Le DADVSI Code (4) : la Cène de ménage
Par Eolas le mardi 10 janvier 2006 à 15:35 :: Actualité du droit :: Lien permanent
Je reviens brièvement sur l'invitation dont ont fait l'objet quelques blogueurs de la part du ministre de la culture, pour un déjeûner débat sur la loi DADVSI. Naturellement, ceux ci en rendent compte de manière détaillée, cf. les blogs respectifs de Cyril Fievet, Tristan Nitot, Bloïc™ Le Meur, Bertrand Lemaire, Vincent Glad, Thomas Clément, et, même s'il n'est pas blogueur, Fafa.
J'ai eu l'honneur d'être sur la liste des invités, de même que mon directeur de conscience Versac, mais ne me suis pas rendu à cette invitation, non pas que je ne sais pas me comporter en société comme certains qui renversent leur vin ou enfument leurs convives, mais j'étais également en déplacement à l'étranger. J'avais informé la personne qui m'avait contacté la veille, mais le billet de Tristan Nitot m'apprend que l'information n'était pas remontée rue de Valois et qu'un couvert vide signalait mon absence.
J'ai lu avec intérêts les divers compte-rendus et commencé à écouter l'enregistrement audio de Loïc Le Meur.
Ce qui m'a le plus étonné dans cette affaire, c'est non pas cette invitation, qui m'a plutôt flatté, et j'adore être flatté, mais c'est le tir de barrage qu'ont subi mes quasi commensaux, sur leur absence de représentativité, la complicité à l'opération de communication du ministère, leur absence de pugnacité au déjeûner (sauf Loïc qui en était à balancer des verres) et leur complaisance satisfaite dans les comptes-rendus.
J'en finis par me dire que j'ai bien fait de ne pas y aller, sous peine d'être moi aussi traîné à la roche tarpéienne et de voir mon costume taché de vin. Et pourtant, une coupe de champagne me ferait venir de très loin.
Donc, n'ayant point de commentaire à faire sur le contenu de cette réunion ni sur le menu, je vais prendre la défense des invités ainsi houspillés, et en profite pour vous expliquer concrètement comment ça s'est passé pour moi.
J'ai tout simplement reçu un e mail la veille, émanant de Publicis-Consultant, me demandant de prendre contact avec eux d'urgence pour une « opportunité » avec Loïc Le Meur, Tristan Nitot, et Versac. Mon premier réflexe était de leur signifier vertement que mon hétérosexualité psychorigide s'offusquait de ce genre de propositions, jusqu'à ce que je réalise que l'absence de Laurent ne pouvait que signifier que cette opportunité n'aurait pas à faire rougir mon confesseur.
J'avais décidé de laisser la réponse attendre mon retour en France, mais ai été relancé sur mon portable le jour même, par un message plus clair sur la teneur et la date de l'invitation. J'ai donc répondu aussitôt à l'e mail indiquant que je ne pouvais que décliner l'invitation, avec regrets vu son caractère si people, qui rappelait un ancien ministre de la rue de Valois.
Sur le fond maintenant :
• Oui, il s'agissait d'une opération de com', et alors ? Le fait qu'elle émane de Publicis Consultants, une agence de communication, le rendait évident, et je pense qu'aucun des invités n'a été dupe un seul instant. Accepter cette invitation n'est pas pour autant un acte de complicité.
• Quelle représentativité avais-je, ainsi que les autres blogueurs ? Aucune : seuls Loïc et Versac sont des habitués des plateaux de télévision, bref, ce qui a fait de nous les Élus, c'est notre audience plus que nos qualités personnelles. Mais permettez moi de penser que nos audiences respectives sont peut être au moins partiellement dues à nos qualités personnelles. Le but était donc que nous en parlions sur nos blogs, et nous fassions les portes-paroles du ministre vis à vis de la blogosphère. Sur ce point, ça a parfaitement marché, puisque même moi j'en parle alors que je n'ai pas pu venir. Et puis un déjeûner, fût-ce avec un ministre, ce n'est pas un acte de gouvernement, dès lors aucune onction populaire n'est nécessaire pour avoir le droit d'y comparaître. L'invitation me concernait moi et mes idées, et je n'étais pas censé représenter qui que ce soit. Je ne représente que devant les tribunaux.
• Pourquoi n'aurais-je, pas plus que les autres invités, profité de cette invitation pour sauter à la gorge du ministre en scandant les slogans d'EUCD.info ? Parce que l'un des critères de choix des invités était probablement de ne pas être des irréductibles adversaires de la loi DADVSI, ni des panégyristes béats, mais des citoyens exprimant en termes mesurés et argumentés leurs interrogations et reproches. Le ministre n'avait pas envie de se retrouver à nouveau sur la sellette après l'incident Virgin et l'incident de l'amendement imprévu. Je sais de par ma profession qu'on est plus crédible et obtient plus en argumentant calmement, sans exagération outrancière ni opposition pure et dure.
• Aurais-je moi aussi écrit un billet ronronnant de consensualisme ? Probablement, car cette invitation m'a réellement flatté, je ne bouderai pas mon plaisir, et je ne suis pas un adversaire de la loi DADVSI. Mes trois billets ne critiquent pas la loi en tant que telle mais commentent la procédure parlementaire et certains incidents inacceptables (la présence de Virgin) ou amusants (l'adoption de la licence optionnelle). Depuis le début, les outrances, les déformations, voire les mensonges lus à ce sujet, du genre la déclaration d'urgence et l'adoption la veille de noël pour violer les règles de la démocratie, on voit ce qu'il en a été, m'ont passablement irrité. Ca m'a rappelé les mêmes antiennes entendues en leur temps contre la LCEN, qui devait écraser l'internet sous une chape de plomb (à l'époque, ce n'est pas Staline qui était invoqué mais Mao, je n'ai pas oublié le "Bienvenue en République Populaire de France"), vous pouvez juger ce qu'il en est aujourd'hui. La loi DADVSI est la transcription d'une directive européenne de 2001, effectuée avec retard, directive qui vise à permettre la ratification d'un traité international de 1996 signé par l'Union Européenne. La France n'a pas d'autre choix que de la transcrire. Là où le débat est permis, c'est sur les points où elle va plus loin que cette directive, c'est à dire dans l'encadrement de la copie privée et la pénalisation du contournement des DRM (amendement 150 et 151 à l'article 7).
Que les propositions parlementaires soient critiquables, c'est normal et sain.
Crier au fascisme parce qu'elles ne nous plaisent pas est ridicule.
Tout comme traîter de collabos ceux qui ne reprennent pas ce discours à la table du ministre.
Commentaires
1. Le mardi 10 janvier 2006 à 17:46 par NKGI
2. Le mardi 10 janvier 2006 à 17:50 par Cyril Fiévet
3. Le mardi 10 janvier 2006 à 17:53 par Fred
4. Le mardi 10 janvier 2006 à 18:13 par all
5. Le mardi 10 janvier 2006 à 18:24 par Pangloss
6. Le mardi 10 janvier 2006 à 18:40 par Patrick
7. Le mardi 10 janvier 2006 à 18:49 par Parayre
8. Le mardi 10 janvier 2006 à 18:55 par Flying™
9. Le mardi 10 janvier 2006 à 20:47 par Maxime
10. Le mardi 10 janvier 2006 à 21:16 par Matthieu
11. Le mardi 10 janvier 2006 à 22:22 par PAGLOP-DUTOU
12. Le mardi 10 janvier 2006 à 23:55 par Maxime
13. Le mercredi 11 janvier 2006 à 00:10 par Luc
14. Le mercredi 11 janvier 2006 à 00:30 par Juriste en herbes
15. Le mercredi 11 janvier 2006 à 00:51 par Albert E
16. Le mercredi 11 janvier 2006 à 00:52 par frédéric Rolin
17. Le mercredi 11 janvier 2006 à 01:19 par EL
18. Le mercredi 11 janvier 2006 à 02:42 par Damien
19. Le mercredi 11 janvier 2006 à 10:26 par Xuelynom
20. Le mercredi 11 janvier 2006 à 10:42 par Luc
21. Le mercredi 11 janvier 2006 à 11:03 par Xuelynom
22. Le mercredi 11 janvier 2006 à 12:21 par L'institutrice
23. Le mercredi 11 janvier 2006 à 13:13 par Luc
24. Le mercredi 11 janvier 2006 à 13:39 par Sans pseudo
25. Le mercredi 11 janvier 2006 à 15:19 par Le secrétaire qu'on devrait tous embaucher
26. Le mercredi 11 janvier 2006 à 15:22 par Arnaud
27. Le mercredi 11 janvier 2006 à 19:16 par -
28. Le mercredi 11 janvier 2006 à 21:31 par Luc
29. Le jeudi 12 janvier 2006 à 10:49 par ML
30. Le jeudi 12 janvier 2006 à 12:07 par Eric
31. Le jeudi 12 janvier 2006 à 15:19 par Eric
32. Le mardi 17 janvier 2006 à 01:58 par bituur esztreym