Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

mardi 3 juillet 2007

Nouvelles de la caverne

Merci beaucoup de vos gentils mots de soutien. Le passage à vide est terminé, ça ne dure jamais bien longtemps de toutes façons, mais ma secrétaire a perfidement profité de mon exil pour bloquer l'entrée de la caverne avec quelques volumineux dossiers nécessitant mon attention urgente, et les esclaves élèves avocats du cabinet se sont enfuis vendredi sous le prétexte fallacieux qu'ils auraient des examens à passer, après m'avoir lâchement fait baisser ma vigilance à coup de champagne (je suis très fier d'eux, ils ont beaucoup appris).

Retour progressif à une activité normale donc.

Et encore merci.

vendredi 22 juin 2007

Une formule à deux balles, un article dans la presse.

Nous sommes sauvés.

Pour Rachida Dati, Nicolas Sarkozy « a été élu sur un mandat clair » en matière judiciaire. Elle compte donc mener à bien le chantier de la fermeté, notamment envers les délinquants mineurs. Pour cela, elle annonce que, « pour la première fois depuis des années », elle adressera directement au parquet une « circulaire d’action publique », qui guidera l’action des procureurs selon le principe « une infraction, une réponse ».

Wouahou. Une infraction, une réponse. Jamais les parquetiers n'y auraient pensé tous seuls. Ils vont adorer. (Ha, et c'est pas le Figaro : Libé donne aussi dans la facilité).

mardi 19 juin 2007

Il ne manque plus à François Hollande que d'être content

''Bis repetita placent" au PS (je graisse) :

PARIS (AFP) - Le Premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, a déclaré mardi que Jean-Marie Bockel, qui entre au gouvernement de François Fillon, "s'est mis de fait hors du PS".

"Il s'est mis de fait hors du PS, il n'y a pas de procédure d'exclusion, c'est comme pour Bernard Kouchner", devenu ministre des Affaires étrangères, à déclaré M. Hollande, interrogé sur une éventuelle exclusion du PS.

"Il était à la droite du Parti Socialiste, et il est à la droite tout court. C'est sa liberté personnelle. Il était apôtre du blairisme (...) Il a saisi l'opportunité qui s'offrait à la lui", a ajouté M. Hollande.

"Il m'a appelé au téléphone pour me dire sa décision, comme l'avait fait Kouchner", a ajouté le dirigeant du PS.

Sans commentaire.

PS : Pour ceux qui n'ont pas saisi le titre.

jeudi 14 juin 2007

La prison vue de l'intérieur

Vous vous souvenez de Romain ?

Romain, c'était le prévenu de cette affaire si bien racontée par un journaliste de Libération.

Romain a été condamné en comparution immédiate à quatre mois de prison ferme pour violences aggravées sur les forces de l'ordre (un pavé lancé sur des gendarmes mobiles le soir du deuxième tour de l'élection présidentielle).

Etant journaliste de formation, il tient un blog depuis sa cellule (hébergé sur Libération.fr, le site parfait pour un blog de prisonnier), à Fleury Mérogis (le grand bâtiment central).

Enfin, il ne le tient pas vraiment : il s'agit d'extraits de ses courriers à ses proches et de textes spécialement rédigés en vue de leur publication sur ce blog. Ses textes sont probablement lus par le personnel pénitentiaire (pas sûr : il est désormais condamné définitif et bientôt sortant, et donc plus systématiquement soumis à la censure), mais rien ne laisse supposer qu'il s'auto-censure ; il a un bon style, et un ton personnel. Son juge d'application des peines devrait adorer.

Le titre du blog est trompeur : quatre mois fermes, avec les réductions de peine, ça fait trois fois sept jours de réduction de peine (les 21 jours dont il parle) soit trois mois et neuf jours effectifs, avec une libération conditionnelle possible au bout d'un mois et vingt jours, c'est à dire très bientôt, d'ici une ou deux semaines environ. Je ne doute pas qu'il l'obtienne. Mise à jour 18/06/2007 : Ca se confirme, il a reçu sa convocation pour l'audience de libération conditionnelle.

Ce blog sera donc de courte vie, et c'est tant mieux pour lui. En tout cas, voilà une visite de l'univers carcéral vu de l'intérieur.

Lien : Quatre mois fermes, le blog de Romain.

(Il ne peut lire les commentaires, naturellement. Certains lui sont transmis par ses proches, et il les lira à sa sortie de prison).

lundi 11 juin 2007

Manifestation des magistrats aujourd'hui à 14 heures

A l'appel de l'Union Syndicale des Magistrats, organisation majoritaire dans la profession, les magistrats[1] sont appelés à se réunir devant les palais de justice aujourd'hui à 14 heures en signe de solidarité avec leur collègue Jacques Noris, vice président du tribunal de grande instance de Metz, agressé dans son cabinet la semaine dernière, et pour demander plus de moyens pour assurer, entre autres, la sécurité des palais de justice.

Pour ma part, j'y serai. Je pense qu'il serait bon que bien des robes noires sans simarre[2] y soient présentes, histoire que de défenseur des justiciables, nous ne devenions pas un jour garde du corps des magistrats.

Notes

[1] Je rappelle que le terme de magistrat regroupe les juges et les procureurs, qui forment un corps unique, même si leurs fonctions sont bien entendu séparées.

[2] Les robes des magistrats se distinguent de celles des avocats par deux simarres, deux revers de soie (ou de satin) noire qui descendent des épaules au pied de la robe, sur le devant. Les robes des magistrats brillent, tandis que celle des avocats sont mates... et moins chaudes en été.

mardi 29 mai 2007

Et de trois !

Hé oui, pour la troisième année consécutive, j'ai soufflé sous le nez de Versac les Pyjamas de Satin décernés par A Fistful of Euros (AFOE), catégorie meilleur blogue français. Et cette année, sans même avoir à faire campagne. Et s'il faut choisir un modèle, je prendrai celui-là.

Merci donc à ceux qui ont voté pour moi, il est toujours flatteur d'être aussi bien entouré.

Un petit mot pour les esprits chagrins qui s'obstinent à me lire : les pyjamas de satin, c'est une médaille en chocolat. Même si mes chevilles aiment à enfler, il leur en faut plus. Simplement, à l'instar de Versac, j'ai un profond respect pour ce blogue anglophone de qualité, qui réunit des blogueurs européens de tous pays, et qui parlent intelligemment de l'actualité politique de leur pays et de l'impact qu'elle peut avoir au niveau européen.

Donc, être considéré comme digne d'intérêt par les lecteurs de ce blogue a de quoi faire plaisir, et faire la nique à Versac qui mérite ce trophée plus que moi depuis trois ans est la cerise sur le gateau.

C'est vrai, quoi. Il n'y a pas de raison que les injustices ne profitent qu'à mes clients.

vendredi 18 mai 2007

Un gouvernement de prix

Je n'avais pas tout de suite réalisé, mais le gouvernement fraîchement nommé inclut deux prix Busiris, dont le premier prix Busiris, qui en fut l'inspirateur et est devenu premier ministre, le second étant Xavier Bertrand, fraîchement récompensé.

Voilà qui s'annonce sous les meilleures auspices. Je ne devrais pas manquer de sujet de billets dans les mois à venir.

mercredi 2 mai 2007

Le grand duel de ce soir

Milan AC : 3 ; Manchester United : 0.

lundi 30 avril 2007

Bienvenida a Sofia

J'avais en son temps entretenu mes lecteurs d'une possible crise dynastique et constitutionnelle au pays de Cervantes.

Vous pouvez soupirer d'aise : la Princesse des Asturies, Doña Leticia Ortiz Rocasolano, a donné naissance hier à 17h28 à une deuxième fille, Sofía de Todos los Santos de Borbón y Ortiz, du prénom de sa grand mère la reine d'Espagne, Doña Sofía Margaríta Viktoría Frederíki Glýksbourgk de Grèce et du Danemark, reine d'Espagne (appelons la Sofia tout court, si vous le voulez bien).

La Princesse d'Asturie ayant pour le moment décidé de lever le pied sur la production de progéniture couronnée, le président du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero n'est plus pris à la gorge pour une éventuelle réforme de la Constitution, et tout semble indiquer que c'est bien sa grande soeur l'infante Leonor de Todos los Santos de Borbón y Ortiz, future 36e princesse des Asturies, Princesse de Viana, Princesse de Gérone, Duchesse de Montblanc (pas les stylos, c'est en Catalogne, province de Tarragone), Comtesse de Cervera y Seigneuresse de Balaguer, qui montera sur le trône quand Dieu l'aura décidé.

Pas encore de photographie officielle.

Je sais que l'évolution de la situation vous préoccupait tous. Vous pouvez maintenant vous concentrer l'esprit libre sur les sujets plus anodins comme les élections de dimanche prochain.

jeudi 19 avril 2007

Affaire "Radiateur" : le délibéré

Le tribunal correctionnel de Saint Nazaire a rendu son jugement dans l'affaire "Radiateur". Les deux prévenus, "Radiateur" lui-même et le directeur de la publication du site Actuchômage ont été déclaré coupables et condamnés tous les deux à 500 euros d'amende avec sursis. Cela signifie que si dans les cinq ans qui viennent, ils ne sont pas condamnés à nouveau à une peine délictuelle, cette condamnation sera réputée non avenue ; dans la cas contraire, ils devront payer l'amende en plus de la peine qui sera prononcée à cette occasion.

Je n'ai pas encore les motifs de la décision, mais Actuchômage devrait les publier. J'en ferai le commentaire le moment venu, cette affaire posant des questions intéressantes sur la responsabilité des éditeurs de site pouvant s'appliquer aux blogueurs.

Le directeur de la publication d'Actuchômage envisage de faire appel ; il a dix jours pour cela.

Piqûre de rappel : j'avais traité l'affaire Radiateur ici.

jeudi 5 avril 2007

Il en va des blogues comme des cloches

A l'instar des cloches, parties à Rome, ce blogue va rester coi quelques jours, mon emploi du temps ne me laissant pas de répit.

Comme notre Sauveur, il ressuscitera au bout du troisième jour, ou plus probablement du quatrième, il est moins balaise que Lui.

Joyeuses Pâques à tous.[1]

Notes

[1] Y compris à nos amis orthodoxes, puisque calendriers julien et grégorien coïncident cette année pour Pâque : vous n'avez plus qu'à enfin admettre que l'Esprit Saint procède du père ET du fils, et le Schisme aura pris fin ; la balle est dans votre camp.

mercredi 4 avril 2007

Pourquoi je n'ai pas parlé de l'affaire Techland

Depuis quelques jours, de nombreux lecteurs m'ont écrit par mail pour me signaler l'affaire dite Techland et me demander mon avis sur celle-ci.

En quelques mots, un éditeur de jeux vidéo, après avoir obtenu par une décision judiciaire les coordonnées correspondants aux adresses IP d'internautes ayant téléchargé illégalement un jeu vidéo qu'il éditait, a chargé un avocat de mettre en demeure les personnes concernées de régler une indemnité forfaitaire de 400 euros sous peines de poursuites. La lettre était accompagnée d'un RIB et laissait un délai de 15 jours.

J'ai refusé de répondre à ces amicales sollicitations car ce que je fais sur ce blog est de la vulgarisation juridique. Je prends du droit compliqué et j'essaye d'en faire du droit simple. Les commentaires permettent ensuite d'apporter des précisions, ou de me faire insulter par les partisans de José Bové.

En l'espèce, s'agissant d'une affaire en cours, qui ne pose pas de problème juridique d'une originalité folle, ces demandes d'avis étaient en réalité des demandes de consultation. Les faits ne nécessitaient aucune explication (un ayant droit veut être indemnisé du préjudice que lui a causé la contrefaçon de son oeuvre), ce qui posait question est : que faire ? Céder ou se défendre, et comment ?

Je ne consulte pas via mon blog, surtout dans une affaire où un contentieux est possible, car tout anonyme que je sois, je reste avocat et tout mauvais conseil donné même gratuitement engagerait ma responsabilité civile.

Ce d'autant que la riposte spontanée a été judicieuse et efficace, selon le principe de l'arroseur arrosé. Si certains internautes fautifs auraient payé, d'autres ont porté plainte auprès du bâtonnier pour ce courrier peu conforme aux règles de la profession.

Attention toutefois au balancier : le site Ratiatum qui regroupe les nouvelles de cette affaire risque à son tour de se faire arroser : il indique le nom de l'avocat en cause, et indique des faits qui sont censés être confidentiels (sur une hypothétique enquête disciplinaire qui aurait été ouverte à l'encontre de cet avocat) ou qui sont douteux (comme le nombre de lettres supposément envoyées, en confessant n'avoir aucune source fiable, ou que des poursuites pénales seraient envisagées à l'égard de cet avocat, ce qui me paraît là plus que douteux). Le fait que cet avocat aurait agi de façon quelque peu téméraire ne permet nullement de le diffamer.

Bref, il serait temps qu'apparaisse dans cette affaire ce qui lui a fait défaut depuis le début : du tact et de la mesure.

Et puisqu'un conseil on me demande, un conseil on aura : face à un courrier comme celui-là, consultez un avocat. Le prix, me dira-t-on ? Mais justiciables de toutes les IP, unissez-vous ! Cotisez-vous, selon le mécanisme des associations de victimes d'un même fait : chaque membre paye une cotisation qui sert à régler les honoraires de l'avocat qui en représente les adhérents. Si vous êtes cent, ça ne coûte que quelques dizaines d'euros par personne.

Notez que ce conseil est encore valable. Quand bien même cet avocat aurait franchi la ligne jaune déontologique, il demeure que l'éditeur de jeu vidéo a des relevés d'IP et les identités des internautes correspondants. La remise en cause de la mise en demeure ne déchoit pas l'éditeur de ses droits.

Voilà pourquoi je ne parlerai pas de cette affaire.

Quoi, comment ça, j'en ai parlé ?

jeudi 29 mars 2007

Affaire Petite Anglaise : la victoire de la blogueuse.

Petite Anglaise a gagné son procès aux prud'hommes. Le Conseil vient de rendre son délibéré, et a condamné l'employeur de Petite Anglaise à lui payer presque 44.000 euros de dommages intérêts[1], outre 500 euros d'article 700, c'est à dire de frais d'avocat, et le remboursement aux ASSEDIC de six mois d'indemnité de chômage de Petite Anglaise.

Je n'ai malheureusement pas encore accès aux motifs du jugement, il faudra attendre quelques jours, probablement une quinzaine pour cela. Commentaire à venir.

Champagne, Petite ! And Champomy for Tadpole.

Notes

[1] 43.981,32 € précisément.

mercredi 28 mars 2007

Rions un peu sur le dos du Monde et des peoples

Le producteur et animateur Jean-Luc Delarue a connu aujourd'hui les joies de la CRPC, la Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (qui ne s'est jamais appelée le « plaider-coupable »), au tribunal de grande instance de Bobigny.

- Et pourquoi le tribunal de Bobigny, mon cher maître ?

- Ma chère lectrice ! Quelle joie de vous revoir !

- Vous me faites rougir. Vous savez que la curiosité m'attire inlassablement vers votre blog telle l'abeille vers la fleur.

- Gageons que l'aspect people est aussi le nectar qui vous attire. Le tribunal de grande instance de Bobigny est territorialement compétent pour l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle, là où s'est posé l'avion qui transportait notre exubérant passager.

- Et qu'a donné cette audience ?

- Le Monde nous l'apprend : une condamnation à un stage de citoyenneté de trois jours, sous peine de deux mois de prison.

- Un stage de citoyenneté ? Et qu'est-cela, je vous prie ?

- L'article R.131-35 du Code pénal vous répond : le stage « a pour objet de rappeler au condamné les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité de la personne humaine et de lui faire prendre conscience de sa responsabilité pénale et civile ainsi que des devoirs qu'implique la vie en société. Il vise également à favoriser son insertion sociale.»

- Jean-Luc Delarue avait-il donc besoin qu'on lui enseigne ces valeurs et que l'on favorise son insertion sociale ?

- Il est permis d'en douter, les faits ayant eu lieu sous l'empire combiné de Bacchus et la pharmacopée. Ce d'autant que dans l'esprit du législateur, ce texte se destinait surtout aux sauvageons issus de nos exotiques banlieues vivant d'expédiants connus sous le vocable générique de "bizness". AJoutons que la menace de deux mois de prison s'il faillit à... trois jours de présence peut prêter à sourire.

- Voilà donc le rire sur le dos de Jean-Luc Delarue ?

- Plus largement, en bon français, je ris du ridicule des puissants, fût-ce d'une puissance seulement médiatique.

- Et pour le Monde ?

- C'est dans l'article que je viens de citer. J'aime quand les journalistes emploient du vocabulaire juridique qu'ils ne maîtrisent pas et boivent la tasse.

- Et où la tasse fut-elle bue ?

- Voyez vous même. L'article commence par ces mots : « L'animateur de télévision, Jean-Luc Delarue, a été condamné, mercredi 28 mars, à un stage de citoyenneté de trois jours ». L'article précise même que cette mesure sera inscrite à son casier judiciaire.

- Je vous suis.

- Suivez moi un peu plus loin, jusqu'à la fin de l'article.

- J'y lis : « Le stage de citoyenneté est une mesure alternative aux poursuites pénales. Mis en place en 2004, il est destiné à rappeler aux personnes poursuivies les valeurs républicaines de tolérance et de respect de la dignité humaine ».

- Et oui. Le journaliste dit donc que l'animateur a été condamné... à une mesure alternative aux poursuites pénales !

- Spectaculaire contradiction !

- Bon, à la décharge du journaliste (en fait une agence de presse) : le stage de citoyenneté peut être ordonné à titre de mesure alternative aux poursuites, par le parquet, dans la cas d'un classement sous conditions (article 41-1, 2° du Code de procédure pénale). Mais la simple relecture aurait dû attirer l'attention de l'auteur sur cette contradiction dans le propos.

- Je reconnais bien là votre mansuétude, et m'étonnais que vous n'en usassiez point à l'égard du nouveau ministre de l'intérieur.

- Madame, je suis ainsi fait que je ne me mets en colère qu'une fois par jour, et qu'un imparfait du subjonctif comme celui dont vous venez de me gratifier fait de moi le plus doux des hommes.

- Vous allez encore me faire rougir : je me sauve afin de cacher mon trouble.

- Vous me dispensez donc de cacher le mien. Serviteur, Madame.

Harry Potter et la bave du crapaud

Désolé pour les fans de la série, le titre n'a rien à voir avec le sympathique sorcier du Surrey, mais je parle ici d'un apprenti sorcier de moindre talent.

(Je graisse)

Le ministre de l'Intérieur a indiqué que l'homme dont l'interpellation a déclenché les heurts était âgé de 32 ans et que les forces de l'ordre avaient, au total, procédé à 13 interpellations.

"Au départ, c'est un passager comme un autre, et ensuite on apprend que c'est quelqu'un qui est très défavorablement connu des services de police puisqu'il a 22 affaires signalées", a-t-il détaillé. "Il y a eu 13 interpellations", a-t-il ajouté, rendant "un hommage appuyé à toutes les forces de l'ordre" qui ont fait preuve d'un "grand sang-froid" et "accompli hier soir un travail tout à fait remarquable".

Plus tard, à la sortie du Conseil des ministres, il a précisé que "la personne qui a été à l'origine de ce contrôle qui a provoqué ces actes de violences inacceptables est un récidiviste défavorablement connu des services de police et de surcroît entré illégalement sur le territoire".

Ha, le départ de Nicolas Sarkozy m'avait laissé orphelin tel un Dumbledore après la disparition de Voldemort : j'avais perdu mon meilleur ennemi[1]. Je croyais qu'on m'avait mis un vulgaire Pettigrew pour assurer l'intérim, mais en fait, c'est plutôt un Lucius Malfoy[2]. Il ne vaut pas le maître, mais annonce un intérim distrayant.

Pourquoi cette charge ? Parce que cette méthode d'insinuation est absolument écoeurante, et indigne d'un ministre de la République (je peux le dire, j'ai deux drapeaux tricolores chez moi, et deux bicolores).

Hier, des incidents très graves ont eu lieu gare du nord. Pas graves en raison des dégâts matériels qu'ils ont provoqués, mais en raison de la présence de la télévision et de la proximité de l'élection, bien sûr. Comment désamorcer la bombe ? Mais en pointant du doigt. En l'occurrence, le voyageur resquilleur dont l'interpellation a été l'élément déclencheur de l'émeute : un "sans papier récidiviste". Immigration clandestine, récidive, bref, c'est la Némésis, l'incarnation, la prosopopée de l'Ennemi de Nicolas Sarkozy. Voyez, voyez comme il a raison, comme il a identifié l'ennemi, comme seul lui sait qui il faut combattre (bon, lui aussi, mais il compte pas).

Mais l'homme de raison, lui, que lit-il ?

Que le ministre déclare à la sortie du conseil des ministres que cette personne est un « récidiviste ».

Un récidiviste de quoi ? Un récidiviste. L'information se suffit à elle même, un récidiviste n'a par définition que ce qu'il mérite. S'agit-il d'un récidiviste du voyage sans payer ? Rappelons que la peine est de 45 euros d'amende, et que la récidive n'existe pas en la matière.

Le début de l'article apporte une précision : il a "22 affaires signalées". Tiens ? Je croyais qu'un récidiviste était une personne condamnée définitivement pour des faits et qui commettait à nouveau des faits identiques ou analogues dans un délai de 5 ans ? Pour le ministre de l'intérieur, non. C'est un délinquant signalé.

Mais signalé où ?

Au STIC, Système de Traitement des Infractions Constatées, que les magistrats du siège affectionnent tout particulièrement, quand ils ont un casier judiciaire (on dit un B1, pour bulletin numéro 1) néant, mais que la police leur joint leur listing du STIC pour montrer que c'est peut être un primo-délinquant, mais s'il pouvait avoir un prix de gros, ça leur ferait plaisir. Je dis "affectionnent" ironiquement, bien sûr : la plupart ne le lisent même pas, et sont agacés de le voir figurer au dossier.

Le STIC est un fichier tenu par la police où sont entrées toutes les personnes entendues dans une affaire de police. Victimes comprises. Peu importe qu'aucune suite judiciaire ne soit donnée aux faits (parce que, par exemple, heu... ils ne sont pas vrais), vous êtes fiché. Pendant 20 ans. Et jusqu'en 2001, ce fichier fonctionnait en toute illégalité (mais on apprend vite qu'une illégalité commise par l'Etat est moins grave que celle commise par un séjour irrégulier qui fait trembler la République sur ses fondations). Ce fichier contient aujourd'hui 5 millions de mis en cause, dont la majorité n'a pas fait l'objet de poursuites.

Mais 22 signalements, quand même, il a bien dû y avoir une ou deux affaires qui l'ont amené devant la justice ?

Ce n'est même pas sûr, puisque la dépêche nous apprend qu'il fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, qui est une simple mesure administrative, résultant soit d'un refus de carte de séjour (antérieur au 29 décembre 2006, la loi a changé depuis) ou d'une interpellation dans la rue ou devant une école maternelle. Or s'il avait été condamné par un tribunal, il ferait l'objet d'une interdiction du territoire, qui est une sanction pénale.

Bref, le récidiviste pointé du doigt par le ministre a peut être bien un casier judiciaire vierge (si on exclut l'APRF qui y est mentionné, mais qui n'est pas une peine, j'insiste sur ce point, c'est uniquement pour que la justice sache que cette personne commet un délit de maintien sur le territoire malgré une décision d'éloignement).

N'empêche, m'objectera-t-on, il a commis au moins deux infractions. J'en conviens, l'une passible de 45 euros d'amende, l'autre d'un an de prison maximum. On est loin du récidiviste suggéré par le ministre. Et je doute fortement que ce soit lui qui ait causé les dégâts dans la galerie marchande, puisqu'il était en garde à vue dans le commissariat de la gare du Nord qui se trouve précisément dans cette galerie pendant les faits. Rien ne me laisse penser que les auteurs de ces destructions connaissaient seulement notre voyageur radin, tant les clandestins savent que pour rester en France, il faut par dessus tout éviter les ennuis, et que cela s'applique à des amis.

Je ne sais pas ce qui s'est passé au juste hier soir. J'ai tendance à être du côté des services de police plutôt que de ceux qui ont causé le désordre qui a permis à des casseurs de se livrer à leurs déprédations. Je m'interroge simplement sur le fait que le banal contrôle d'un voyageur sans ticket, qui, s'il s'était échappé, aurait fait perdre 45 euros à la RATP, dégénère à ce point en sept heures d'émeute en plein Paris.

Mais tenter de justifier l'action des forces de l'ordre en insinuant que ce serait la faute d'un sans papier récidiviste, c'est à vomir.

Bienvenue à votre poste, Monsieur Baroin. Je vous aime déjà.

Notes

[1] Dans tous les dossiers de droit des étrangers allant au contentieux, mon adversaire est un préfet, soumis hiérarchiquement au ministre de l'intérieur, et parfois le ministre de l'intérieur lui-même.

[2] Que l'on traduit en français par Mauvaisefoi.

jeudi 22 mars 2007

Affaire des caricatures : Charlie Hebdo relaxé

... Ou plus exactement Philippe Val, son directeur de la publication.

D'après Reuters :

Les juges ont estimé que les caricatures relevaient de la liberté d'expression et ne s'en prenaient pas à l'islam mais aux intégristes.

Sur les trois dessins concernés, les juges ont estimé que celui qui représentait Mahomet portant une bombe dans son turban était, "pris isolément, de nature à outrager les adeptes de cette religion (l'islam)", mais qu'il devait être re-situé dans le contexte plus général du magazine qui traitait de l'intégrisme religieux.

En conséquence, même si ce seul dessin est en lui-même "choquant ou blessant pour les Musulmans, il n'y a pas de volonté délibérée de les offenser", a ajouté le tribunal.

L'ensemble du magazine a participé au débat public sur le sujet, concluent les juges.

Dès que j'aurai le texte du jugement, je le publierai en intégralité, avec mes quelques commentaires.

Mise à jour 15h06 : Sur le blogue de Pascale Robert-Diard, chroniqueuse judiciaire au Monde, de larges extraits du jugement (Admirez au passage l'élégance du style de la 17e chambre, ses jugements sont toujours des bijoux de langue française) :

Attendu que Charlie Hebdo est un journal satirique, contenant de nombreuses caricatures que nul n’est obligé d’acheter ou de lire, à la différence d’autres supports tels que des affiches exposées sur la voie publique[1] ;

Attendu que toute caricature s’analyse en un portrait qui s’affranchit du bon goût pour remplir une fonction parodique (…)

Attendu que le genre littéraire de la caricature, bien que délibérément provocant, participe à ce titre à la liberté d’expression et de communication des pensées et des opinions (…)

Le tribunal écarte ensuite deux des trois dessins poursuivis : celui-ci

et celui-là :

comme ne visant manifestement pas les musulmans dans leur ensemble en raison de leur religion.

Par contre, estime le tribunal, celui-ci, le plus célèbre :

laisse clairement entendre que cette violence terroriste serait inhérente à la religion musulmane.

Toutefois,

Attendu que, si par sa portée, ce dessin apparaît en soi et pris isolément, de nature à outrager l’ensemble des adeptes de cette foi et à les atteindre dans leur considération en raison de leur obédience (…) il ne saurait être apprécié au regard de la loi pénale, indépendamment du contexte de sa publication (…)

Attendu que le dessin en cause est inclus dans un numéro spécial dont la couverture "éditorialise" l’ensemble du contenu et sert de présentation générale à la position de Charlie-Hebdo (…)

Attendu qu’ainsi, en dépit du caractère choquant, voire blessant, de cette caricature pour la sensibilité des musulmans, le contexte et les circonstances de sa publication dans le journal Charlie-Hebdo, apparaissent exclusifs de toute volonté délibérée d’offenser directement et gratuitement l’ensemble des musulmans; que les limites admissibles de la liberté d’expression n’ont donc pas été dépassées (…)

L'UOIF a indiqué son intention de faire appel. La Mosquée de Paris ne lui emboîterait pas le pas. Le parquet non plus, ayant requis la relaxe lors de l'audience.

Donc faute d'appel du parquet, Charlie Hebdo ne risque plus d'être pénalement condamné, mais peut seulement être éventuellement condamné à des dommages-intérêts en appel, si la 11e de la cour estimait que l'infraction était en fait constituée.

Ce qui est peu probable.

mercredi 21 mars 2007

Petite Anglaise : délibéré au 29 mars 2007

Coup de chapeau aux conseillers prud'hommes qui rendront leur jugement une semaine après l'audience. Quand on connaît leur charge de travail, on admire.

Du coup, j'attendrai d'avoir le jugement pour commenter les arguments des parties et le sens de la décision.

mardi 20 mars 2007

Agenda

Quelques dates susceptibles d'intéresser mes lecteurs, et qui entraîneront des billets idoines en leur temps :

  • 21 mars 2007 : Conseil de prud'hommes de Paris.

Procès de Petite Anglaise contre son ancien employeur. Données du litige ici.

27 rue Louis Blanc, PAris 10e, M° Louis Blanc, section Activités Diverses, premier étage, je crois (vérifiez sur les panneaux près des ascenseurs, puis cherchez sur les listes d'affaires affichées aux portes des salles d'audience le cabinet Dixon Wilson comme défendeur).

  • 22 mars 2007 : 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris.

Délibéré dans l'affaire Charlie Hebdo et des caricatures.

6 Boulevard du Palais, Paris 1er ; Métro Cité ou Chatelet ; escalier B, premier étage, porte à gauche en haut de l'escalier : suivez les nombreuses caméras de télévision.

  • 17 avril 2007 : Tribunal correctionnel de Saint Nazaire.

Délibéré dans l'affaire "Radiateur".

77 rue Albert de Mun, demandez à l'accueil.

Le printemps s'annonce chaud. Les nouvelles fraîches seront ici.

Procès Charlie Hebdo : délibéré reporté

Le délibéré de l'affaire Charlie Hebdo et des caricatures a été reporté au 22 mars, soit après demain.

jeudi 15 mars 2007

Et c'est reparti...

Code jaune. Pas de billets jusqu'à lundi. Bon week end.

- page 7 de 11 -

Mes logiciels, comme mes clients, sont libres. Ce blog est délibéré sous Firefox et promulgué par Dotclear.

Tous les billets de ce blog sont la propriété exclusive du maître de ces lieux. Toute reproduction (hormis une brève citation en précisant la source et l'auteur) sans l'autorisation expresse de leur auteur est interdite. Toutefois, dans le cas de reproduction à des fins pédagogiques (formation professionnelle ou enseignement), la reproduction de l'intégralité d'un billet est autorisée d'emblée, à condition bien sûr d'en préciser la source.

Vous avez trouvé ce blog grâce à

Blog hébergé par Clever-cloud.com, la force du Chouchen, la résistance du granit, la flexibilité du korrigan.

Domaine par Gandi.net, cherchez pas, y'a pas mieux.