Audience collégiale au tribunal correctionnel de Paris.
L’usage veut que les affaires passent dans l’ordre suivant :
D’abord les affaires où les prévenus sont détenus, afin de libérer l’escorte. Ce qui est idiot : c’est le prévenu qu’il faut libérer, pas l’escorte, mais les juges ne nous écoutent jamais.
Ensuite les affaires avec avocat, afin de libérer plus vite les auxiliaires de justice que nous sommes (et qui facturons au temps passé le plus souvent).
En dernier, les affaires où les prévenus sont libres et se défendent seuls.
Or là, le président commet une entorse aux usages : aucun détenu n’est arrivé, mais, subodorant que l’escorte ne saurait tarder, il décide de prendre un dossier sans avocat, qui nécessite généralement moins de temps (il n’y a jamais d’exception de procédure soulevée, et quand on donne la parole au prévenu en dernier après les réquisitions, il n’a généralement rien à dire, alors qu’un avocat, lui, plaide).
Grognements sur les bancs des avocats. Il aurait pu libérer un ou deux d’entre nous.
Le prévenu s’avance en zigzagant. Il est poursuivi pour conduite en état d’ivresse. Pas loin de 2 grammes à 9h45 du matin —Sifflement admiratif, vite étouffé, du gendarme d’audience, un connaisseur, visiblement— et délit de fuite après avoir provoqué un accident matériel.