Il y a presque un an de cela, je commentai en ces lieux la naissance de l'infante Leonor de Bourbon, de son vrai nom Leonor de Todos los Santos de Borbón y Ortiz.
N'ayant que mépris pour les paillettes et fanfreluches qui font les beaux jours d'obscures gazettes destinées aux salles d'attente d'artistes capillaires, c'était bien sûr sous un angle juridique que j'avais abordé le sujet, à savoir le prédicament que cette naissance causait au Président du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, qui avait promis, au nom de l'égalité homme-femme de modifier la Constitution espagnole pour supprimer l'exclusion des femelles en cas de naissance d'un héritier mâle[1]. Cette révision implique en effet une dissolution du parlement et des élections générales, le nouveau parlement devant approuver ladite révision de la constitution. Or "Zéta-pé" comme l'appellent ses amis[2] n'a absolument pas envie de cette dissolution, tant il est incertain de retrouver la Moncloa après cette aventure électorale.
Zapatero avait néanmoins pu gagner du temps, les Princes des Asturies ayant annoncé leur intention de ne pas élargir la famille royale avant un certain laps de temps. Las, les nuits de la Zarzuela sont torrides, et les grands de ce monde se jouent et se rient de la glèbe comme les dieux de l'Olympe avec les mortels. Et voilà que le couple princier annonce que la La Princesse Letitica, que ses contempteurs appellent la Leti, est grosse. Pour peu que la princière matrice accueille un mâle en gestation, et c'est une catastrophe pour ZP. Car sa naissance excluerait Leonor du trône en violation des engagements féministes du président du gouvernement, sauf à donner un effet rétroactif à cette révision qui du coup excluerait Felipe de la succession au profit de la fille aînée du roi, Elena (et qui verrait à son tour un garçon lui succéder, Felipe Juan Froilan de Todos Los Santos). Et c'est peu dire que les Espagnols ne sont pas très enthousaistes à cette idée, tant l'infante Elena, dans sa générosité, n'a pris pour elle que le droit d'aînesse et a laissé grâce et vivacité d'esprit à sa soeur puînée, Cristina.
Zapatero est donc acculé à se dédire ou à tenir sa parole quitte à risquer de se saborder politiquement, sauf à faire un fort peu protocolaire croc en jambe à la princesse la prochaine fois qu'il la croisera dans les escaliers.
Franchement, les chamailleries de nos princes, à côté des drames dynastiques outre-pyrénnées, paraissent bien fades.