamment à cause de matériel que je traiterais pudiquement de défectueux.
Ensuite, il est maintenant courant que les tribunaux soient séparés en 2: la partie ancienne est toujours utilisée pour les procès solennels (assises...), le reste étant dans le bâtiment neuf. C'est le cas à Nantes et aussi à Rennes (où la cour d'appel est dans le bâtiment historique du parlement ainsi que la salle pour les assises).

C'est également le cas au TGI de Versailles, sans compter les nombreux palais où l'ancienne partie est consacrée à la cour d'appel et la nouvelle au TGI (Nîmes).

Eolas

10. Le lundi 25 juin 2007 à 15:07 par Dinah

@Delio

Pour le département du Nord, même votre proposition n'est pas satisfaisante ; en effet, si le TGI d'Avesnes sur Helpe était supprimé, les justiciables auraient 90 km à parcourir pour aller à Douai...

De manière plus générale, je pensais que le nombre de juridictions dans un département était fonction de sa population ? Ce qui expliquerait pourquoi le Nord-Pas de Calais et l'Ile de France, les régions françaises les plus densément peulplées si je ne m'abuse, sont les plus fournies en TGI...

A titre comparatif, j'habite dans l'Aisne, un département très rural, et le TGi de Laon dont je dépend est déjà à 40 km de chez moi.

11. Le lundi 25 juin 2007 à 15:12 par yves

Regrouper la cour d'appel de Nîmes avec celle d'Aix-en-Provence pour cadrer avec le découpage administratif, ça anticipe un rattachement du Gard à la PACA?

Parce que jusqu'à nouvel ordre, Nîmes et le Gard sont dans le Languedoc-Rousiilon, et la logique serait plutôt de fusionner les cours d'appel de Nimes et de Montpellier.

12. Le lundi 25 juin 2007 à 15:26 par Triskael

Désolé de troller, mais je voulais attirer votre attention, maître, ainsi que celle de vos lecteurs sur un point qui ressemble à une affaire dont vous avez parlé : celle où, à Grenoble, toute une affaire a été frappée de nullité (si je me souviens bien) pour vice de procédure, à cause du juge d'instruction qui s'est saisi lui-même.
Dans cet article de libé, www.liberation.fr/actuali... , la seconde affaire décrite est dans le même esprit, même si c'est des policiers qui ont commis une erreur.
Voici donc un exemple de plus, pour vous et vos lecteurs.

Pour ce qui est de ce redécoupage de la carte judiciaire, je retiendrais un truc : c'est que ça va coûter énormément d'argent. Est-ce une si bonne idée alors ?...

D'autant plus qu'en traitant le problème une cour d'appel par une cour d'appel, cela aurait probablement été plus économique. Mais moins médiatique.

Eolas

13. Le lundi 25 juin 2007 à 15:37 par vache qui pête

Bonjour maître Eolas.
"vu de l'extérieur", ce billet me semble parfaitement juste, honnête, et complet.

14. Le lundi 25 juin 2007 à 15:49 par CLS

@Me Eolas

Certes, la réforme n'est pas faite pour le confort des avocats, et nous devrons nous adapter.

Il n'en reste pas moins que le coût des déplacements en audience au TGI vont sensiblement augmenter la note d'honoraires.

Je prends un exemple: le Nord, que je connais bien, possède 7 TGI. Nous savions bien, ici, que certains étaient appelés à disparaître (Avesnes-sur-Helpe, Hazebrouck, entre autres). Le principe édicté par Mme Dati aura pour conséquence de n'en laisser subsister qu'un seul sur les sept, probablement celui de Lille, le plus important, et, partant, le moins mobile.

Ce qui, à son tour, aura pour conséquence que les avocats d'Avesnes se trouveront à 105 kilomètres de leur TGI, et ceux de Dunkerque à 75 kilomètres. Le surcoût pour le client se monterait à 100 € dans le premier cas, à 70 € dans le deuxième cas. Je ne parle même pas du temps gaspillé, ni même des difficultés d'organisation pour regrouper 7 juridictions en une, déjà débordée par ailleurs.

La mesure coûtera donc de l'argent au contribuable, mais aussi à son alter ego, le justiciable. Est-ce envisageable, en ces temps où la justice (pour le meilleur et pour le pire) est au centre des débats, de rendre son accès encore plus onéreux?

Il est vrai que le Nord est vraiment un cas à part : département très peuplé, et très étiré en longueur, de la mer du nord jusqu'aux confins de la Champagne. Je n'imagine pas qu'ils ne laissent subsister qu'un seul TGI pour tout cet ensemble. Dunkerque, valenciennes, sont des villes assez importantes pour justifier un TGI...

Eolas

15. Le lundi 25 juin 2007 à 16:45 par PEB

1/2 HS: Pourquoi dans un certain nombre de cas standard (dépôts de mémoires par les avocats par exemple, gestion de certains formulaires) suppléer la distance par la dématérialisation des procédures ?

Ca coûte cher mais regardez le succès des téléprocédures fiscales.

C'est peu dire que nous l'appelons de nos voeux. Cela se met en place sur Paris, avec le service e-greffe, qui se fait via une connexion sécurisée et clé USB identifiant l'avocat. Mais cela règle les mises en état en matière civile, qui se règlent de plus en plus par des échanges de bulletins préalables à l'audience et donne en province des "mises en état virtuelles", hors la présence physique des avocats. Mais pour les procédures orales, sans représentation obligatoire où les particuliers se représentent eux même, la distance compte car le déplacement en personne est inévitable. Le citoyen devrait plus être préoccupé par la fermeture de tribunaux d'instances que par celles de TGI.

Eolas

16. Le lundi 25 juin 2007 à 17:02 par francis


les regroupements de service créent des difficultés et ont un coût, à court terme.... mais en règle générale elles permettent une meilleure qualité et des économies d'échelle, à terme...
les avocats déménageront , leur famille, leurs enfants adolescents seront très contents de les voir quitter hazebrouck, cambrai, ou avesnes sur helpe...les clients des tribunaux devront plus se déplacer, ce qui est un réel problème pour certains d'entre eux, mais beaucoup de contacts ont lieu à distance (le seul procès que ma femme et moi ayons intenté dans notre vie, nous l'avons gagné au TGI de laval, contre une assurance, avec un avocat choisi au hasard dans la liste publiée, que nous n'avons jamais vu...

Au civil, ça ne pose pas de problème, en effet. Au pénal, un peu plus. Mais rien d'insurmontable.

Eolas

17. Le lundi 25 juin 2007 à 17:20 par Le Chevalier Bayard

"Face à une situation en clair-obscur, le débat d'opinion se cristallise, comme toujours en France, sur des réformes quasi révolutionnaires, de manière à ne pas les faire et à préserver le statu quo.

Plus les interrogations sur la justice se font fortes, plus les bouleversements en trompe l'oeil deviennent osés, plus le rêve d'un illusoire "grand soir" rôde" (Alain Minc - Au nom de la loi - Le mythe du grand soir judiciaire - chapitre VII - p. 175 Gallimard, 1997)

Ce qui rejoint d'une certaine manière l'analyse "in fine" du commentaire de Paxatagore.

S'agissant de la carte judiciaire, Alain Minc rappelle qu':

" A des ressources globales dérisoires s'ajoute l'inadaptation de la CJ qui ne permet pas d'allouer au mieux les effectifs et les crédits. La géographie des juridictions reflète l'héritage de l' Ancien Régime, corrigé par les effets de la première révolution industrielle.

Depuis 1958, le monde rural s'est réduit comme une peau de chagrin, la hiérarchie des métropoles économiques a été bouleversée, mais l'organisation judiciaire est demeurée immobile - chapitre V- p. 125".

Par ailleurs, et en conclusion d'un article paru dans les "Echos" du 6 février 2001 intitulé "La justice, la loi et le droit" c'est Nicolas Baverez qui affirme que :

"La justice est ainsi exemplaire de la crise des fonctions régaliennes de l'Etat, cannabalisées par l' Etat providence, écartelées par la fragmentation du tissu social et du territoire, contournées par les forces du marché, enfermées dans les conceptions et les pratiques datant des sociétés fermées et administrées".

Bref, la situation des avocats français en est symbolique, dont le chiffre d'affaires stagne à hauteur de 5 mds d'euros sur un marché en expansion en dépit de leur nombre restreint (40 000 avocats contre 100 000 en Allemagne, 96 000 au Royaume-Uni, 115 000 en Italie et 114 000 en Espagne).

En d'autres termes, plus il y a de droit moins il ya de justice !

18. Le lundi 25 juin 2007 à 17:25 par Le Chevalier Bayard

Très important ! lire : le démon corporatiste - chapitre V - p. 125

19. Le lundi 25 juin 2007 à 17:43 par francis

pas de demon corporatiste chez nos amazones ou alapage.....

20. Le lundi 25 juin 2007 à 17:47 par hors sujet

Je checke le site toutes les deux heures dans l'attente de voir un billet à propos de la scène digne d'un mauvais western commise dans le 7ième vendredi à 22 h 15 ....

Vous pouvez arrêter de fausser mes stats, alors, je ne compte pas en parler.

Eolas

21. Le lundi 25 juin 2007 à 17:58 par Fred

d'ailleurs, sans le vouloir, vous soulevez un argument que les avocats qui manifestent un peu partout feraient mieux de soulever à la place d'obscures arguties auxquelles personne ne comprend rien: le coût de la réforme.

Il doit bien y avoir quelques avocats spécialisés dans l'immobillier capables d'estimer le coût pour le contribuable de ce programme et d'en faire la publicité qui se doit au son de avons nous les moyens de cette réforme alors que les (biffez les mentions inutiles: vieux,étudiants,rmistes,infirmières, chanteurs-pop-exiles-en-suisse, avocats (non je plaisante)...) crèvent misère!



22. Le lundi 25 juin 2007 à 18:00 par Fred

@hors sujet

maitre Eolas n'est tout de même pas le professeur Rollin

23. Le lundi 25 juin 2007 à 18:16 par Intime Conviction

Dernières nouvelles: Dati demande l'aide des magistrats pour la carte judiciaire

www.intimeconviction.com/...

24. Le lundi 25 juin 2007 à 18:26 par Paul

D' un point de vue de manager, deux questions ou remarques :
1. Le regroupement des parquets pose necessairement des questions de "gestion de carriere" (en gros, qui devient procureur en chef.. ou qui est relegue adjoint.) Cela est tres difficile a mettre en place s'il n'y a pas de déménagement physique du tribunal.. (il suffit de regarder les fusions administratives d'hopitaux pour s'en convaincre.)
2. Du point de vue du cout des archives.. Les tribunaux ne declarent t-ils pas périodiquement des dégats des eaux afin de s'en débarrasser, comme le font toutes les autres administrations ??

25. Le lundi 25 juin 2007 à 18:29 par terq

Les révélations de la presse

www.lefigaro.fr/france/20...

26. Le lundi 25 juin 2007 à 18:51 par YR

Quelques réflexions au fil de la lecture :

1. Tiens, on réforme aussi la carte judiciaire ? Je vais pouvoir choisir mon tribunal, comme je vais pouvoir choisir l'école de mes enfants ? Arff...

2. La carte date de 1958, elle est vieille et il faut DONC la réformer (sous peine de dépasser la date de validité, sans doute ?). Un peu comme l'ordonnance de 1945 sur les mineurs (qui n'a bien sûr jamais été modifiée depuis, surtout pas par un ministre homonyme d'un président de la république. Ah, ce n'est pas un homonyme ?). Un peu comme la loi sur la laïcité de 1905 ? Un peu comme le code civil ? Que de vieilleries qu'il faudrait vite réformer !

3. Efficacité ou restriction des budgets par économies d'échelle ? Cela ne rentre t'il pas aussi dans l'optique de supprimer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ?

4. Cela va coûter de l'argent ? Pas plus que d'autres réformes non budgétées. Si ?

27. Le lundi 25 juin 2007 à 19:27 par elode

merci maitre eolas pour vos informations
que je me permets de compléter avec ces quelques propos
le particularisme de la Moselle réside dans son droit local.
les avoués a la Cour d'Appel de Metz ont un statut particulier. 50 avoués a la Cour d'Appel se retrouveront donc du jour au lendemain obligés de retourner en 1ere instance, sans clientèle.
cordialement

28. Le lundi 25 juin 2007 à 19:37 par Juge du siège

@27: ah, le fameux argument du droit local!
Est-ce à dire que les magistrats nancéens seraient incapables de l'appliquer? Eux qui appliquent déjà, dans les procédures familiales notamment, le droit algérien, tunisien, américain, britannique, etc...?

29. Le lundi 25 juin 2007 à 19:54 par OuvreBoîte

IC@23 : Elle cumule les fautes relevés plus haut, la dépêche : "La France compte 181 TGI", "inchangé depuis 1958", ... Reuters va en prendre pour son grade ?

Je n'ai pas la prétention de donner des conseils à notre ministre de la justice (et n'étant pas juriste je ne suis pas invité à en donner) mais je me permettrait de remarquer qu'elle semble s'être embarquée dans une ligne de défense assez éculée, connue pour les échecs douloureux qu'elle a apporté à ceux qui ont voulu s'en servir.
Combien de ministres ont rendu leur maroquin après avoir expliqué les réactions de rejet à leur réforme par "le manque d'explications" ; ou bien leur "incompréhension" ou leur "surprise" face à l'opposition rencontrée ? On citera pour mémoire l'inénarrable intervention du Chef de l'Etat lors de la compagne référendaire du TCE ou l'éphémère passage de Christian Sautter et de sa ministre du budget aux finances en 1999, quand ils ont voulu refaire à neuf l'administration fiscale.

30. Le lundi 25 juin 2007 à 19:56 par Anne L

A-t-on fait une étude sérieuse de "faisabilité" de cette réforme nécessairement très coûteuse -et pas seulement en locaux (sur ce seul aspect, le coût est considérable sauf à installer des annexes des TGI en périphérie dans des champs de betteraves...-).
. Décider du regroupement de tribunaux en province -80% de la population française tout de même...-, cela signifie que les avocats des barreaux des TGI rayés de la carte devront se rapprocher des T.G.I départementaux (locaux, secrétariat, réorganisation des barreaux) mais également que toutes les activités "périphériques" (huissiers, éducateurs PJJ, certains services de police et de gendarmerie, experts, enquêteurs sociaux, etc...) puissent s'adapter.
Pour les seuls avocats, pourront-ils, à la fois, conserver leurs cabinet dans la ville du TGI rayé de la carte et supporter les obligations (financièrement lourdes) de commission d'office dans le TGI départemental situé à 50 ou 70 km de leur cabinet.
Enfin, un palais de justice, ce n'est pas seulement (au pénal) le lieu où doivent se rendre les délinquants pour se faire juger mais aussi celui où les témoins sont convoqués devant un juge d'instruction, les victimes devant un tribunal correctionnel ou les parents d'un mineur devant un juge des enfants....
Il n'y a aucune raison de ne pas envisager une réforme mais est-on prêt à en payer le prix (et rapidement)... Quand on connait l'état du parc immobilier du Ministère de la Justice, les professionnels -mais également les usagers...- peuvent être inquiets.... Le passage de 6000 à 8000 magistrats, en moins de dix ans, s'est fait sans création de locaux (quatre juges du siège ou conseillers dans un même bureau dans certains TGI ou cours d'appel, c'est une surpopulation difficilement acceptable....). Il va falloir envisager d'installer des ALGECO sur les parkings des TGI et des cours d'appel ....
Il est à craindre que les TGI ou les cours d'appel qui échappent à la règle envisagée (un TGI par département et une Cour par Région -mais imagine-t-on supprimer celle de Versailles au profit de Paris -et dans quels locaux?...) conservent leur statut non sur des critères objectifs mais pour des raisons "politiques" (élus locaux influents), "sociales" (l'hostilité des "lobbies" -magistrats, avocats et autres auxiliaires de justice) ou, plus simplement "financières" (coût et lenteur de l'attribution de nouveaux locaux).
Madame Dati a du souci à se faire.... Il est peut probable qu'elle puisse voir l'aboutissement de sa réforme (ou alors une version très "light"...) compte tenu des résistances prévisibles et de la durée moyenne du "mandat" d'un Garde des Sceaux (15 depuis 25 ans...).

31. Le lundi 25 juin 2007 à 20:05 par Blub

"Cette réforme n'est pas un coup de tonnerre dans un ciel bleu"

Peut-être vouliez vous citer Léopold Sédar Senghor ?
Dans ce cas, ce serait plutôt "un ciel serein" ;-)

Quoiqu'il en soit, bravo et merci pour cet article qui éclaire les buts, les modalités et les conséquences de cette réforme aux modestes électeurs que nous sommes.

32. Le lundi 25 juin 2007 à 20:39 par Herbie

Quand j'ai entendu Dati parler de cette réforme de la carte judiciaire, je me suis dit pourquoi pas, si la centralisation des moyens peut effectivement améliorer l'efficacité de la Justice, bien que j'en doute, car si la masse de travail et celle des moyens ne changent pas, y aura-t-il une véritable amélioration (ça fait un peu Lavoisier sur les bords, je l'admets) ?
A la rigueur, je m'étais dit que ça me semblait être un moyen de réformer tant bien que mal la Justice sans y investir des fonds que l'Etat ne semble pas disposé à offrir.

Je vous ai lu, Maître, et j'ai compris que cette réforme risque d'être bien couteuse si elle est faite sérieusement.

D'où ma question : tout cet argent utilisé pour redessiner une carte des TGI ne serait-il pas mieux utilisé si on l'employait à recruter du personnel (non vacataire) et des équipements (sécurité et informatisation) ?

J'ai l'impression que la réforme de la carte judiciaire risque de priver la Justice de ce dont elle a réellement besoin.

33. Le lundi 25 juin 2007 à 21:12 par OuvreBoîte

Je regarde la carte obligeamment linkée dans le billet, je trouve que ça amène plein de questions (je découvre la carte judiciaire, c'est diablement intéressant comme sujet en fait, je m'y attendais pas).

En fait cette répartition est très curieuse ; il y a des métropoles qui n'ont pas de cours d'appel (comme Marseille) ce rôle étant manistement joué par une ville moyenne assez près. Certaines cours d'appel ou TGI sont très raprochés alors qu'à d'autres endroits c'est assez espacé. On voit bien que la densité de population joue un rôle mais manistement pas toujours (Pau, 80000 habitants, une ribambelle de TGI à une longeur de bras, Limoges 130000 habitants, le désert tout autour).

D'où vient cette drôle d'organisation ? C'est purement historique ?

34. Le lundi 25 juin 2007 à 21:16 par Atreyuh

@ 9 Proteos

Euh excuses moi de te contredire mais si ça se fait effectivement à Rennes certainement pas à Nantes, l'ancien palais n'étant plus utilisé et le nouveau, monstruosité architecturale ressemblant plus à un bunker qu'un palais de justice n'a aucune partie ancienne vu qu'il date de 2000...

PS: Pour une photo du monstre: fr.wikipedia.org/wiki/Pal...

35. Le lundi 25 juin 2007 à 21:23 par OuvreBoîte

Et j'ajoute que la maillage des tribunaux de commerce est relativement impressionnant. Pourtant le débat récurrent - bien que peu médiatisé - sur le fonctionnement des tribunaux de commerce, leurs greffes et les cabinets qui gravitent autour, et les supposés abus, népotisme et rentes de situation ne semble pas devoir surgir de la soudaine reprise des travaux pratiques de géographie place Vendôme. Il est vrai que c'est pas vraiment le secteur public, mais quand même.

36. Le lundi 25 juin 2007 à 21:43 par OuvreBoîte

Eolas@15

Ce sujet avait déjà été aborté ici
maitre.eolas.free.fr/jour...
(41 et suivants) quand je m'étais fait disputer par une honorable représentante de la magistrature pour avoir suggéré que le sujet de la dématérialisation arriverait un jour ou l'autre sur la table (je vais pouvoir préparer ma reconversion professionelle comme haruspice).
Dans l'article du Figaro donné en lien du billet précédent, (celui-ci www.lefigaro.fr/france/20... )
Le Garde des Sceaux "appelle de ses vœux la « numérisation » et la « dématérialisation » de la procédure judiciaire". Hors la numérisation doit indiquer logiquement le fait de produire des copies électroniques des documents papier, on imagine dans le contexte pour leur communication aux avocats. La dématérialisation, en revanche, indique normalement une procédure tout électronique. Comme je suppose que Mme Dati, juriste, n'emploirait pas les mots n'importe comment, mais que ses propos sont rapportés par des journalistes, il y a là un point à clarifier : Ont-ils l'intention de dématérialiser complètement la procédure ou juste la communication des pièces aux avocats et/ou aux justiciables ?

37. Le lundi 25 juin 2007 à 21:49 par jerikojerk

"En plusieurs mots, il s'agit de l'organisation [..] il n'y a aucun chevauchement)."

Bref en mathématique, on appelle ça la partition d'un ensemble.

38. Le lundi 25 juin 2007 à 21:56 par Juge du siège

@33: la carte judiciaire est le résultat d'une curieuse stratification depuis:
-l'Ancien régime: le siège des parlements (Aix) ou des justices d'Ancien Régime (Présidial de Riom),
-le XIXème siècle: les nombreux tribunaux civils créés lors de l'industrialisation de la France, d'où le grand nombre de TGI dans le Nord, la Picardie, du Doubs
-les annexions du 3ème Empire: cour d'appel de Chambéry
-l'essor de l'Ile de France: éclatement du tribunal de la Seine en les TGI de Paris, Nanterre, Créteil, Bobigny, Pontoise, Créteil...
-la re-création de ce qui existait avant les annexions: Metz (1973)

39. Le lundi 25 juin 2007 à 21:57 par Nico

"le tribunal de grande instance de Créteil en est un exemple, situé à 500m d'une station de métro, sans aucune ligne de bus qui le desserve."

500m c'est pas la mer à boire quand même :)

Un jour, à Créteil, j'ai eu un dossier d'accident de la circulation, un conducteur ivre qui a fracassé les jambes d'un motard (bassin détruit, plus de prothèses qu'un terminator, des boches dans les os...) contraint à vie de marcher avec deux béquilles, avec des douleurs chroniques que les antalgiques n'arrivent pas à masquer sauf à l'assommer chimiquement. Il a dû marcher un kilomètre pour venir au tribunal (500m) et retourner prendre le métro (encore 500m). Je lui transmets votre "500m, c'est pas la mer à boire" ?

Eolas

40. Le lundi 25 juin 2007 à 22:10 par Clems

Cher Maître,

je découvre avec grand plaisir vos écrits et décide d'y apporter un témoignage cocasse. Après tout, mon poste étant parmi les premiers visés par ce qui pourrait être une réforme bien utile si bien menée, temps est venu d'en rire avant les précisions qui nous seront apportées mercredi soir. Aujourd'hui, le Barreau de notre jolie cité de Millau ayant décidé d'exprimer fortement sa contestation et conscient de sa taille réduite (16 avocats..) a défilé jusqu'à la sous-préfecture avec cercueil et gerde (pour de vrai)! Pas d'épitaphe mais une bannière : sauvez notre gagne pain euh, pardon, notre juridiction...

Proposé à la population, un tract ventant la grandeur et l'efficacité de la juridiction millavoise (4 magistrats du siège et 2 au parquet).

Hélas le doux conte ne résiste pas à l'analyse. Le cercueil a terminé sa route après avoir monté des escaliers non accessibles aux personnes handicapées moteur, dans le noir de la salle des pas perdus où il ne gènait quiconque puisque l'accueil n'est plus assuré depuis plusieurs mois (aucun vacataire depuis le mois de janvier et des justiciables esseulés qui finissent par entrer dans les bureaux des magistrats, en quête d'âme qui vive?...) A fortiori un standard tenu en alternance par les divers fonctionnaires répondant entre deux tâches nécessitées par la marche "normale" de leur service. Un portique de sécurité (!) ayant coûté 8.000 euros contre un mur faute de personnel pour l'entendre sonner en cas de danger. Un juge d'instruction qui travail avec un fonctionnaire de catégorie C faisant fonction de greffier sans avoir jamais été formé à ce qui reste un métier à responsabilité. Un substitut détaché les 3/4 du temps dans les grosses juridictions surchargées parfois à plus de 100 km (heureusement qu'il n'a pas de vie de famille et n'aspire pas à une vie sociale...) STOP, la coupe est pleine.

Alors voilà, réforme il doit y avoir. Certe l'Aveyron est une très grand département et certains justiciables devront faire près de 100 km pour aller à Rodez, parfois dans la neige... Mais il est évident que certaines fonctions doivent disparaître de ces juridictions auxquelles on ne donne pas les moyens de travailler efficacement (vous avez dit numérisation des procédures, où est caché le scanner ? Quid du graveur de CD Rom?) Espérons simplement qu'elle sera respectueuse de tous. A suivre.

41. Le lundi 25 juin 2007 à 22:20 par Clems

@40
Vous devriez changer de pseudo surtout si c'est pour tenter de tenir des paroles sensées ;) J'ai largement contaminé celui-ci et je ne suis pas certain de vouloir arrêter.

42. Le lundi 25 juin 2007 à 22:27 par feu Clems 40

@41

Je vais y songer

43. Le lundi 25 juin 2007 à 22:33 par didier Schneider

@ eolas :
"le tribunal d'instance pour les litiges moyens (entre 4000 et 1000€)"
Il semble que ce soit 7600 euros ( fr.wikipedia.org/wiki/Tri...

"créations des tribunaux de grande instance de Nanterre, Bobigny, Créteil au début des années 70, et de la cour d'appel de Versailles en 1975".
Certes, la cour d'appel de Versailles date de 30 ans, mais ses batiments croulants datent de Louis XIV ( sans rire ! ). Pas de portique de sécurité, pas de clim en été, pas de calfeutrage en hiver.....que du bonheur ! ah si, il y a les vitres pare balles ( orientées plein sud, parfois, créant un effet de serre... ) .
Dans certaines chambres civiles, il n'y a pas quinze place pour s'asseoir, et les magistrats ne peuvent siéger en collégiale ( ou alors assis les uns sur les autres ! )

par contre, le TGI , un beau batiment neuf, accessible aux fauteuils roulants, ascenseur....


"Cela s'inscrit notamment dans la logique de la réforme votée en mars dernier qui prévoit en 2010 la collégialité de l'instruction"
Ce dont on ne peut que se féliciter , car cela évitera nombre de dérapages.
Rappel : la profession de foi de NS " vous serez protégé contre le risque d'être placé sans défense en prison"


"En soit, un tribunal n'apporte que peu d'emplois, mais la disparition d'un tribunal va servir à d'autres administrations de prétexte pour se concentrer d'avantage et aller dans de plus grandes villes"
Et les villes touchées par cette réforme ne sont pas des "gazelles économiques" ( Nimes, Agen, Pau).
Oui mais.......'je renforcerai la présence des services publics dans les quartiers et en milieu rural"

La justice est elle un service public, au même titre que les transport ou une poste ?
ou une administration déconcentrée ?

"même en région parisienne : le tribunal de grande instance de Créteil en est un exemple, situé à 500m d'une station de métro, sans aucune ligne de bus qui le desserve."
Les tribunaux de Versailles : pas de métro, mais minimum un kilomètre des gares, et deux kilomètres du RER. Certes, il y a des bus, mais aux heures de pointe, ça n'avance pas.

Art. L. 321-2 du code de l'organisation judiciaire : Sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires fixant la compétence particulière des autres juridictions, le tribunal d'instance connaît, en matière civile, à charge d'appel, de toutes actions personnelles ou mobilières jusqu'à la valeur de 10 000 euros. Il connaît aussi, à charge d'appel, des demandes indéterminées qui ont pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros. Eolas 1, Wikipédia 0. Sinon, le TGI de Versailles est à deux pas du RER Versailles Rive Gauche.

Eolas

44. Le lundi 25 juin 2007 à 23:34 par Paf, le chien

@36 Le Garde des Sceaux "appelle de ses vœux la « numérisation » et la « dématérialisation » de la procédure judiciaire"

Avec des amendes et des peines de prison dématérialisées ? Ce sera, certes, un grand moment le jour ou les mandats de dépôt pourront-être délivrés par courrier électronique : quel gain de temps et d'argent !

Ça vaut tous les découpages du monde : ça permet de tout regrouper en un seul endroit !

Ça commence pour un O... ah oui, ça y est ! Orwel. Georges Orwel.

45. Le lundi 25 juin 2007 à 23:34 par LDiCesare

Je vais pinailler:
> Les Yvelines (...) de taille similaire (...)(la Seine et Marne)
Euh, vous parlez de quoi? 2284km2 = 5916km2? En population oui 1,3 million/1 million, mais en 'taille', pas vraiment. En termes de distances à parcourir pour aller d'un bout du département à la préfecture en particulier, ces deux départements ne sont pas comparables.

La cour d'appel de Pau à Bordeaux? Ca va être super quand on va devoir venir de Mauléon, ça.

46. Le mardi 26 juin 2007 à 02:33 par niju

@ didier Schneider: preuve, s'il en était encore besoin, que wikipedia est à prendre avec des tenailles (les pincettes sont trop petites, à ce stade): depuis la loi du 26 janvier 2005, l'ancien plafond du taux de compétence (7600 euros, pour reprendre les 50 000 francs d'avant) a été remonté à 10 000 euros. Quant au plancher de compétence, il est bien de 4 000 euros, puisqu'en dessous, c'est le juge de proximité qui est saisi de l'affaire :)

47. Le mardi 26 juin 2007 à 04:22 par Esurnir

@niju: Franchement je ne vois pas de quoi vous parlez, Wikipedia m'a l'air à jour concernant cet article. Certes il a un niveau d'achèvement au niveau de l'intérêt du grand public pour la procédure civil mais au moins les seuils sont bons.

Peut être parce que vous les avez actualisé à quelques minutes avant de poster ce commentaire ?"Franchement", vous ne voyez pas ? Tsss tsss...

Eolas

48. Le mardi 26 juin 2007 à 09:45 par Damien

Merci Eolas pour ce billet très intéressant.
Le gouvernement a-t-il donné d'autres arguments ormis ceux que tu as cité ("la simplicité, le vieillissement de la carte judiciaire, et l'efficacité par la concentration de moyens.") ?
Ca semble un peu léger pour une opération de cette envergure. De plus, madame Dati, ayant exercée dans la magistrature, devrait être bien placée pour prédire les conséquences de cette réforme non ?

49. Le mardi 26 juin 2007 à 10:32 par PEB

Le télépaiement des amendes supposera la mise en place d'une interface de gestion commune entre l'ordonnateur (le Premier président du TGI ou de la Cour d'appel: bref le ministère de la Justice) et le comptable (le Trésor public). Je ne doute pas qu'on y arrivera un jour et ce sera une garantie supplémentaire de la bonne exécution des peines et de recettes au profit de l'Etat.

Cela n'a rien d'un Orwell. Le but est de simplifier les tâches de l'usager. En matière de procès civils ou administratifs, les avocats n'auront plus à se perdre dans les embouteillages pour déposer leurs conclusions dans les temps. Dans ces cas, l'audience, certes nécessaire, n'est le plus souvent qu'une explication de textes.

Il y aurait aussi certainement certains formulaires qui pourrait être traité de manière (semi-?)automatisé.

Le paiement des amendes ne relève absolument pas des juges, mais du trésor public, sous le contrôle du parquet s'agissant d'une peine. Pas besoin de télépaiement ou d'installer un terminal carte bleu dans le prétoire. Et un point de vocabulaire : on parle de président d'un tribunal de grande instance et de premier président de cour d'appel ou de la cour de cassation. Les présidents de chambre ont le titre de vice président du tribunal de grande instance, et de président à la cour d'appel.

Eolas

50. Le mardi 26 juin 2007 à 11:02 par FrédéricLN

Une question bête : si on veut rendre la justice plus performante, ça serait bien de disposer d'indicateurs de performance ? ça ne doit pas être très difficile à calculer (pas pour Me Eolas - pour l'administration)
Genre
Nb affaires jugées (qualifiées autant que besoin) / Coût total (interne administration + frais engagés par les justiciables)

Et de voir qui est le plus "performant", les gros tribunaux ou les petits ?

51. Le mardi 26 juin 2007 à 11:43 par pkc

@50
je doute que l'indicatif de performance soit vraiment pertinent.
si on transposait ça à la plupart des services publics, vous seriez le premier à râler des lourdes conséquences de tels systèmes de mesure (hôpitaux, écoles, etc).

52. Le mardi 26 juin 2007 à 11:52 par FVDV

Cher Confrère,

Votre billet est pertinent sur de nombreux points.

Cette réforme n'ira pas sans heurt.

Je vois par exemple la restructuration judiciaire de la Seine Maritime :

3 TGI (Rouen, Dieppe, Le Havre) chacun avec des barreaux importants.

Un TGI spécialement diligent en droit maritime (Le Havre)

Des copains de Sarkosy dans les mairies de Dieppe et du Havre.

Des querelles existant entre les deux grandes villes.

Bref, un sacré dilemme politique.

Dans d'autres départements, les préfectures sont plus petites que la sous-préfecture, comme la Corrèze (Tulle - Brive), l'Allier (Moulins, Montluçon, Cusset-Vichy).

Que va-t-il se passer pour nos confrères de Riom?

Les pétitions circulent partout.

Il faut également penser aux avoués. Vont-ils être indemniser?

Il ne faut pas perdre en vue que certains barreaux compte moins de vingt avocats, que des tribunaux ne peuvent pas fonctionner de façon autonome.

Enfin, sur l'immobilier de la justice, qui en sera le repreneur? Le privé, le public?

Comme disais Francis Blake "Wait and see"

VBD

53. Le mardi 26 juin 2007 à 12:11 par Slurp

" @niju: Franchement je ne vois pas de quoi vous parlez, Wikipedia m'a l'air à jour concernant cet article. Certes il a un niveau d'achèvement au niveau de l'intérêt du grand public pour la procédure civil mais au moins les seuils sont bons.

Peut être parce que vous les avez actualisé à quelques minutes avant de poster ce commentaire ?"Franchement", vous ne voyez pas ? Tsss tsss... "

*Sort sa langue*
Le Maître aurait-il quelques vélléités de devenir juge d'instruction? Si tel était le cas, nul doute qu'il en aurait les capacités!
*Range sa langue*

Le candide que je suis imagine que les avocats ont à peu près les connaissances et les compétences nécessaires pour occuper un poste au parquet.
Mais au fait, un avocat peut-il devenir juge ou procureur? Doit-il passer passer par l'ENM ou y a-t-il des passerelles?

54. Le mardi 26 juin 2007 à 13:39 par SPM

Comment ils font pour trouver des magistrats qui veulent bien aller à Saint Pierre et Miquelon ? Ils recrutent des locaux ? C'est les derniers de l'ENM qui s'y collent ?

55. Le mardi 26 juin 2007 à 13:39 par Intime Conviction

Voyons ce qu'en dit, dans le figaro, le Bâtonnier Paul-Albert Iweins:

www.intimeconviction.com/...

56. Le mardi 26 juin 2007 à 13:42 par SPM

Comment ils font pour trouver des magistrats qui veulent bien aller à Saint Pierre et Miquelon ? Ils recrutent des locaux ? C'est les derniers de l'ENM qui s'y collent ? Je sais que pour les TA d'outre mer, les magistrats sont éclatés ( le président à Fort-de-France, le vice-présidents à Basse-Terre, des conseillers à Cayenne et Fort de France). Personne à SPM bien qu'il soit indiqué comme TA sur la carte.

57. Le mardi 26 juin 2007 à 16:01 par Atreyuh

@ 53, Slurp

Je me permets de te donner quelques éléments de réponse, mon maître de stage en ayant ras la casquette de l'avocature et ayant cherché à intégrer la magistrature, nous en avons un peu discuté. La magistrature bureaucratique française ne facilite pas les passages d'avocats vers les fonctions juridictionnelles contrairement aux magistratures professionnelles anglo-saxonnes, où les juges proviennent du Barreau. Donc non, normalement il faut intégrer l'ENM par la voie du concours. En revanche je suppose qu'il est possible à des avocats aux compétences exceptionnelles reconnues par leurs pairs et le corps des magistrats, d'intégrer celui ci sur dossier, encore que je sois pas sûr mais je crois me souvenir qu'un de mes professeurs,avocat honoraire, nous en avait touché deux mots au premier semestre...
Pour ce qui est de mon maître de stage, il a du se contenter d'officier en tant que juge de proximité...

58. Le mardi 26 juin 2007 à 16:03 par Guichardin

Ouh, Maître, l'argument du client en béquilles, c'est moyen quand même. Je pense que la localisation du tribunal n'est quand même pas le principal de ses soucis quotidiens.

59. Le mardi 26 juin 2007 à 16:09 par Gastiflex

@Eolas : "des boches dans les os..."
Tss ! Pour un européen convaincu, parler de cette façon de nos voisins allemands, vous me décevez ;-)

60. Le mardi 26 juin 2007 à 16:09 par Gastiflex

@Eolas : "des boches dans les os..."
Tss ! Pour un européen convaincu, parler de cette façon de nos voisins allemands, vous me décevez ;-)

61. Le mardi 26 juin 2007 à 17:03 par Gastiflex

Ah, ça a bugué.

62. Le mardi 26 juin 2007 à 17:17 par Denis

« Mes confrères de province, ceux de Metz en tête, manifestent leur mécontentement à l'annonce d'un projet de réforme de la carte judiciaire »

Pourquoi les barreaux de Metz, Sarreguemines et Thionville ont-ils été si prompt à réagir à cette réforme annoncée ?

J’aimerais aborder cette question qui, à ma connaissance, suscite peu de commentaires.

L’ explication à avancer est double.
Certes, la baisse de l’activité qu’entraînerait la suppression de la Cour d’appel de Metz y est pour quelque chose; mais, une explication plus profonde s’impose : l’identité (la sensibilité ?) locale très forte des Mosellans.

L’Alsace-Lorraine a été annexée à l’Allemagne de 1871 à 1918. Cette annexion a été très mal vécue et le souvenir de ce déchirement est encore vivace. En fait d’Alsace-Lorraine, il s’agit plutôt de l’Alsace-Moselle puisque parmi les 4 déparquements lorrains, seule la Moselle a été arrachée à la France.
Il en découle un certain nombre de particularités, encore d’actualité. Pour l’anecdote les trains roulent à droite en Moselle... Le nombre de jours fériés y est plus élevé que dans le reste de la France et il existe un droit local. Celui-ci a deux sources principales : 1) des dispositions d'origine française maintenues en vigueur par les autorités allemandes après 1870 et jusqu’en 1918 et abrogées dans l’intervalle en France; 2) des dispositions d'origine allemande qui se sont donc appliquées à la Moselle.

Exemples :
- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat n'est pas applicable à l'Alsace-Moselle qui reste régie par la loi du 18 Germinal an X (8 avril 1802) comprenant le Concordat de 1801.
- la loi du 1er juillet 1901 n'est pas applicable aux associations ayant leur siège en Alsace-Moselle.
- les Tribunaux de Commerce n'existent pas, ils sont remplacés par une chambre spécialisée du Tribunal de Grande Instance, chambre dont la composition est caractérisée par l’échevinage.

Beaucoup des dispositions du droit local furent donc conservées après 1918. Certes, dans les années 20, le gouvernement Edouard Herriot (Cartel des Gauches) tenta d’introduire les lois de laïcité en Alsace-Moselle mais cette réforme se solda par un échec.

Quant à la cour d'appel de Metz, elle avait été supprimée en 1873 par les Allemand avant d'être ré-installée en 1973. La perdre à nouveau serait vécu comme un retour vers passé douloureux, une sorte d’humiliation pour les Mosellans.

Voilà pourquoi les avocats mosellans sont à la pointe de la contestation de la réforme de la carte judiciaire. Je prends le pari qu’ils obtiendront gain de cause, peut-être pas sur les TGI de Sarreguemines et Thionville mais en tout état de cause en ce qui concerne le maintien de la Cour d’appel de Metz.

63. Le mardi 26 juin 2007 à 17:49 par Stellar

La remarque de FredericLN me semble judicieuse.

Une des raisons de la réforme est la mise en oeuvre de la collégialité de l'instruction, qui conduit à la supression des tribunaux insuffisamment dotés en magistrats. Je n'ai vu ce motif de bon sens que sur ce blog et il semble absent des discours ministériels comme des articles de presse.

L'autre raison est d'améliorer l'efficacité de la justice. Je suis pour le principe, même si cela doit entraîner des désagréments pour les membres de barreaux ou des juridictions concernés. Il pourra être judicieux de prévoir des mesures compensatrices le cas échéant. La question est si une grande juridiction fonctionne mieux qu'une petite. Existe-t-il des économies d'échelle ou au contraire des risques de bureaucratisation des grandes organisations? Où se situe l'optimum? Paxatagore semble réservé sur la question : paxatagore.org/index.php?... .

De plus, si on prend des mesures pour améliorer l'efficacité il peut être bon de définir d'abord ce qu'est l'efficacité, de bâtir des indicateurs, de mesurer la situation actuelle selon les juridictions et d'analyser la cause des écarts. Ensuite, une fois des mesures d'amélioration prises il faudra évaluer leurs effets. Je sais que l'on procède rarement ainsi en matière de réformes mais cela vaudrait peut-être le coup d'innover. Il est possible que cela ait été fait, puisque l'idée de la réforme est ancienne. Dans ce cas, autant nous donner l'information.

64. Le mardi 26 juin 2007 à 17:52 par Stellar

Je suis désolé pour le triplé. Pourtant je n'ai appuyé qu'une fois sur la touche envoi.

65. Le mardi 26 juin 2007 à 18:09 par Neville

@ Denis, 62. Certes, en Moselle s'applique le Droit local, sensiblement différent du Droit "commun" français. On peut comprendre qu'une Cour d'Appel soit spécialisée dans ce droit local et que les justiciables de Moselle souhaitent ne pas être jugés, en appel, dans une Cour moins sensibilisée à ce Droit local.

Mais alors, pourquoi ne pas rattacher judiciairement parlant la Moselle à l'Alsace, donc à la Cour de Colmar ?

Au fait, dans le refus des Mosellans de dépendre de la Cour d'Appel de Lorraine, n'y aurait-il pas une manifestation supplémentaire de la rivalité séculaire et légendaire entre Metz et Nancy ?

Je précise que je ne suis ni messain, ni nancéen, ni lorrain, bien qu'ayant passé quelques mois de ma vie en Lorraine.

66. Le mardi 26 juin 2007 à 19:25 par Denis

@Neville
Effectivement, la remarque est pertinente. La rivalité Nancy Metz est un élément d’explication important (euphémisme). Il faut bien dire que cette rivalité empoisonne les affaires de la Lorraine et qu’elle se décline dans tous les domaines de la vie régionale.
Quant au rattachement de la Moselle à la Cour d’appel de Colmar, ce serait une solution rationnelle puisque Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle ont en commun l’application du droit local (et n’est-ce pas là l’objectif de la réforme, rationaliser ?), mais je doute que cette solution emporte l’adhésion des intéressés !

67. Le mardi 26 juin 2007 à 20:09 par dura lex sed lex

Quitte à ne mettre qu'une seule Cour d'Appel en Lorraine, autant la mettre dans la capitale de région. Logique, non ? Il faut donc supprimer la Cour d'Appel de Nancy...

68. Le mardi 26 juin 2007 à 21:55 par Esurnir

@Eolas:<mauvaise foi>Et alors ?</mauvaise foi>

69. Le mardi 26 juin 2007 à 22:17 par Judge Dredd - Avocat provincial

Je m'y attendais à cette réforme. Pour ainsi dire, elle était clairement inscrite dans le programme de Monsieur Nicolas SARKOZY. Je suis aujourd'hui stupéfait de constater qu'un certain nombre de Confrères ayant voté pour Nicolas SARKOZY (et qui ont même ouvert le champagne au soir du 6 mai 2007) s'insurgent aujourd'hui contre un des mesures phares de leur gourou. Je suis même persuadé que le Barreau français a voté en majorité pour Monsieur SARKOZY et que voit-on aujourd'hui ? Les confrères découvrent subitement que cette réforme (le redécoupage est déjà fait quoi qu'en dise DATI) se met en oeuvre et se mettent à la brocarder... Nous réagissons comme d'habitude beaucoup trop tard... On récolte toujours ce qu'on sème...

70. Le mercredi 27 juin 2007 à 11:29 par Sylvestre

Les dernières nouvelles sur le sujet dans Le Monde sur internet :
[url]www.lemonde.fr/web/articl...

Je sens que le leitmotiv de ce gouvernement va être : j'ai été mal compris(e)...

71. Le mercredi 27 juin 2007 à 16:18 par Intime Conviction

La ministre a t-elle l'air de bonne foi?

www.intimeconviction.com/...

72. Le mercredi 27 juin 2007 à 21:34 par Saint Appronien

Il est vrai que cette réforme coutera cher à l'état si elle doit être mise en place...

D'ailleurs si l'idée de supprimer les plus petits TI est avérée, qu'en sera t il des charges des huissiers de justice exercant leur fonction sur ces ressorts ?

Beaucoup de petites études rurales ne doivent leur survie qu'au fait de posséder un monopole sur le ressort de cette petite juridiction... Il en sera tout autrement si ces dernières doivent se mettre à rivaliser avec d'importantes études installées au coeur des grandes villes.
Cela risque d'avoir pour conséquence de voir ces petites charges disparaître pour laisser la place à de grosses structures centrées sur le TGI...

Ne voulait-on pas rendre la justice accessible ?

73. Le jeudi 28 juin 2007 à 14:32 par ASHM

Cher confrère,

juste une précision,

nous exercons une profession libérale

mais, sur commission d'office et/ou à l'aide juridictionnelle (surtout dans mon petit tribunal) nous accomplissons aussi nous disent les textes (et noblesse de la profession oblige) une mission de service public.

VBD

74. Le vendredi 29 juin 2007 à 11:05 par Psykozora

Et si on parlait du coût social d'une telle mesure.

En effet, rappelons que les avocats ne travaillent pas seuls, ils ont des secrétaires, des femmes de ménage et souvent des juristes.

Les salariés des cabinets d'avocats qui ont construit leur vie sur place et qui bien souvent sont originaires des lieux, vont-ils demander à leur famille de déménager ? A leur mari ou leur épouse de quitter leur propre travaille pour suivre le cabinet?

Si en région parisienne, il n'y a qu'un TGI par département, c'est aussi dû à la taille des département et à la mobilité des habitants, facilitées par les infrastructures existantes. Maintenant imaginez la même chose en Province où certains TGI sont éloignés de plus de 60 km de l'un de l'autre, quand ce n'est pas 100 km.

Les salariés auront donc le choix entre:
- déménager, ce qui ne concernent pas qu'une personne mais une famille,
- refuser de suivre le cabinet et se faire licencier sans espoir de retrouver le même travaille puisque la plupart des cabinets d'avocats auront fait la même chose et l'espoir limité de retrouver un travail équivalent,
- ou encore faire le trajet quotidiennement ce qui implique un coût financier et écologique non négligeable. (un trajet de 60km en province hors autoroute prend environ 50 min - 1h)

Par ailleurs, les villes qui accueilleront ces TGI et CA regroupées auront elles les infrastructures pour accueillir tout le monde, car même si cela ne représente finalement que peu de gens, il va tout de même falloir qu'ils se logent, que leurs enfants aillent à l'école, que les cabinets trouvent des locaux.... Tout cela a un coût qui lui ne sera pas supporté par l'Etat et les prix de l'immobilier ne sont pas les mêmes dans les grandes villes que dans les petites.

Je sais bien que ces considérations sont très terre à terre et ne sont pas suffisament importantes pour être prises en compte, mais personnellement je ne peux m'empêcher d'y penser...

Je raisonne à un niveau local alors qu'il faudrait raisonner à un niveau global pour voir les fabuleuses économies que l'Etat espère probablement réaliser, mais des gens vont encore rester sur le carreau et je trouve ça bien dommage.

PZ

75. Le vendredi 29 juin 2007 à 17:41 par Viviane

A mon sens, cette réforme emporte, au delà des difficultés prévisibles de sa mise en oeuvre, de véritables dangers pour l'accès effectif à une justice indépendante et impartiale. Je me permets de vous livrer dans le désordre quelques éléments fondant mes craintes :

Le coût social de cette réforme, évoqué par un commentateur, concerne également à mon sens le justiciable : je pense aux majeurs protégés, aux personnes surendettées, ... autant de justiciables très rarement représentés par un conseil et qui ne pourront vraisemblablement pas effectuer de déplacements sur le territoire pour se rendre à une convocation ou à une audience à plusieurs kilomètres de leur domicile. Même si la comparaison a déjà été récusée, je continue à penser que la disparition de "tribunaux de proximité" a quelque chose à voir avec la fermeture d'une école ou d'un bureau de poste dans une petite commune ...

Je précise que la visio-conférence, présentée comme le remède à ce type de difficultés, recèle à mon sens de graves inconvénients qu'il ne faut pas sous-estimer : elle amputerait nécessairement l'audition d'une personne d'une dimension humaine pourtant riche d'enseignements pour la prise de décision. Elle éloignerait encore d'avantage les justiciables de leur justice, qui souffrant déjà d'une bien mauvaise image, sera perçue d'autant plus lointaine et incompréhensible.

Or, il ne me semble pas que ce ne sont les petits tribunaux qui véhiculent cette image d'une justice inhumaine ... ce sont pourtant ceux-là qui sont menacés ...

Pour les magistrats, je crains que l'effectivité de leur indépendance statutaire soit mise à mal par cette réforme qui envisagerait, semble-t-il, de transformer les tribunaux d'instance (pour ceux qui survivront) en chambres détachées des TGI accueillant, au-delà des contentieux habituels de la justice d'instance, les audiences des juges des enfants, des juges aux affaires familiales ...

La perte d'autonomie des tribunaux d'instance introduirait, de facto, une forme de hiérarchisation des magistrats du siège : le Président du TGI deviendra maître de l'affectation sur un territoire d'un très grand nombre de juges et, pour certains d'entre eux, de leurs attributions (c'est déjà le cas des présidents de correctionnel ou des JLD qui ne bénéficient d'aucune garantie statutaire pour l'exercice de leurs fonctions, c'est-à-dire qu'ils peuvent, s'ils déplaisent, être affectés du jour au lendemain à une chambre civile ou aux affaires familiales).

Je crois en effet que l'indépendance effective du juge est en cause, cette indépendance n'ayant pas pour objet le confort de celui-ci mais constituant une garantie essentielle pour garantir aux justiciables une justice égale pour tous.

Mon expérience personnelle me fait pester contre la prétendue efficacité des grosses structures. Les petits tribunaux que j'ai connus avaient les moyens d'une justice de qualité. En quelque sorte, ils rendaient des décisions "sur mesure". Si certains contentieux très technique gagneraient à être réservés à des pôles ou à des chambres spécialisées (affaire économique et financière à l'instruction, départage prud'homal, voir même, pourquoi pas, droit de la construction, ...), j'ai pu remarquer que la plupart des autres contentieux sont traités avec une moindre qualité dans les grosses structures. Or, ce sont pourtant ces structures que la réforme entend généraliser.

Pour finir, je rejoins certains commentaires soulignant que l'argent nécessaire à la mise en oeuvre de cette réforme serait plus utilement affecté au recrutement pérenne de personnel dans les Palais de justice.

Viviane

76. Le samedi 30 juin 2007 à 02:40 par zadvocate

"En un mot : c'est ça."

ca fait plus d'un mot ça !

77. Le samedi 30 juin 2007 à 07:17 par Clémentine.

Il y a des TGI qui sont parfois de gentille catastrophe, dernier exemple en date:
-une commune assigne en référé une association (créée, déclarée et tout et tout depuis près de 18 ans) afin que soit interdit à l'asso d'utiliser sa dénomination, son sigle et toute allusion au nom de ladite commune où elle a son siège.
-décision du juge des référés: -condamnation de l'asso à modifier sa dénomination (déclarée
depuis des lustres), le libre choix de la dénomination contenu
dans la liberté d'association...aux oubliettes.
-la demande de la commune quant à la référence à son patronyme
est sans objet.
-la commune est déboutée de sa demande relative au sigle.
Résultat 2 à 1 pour l'asso défenderesse, pensez-vous ? et bien perdu. L'asso est déclarée partie perdante et donc condamnée à payer les dépens et 750 euros au titre de l'article 700 du NCPC.

78. Le samedi 30 juin 2007 à 09:20 par AVENIR

La richesse vient du débat. Face à une réforme, la passion prend vite le pas sur la raison. Face à un conseil des prud'hommes qui rend 90 décisions par an on peut s'interroger :
- même si les conseillers s'investissent dans l'oeuvre de justice ont-ils la même expérience que ceux qui exercent dans une juridiction plus importante, confrontés à la diversité des situations ?
- le conseiller qui vit et exerce dans une petite ville ne rencontre-il pas plus de difficultés pour rester impartial ?
- peut-on continuer à dépenser les deniers de l'Etat sans se soucier du coût réel du "service" rendu ? Un tribunal c'est du personnel, un bâtiment à entretenir, des dépenses de fonctionnement (informatique ....)

Pourquoi être critique avec la dématérialisation qui se développera très vite ces prochaines années dans les actes de justice ? Aujourd'hui grâce à la nouvelle technologie nous pouvons échanger ensemble sur ce blog, nous voir. Nous sommes une société de l'image, de la communication. Apprenons à l'intégrer dans nos échanges de travail.

Il me paraît aujourd'hui nécessaire de réformer la carte judiciaire. Supprimer un tribunal ne signifie pas pour autant supprimer toute forme de présence de l'institution judiciaire dans les villes : des permanences peuvent être envisagées dans des maisons de services publics, en outre les magistrats se déplacent depuis longtemps (audience foraine par exemple) pour assurer des audiences dans des bassins éloignés du tribunal compétent... La proximité doit se développer par la création d'antennes.

Les impacts financiers, qualitatifs d'une réforme ne s'apprécient que sur le long terme. Les dépenses engagées aujourd'hui seront un investissement pour l'avenir.

Vous parlez des auxiliaires de justice, mais n'oublions pas ces personnes de l'ombre, greffiers et surtout fonctionnaires de catégorie C dont les rémunérations sont faibles. Il conviendra de trouver des mesures d'accompagnement social.

C'est ensemble que nous devons avancer.

Nous parlons de réforme de la carte judiciaire mettant en cause la proximité, mais le langage judiciaire utilisé par magistrats et avocats ne constitue-t-il pas lui-même un frein à la proximité. Il faut assister à une audience pour s'en rendre compte.

Merci Maître EOLAS pour cette porte ouverte sur le monde judiciaire.

79. Le samedi 30 juin 2007 à 12:29 par Viviane

Données chiffrées trouvées sur un autre blog :

"50% des affaires traitées par les tribunaux d’instance en moins de 3 mois ½.
50% des affaires traitées par les tribunaux de grande instance en moins de 6 mois."

La réforme de la carte judiciaire, en privilégiant les gros TGI, ne pourra à mon sens que faire augmenter ces chiffres, qui ne reflètent en tout cas pas l'activité des grosses juridictions ...

Il est certain que la concentration des moyens envisagée est de nature à permettre une meilleure qualité de la justice concernant des contentieux techniques nécessitant une spécialisation (la création de pôles de l'instruction pour des affaires sensibles répond déjà à ce soucis; pourquoi pas demain, un regroupement des Conseils de prud'hommes qui appliquent le droit du travail, souvent complexe).

Cela étant, il m'apparaît que les contentieux plus simples ne pourront que souffrir en terme de délais et de qualité des visées productivistes de la réforme de la carte judiciaire.

Je ne suis pas sûre que les conditions de travail et d'accueil des justiciables dans les juridictions d'Ile de France soient les meilleures et encore moins un modèle ! Je crois que l'on peut même affirmer, sans leur en faire grief, que pour ces derniers contentieux, magistrats, fonctionnaires et auxiliaires de justice y font de "l'abatage" (audiences de police, audiences correctionnelle, contentieux locatifs, affaires familiales -quel justiciable de la région parisienne est resté plus de 5 minutes dans le bureau du juge pour un divorce par consentement mutuel ?-, ...).

Ma crainte est que la qualité de la justice du quotidien soit sacrifiée au nom d'impératifs ne concernant que la justice pénale (la concentration des juridictions pénales vise également à permettre une "harmonisation" de la jurisprudence, et notamment des peines prononcées) ou des contentieux complexes considérés comme plus nobles (pour lesquels une spécialisation est nécessaire).

Or, il est peut-être bon de rappeler que la justice du quotidien, qui touche par définition la plus grande partie des citoyens, est au coeur d'enjeux de société (famille, logement, vieillesse, surendetement, ...), jugés pour l'heure comme des questions moins sensibles.

Viviane

80. Le lundi 2 juillet 2007 à 15:30 par OLICHON Pierre

la grande réforme de la justice que je connais est la suppresson des tribunaux de simple police et de justice de paix mais il a fallu inventer des conciliateurs ?

81. Le mardi 3 juillet 2007 à 18:56 par UJA de Bayonne

Le Barreau de Bayonne est également toujours en grève ...

Le TGI de Bayonne risque en effet la suppression, tout comme la Cour de Pau.

Vous pouvez suivre notre actualité et signer notre pétition ici : ujabayonne.free.fr/

82. Le vendredi 6 juillet 2007 à 16:35 par koleoptere


à propos de "la carte de 1958" de la Région Provence Alpes Côte d'Azur j'ai du mal à croire que la carte actuelle date des années cinquante. Le sujet m'intéresse bien (que je ne sois pas du métier) et je voudrais trouver la trace des aménagements successifs. Pouvez vous m'aider ?

83. Le lundi 9 juillet 2007 à 10:32 par Gwenael HENRY

Le projet gouvernemental souligne l'opposition entre deux logiques ministérielles : Finances vs Justice. Le "rationalisme" du ministère des finances qui demande une simplification par l'alignement sur le découpage administratif régional, est généralement valorisé dans le discours dominant face au sois disant "traditionalisme" (pour ne pas dire pire : par exemple conservatisme) du ministère de la justice qui restait, du moins jusqu'à tout récemment, plus attaché aux aspects historique, sociologique et culturel de la fonction judiciaire.

Si les arguments fondamentaux "justifiant" cette refonte portaient d'une part sur la rationalisation par l'alignement sur les "régions administratives" et d'autre part sur le relèvement du seuil minimal d'activité des tribunaux, il faut bien alors constater que le projet gouvernemental est mal ficelé. Un seul exemple en Bretagne : le projet gouvernemental (qui n'est pas arrêté, nous assure-t-on) intègre déjà le fait que le département de la Loire Atlantique passera du ressort de la cours d'appel de Rennes à celui de celle d'Angers.

Un observateur honnête remarquera facilement que pour rester dans la logique des arguments « fondamentaux » exposés ci dessus, il faudrait premièrement que la Vendée suive la Loire Atlantique vers Angers et que la Charente passe du ressort de Bordeaux à celui de Poitiers pour cadrer avec les limites des régions administratives. Or ces modifications là, conformes à la doxa gouvernementale ne semblent pas du tout figurer à l'ordre du jour du projet de refonte de la carte judiciaire. Et deuxièmement comment dire qu'il convient de relever le seuil minimal d'activité en retirant un département du ressort d'une cours d'appel qui n'a rien demandé et fonctionne correctement.

84. Le jeudi 12 juillet 2007 à 21:38 par gardarem lou tribunal

un premier point : la"large concertation" préconisée par la garde des sceaux : mise en place de la commission 27 juin : réunion avec les chefs de cour 30 septembre : entre les deux larges consultations des magistrats, personnels et auxiliaires de justice des juridictions du ressort des Cours d'Appel!!!! quand on connaît les difficultés pour réunir des assemblées plénières dans les Tribunaux on comprend tout de suite que cette consultation n'est qu'une façade.... pour ma part je pense que la carte est déjà faite....et voilà mon deuxième point : comme beaucoup l'ont justement souligné, ce sont les citoyens les plus défavorisés qui se rendent le plus souvent au Tribunal ; les Tribunaux d'Instance restent ceux qui fonctionnent le mieux en termes de délais et d'accueil du public ; qu'adviendra t-il dans les départements ruraux où les transports en commun sont difficiles voire inexistants et le réseau routier (pour ceux qui ont une voiture) difficile? certains TI ont déjà des ressorts s'étendant jusqu'à 60 Km de distance ; leur suppression ralongerait les temps de trajet jusqu'à plusieurs heures ? Qui déposera une demande pour récupérer une somme modique(par rapport au seuil de compétence, mais pas pour le citoyen) et engager des frais de déplacements supérieurs à la somme réclamée ? Faut-il que les gens renoncent à réclamer des sommes de 150 ou 200 € même s'ils sont dans leur droit ? Malheureusement la population ne me parait pas prête dans beaucoup d'endroit à être solidaire de la bataille pour maintenir ces petites juridictions.... gardarem lou tribunal ne sera pas je le crains le mot d'ordre de l'automne mais nous risquons tous d'en pâtir...

85. Le dimanche 22 juillet 2007 à 22:59 par Grantumu


La collégialité, bon principe, n'est-elle pas en pratique une vaste foutaise?

La collégialité dans un corps où les 3/4 des gens sont avant tout et en priorité des carriéristes, même les bons, donc des concurrents?

La collégialité qui sauverait des Outreaux ... alors que toutes les réformes mises en oeuvre ces dernières années multiplient les juges uniques et les rapporteurs (quelques farces collégiales ont été brillament enterrées, terrassées par les contraintes budgetaires, mortes de soif en attendant les décrets d'application; mais les veaux sont contents, on leur a voté la loi tant promise à grand renfort de publicité) et que toutes, ou presque, les collégialités existantes ne le sont que de façade: toutes fonctionnent avec un président omnipotent qui se garde les pièces nobles et délègue les bas morceaux aux assesseurs, ou avec un système de rapporteur moins méprisable que le précédent; et les magistrats ne s'entretiennent que de quelques points particuliers, quand ils se supportent.

Il suffit d'avoir un peu fréquenté les chambres de l'accusation, devenus de l'instruction, collégiales depuis toujours (ou presque), pour savoir qu'il ne s'y fait aucun travail collégial (les accusés d'Outreaux ont pu vérifier). Dans les bonnes chambres, il y en a un qui travaille sur chaque dossier, et les autres l'aident à porter son résultat, en précisant tout au plus quelques contours.

Alors la collégialité de l'instruction ... qui sauverait des catastrophes ... et impliquerait une réforme de la carte judiciaire ... Sérieusement?!

J'ai une recette de grand-mère: on oblige à avoir non plus un, mais 2 juges d'instruction par chambre, et les tribunaux à 3 chambres sont tous sauvés. Et j'ai même un truc pour sauver la Chambre du TGI de MILLAU: 4 juges d'instruction pour les TGI à une chambre (oui, le quatrième, c'est pour permettre aux trois autres de prendre des RTT, des congés maternité, des vacances ... hein? Ils arrivent toujours à les prendre. C'est vrai).

Et avec quel argent va-t-on les payer? C'est dont ça le coeur de la réforme.

86. Le samedi 28 juillet 2007 à 14:23 par guigui

La réforme de la carte judiciaire est en marche, et assurément, le fondement de la réforme (et son utilité même) réside dans le "turn over" des fonctionnaires de la justice et le fait que l'Etat se trouve dans la nécessité de procéder à un rassemblement de ses fonctionnaires, qui, compte tenu des 35 heures et des divers congés (maladie, grossesse, dépression... et autres) ne sont plus que deux sur trois en poste. Si les magistrats du siège et du parquet ainsi que les fonctionnaires de Greffe se trouvent en un seul et même lieu, il y aura toujours du personnel. Réflexion basique mais d'une pertinence non contestable.

L'idée majeure de la Ministre Rachida Dati, ou qu'on lu a soufflé, c'est donc de procéder à une départementalisation de la justice, c'est à dire, parvenir à 1 Tribunal par département, et apparemment au Chef lieu. De plus, selon ses propos lors de l'installation du Comité de réflexion..., l'idée c'est d'avoir un Tribunal de Premier Instance (TPI) comprenant les juridictions anciennement d'instance, de Grande instance et de Prud'hommes ; les Tribunaux de commerce semblent exclus de ce regroupement compte tenu de la spécifité de leur fonctionnement (juges élus et bénévoles et Greffiers profession libérale, ce qui ne coute rien à l'Etat et qui fonctionne très bien - d'ailleurs tous les Greffes avant 1970 étaient des charges privées), ce qui fait qui ne devraient pas être intégrés dans cet immense TPI départemental.

Cependant, si pour les fonctionnaires, cela implique une délocalisation, les professions libérales grondent, surtout les avocats, qui vont devoir procéder à l'ouverture de bureaux secondaires au chef lieu du département (alors même que parfois, c'est seulement un Chef lieu hérité de l'histoire mais que la démographie et le dynamisme se trouvent dans une sous-préfecture), avec les frais de fonctionnement que cela engendre, notamment en province, où la plupart des avocats ne roule pas surt l'or... Sans compter sur les conséquences importantes collatérales en termes de déplacement de population (les avocats, ainsi que leur personnel qui pourrait se retrouver sur le marché du Travail- suivez mon regard -) et sur les crêches, écoles, milieux associatifs, qui seraient dépeuplés d'un côté et surpeuplés de l'autre. Sans compter sur la réticence des hommes politiques, qui en perdant leur Tribunal, perdent du même coût une institution importante, au profit d'une ville voisine, souvent concurrente historique.

Alors, il me semble que j'ai peut être la solution:
Rappelons nous les nécessités et objections :
1) Le regroupement des fonctionnaires en 1 seul lieu pour une meilleure gestion du personnel et la continuité du service public ;
2) La réticences des professions libérales, notamment avocats, pour eux et leur personnel ;
3) La réticence des politiques ;

Pourquoi l'Etat ne procéderait pas à un regroupement des fonctionnaires (magistrats et personnels de Greffe) dans son fameux Tribunal de Premier Instance civil d'une part et regrouperait par ailleurs les Tribunaux de commerce dont les caractéristiques en termes de compétence et de fonctionement son bien distinctes, notamment quand il en existe dans plusieurs villes dans un même, à l'endroit le plus adapté en terme de dynamisme et de population.

Ainsi on aurait bien la départementalisation souhaitée, 1 Tribunal de premier degré par département (1 civil et 1 commercial), le cas échéant à deux lieux différents du département, ce qui réglerait tous les problèmes :
- les fonctionnaires seraient regoupés en 1 seul lieu ;
- les avocats des lieux de suppression des TI et TGI et Prud'hommes bénéficieraient en contre-partie du Tribunal de commerce à compétence départementale ;
- les politiques conserveraient 1 des 2 Tribunaux du département et n'auraient donc que peu d'argument pour rejeter cette idée.

Pour donner des indications pratiques au regard des récentes réticences des avocats, dans les Basses Pyrénées, l'Allier et le Midi Pyrénées :
- le TPI à PAU et le Tribunal de commerce à BAYONNE
- le TPI à MOULINS et le Tribunal de commerce à CUSSET-VICHY
- le TPI à RODEZ et le Tribunal de commerce à MILHAU

Ce pourrait être une solution, même si deux probèmes persistent :
- quand il existe trois villes importantes dans le département (mais il faut bien trancher à un moment donné) ;
- le parquet qui doit parfois intervenir lors d'audience du Tribunal de commerce (mais dans ce cas, il y aurait toujours un procureur ou un substitut pour faire quelques km pour assister aux audiences lorsque sa présence est obligatoire - ca ne fait qu'1 personne à déplacer par semaine et encore, quand c'est nécessaire)

Voià mes reflexions sur ce sujet.

Je vous remercie de me faire part de vos remarques et critiques qui seront bien légitimes. Et pour ceux qui seraient convaincus par la démonstration et auraient les bonnes grâces de Madame la Ministre, Monsieur le Premier Ministre ou Monsieur LE PRESIDENT, ou toute autre personne en position dominante, peut être serait-il judicieux de leur faire part de ces réflexions.

87. Le mardi 31 juillet 2007 à 10:14 par FrédéricLN

@51 : bien au contraire, j'ai défendu également depuis longtemps la transparence sur les indicateurs de performance des hôpitaux.

Je sais bien que la "performance des indicateurs de performance" (fondés sur des nombres d'affaires gérées) a des limites : par exemple, ils n'ont presque aucun sens en matière de sécurité publique (le fait qu'on arrête plus de monde ne prouve pas qu'il y a plus de sécurité ...). Les indicateurs mesurent d'autant mieux la performance, que celle-ci dépend essentiellement de ce qui se passe à l'intérieur du service public, ex. : transports publics, hospitalisation, éducation nationale, impôts/comptabilité ...

(vs. très mal pour la sécurité, la défense, la diplomatie, l'économie, l'emploi ...).

Je ne sais dans lequel des deux cas se trouve l'action des tribunaux ? à quel point maîtrisent-ils la "production de jugements" ? Vu de loin, je dirais plutôt à la première famille, mais je veux bien être convaincu du contraire.

88. Le jeudi 2 août 2007 à 17:07 par Roy Bean

La refonte de la carte judiciaire ?
Une farce pour dissuader le quidam de saisir la justice pour les petits litiges, car qui galopera depuis Oye-Plage jusqu'à ARRAS (2 x 115 km par l'autoroute: 2 x 6,70 €) ou BETHUNE (2 x 90 km par l'autoroute: 2 x 5,20 €) pour saisir l'éloigné juge de proximité...
Et le pauvre avocat de Saint-Omer (62) que je suis sera l'un des dindons de cette farce ! Les confrères de Province et électeurs de N. Sarkozy auraient peut-être dû lire son programme !

Il est certain que le département du Nord sera le plus problématique si la réforme doit à tout prix être "un département, un TGI". Il est tout en longueur. Espérons un peu de pragmatisme.

Eolas

89. Le vendredi 3 août 2007 à 15:22 par David

Qu'entrainerait la suppression d'un TGI dans une commune quant aux droits de la défense d'un individu gardé à vue ? ( les avocats se donneront-ils la peine de se déplacer de leur domicile au commissariat puis vers le tribunal de la région ?)
S'il ne subsiste qu'un seul procureur par région, quid de leurs relations avec les élus locaux ? (Notamment dans leur mission de prévention contre la délinquance)
Merci

Le projet repose sur un TGI par département, une cour d'appel par région. Cela induit donc un procureur de la république par département et un procureur général par région. Pour les gardés à vue, ça ne changera pas grand'chose. Les avocats se déplacent quand il le faut, peu importe la distance, les nécessités de la défense passant avant leurs convenances personnelles, quoi qu'il nous en coûte. Par contre, les transferts lors des défèrements seront plus problématique pour les commissariats et gendarmeries situées en périphérie du ressort, loin du siège du tribunal Cela fera uatant de kilomètres en plus. Et il y a des délais à tenir. S'agissant des relation parquet-élus locaux, cela peut les faciliter, puisque toutes les communes du département auront un seul procureur comme interlocuteur, idem pour le préfet (c'est déjà le cas dans des départements comme Paris, le Val de Marne, les Hauts de Seine, le Val d'Oise, la Seine Saint Denis, les Yvelines...). Les procureurs généraux interviennent rarement directement avec les élus. Ils ont déjà de quoi s'occuper à chapeauter les parquets de leur ressort. Les procureurs généraux ont plutôt comme interlocuteurs des ministres et préfets de région. Mais comme je le signale, rien n'interdit d'unifier des parquets au niveau départemental : un procureur de la république au siège du principal TGI et des procureurs adjoints qui dirigent les parquets des autres TGI sous son autorité directe.

Eolas

Mes logiciels, comme mes clients, sont libres. Ce blog est délibéré sous Firefox et promulgué par Dotclear.

Tous les billets de ce blog sont la propriété exclusive du maître de ces lieux. Toute reproduction (hormis une brève citation en précisant la source et l'auteur) sans l'autorisation expresse de leur auteur est interdite. Toutefois, dans le cas de reproduction à des fins pédagogiques (formation professionnelle ou enseignement), la reproduction de l'intégralité d'un billet est autorisée d'emblée, à condition bien sûr d'en préciser la source.

Vous avez trouvé ce blog grâce à

Blog hébergé par Clever-cloud.com, la force du Chouchen, la résistance du granit, la flexibilité du korrigan.

Domaine par Gandi.net, cherchez pas, y'a pas mieux.