Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Les gardes à vue sont-elles illégales ?

— Pardonnez-moi, maître…

— Oui, mon Jeannot, mon fidèle stagiaire. Entre donc, et sers toi du thé. Que puis-je pour toi ?

— J’ai entendu à la radio le Bâtonnier de Paris tonner contre le système français de la garde à vue qui serait selon lui illégal…

— Eh bien ?

— Mon papa, il dit que c’est n’importe quoi. Mais comme lui aussi parfois, il dit n’importe quoi, je me suis dit que j’allais vous demander votre avis.

— Je ne prétends pas être à l’abri de dire parfois n’importe quoi moi-même, mais je veux bien prendre le risque.

Mon bâtonnier bien-aimé a en effet lancé cette semaine une offensive contre le système français de la garde à vue. Cela me réjouit, et mérite que je m’attarde sur les arguments d’un côté et de l’autre, en les rectifiant si besoin est, pour que tu te fasses ton opinion, ainsi que mes lecteurs dont les oreilles traînent parfois par ici.

Note que je confesse volontiers un biais en faveur de la thèse de l’illégalité de la garde à vue à la française, encore que ma première opinion était plus restreinte que celle défendue par le bâtonnier, je vais y revenir. Afin de clarifier les choses, je voudrais préciser que ce n’est pas un biais corporatiste parce que je suis avocat : c’est juste que je revendique fièrement mon biais pro-droits de l’homme et acquiescerai volontiers à tous les procès d’intention qui me seraient faits en ce sens.

— Mon papa se dit très attaché aux droits de l’homme. 

— Las, comme pour les catholiques, il y a beaucoup de croyants non pratiquants en France. Tu trouveras sur cette page du site de France Info les arguments des parties, dont, à tout seigneur, tout honneur, celui du Bâtonnier Charrière-Bournazel. Reprenons-les plus en détail après avoir rappelé ce qu’est la cour européenne des droits de l’homme.

Plantons le décor

L’affirmation du Bâtonnier est la suivante : le système de garde à vue français n’est pas conforme à la Convention Européenne des Droits de l’Homme (de son vrai nom Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, en respectant les majuscules, soit CsDHLf, ce qui n’est pas joli, d’où l’expression généralement employée de Convention européenne des droits de l’homme. Cette Convention a été signée au lendemain de la Seconde guerre mondiale, dans le cadre du Conseil de l’Europe, une organisation internationale consacrée à la paix et aux droits de l’homme, totalement distincte de l’Union Européenne, notamment en ce qu’elle est beaucoup plus large (47 États membres, dont la Turquie, ce qui en 1950 n’a choqué personne), et qu’elle la précède de 7 ans.

Attardons-nous sur cette convention car le comportement de la France a son égard montre combien la France, en matière de droit de l’homme, est croyante mais non pratiquante.

La France a signé la convention dès le 4 novembre 1950, soit le jour de sa signature officielle.

— Il y a donc des signatures postérieures ?

— Oui, c’est le principe d’un traité multilatéral. Des États peuvent embarquer en route. Par exemple, des États nouvellement créés : la Bosnie Herzégovine aurait eu du mal à ratifier la convention en 1950. D’autres États ont moins d’excuses, comme la Principauté de Monaco, qui n’a signé qu’en 2004. Mais signer n’est pas tout.

— Comment ça ?

— Chaque État a ses règles en matière de ratification ; mais souvent il faut que le parlement national ratifie la signature du chef de l’État, pour que la Convention fasse effet en droit interne : c’est le respect de la séparation des pouvoirs, qui interdit au chef de l’exécutif d’empiéter sur le domaine du législatif.

— Et en France, comment ratifie-t-on ?

— Généralement, par une loi, qui peut être parlementaire, comme c’est le cas pour la quasi totalité des traités et convention internationale, ou exceptionnellement par referendum, encore qu’une expérience malheureuse en 2005 a je crois démontré l’inanité de l’idée.

— Donc le parlement a dû ratifier la Convention européenne des droits de l’homme pour qu’elle s’applique en France ?

— Absolument. Et c’est là que nous voyons la première hypocrisie de la République. Si la France s’est empressée de signer la Convention la main sur le cœur en vagissant son amour inconditionnel des droits de l’homme qu’elle prétend avoir inventés, il y eut loin de la coupe aux lèvres puisque ce n’est que le 31 décembre 1973 que la loi de ratification fut votée. 

— la première ? Il y en eut une seconde ?

— Absolument. Car la Convention européenne des droits de l’homme, contrairement à sa cousine universelle de l’ONU, avait vocation a être directement applicable en droit interne ; et pour assurer l’effectivité de cette application, la convention prévoyait la création d’une cour européenne des droits de l’homme, siégeant à Strasbourg, comme le Conseil de l’Europe, devant laquelle des individus estimant qu’un État avait violé à son encontre un des droits garantis par la Convention pouvaient exercer un recours.

— Je ne vois là nulle hypocrisie.

— La voici. La France en ratifiant la Convention avait exclu l’application de ce droit au recours individuel. La France, qui hébergeait la Cour européenne des droits de l’homme, a ainsi tardé 24 ans à l’appliquer, et 7 ans de plus avant de permettre à ses citoyens, dont certains habitaient à quelques rues de la là, de saisir la cour qui en garantit l’application.

— Et quand ce dernier obstacle a-t-il été levé? 

— Le 9 octobre 1981, le même jour que la loi abolissant la peine de mort. Quelle que soit l’importance que j’accorde à cette loi, le discret voyage de Robert Badinter à Strasbourg pour aller lever cette réserve a je crois plus d’impact historique.

— Et quelles sont les conditions d’exercice de ce recours ?

— Il y en a trois cumulatives. Avoir épuisé les voies de recours internes (il faut donc aller jusqu’au Conseil d’État ou la cour de cassation, selon qu’on est devant les juridictions administratives ou judiciaires), avoir au cours de l’instance soulevé dans son argumentation la violation de la convention, et former le recours dans les six mois de la date de la décision mettant définitivement fin au litige. 

— Et quels en sont les effets ?

— Devant la cour, on peut obtenir une indemnisation pécuniaire. La loi Française permet en outre depuis 2000 une révision des décisions qui ont entraîné une condamnation de la France, ce qui est tout à son honneur, après autant de retard à l’allumage.

— Une autre précision à ajouter pour un béjaune tel que moi ?

— Ta modestie t’honore, Tartuffe. Oui, une, d’importance pour la suite : si la cour apprécie la violation ou non de la Convention au cas d’espèce, elle veille à ce que son interprétation dépasse le cas d’espèce et soit une indication valable pour tous les États membres. À présent que te voilà armé pour comprendre, si tu le veux bien, passons à notre affaire des gardes à vue.

— Je suis toute ouïe et bois vos paroles.

— Bois plutôt ton Bi Luo Chun, il refroidit.

La parole est à l’accusation 

L’argumentation de mon Bâtonnier bien-aimé repose sur deux arrêts récents de la Cour. le premier est l’arrêt Salduz contre Turquie du 27 novembre dernier.

— Ce nom me dit quelque chose…

J’en avais déjà parlé en juillet dernier. Me croyant en retard, j’étais en fait plutôt en avance. 

— Mais à l’époque, vous considériez que cet arrêt ne s’appliquait qu’aux procédures d’exception repoussant de plusieurs jours l’intervention de l’avocat.

— Tout à fait. Et cet aspect là, tu vas le voir, me paraît hors de toute discussion. Mais depuis il y a eu un nouvel arrêt Danayan contre Turquie le 13 octobre 2009 qui précise la position de la cour.

— Je suis toute ouïe et bois mon Bi Lui Chun.

— Tu apprends vite. Rappelons que dans le premier cas, nous avions un jeune homme, mineur, arrêté pour un odieux attentat terroriste.

— Qui consistait à…?

— Étendre une banderole sur un pont, en soutien à Apo, Abdullah Ôcalan, fondateur du PKK, parti des travailleurs du Kurdistan, mouvement de guérilla et groupe terroriste. Je n’ai guère d’estime pour Öcalan, mais afficher un soutien à son égard, surtout quand on est mineur, ne me paraît pas relever d’une procédure d’exception. Et pourtant ce fut le cas : il fut placé en garde à vue selon le régime des lois turques antiterroristes, qui excluent l’assistance d’un avocat, et fut condamné à 2 ans et demi de prison. Procédure qui, du fait de l’exclusion de l’avocat, aboutit à la condamnation de la Turquie. La cour statuant en Grande Chambre avait à cette occasion déclaré que “Dans la plupart des cas, cette vulnérabilité particulière [du gardé à vue] ne peut être compensée de manière adéquate que par l’assistance d’un avocat, dont la tâche consiste notamment à faire en sorte que soit respecté le droit de tout accusé de ne pas s’incriminer lui-même” (§54) et  qu’ “Il est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations incriminantes faites lors d’un interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat sont utilisées pour fonder une condamnation.” (§55)

— Mon papa est contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, et franchement, quand je lis ça, je l’approuve. Une procédure où sous prétexte de lutter contre le terrorisme, on écarte l’avocat ! Ce n’est pas en France qu’on verrait une chose pareille.

— Ah, oui ? Tu me copieras 100 fois l’article 706-88 du code de procédure pénale pour demain. À la main, s’entend.

— Heu… Et que dit l’arrêt Danayan ? 

— Seyfettin Dayanan a été accusé d’être un militant d’un parti islamiste kurde, le hizbollah. Il a subi la même procédure antiterroriste “avocat-free”. Mais lui, à la différence de Yusuf Salduz, ne va pas parler au cours de sa garde à vue. Il ne va rien dire. Pas un mot.

— Ah ! Donc nonobstant l’absence d’avocat, il avait usé de son droit à ne pas s’incriminer lui-même. 

— Absolument. Ce qui ne va pas empêcher la Cour de condamner la Turquie, en allant un peu plus loin dans les précisions relatives au rôle que doit pouvoir jouer l’avocat. Voici ce que dit la cour : “Comme le souligne les normes internationales généralement reconnues, que la Cour accepte et qui encadrent sa jurisprudence, un accusé doit, dès qu’il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l’assistance d’un avocat et cela indépendamment des interrogatoires qu’il subit (…). En effet, l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. A cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer.”  

Mon Bâtonnier vénéré en déduit que le système actuel des gardes à vue, qui ne permet que ce qu’il appelle avec pertinence une simple “visite de courtoisie”, sans accès à la procédure, ni communication des éléments de preuves recueillis, ni même la qualification des faits reprochés (qui ne seront fixés par le parquet qu’au moment de la citation, j’ai vu des gardes à vues entières menées sous une qualification juridique erronée avant que le parquet ne redresse l’erreur, moins d’une heure avant la comparution devant le tribunal). De fait, la première chose que je dis aux gardés à vue que je vais visiter est que je ne suis pas là pour les aider à préparer leur défense mais leur expliquer leur situation, leur dire quels sont leurs droits, et ce qui va se passer par la suite. Dissiper le brouillard juridique, c’est déjà beaucoup, et pourtant c’est si ridiculement peu. Le système actuel est tout entier conçu pour écarter la défense et l’empêcher de faire son travail, et c’est tellement entré dans nos mœurs que ça ne nous choque même plus, à commencer par les magistrats, pourtant gardiens de la liberté individuelle.

— Vous vous laissez emporter, maître…

— Ah, vraiment ? Tiens, connecte toi à M6Replay et regarde l’émission Zone Interdite du 22 novembre (accessible jusqu’au 29). File à 3 mn et regarde l’édifiante histoire d’Ali, le braqueur de coiffeur. Il est soupçonné d’un crime, vol à main armée. 15 ans encourus. Il est arrêté à l’aube, chez ses parents, après trois ans d’enquête. Il y a donc déjà un dossier, avec à charge une empreinte génétique et ces gants en latex verts abandonné par le malfaiteur, outre un témoin oculaire. Tu noteras qu’alors qu’il se fait réveiller avec une lampe torche dans les yeux et un pistolet sous le nez, le policier ne juge pas utile de lui notifier les raisons de son interpellation. “Par respect pour sa mère”. Le même respect ne s’opposait cependant pas à une entrée de force alors que la respectable maman dormait du sommeil du juste. Logique policière, sans doute. 

En fait, il s’agit juste de plonger l’interpellé dans une situation de stress et d’angoisse, pour “attendrir la viande”. En toute illégalité, soit dit en passant, car l’article 63-1 du Code de procédure pénale (CPP) dispose que “Toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête”. La sanction est la nullité de la procédure. Pourquoi le major de police le fait-il donc devant une caméra de télévision ? Mais parce qu’il sait bien que ce brave Ali n’aura aucun moyen de faire valoir cette violation de ses droits, dont il n’a même pas conscience. Le procès verbal de notification, qui sera rédigé bien plus tard, mentionnera bien tous ces éléments, comme s’ils avaient été notifiés immédiatement au moment de l’interpellation, et Ali signera tout ça sans tiquer. Pas vu, pas pris. Avis aux magistrats qui me lisent, sur la foi à accorder aux procès-verbaux de notification qui leur sont soumis. Heureusement qu’entre toutes ces personnes qui violent la loi, certains ont un brassard “police”, pour qu’on évite de les confondre.

À 08’35”, un autre grand moment : la notification de la durée de la mesure. “Deux jours maximum”. En fait, c’est 24 heures, renouvelable une fois sur autorisation d’un magistrat. C’est dire si cette autorisation est perçue comme un contre-pouvoir par les policiers : ils la considèrent comme acquise alors même que le procureur ignore l’existence de cette garde à vue. Notez l’explication du policier : “je vais te poser des questions et tu vas y répondre, tu me répondras oui ou non, c’est moi ou c’est pas moi”. Vous comprenez maintenant ce qu’entend la cour européenne des droits de l’homme par “Dans la plupart des cas, cette vulnérabilité particulière [du gardé à vue] ne peut être compensée de manière adéquate que par l’assistance d’un avocat, dont la tâche consiste notamment à faire en sorte que soit respecté le droit de tout accusé de ne pas s’incriminer lui-même? Ali a le droit de se taire et c’est sans doute à ce stade son meilleur choix (sachant que dire “ce n’est pas moi”, c’est déjà faire une déclaration). C’est pourquoi on ne le mentionnera même pas dans l’éventail des possibles. “Tu répondras à mes questions”, point. Ah, et je vous laisse deviner l’ambiance si Ali s’avisait de tutoyer le policier en retour, bien sûr.

— Un peu comme si je m’avisais de le faire à votre égard ?

— Exactement, mon Jeannot. Mais tu sais où est ta place, même si parfois tu lorgnes celle des autres. Continuons avec Ali. Dès son arrivée, le voilà placé en cellule. Un esprit naïf comme le mien a tendance à penser que si les policiers se sont levés à 4 heures du matin pour aller l’arrêter à 6, c’est qu’ils étaient pressés de lui parler. Alors pourquoi le faire poireauter en cellule près tout cet empressement ? La journaliste le dit candidement : “ils ont 48 heures pour le faire avouer”. Alors on le met à mijoter après lui avoir confisqué ses lunettes, et ses chaussures. L’ennui est propice à la réflexion morale.

L’affaire reprend à 11’40. Ali est enfin interrogé. Il conteste les faits, et demande à voir les preuves réunies contre lui. Dans un pays ordinaire, on trouverait que c’est la moindre des choses. Surtout que les gants saisis lors de la perquisition étant dans la pièce à côté, on peut se dire que l’effort de manutention serait limité. De même qu’on lui agite son ADN. Il demande où l’échantillon témoin a été recueilli. N’est-ce pas une question légitime ? Un droit fondamental de connaître les preuves à charge pour les discuter ? Réponse du policier : “Ah je sais pas, moi”. Il n’a qu’à demander au journaliste qui filme la scène, lui est au courant, il nous l’a expliqué plus tôt dans le reportage. Bienheureux journaliste, qui a plus de droit que les avocats à ce stade.

Alors évidemment, Ali, pensant qu’en fait les policiers n’ont rien et veulent le faire avouer au bluff, va nier. Non pas l’évidence comme dit le commentaire, à ce stade, il n’a même pas connaissance de l’évidence à nier. Mais ça fera tellement mieux devant le tribunal que dans un premier temps, il ait nié sa participation. Dans les dents de la défense qui voudrait plaider les remords sincères. L’avocat n’a pas le droit d’être là, mais ça n’empêche qu’on pense à lui.

Et voici venir le culte de l’aveu, la “chansonnette”, comme on appelle ces interrogatoires interminables visant à briser par l’épuisement les défenses du gardé à vue. Très efficace, comme l’ont montré des affaires comme celles de Patrick Dils ou Richard Roman, ou des innocents ont fini par passer aux aveux. C’est l’efficacité administrative en action. Pourtant, il y aurait de quoi boucler le dossier. ADN, gants en latex similaires, deux témoins sur trois catégoriques, le parquet a des munitions. Mais la défense aussi, elle peut encore plaider le bénéfice du doute. Ça tombe bien, on a encore des heures sans cette gêneuse. Et quand il est en cellule pour réfléchir, on lui retire ses lunettes. On voit plus clair quand on ne voit plus très clair. Logique policière. L’argument du suicide ? Mais ça fait longtemps que les verres de lunette ne sont plus en verre mais en polycarbonate, en Trivex® ou en CR-39. Essayez de vous taillader les veines avec ça. En outre, vous admirerez l’élégance de l’argument : on ne veut pas qu’Ali se suicide car… cela attirerait des ennuis au major et à son chef de poste : paperasse à remplir, serpillère à passer. Ça doit être ce qu’on appelle le respect du citoyen.

Victoire de la Justice : il passe aux aveux. Avec le major, grand seigneur : “au bout du compte, ça va te servir”. Vous allez voir en effet comme ça va le servir. Maintenant qu’il avoue, miracle, la caisse des scellés a trouvé le chemin du bureau et on lui montre les pièces à conviction (l’arme). 

Nous avons donc des aveux complet. Il est alors déféré au tribunal où l’attend…

— …son avocat.

— Perdu. Le procureur de la République. Qui va le recevoir, toujours sans avocat, qui va l’entendre sur sa version des faits. Je précise que le procureur est partie à l’audience, c’est même lui qui va y soutenir en personne l’accusation. J’ai expliqué un jour à un confrère américain qui visitait le palais que le procureur recevait ainsi notre client en tête à tête et recevait ses déclarations sans même qu’on puisse l’assister, il ne voulait pas me croire. Un avocat français qui recevrait la partie adverse seule avant un procès encourt la radiation. Un procureur, une promotion. 

Le procureur va donc recevoir des déclarations d’Ali, qui seront dûment notées au procès verbal de citation. Là encore, notez bien qu’aucun avocat n’est là pour lui dire de se taire, ni n’a pu le voir avant pour lui suggérer des réponses appropriées pour sa défense. Il va donc se plaindre lui-même (le procureur note : absence de remords à l’égard de la victime), reconnaître le mobile pécuniaire (c’est un crime crapuleux, ceux où la récidive est la plus fréquente), le mensonge à son père (il prétendait travailler et volait pour donner le change), s’enfonçant encore un peu plus. Conclusion : le procureur lui annonce déjà que ça va mal se passer. Et en effet, il n’y a pas grand chose qu’il pourrait encore faire pour démolir sa défense. L’avocat peut donc entrer en scène. Vous voyez comme ça l’aide d’avoir avoué. 

On va enfin autoriser un avocat à prendre connaissance du dossier, une demi heure avant de le plaider, alors que le parquet le mijote depuis trois ans. Ce qui sera pile la peine prononcée, dont 18 mois fermes, face à un Ali incrédule, qui n’a pas vu le coup venir. Au bout d’une procédure illégale et donc nulle depuis le moment de l’arrestation. Le tribunal précisant “c’est criminel ce que vous avez fait”, montrant bien qu’il a jugé non pas le délit qu’on lui présentait (un vol avec violences) mais un crime (vol à main armée) qui aurait dû aller aux assises. Voilà en images le système ordinaire français, tel qu’il fonctionne au quotidien. 

Et quand on compare ce fonctionnement à ce que dit la cour européenne des droits de l’homme, en effet, on peut avoir des difficultés à le trouver conforme. Sauf quand on est porte-parole de la Chancellerie, comme on va le voir. Oui, mon Jeannot, je te le dis en face : ce qu’a montré M6 ce dimanche soir est une violation de la convention européenne des droits de l’homme.

— Mais c’était un braqueur ! 

— On traite ainsi les braqueurs comme les innocents. Parles-en à monsieur Kamagaté.

La parole est à la défense

— Et que répond le gouvernement face à cette offensive ?

— La réponse de Guillaume Didier, porte-parole du Garde des Sceaux, que je salue ici (Guillaume, pas Michèle) car je sais que c’est un lecteur assidu et un commentateur occasionnel peut être écoutée sur la page de France info précitée. Le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’emportera pas la conviction d’un juriste.

1) L’arrêt Danayan condamnerait la Turquie et non la France. Un étudiant en droit qui sortirait cet argument se prendrait aussitôt zéro. La Cour interprète la Convention, qui est la même pour ces deux pays. Ce qui vaut pour l’un vaut pour l’autre. Il est très courant d’invoquer devant des juges français des jurisprudences de la cour sanctionnant d’autres pays. Ils n’y voient rien d’anormal dès lors que les faits sont pertinents. 

2) La Turquie n’aurait pas du tout le même système judiciaire que la France. Argument qui repose sur l’ignorance de l’interlocuteur. En effet, si je vous dis qu’en Turquie, les ordres de juridictions judiciaires et administratifs sont séparés, que la cour suprême administrative s’appelle le Conseil d’État (Danıştay) tandis que la cour suprême en matière judiciaire s’appelle la cour de cassation (Yargıtay) dont le rôle est d’unifier au niveau national l’interprétation de la loi par la jurisprudence, et dont le président porte le titre de Premier Président (Birinci Başkan), le juriste réalisera qu’en effet, les deux systèmes ne sont pas du tout comparables. En fait, tu as compris, les deux systèmes sont très proches, il n’est que de lire l’arrêt Salduz, notamment l’exposé du droit turc pertinent (§27 à 31) pour voir que le système turc est même plus respectueux de la Convention que le notre (il ne permet de repousser l’intervention de l’avocat que de 24 heures, contre 48 à 72 chez nous), la Turquie n’ayant pas attendu sa condamnation pour se mettre en conformité avec ce texte. 

— Il y a quand même des différences culturelles entre les deux pays ?

— C’est exact. Par exemple, la Turquie a accordé le droit de vote aux femmes 15 ans avant la France. Croyante, non pratiquante, cher Jeannot…

3) Ce que la cour exigerait, c’est le principe de l’accès immédiat à un avocat, ce que prévoit le droit français depuis dix ans (seulement, ai-je envie d’ajouter), avec ce droit à l’entretien dès la première heure de garde à vue. Au contraire, cet arrêt consacrerait le système français. Là, j’ai envie de dire : un arrêt de la cour européenne des droits de l’homme c’est du sérieux. Il ne faut pas lui faire dire ce qu’il ne dit pas. Qu’il consacre le système français, c’est non, sans aucun doute. Il condamne même le système dérogatoire applicable au terrorisme, trafic de stupéfiants et aux bandes organisées. Quant au système de droit commun, celui d’Ali, la cour parle du droit à l‘assistance d’un avocat, pas à un droit à un entretien avec un avocat ignorant du dossier. Assistance semblerait supposer que l’avocat puisse assister, du latin ad sistere, être présent à côté de quelqu’un. À propos du système français, rappelons que jusqu’en 1993, l’avocat était tenu à l’écart de la garde à vue. La France ayant été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, elle a introduit cette visite de l’avocat, sans accès au dossier, par une loi du 4 janvier 1993. Mais face aux geignements des syndicats de policier, une loi d’août 1993 va repousser à la 20e heure cette intervention. Et on va même gratter une heure aux avocats en disant que la loi disant “à l’issue de la 20e heure”, cela s’entend comme la 21e heure. Ce n’est que par une loi du 15 juin 2000 que l’avocat a pu enfin intervenir dès la première heure. Toujours sans accès au dossier. Croyante, non pratiquante, te disais-je, cher Jeannot;

4) Si la cour avait voulu dire que l’avocat devait être présent tout au long de la garde à vue, elle l’aurait dit explicitement. Oui, je suis d’accord, avec cette limite qu’elle statue sur ce qu’on lui demande de juger. Et ici, il n’y avait pas du tout d’avocat, là est la violation. Je ne crois pas que M. Didier puisse exciper de son côté d’une décision de la même cour consacrant explicitement le système français en disant que cet entretien d’une demi heure sans accès au dossier était satisfaisant au regard de la Convention. Donc miroir à paroles. Je reprends ici les mots de la cour : Dans la plupart des cas, cette vulnérabilité particulière [du gardé à vue] ne peut être compensée de manière adéquate que par l’assistance d’un avocat, dont la tâche consiste notamment à faire en sorte que soit respecté le droit de tout accusé de ne pas s’incriminer lui-même” (Salduz, §54) et  qu’ “Il est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations incriminantes faites lors d’un interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat sont utilisées pour fonder une condamnation.” (ibid. §55) un accusé doit, dès qu’il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l’assistance d’un avocat et cela indépendamment des interrogatoires qu’il subit (…). En effet, l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. A cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer.”(Danayan, §32). Si Guillaume Didier pouvait nous expliquer en quoi un avocat n’ayant pas accès au dossier pouvait au cours d’un entretien de 30 minutes maximum dont il lui est fait interdiction absolue de faire état auprès de quiconque organiser une défense, discuter l’affaire, rechercher des preuves favorables à l’accusé, et préparer les interrogatoires, je suis avide de ses lumières. Dans l’intervalle, je risque de rester convaincu de l’incompatibilité du système français avec la Convention européenne des droits de l’homme.

5) La cour dirait même expressément qu’il est admissible de retarder l’intervention de l’avocat. Écoutez bien ce passage. On sent le trouble du porte-parole. Il a failli dire que l’avocat était écarté deux voire trois jours. Il se rattrape à temps et dit juste “retardé” car le journaliste n’aurait pas laissé passer un argument aussi grossier. Voici ce que dit en réalité la cour européenne : c’est dans Salduz, §55 : Même lorsque des raisons impérieuses peuvent exceptionnellement justifier le refus de l’accès à un avocat, pareille restriction – quelle que soit sa justification – ne doit pas indûment préjudicier aux droits découlant pour l’accusé de l’article 6 (…). Il est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations incriminantes faites lors d’un interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat sont utilisées pour fonder une condamnation.” La cour admet cette éventualité pour aussitôt la restreindre. Or l’article 706-88 du CPP s’applique systématiquement à toutes les affaires qu’il concerne, sans distinction, seul l’officier de police judiciaire décidant souverainement de recourir à cette procédure dérogatoire. Là, Guillaume Didier fait dire à un arrêt le contraire de ce qu’il dit, ce qui ne manque pas de saveur quand il joue les gardiens du temple du respect de la parole de la cour.

— Alors que faire ?

— Ce sera si tu le veux bien l’objet d’un prochain billet, celui-ci risquant d’épuiser la patience de mes lecteurs. Maintenant, va me photocopier ces dossiers, et n’oublie pas de faire tes lignes pour demain.

La discussion continue ailleurs

1. Le mardi 24 novembre 2009, 10:12 par 13ZENRV.fr

Accusé, levez-vous !

Partager sur Facebook « Partie pénale » : c’est ainsi qu’il faudra sans doute désormais appeler le mis en cause, le prévenu, l’inculpé, bref, l’accusé dans un procès pénal. Et Michèle Alliot-Marie le jure, main sur le ......

Commentaires

1. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:09 par Médor

Prem’s = +1 (je ne f… vraiment rien ;-)
La contagiosité de H1N1 est inférieure à certains autres zélateurs …

2. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:14 par Ti

Magistrale démonstration et par l’exemple d’Ali de ce qui se vit tous les jours dans nos Tribunaux.
Puissiez vous être non seulemnt compris de vos lecteurs mais aussi entendu par le législateur…

Si je peux rajouter un petit grain de sel, en tant que magistrat, l’annulation de cette procédure est très difficile à vivre genre “Le Tribunal relâche un braqueur pour vice de forme”.

Et il y a fort à parier que la prochaine fois, vous serez écarté de la présidence du Tribunal Correctionnel …

3. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:23 par Ulpien

J’ai toujours été frappé de constater à quel point paraissaient évidents, en droit disciplinaire de la fonction publique, des droits de la défense très étendus, depuis la notification claire et précise des griefs à l’entame de la procédure jusqu’aux exigences de motivation qui pèsent sur la décision de sanction, par comparaison avec la situation de la procédure pénale, où les risques courus sont pourtant beaucoup plus lourds.

Les garanties dont sont entourées les procédures disciplinaires n’empêchent pas les poursuites et elles aboutissent souvent à davantage de vérité.

4. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:39 par Charo

”{{Mon papa se dit très attaché aux droits de l’homme.

— Las, comme pour les catholiques, il y a beaucoup de croyants non pratiquants en France.}}”

Et les non-croyants sont des ogres mangeurs d’enfants ? Sans compter les autres croyances…

tsss tsss tsss….

Eolas:
Ça alors. Un Taliban des métaphores.

5. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:41 par Tardigradus

Permettez-moi quelques chicaneries typographiques, maître. Vous dites “de son vrai nom Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, en respectant les majuscules, soit CsDHLf, ce qui n’est pas joli, d’où l’expression généralement employée de Convention européenne des droits de l’homme”. Or, si la forme développée nécessite, ainsi que vous l’écrivez, l’alternance de majuscules et de minuscules à l’initiale de certains mots (encore que celui de “Libertés” me laisse perplexe), le sigle, lui, (j’ai bien dit le sigle, il n’est point question ici d’acronyme) ne peut se composer qu’entièrement en capitales : CSDLHF.
Un peu plus bas, vous invoquez “la loi Française”. Un f minuscule s’impose, française n’étant là qu’un simple adjectif qualificatif, et pas un gentilé.

6. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:49 par lapocompris

La Turquie n’aurait pas du tout le même système judiciaire que la France. (…) système turc est même plus respectueux de la Convention que le notre (il ne permet de repousser l’intervention de l’avocat que de 24 heures, contre 48 à 72 chez nous), la Turquie n’ayant pas attendu sa condamnation pour se mettre en conformité avec ce texte. Raison de plus d’être contre l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne, on ne veut pas passer pour le plus mauvais élève de la classe.

Eolas:
Damned, vous marquez un point.

7. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:54 par Van der Waals

Si les choses bougent tant mieux.

C’est juste domage que le Bâtonnier ait mis un mois à réagir et que ses déclarations tombent pile au moment oú une avocate parisienne venait d’être placée en garde à vue. Il s’agit peut être d’une simple coïncidence, mais ça fait tache (un peu comme les jounalistes qui s’offusquent des conditions de la GAV quand un des leurs en a fait l’expérience pour délit de presse) et j’éspère que ça n’empêchera pas les choses d’avancer.

8. Le lundi 23 novembre 2009 à 10:56 par Ryuu

Je ne vois qu’une solution: faire citer les droits par la police, à l’américaine, surtout le premier, “le droit de garder le silence”. Ca devrait plaire au papa de Jeannot, que l’on surnommait “l’américain”.

9. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:05 par MiKa

Cher maître, lecteur occasionnel de votre blog depuis un certain temps, assidu depuis quelques semaines et ayant à l’occasion relu d’anciens articles, en finissant de lire cet article, je me demande que penser de notre pays, et surtout, plus je vous lis, vous, personnes vivant le système judiciaire au quotidien, plus je crains d’être un jour arrêté (à tort ou à raison, avec notre belle loi hadopi, qui sait quand ils arriveront) un jour, et de me retrouver dans des situations comme celles-ci.

Notons que grâce à vous, si un jour ce malheur m’arrive, je serai plus conscient de mes droits et à même de pouvoir “survivre”, et pour cela, vous méritez un grand merci.

10. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:12 par Pascal

Maître, Connaissez vous la jurisprudence de la cour de Cassation qui oblige les fonctionnaires de police ou les militaires de la gendarmerie (oui, eux aussi sont sales) à placer une personne mise en cause en garde à vue dès que des moyens coercitifs sont mis en action afin d’assurer ses droits (élémentaires, surement) qui expliquent en grande partie l’augmentation du nombre de gardes à vue?

Pourriez vous nous dire comment vos collègues et vous même aller assurer votre présence à toutes les procédures? De jour comme de nuit? en Ville et en Campagne?
Ou cela se fera à la tête du client? à la vue des faits? du jour de la semaine?
Ceci n’est pas ironique mais je pense qu’une réflexion de votre bâtonnier plus pousser en présentant de vraies solutions et ne pas simplement lancer un pavé juste pour avoir le plaisir de voir les ronds dans l’eau…
je suis d’accord avec vous que ce doit être la mode du temps autant chez nos politiques que chez nos représentants divers et variés….
Bonne journée

11. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:12 par Quixotte

Bien, bien et nécessaire tout ce bruit fait autour des conditions de la garde à vue !!!

J’aimerais, cependant, qu’on s’intéresse un peu aux motifs de la garde à vue, à ce qui peut la justifier. Dans une démocratie, une privation de liberté, c’est sérieux ou, du moins, ça devrait l’être.

Un policier, un officier de police judiciaire, peut décider d’une garde à vue sans avoir à réellement la motiver, par exemple parce que vous avez traversé en dehors des clous en le regardant d’un air narquois ce qui, selon lui, représente un délit d’outrage. Et allez, hop au trou…

Le contrôle que sont censés exercer les magistrats du parquet sur les gardes à vue, c’est de la rigolade, vous avez souvent vu des procureurs en goguette faire les commissariats ?

Des gardes à vue abusives sur les 600 000 qu’on connaît chaque année, il doit y en avoir des wagons et moi tout seul dans mon coin j’en connais déjà un paquet.

S’intéresser aux conditions de la garde à vue c’est s’intéresser au reflet plus qu’à l’objet.

12. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:12 par vpo

Question: Imaginons un justiciable en France arreté à 6h00 à son domicile. Que le mis en cause soit coupable ou non, peu importe pour le moment.
Et imaginons un instant que le gardé à vue refuse obstinément de signer le PV en objectant que l’on ne l’a pas averti du motif de son interpellation.

Que va-t-il se passer?

Les policiers vont-ils tous jurer la bouche en cœur que si, si, ils ont respecté la procédure?

Cela sera-t-il la voix forcément sujette à caution du mis en cause contre la voix forcément sujette à aucune caution des forces de l’ordre?

Eolas:
Absolument. Ne serait-ce que parce qu’on ne peut se permettre d’annuler une procédure dès lors que le prévenu allègue une atteinte à ses droits qui ne figure dans aucun procès verbal.

13. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:21 par DT

A propos du commentaire numéro 8: je signale qu’il faut une époque où il était obligatoire de dire au gardé à vue, au moment de la notification de ses droits, qu’il pouvait garder le silence. Ca n’a pas duré longtemps: instaurée, si je me souviens bien, par la loi sur la présomption d’innocence, cette obligation a promptement disparu peu après (soit dès la LSQ des socialistes, soit au moment du retour de la droite au gouvernement en 2002, là j’avoue que je ne me souviens plus).

Eolas:
C’est la loi Perben I du 9 septembre 2002.

14. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:24 par Bernard

Bonjour maître,
Vous oubliez aussi les quidams qui sont convoqués comme témoin, mais en fait sont des mis en causes, que le policier ou le gendarme ne met pas en garde à vue, sont entendus dans le cadre de l’enquête, où “le bras armé” de la justice l’oblige à rester présent, leur disant que si il s’en va, il va le mettre en garde à vue pour plusieurs heures…
Il arrive souvent que ce quidam dise ce que le policier ou gendarme veut entendre pour partir plus vite… Comme un gardé à vue…

Eolas:
Oui, c’est une perversité du système français, qui révèle son allergie aux droits de l’homme. Garde à vue est devenu, par une pure pratique policière sans aucun fondement légal, synonyme d’encellulement, menottes, fouille, privation des lacets ceinture lunettes et montres.Aucun texte de loi ne dit que ce statut doit s’accompagner d’une humiliation et d’un traitement de quasi-prisonnier. Mais puisque sous la pression de la CEDH, il a fallu donner des droits et encadrer cette mesure, on en a fait un moment peu enviable, voire que l’on souhaite par dessus tout éviter. Il est hallucinant d’entendre un policier menacer d’un placement en garde à vue, quand c’est la personne interrogée qui devrait exiger ce statut. Et après, on reproche aux avocats de soulever le défaut de placement en GAV. “Comment, maître, vous nous reprochez de ne pas avoir engeôlé votre client, de l’avoir contraint à se déshabiller devant des policiers et être privé 48 heures de ses lunettes avec un pantalon qui menace de choir ?” — “Non, je vous reproche de ne pas avoir respecté ses droits fondamentaux reconnus par la Convention, nonobstant les petites gâteries que vous lui adjoignez.”

15. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:26 par Thomas

Ca alors! Baser tout un argumentaire sur un reportage de M6, c’est fort! Très fort!
Alors je ne sais pas si vous avez effectivement participé à cette arrestation, et/ou à cette affaire dans sa globalité, auquel cas vous êtes bien en droit d’en apprécier son pourcentage de véracité, et en toute honnêteté ce n’est pas mon cas, mais je serais vous (et je suis moi), je ne placerais aucune foi dans un reportage télé, surtout s’il a pour but d’être diffusé en Prime Time. Les reconstitutions ou deuxièmes prises sont légion, quand le script n’est pas défini avant!

Ou alors, il faut prendre pour argent comptant les mêmes reportages (Envoyé Spécial ou autres) sur la délinquance, l’insécurité ou ce genre de trucs. Il me semble pourtant vous avoir déjà lu à ce sujet, et vous me paraissiez alors plutôt critique.

Alors bon, je comprends bien que ce reportage n’est pris qu’à titre d’exemple pour étayer votre thèse, et que vous en avez certainement bien d’autres dans la manche pour me convaincre (ce qui est d’ailleurs déjà fait), mais de grâce, non, pas un reportage de Zone Interdite! Pas vous!

Eolas:
Allez, on se calme, on respire par le nez et on boit un verre d’eau fraiche. Puis vous me ferez le plaisir de lire mon billet et pas vos préjugés. En otant vos œillères anti-télé, vous constaterez que je fonde mon argumentation sur des textes et deux arrêts de la CEDh que je cite et dont je fournis le lien, et que l’émission de M6 me fournit un exemple. J’ajoute que si j’ai décidé de prendre cet exemple, c’est que je l’ai trouvé fidèle à une situation que je connais fort bien pour la vivre au quotidien (j’ai même déjà plaidé face à ce substitut du temps où il sévissait à Paris), par accident notez le puisque le sujet du reportage n’est pas la garde à vue mais les braquages de quartier. 

16. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:27 par pini

J’ai beau être un mékeskidi, je n’en suis pas moins un lecteur assidu de votre prose.
J’ai beau être né français, je n’en ai pas moins honte quand je lis vos exposés.

Triste France Tragique.

17. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:27 par Cobab

vpo : disons que s’il n’a pas signé, il conserve la possibilité d’utiliser l’argument devant le juge alors que s’il signe, c’est mort.

Vous savez donc quoi faire, le cas échéant.

18. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:32 par Barth

Maitre Eolas emploi donc ses stagiaires à faire du thé et des photocopies, édifiant… Nous nous vengerons! Signé l’AVSM (Amicale Vengeresse des Stagiaires Masqués)

Eolas:
Vu que mon stagiaire me paye 700 euros par mois, il ne faut pas qu’il s’attende à des tâches plus gratifiantes.

Comment ça, ce n’est pas le stagiaire qui doit payer le maître de stage ?

19. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:41 par GregF

Je vais me permettre un gros résumé pour le mekeskidi que je suis :

“Garde à vue”= Silence absolu

Sauf pour dire : j’attends mon avocat, je ne suis pas à 72 heures près…

J’ai bon ou même dire cela est déconseillé ?

Eolas:
Je dirais qu’après avoir décliné son identité complète au début du premier interrogatoire (dit de grande identité), on peut se contenter d’un laconique “je ne ferai aucune déclaration et ne répondrai pas à vos questions”, éventuellement pour briser la monotonie et enseigner un peu de droit aux forces de l’ordre agrémenté d’un “en vertu de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme”. Rien d’autre. Les raisons profondes (vous refusez de faire quelque déclaration que ce soit sans avoir eu le conseil préalable d’un avocat ayant eu accès au dossier, ce que ferait tout homme rationnel) pour le tribunal.

20. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:50 par Veterini

Maître,

Vous êtes injuste avec Guillaume Didier qui reconnait implicitement que l’assistance qu’un avocat turc fournit en 24 heures, un avocat français arrive à le faire en 30 minutes chrono sans même lire le dossier !

Si ca, ce n’est pas un signe du respect témoigné par la France aux avocats…

Eolas:
Chapeau. Envoyez votre CV à la Chancellerie. Ils ont besoin de gens comme vous.

21. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:51 par Pas encore pendu

Sur la signature du PV de GAV, mon expérience est qu’on est bien démuni quand on en arrive là. Après 48h d’interrogatoires et autres procédures stressantes et humiliantes, on est vraiment dans un mauvais état pour résister à la pression.

Même dans mon cas (je reconnaissais tout et plus, et les policiers qui m’avaient pris en charge m’ont eu l’air de faire leur boulot honnêtement et sans essayer de m’enfoncer), j’ai eu quelque difficulté à relire le PV, en faire changer quelques formulations dont j’ai eu l’impression qu’elles distordaient ce que j’avais dit et pourraient éventuellement me nuire. Je me souviens d’un mouvement relativement violent du policier quand j’ai failli raturer moi-même le PV pour le corriger. Et au bout de 4 ou 5 demandes de modifs, c’est vrai qu’on a tendance à laisser tomber et à signer en bas à droite.

On manque de lucidité, on manque de capacité à réagir, on n’est vraiment pas placé en position de contester, même si ce pourrait être légitime.

Et on n’a aucune idée de ce qui pourrait se passer si on refusait tout simplement de signer.

Eolas:
la réponse se trouve à l’article 62 al. 3 du CPP : (L’officier de police judiciaire) dresse un procès-verbal de leurs déclarations. Les personnes entendues procèdent elles-mêmes à sa lecture, peuvent y faire consigner leurs observations et y apposent leur signature. Si elles déclarent ne savoir lire, lecture leur en est faite par l’officier de police judiciaire préalablement à la signature. Au cas de refus de signer le procès-verbal, mention en est faite sur celui-ci. 

Vous avez donc le droit de refuser de signer. Pour ma part, je ne vois aucune raison d’accepter de le faire.

22. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:57 par yves

Je ne vois pas ce qui peut étonner. Le gouvernement se fout des droits de la défense comme de l’an quarante, (car en 40 les droits de la défense…), et ne changera pas cette situation (sauf vers le plus pire) avant une belle condamnation en bonnet Duforme par la cour CSDFGHJJ (ou quelque chose comme ça).

D’ici là la méthode Orwell s’appliquera: changer le sens des mots juste pour leur faire dire ce qu’on a envie qu’ils disent.

23. Le lundi 23 novembre 2009 à 11:59 par Pas encore pendu

“Garde à vue”= Silence absolu, sauf pour dire : j’attends mon avocat, je ne suis pas à 72 heures près…
Mouais, j’imagine que ça doit dépendre des cas.
Parce faire preuve d’un tel “manque de coopération” revient quand même à s’exposer de manière quasi-automatique à un déferrement, suivi d’une mise en examen et très probablement d’une incarcération provisoire… Non?

Eolas:
Tandis que passer aux aveux vous garantit la remise en liberté et le classement sans suite ? Demandons à Ali ce qu’il en pense. 

24. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:00 par Cyberfrisou

Un point me turlupine … d’autant plus que vous ne l’avez pas soulever …
Il me semble que les dispositions relatives à la garde à vue ne sont pas illégales (car elles sont conformes à la loi) mais plutôt “inconventionnelles” (non-conforme à la convention européenne). Cela semble relevé du détail mais l’étudiante en droit que je suis, a besoin d’avoir les idées claires !

Eolas:
C’est exact. Mais je m’adresse à des non juristes, les fameux mékéskidis, et je les bombarde d’assez de détails comme ça. Un peu de simplification ne fait pas de mal en utilisant le mot loi dans son sens le plus large de droit positif.

25. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:04 par Denis75

@ DT (n° 13)
C’est bien ce que je pensais : c’est un gouvernement de droite qui a définitivement supprimé la mention explicite de ce droit.
Ce qui n’empêche pas les citoyens d’y avoir recours s’ils en ont connaissance.

À la note de pas de page n° 176 :
http://www.hrw.org/fr/node/62153/section/6

26. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:12 par Petit pois sournois

Au vu de tous ces arguments, dont je ne nie pas la valeur, je ne peux que reposer la question d’un de mes commentaires d’un billet précédent :
Comment se fait-il que la France n’ait pas encore été condamnée sur ce point ? Aucun des avocats des 500 000 gardés à vue annuels n’a donc introduit de recours ? Pourquoi ? Ou bien les recours introduits ont été rejetés ? Pourquoi ?

Eolas:
Pour la raison qui fait que je n’ai moi même, malgré que j’en ai, jamais pu déposer un tel recours. Nos clients s’en tapent des questions de principe. Ils veulent sortir le plus vite possible et oublier tout ça. Il faudrait aller en appel (et renoncer au crédit de réduction de peine, avec le risque d’aggravation de la peine), aller en cassation avant d’aller à Strasbourg et attendre 2 à 4 ans. Le jour où je trouverai un client prêt à aller jusqu’au bout, je serai ravi. En attendant, comme je leur évite bien souvent la détention, ils brisent là et passent à autre chose. Et quand malgré mes efforts, ils y vont, à la seconde où leur orteil touche le sol de la liberté, ils laissent tomber le dossier. Les Turcs sont bien plus procéduriers que nous. M. Danayan ayant eu 12 ans de prison, il a ainsi eu de quoi s’occuper. Mais je ne désespère pas d’être celui qui fera condamner la France à Strasbourg. À moins qu’un arrêt Coupat c. France ne me grille la politesse ?

27. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:26 par un supporter de plus

Cher Maître,
2 questions - qui ne sont pas des ocnsultations persos - si vous le voulez bien :

  • Vous dites que la procédure est nulle. Ce reportage peut-il servir à avoir gain de cause en appel - à condition qu’appel ait été interjeté - ou en cassation ?
  • le commentaire du juge “c’est criminel”, reconnaissant implicitement que le gamin avait été jugé en Comparution immédiate pour des raison non juridiques, est il un motif d’annulation du jugement ?

Merci d’avance
bien à vous

Eolas:
○ Non. La nullité aurait dû être soulevée devant le tribunal avant toute défense au fond. Si l’avocate commise d’office avait eu accès aux images, elle aurait pu le plaider. Mais elle est désormais forclose. Art. 385 du CPP. 
○ Non. Ce ne sont pas des propos qui révèlent une partialité du tribunal.

28. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:29 par Switz

Offrir du Bi luo chun à un stagiaire atteste l’évidente générosité de l’employeur. Un Gunpowder bien fait aurait suffi à sa peine, cette boisson énergisante est tout aussi bénéfique pour la capacité de travail et de concentration, et favorise le rendement (même après déduction des quelques passages aux toilettes malheureusement nécessaires) .

29. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:30 par Geo

quel aurait du être le comportement d’Ali pour mieux s’en tirer ? ne pas parler avant de voir l’avocat ? est-ce que cela pourrait aussi jouer en sa défaveur ?

Eolas:
Le fait d’avoir parlé a-t-il joué en sa faveur, franchement ? 

30. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:36 par ninou

Je suis assez partagée sur cette affaire, même si votre billet est assez complet.
N’est-il pas vrai que nombre d’avocats, en pratique, font tarder l’entretien avec le gardé à vue pour, justement, disposer de quelques (maigres je vous l’accorde) informations que leur client tirerait des interrogatoires subis ?

Eolas:
Non. Notre entretien ne peut avoir d’utilité que s’il a lieu avant l’interrogatoire. Sinon nous arrivons après la bataille.

De plus, alors comment faire puisque, vous le savez, le point de départ de la garde à vue diffère souvent du placement effectif en garde à vue (rétention douanière, simple convocation transformée en GAV, etc…).

Eolas:
La jurisprudence est claire : la garde à vue remonte au moment où la personne est privée de liberté en cas d’interpellation où est arrivée dans les lieux en cas de convocation. 

Enfin, alors que seule l’obligation de faire prévenir un conseil est mise à la charge des policiers, la procédure devrait-elle être alors considérée comme nulle si, l’avocat, lui, n’intervient que plusieurs heures plus tard ?

Eolas:
Non. la seule obligation des policiers est de contacter l’avocat choisi ou de permanence. Le reste est de la responsabilité de l’avocat.

Enfin, vous le savez, comme le précise Hervé Vlamynck, “le temps policier n’est pas le temps judiciaire”, et les PV lors d’une GAV ne sont et ne peuvent être réalisés en temps réel…

Dès lors, je reste perplexe. Curieuse, et je pense pouvoir affirmer de bonne foi, mais perplexe…

Eolas:
Les PVs d’audition sont faits en temps réel puisqu’ils sont signés immédiatement. Et rien n’interdit à l’OPj d’informer verbalement l’avocat de ce qu’il y a une empreinte ADN. L’argument du “y’a rien à montrer aux avocats” me fait tiquer. On ne demande pas un beau dossier bien ficelé. On veut connaître son contenu, même si c’est dans un carton à chaussures.

31. Le lundi 23 novembre 2009 à 12:41 par Dr Tavuk

Je rejoins ceux qui posent les questions (en espérant ne jamais avoir à se servir des réponses) : supposons qu’on se retrouve en garde à vue. En gros la solution la plus sûre consiste à ne rien dire, rien entendre, rien voir et rien signer. Mais quels sont les risques dans ce cas ??

Eolas:
précisément, on n’en sait rien, puisque l’avocat n’a pas accès au dossier. Mais se taire est un droit maintes fois consacré par la CEDH. Et il est difficile de s’enfoncer en se taisant. 

32. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:10 par Maboul Carburod....z

Ce qui est intéressant de noter pour la France est que l’Habeas Corpus dont on nous rebat les oreilles ne devrait concerner pour certains politiciens que l’institution judiciaire dès lors qu’elle est formellement saisie alors qu’il faut considérer qu’un policier ou un gendarme enquêtant sur un délit, un crime voire une contravention, agit en qualité d’officier de police judiciaire ou d’agent de police judiciaire. En droit, l’affaire concerne la justice que l’on peut considérer comme saisie. Les droits de l’Habeas Corpus doivent donc être établis à ce stade.

On me rétorquera “efficacité policière” et “naïveté” des juges.

Il est bon que la Cour de Strasbourg rappelle les principes élémentaires et les sanctionne.

Pour la France, la révision du Code de Procédure Pénale devrait aussi porter sur la création “enfin” d’un corps spécifique d’enquêteurs soumis au ministère de la justice, ce qui permettra de réfléchir aux lieux de déroulement des enquêtes et à la problématique de l’assistance des avocats.

Sur ce, je sors de mon rêve debout pour retourner à mon quotidien de magistrat.

33. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:34 par sir yes sir

maître je vous trouve bien chafouin.
En tant que Procureur (enfin brave petit soldat du procureur c’est-à-dire substitut, mais c’est pareil, n’est-on pas indivibles?) je ne conçois pas le déferrement tel que vous le décrivez.

Déjà, d’une, je défère AVEC un avocat (oui messieurs dames), enfin en tout cas si celui-ci le veut bien. En effet il survient parfois qu’un beau matin, un beau DIMANCHE matin en particulier, l’avocat de permanence me demande d’un ton léger si cela me convient qu’il arrive une fois son client présenté devant le JLD. Auquel cas que dire ?

Eolas:
J’applaudis à votre pratique, plus respectueuse de la CEDH, que celle en cours à Paris et dans les tribunaux périphériques. Si l’avocat ne vient pas, vous n’avez rien à faire et avez fait ce qu’il fallait. Précision : la seule fois où j’ai refusé de me déplacer un dimanche, c’était le jour du baptême de ma fille. 

Mais surtout… Soyons sérieux, en tout cas je prétends (tenter de) l’être : je ne prends durant le déferrement aucune note visant à assurer l’accusation et à enfoncer le prévenu, qui a son compte après 24 à 48 heures de GAV. Je note ce qu’il me dit, consciencieusement. S’il nie je me contente d’un sobre je ne reconnais pas les faits qui me sont reprochés ou pour être plus fidèle j’ai rien fait, et je passe quand il ergote sur c’est pas si grave (une extorsion, ou un bon coup de couteau dans le thorax car j’aipasfaitexprès) ou encore sur ses commentaires parfois déplacés sur la victime (pas terrible non plus devant mes collègues du siège). S’il est là c’est que, si j’ai bien travaillé en tout cas, j’en ai déjà assez contre lui, sinon il ne devrait pas être là…

Eolas:
Même remarque que plus haut.

Et oui, j’ose le dire, je note même les remarques qui peuvent faire passer mon prévenu de la case mandat de dépôt à la convocation JAP ou du ferme au si convoité SME : je viens de signer un CDI, je vois un psy trois fois par semaine, je suis sous méthadone depuis 3 semaines j’essaye de décrocher…

Eolas:
Encore heureux.

Et jamais vous ne me prendrez en traître : je note TOUJOURS le sacro-saint JE REGRETTE JE SUIS DESOLE JE JURE JE LE REFERAI PLUS. Même si je n’y crois pas une seconde (18 mentions au CJ, dont une il y a deux mois, pour les mêmes faits, d’ailleurs c’était moi à l’audience il avait déjà juré qu’il ne le referait plus…).

En tant que magistrat, même du parquet, je suis garant des libertés individuelles, et mon but n’est pas de coincer les gens ou de les faire plonger au nom de mon plaisir pervers.

A part ça, bien que vous trouvant un peu chafouin, vous avez tout à fait raison sur l’inutilité de l’avocat en GAV, sur l’hypocrisie qui imprègne tout ça et sur l’absence de respect des droits de la défense en particulier dans les procédures de CI.

Eolas:
Vous voyez comme on se retrouve.

Tout en devant reconnaître, en toute honnêteté, que bon nombre de nos procédures n’aboutissent qu’après des GAV dans les conditions que vous décrivez.

Eolas:
D’où la colère des avocats qui en ont marre que leur pays ait peur des droits de l’homme dont le respect n’a jamais fait obstacle à une politique pénale efficace.

34. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:38 par Stein

Oui à la présence d’un avocat, le temps nécessaire, pour qu’il défende une personne gardée à vue. Oui à l’enregistrement son et image, sans discontinuer, d’un gardé à vue. J’ai connu le cas d’un quidam qui avait avoué même lors de sa présentation au JI d’un crime pour enlèvement d’enfant et attouchement. Il a été sauvé par l’arrestation du véritable auteur des faits, dix jours plus tard. J’en ai gardé un très mauvais souvenir. Je précise que des éléments matériels irréfutables attestaient de son innocence.

35. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:39 par Bob

Très bon billet : une belle argumentation et quelques touches d’humour bien écrites.

Merci.

Vivement le 2ème.

36. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:39 par sevand

Dans la plupart des barreaux français, le plus souvent la permanence y est assurée par un seul avocat (voire deux) et cela pendant une semaine entière. J’ai quand même un doute dans le cas d’une application stricte de cet arrêt sur l’assistance d’un conseil dés la mise en GAV. Comment assister leur client pendant 24/48H (sans parler des multiples GAV), dans la mesure ou parallèlement ils doivent assurer lerus affaires courantes?

Eolas:
On nous a sorti cet argument en 1993, lors de l’accès à la garde à vue à la 21e heure. On ne devait pas y arriver. On y est arrivé.
On nous l’a ressorti en 2000 avec la première heure. On ne serait pas disponible. On l’a été.
La même année, on nous a dit qu’on ne pourrait pas assurer la représentation au prétoire en prison. On l’a fait.
Donnez-nous des droits de la défense et laissez-nous nous démerder avec. On en fera bon usage, c’est promis.

37. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:50 par Acai

Merci!

38. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:56 par LST

Cher Maître,
Il y a une chose que je ne comprends pas : pourquoi, alors que le papa du petit Jeannot est le premier magistrat de ce pays, il ait tout oublié de sa profession d’avocat et n’ait pas un peu plus d’énergie à consacrer aux droit de la défense… De même, il y a une telle proportion d’avocats dans le parti majoritaire que je ne sais quoi penser.

Eolas:
Jeannot n’est pas le fils du Premier président Lamanda, voyons !

39. Le lundi 23 novembre 2009 à 13:56 par Stanley MILGRAM

Mais en France, pendant la garde à vue, l’avocat n’a pas accès au dossier de son client.
Parce qu’en France, la Police a besoin d’un dossier pour une “GAV” ?
J’ai été trois fois en garde à vue, sans motifs apparents… sinon celui d’avoir protesté contre les méthodes policières, lors de contrôle ou autres remarques !

Eolas:
Pour avoir un dossier, pas besoin de motif apparent, comme on dit à Outreau.

40. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:03 par raven-hs

Merci pour ce billet.

J’attends le prochain billet sur le “que faire ?” avec impatience.

Le dernier arrêt date du 13 octobre 2009. Combien de temps faudrait-il pour épuiser les voies de recours interne ( passer par le tribunal correctionnel, la cour d’appel, la cour de cassation ), pour enfin saisir la Cour EDH. Il faudrait au moins compter 6 ou 7 ans pour avoir une décision.

Pour éviter d’attendre de nombreuse années avant d’avoir une décision, dans quelle conditions peut-on poser une question préjudicielle à la Cour EDH sur ce point ?( j’avoue que je ne sais même pas si c’est possible ).

En résumer, comment pourrait on faire en sorte que la CourEDH se prononce rapidement sur la compatibilité du droit français avec la ConventionEDH ?

Une autre question que je me pose sur le ” que faire en attendant ? ” c’est le comportement de l’avocat.

Pour pouvoir invoquer la violation d’un droit, il semble nécessaire d’avoir voulu invoquer ce droit et de se l’être vu refuser. Est-ce que sa signifie que l’avocat doit se rendre au commissariat pour demander à assister son client, demander communication du dossier et faire constater le refus de la police ou de la gendarmerie pour pouvoir entreprendre un recours ?

Eolas:
ce sera l’objet de mes réflexions dans le prochain billet. Je ne pense pas que ce soit nécessaire : Salduz et Danayan ne l’ont pas fait. Dès lors que la loi ne le prévoit pas, la violation est constituée.

@ Jeannot : Photocopier les dossiers c’est bien, mais tu rendrais services à tout le monde en allant aussi relever la toque, en regonflant les pneus du vélo de ton patron, en graissant sa chaine ( je parle toujours du vélo ) et même en allant lui faire ses courses, ça permettrait de lui dégager du temps libre sur un emploi du temps chargé et de pouvoir nous faire la suite de son excellent billet.

Eolas:
T’as entendu, Jeannot ?

41. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:15 par DT

En réponse au commentaire 32 (mais aussi à certains autres commentaires précédent).

Oui, la seule attitude valable en garde à vue consiste à se taire et à refuser de signer (il faut refuser de tout signer, même ce qui n’a pas apparemment d’importance, et il faut refuser de dire quoi que ce soit, même les choses les plus insignifiantes).

Que l’on se considère comme “coupable” ou “innocent” ne change rien à l’affaire. On connaît suffisamment “d’innocents” (ou, en tout cas, de gens qui pensaient ne rien avoir à se reprocher) qui ont été condamnés pour savoir que cette attitude est la seule possible.

Qu’est-ce qu’on risque? Et bien, on pourrait dire qu’en principe on ne devrait rien risquer car on ne voit pas pourquoi, dans un Etat de droit, on devrait être sanctionné pour le simple exercice d’un droit.

En réalité, il est certain que dans l’esprit des policiers et de quelques magistrats, il est suspect de se taire. Pour les policiers, peu importe: ils ne décident de rien, et leur avis compte peu. Ceux qu’il faut convaincre, ce sont les magistrats.

Mais comme vous êtes des lecteurs assidus du blog de maître Eolas, vous ne devriez pas avoir trop de mal à exposer, devant le substitut ou le juge d’instruction, les raisons qui vous ont poussé à ne pas répondre aux questions en garde à vue. Illégalité de la garde à vue au regard de la convention européenne des droits de l’homme, inégalité des armes, absence d’accès au dossier, etc…

Vous en conclurez naturellement que votre silence n’est pas une présomption en faveur de votre culpabilité, mais seulement une marque de votre attachement à la défense des droits de l’homme dans toutes les circonstances et, en l’occurrence, de la défense de vos propres droits dans la procédure qui est en cours contre vous.

Ensuite (et parce que votre avocat aura entre-temps pris connaissance du dossier et communiqué avec vous, ce qui fait que vous saurez exactement à quoi vous en tenir quand aux éléments charge), vous pourrez vous exprimer sur le fond, toujours devant un magistrat.

En conclusion, n’oubliez pas la maxime suivante: il ne faut jamais répondre aux question posées par un policier.

Eolas:
Heu, s’il vous dit “Sarah Connor ?”, répondez non.

42. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:27 par DT

Une précision supplémentaire à mon commentaire (numéro 41) car j’ai peur de ne pas être compris. Ce n’est que devant le magistrat et pas pendant la garde à vue que vous devez vous justifier de ne pas parler.

Durant la garde à vue, devant les policiers, il faut se contenter de dire “je n’ai rien à déclarer” et refuser de signer. Rien de plus. Il ne faut pas oublier en effet que la garde à vue est une zone de non-droit. Les intimidations, les claques voire les coups, c’est toujours possible et très difficile à prouver ensuite. Plus les policiers vous sentiront prêt à flancher, plus le traitement sera difficile. Donc pas d’énervement, calme et détermination (autant que possible) et surtout NE RIEN DECLARER.

43. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:33 par m@di

@MiKa
vous m’ôtez les mots de la bouche ! Je lis ce blog depuis plusieurs mois et le recommande à tour de bras (ou de clics de souris). Il me semble nécessaire de mieux connaître ses droits, juste au cas où ça pourrait servir ! -Merci-

44. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:34 par epc

Concernant le commentaire 34 de Stein, je me permettrai juste de rappeler que la video de la GAV n’est en aucun cas utilisable en matière de violences ( “regardez la video, il m’a tapé !” ).
Elle ne pourra être visionnée que si le gardé à vue conteste que ce qui est écrit dans son PV soit ce qu’il a effectivement dit….

45. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:45 par blabla

Plusieurs choses me chagrinent dans cette histoire:

- que l’intervention du Bâtonnier coïncident avec l’interpellation et la placement en garde à vue d’une avocate (qui, en passant, a bénéficié des mêmes droits que tous les autres gardés à vue, avec en plus avis à son autorité de tutelle.)

Eolas:
Vous croyez que la CEDH a anticipé la sortie de son arrêt Danayan en prévision des mésaventures de ma consœur ?

- que se profile à l’horizon, une présence accrue des avocats lors des gardes vues, auditions et perquisitions, avec à la clé une facturation salée des avocats commis d’office (qui pourront se rendre dans les commissariats en Rolls!)

Eolas:
Quand je suis appelé pour une garde à vue au titre de ma permanence, je quitte mon cabinet toutes affaires cessantes et y revient au mieux une heure et demie plus tard, parfois deux et plus. Je suis royalement payé 63 euros. Autant vous dire que la Rolls attendra. Mais je suis ravi de voir que l’hypothèse que nous puissions nous enrichir vous chagrine. Dire qu’il y en a qui font ça pour gagner leur vie.

46. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:47 par pendragon

pourquoi pas un busiris à guillaume didier - notamment pour son désormais célèbre “la turquie c’est pas la france” et le non moins fameux en devenir “retarder la présence d’un avocat c’est favoriser son accès”,

j’avais remarqué que le sieur guillaume didier avait une propension à justifier toute bétise au nom de la dialectique juridique, mais la il va loin…

Eolas:
Le dossier a été classé sans suite par opportunité des poursuites : un prix aurait parasité le billet. Mais sans préjuger de la position de l’académie, on n’est pas passé loin.

47. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:48 par plop

En voyant le reportage hier, je me posait également la question de la qualification en “vol à main armée”.

Si j’ai bon souvenir, c’est un pistolet à bille qui a été utilisé par Ali, réplique apparente, mais inoffensive. Les pistolets à bille ne font pas partie des armes je crois me rappeler. Peut on parler de vol à main armée quand il y a eu menace avec un objet pouvant être pris pour une arme mais n’en étant pas une ?

Par exemple, si je fais un braquage avec un pistolet à eau, puis-je être accusé de vol à main armée ?

Merci Maitre.

Eolas:
La réponse est à l’article 132-75 du code pénal

48. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:48 par julien

@maitre eolas.

Merci pour ce billet. Il y a depuis Salduz c. Turquie (2008) des dizaines d’arrets qui ont condamne differents pays du conseil de l’europe pour l’absence de l’avocat pendant la garde a vue. Au rythme de croisiere qui est pris, ce sont des centaines d’arrets a venir (principalement Turquie).

Voyons le dernier arret BOLUKOÇ c. Turquie du 17 novembre 2009 :

34. As to the question of legal assistance, the Court reiterates that it has already examined the same grievance in the case of Salduz v. Turkey and found a violation of Article 6 § 3 (c) of the Convention in conjunction with Article 6 § 1 (cited above, §§ 56- 62). In that case, the Court found that the applicant’s right of access to a lawyer had been restricted during his police custody, pursuant to section 31 of Law no. 3842, as he was accused of committing an offence falling within the jurisdiction of the State Security Courts. As a result, he had not had access to a lawyer when he made his statements to the police. No justification had been given for denying the applicant access to a lawyer other than the fact that it was a requirement of the relevant legal provisions. This fell short of the guarantees of Article 6.

35. The Court has examined the present case and finds no particular circumstances which would require it to depart from its findings in the aforementioned Salduz judgment. In this connection, the Court considers that, in the absence of information from the Government on the manner in which the meetings took place, the fact that the second and third applicants were able to meet with their lawyers for about fifteen minutes on the third and fourth day after their arrest, failed to ensure that their lawyers were able to give them effective assistance (see, for example, Tağaç and Others v. Turkey, no. 71864/01, §§ 35-36, 7 July 2009). In this respect, the Court reiterates that the Convention is designed to “guarantee not rights that are theoretical or illusory but rights that are practical and effective” (ibid. § 51).

36. There has therefore been a violation of Article 6 § 3 (c) of the Convention read in conjunction with Article 6 § 1 in the present case.

15mn de visite d’un avocat au 3eme et 4eme jour de la garde a vue, cela est une violation de l’article 6-1 et 6-3 c) de la Convention. C’est donc clair et net!

Eolas:
Je pense qu’on est en présence d’une procédure dite d’arrêt pilote.

49. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:49 par Stein

epc —-45 et 46….
Je ne crois pas que les GAV soient devenues plus respectueuses envers les individus, au contraire. Alors, pour limiter la “casse”, filmer peut amener les gens à plus d’humanité et à respecter ce qui doit l’être. Je confirme la position de DT en 41 et 42.

50. Le lundi 23 novembre 2009 à 14:58 par Petit pois sournois

@ julien (50) et à d’autres (y compris à notre hôte)

Tous les motifs de nullité des GAV qui sont soulevés, par Maître Eolas comme par les commentateurs, sont connus depuis de longues années.

Pourquoi donc le bâtonnier du plus important barreau de France est-il obligé, pour attaquer la réglementation et les pratiques françaises, d’aller chercher des décisions rendues contre la Turquie dont certaines, comme le reconnaît notre hôte, ne sont pas réellement applicables aux situations qui se rencontrent en France ? Pourquoi les avocats français ne sont-ils pas encore parvenus à obtenir ces condamnations que tout le monde semble s’accorder à dire inévitables ?

Pour l’instant, silence général. Et si Maître Eolas nous explique dans un prochain billet “Que faire”, je demanderai de nouveau, tant qu’aucune réponse solide n’aura été présentée, pourquoi cela n’a pas été fait.

Eolas:
Je vous ai répondu plus haut. Et je cherche toujours en vain un arrêt déboutant une personne se plaignant du système français. Zéro partout.

51. Le lundi 23 novembre 2009 à 15:00 par chris

En somme, signer c’est fermer toutes les portes et fenêtres (emballé, pesé, hop au suivant !), ne pas signer c’est laisser une “fenêtre” entr’ouverte. J’aime les fenêtres ouvertes surtout devant la rhétorique d’intimidation des cols blancs.

52. Le lundi 23 novembre 2009 à 15:06 par jojolapin

N’oublions pas l’arret CEDH Kolesnisk du 19 novembre 2009 condamant l’Ukraine pour avoir utilise des “aveux” faits en l’absence d’avocat.

Pour ceux qui aime les associations d’avocat contre la garde a vue sans avocat : Voici “Je ne parlerais qu’en presence de mon avocat (favori)”

Pour ceux qui sont plutot petition.

Enfin pour ceux qui aiment les conclusions de nullites a deposer pour faire devenir tout rouge de honte de rage le procureur.

Et pour ceux qui aiment les rapports du controleur des lieux de privation de liberte sur les locaux de garde a vue ou on melange des excrements car le wc est bouche : 5 nouveaux rapports deposes le 19 novembre 2009.

Cliquons citoyens!!

53. Le lundi 23 novembre 2009 à 15:44 par ceriselibertaire

Garde à vue
Gare à vous
Garde à vous
Garde avoue

je ne sais plus avec ce gouvernement le doigt sur la couture.

54. Le lundi 23 novembre 2009 à 15:45 par parquezaco

Maître,

vous prétendez que la garde à vue d’un supposé (je dis supposé parce que les journalistes disent présumé ce qui est une aberration de plus) braqueur serait nulle car les policiers, au moment du réveil matutinal et sans doute brutal, ne lui auraient pas, illico presto, notifié ses droits.

Eolas:
Absolument. Quand le code pénal (et la Convention, accessoirement) dit “immédiatement”, cela s’oppose à ce que l’OPJ retienne cette information pour plus tard fût-ce par respect pour la maman de la personne soupçonnée (et nous sommes d’accord sur l’inanité du terme présumé). 

Avec comme preuve de cette intolérable violation des lois (plus dangereuse pour la République que le fait d’empoigner une malheureuse coiffeuse par les cheveux en lui braquant sous le nez une arme de poing) le reportage saucissonné de M6.

Etes-vous toujours sérieux?

Eolas:
Absolument. La scène est filmée. Si ça suffit pour faire condamner mes clients, ça suffit pour constater une violation de la procédure. Si vous pensez qu’il s’agit d’un montage ou d’images de synthèses, n’hésitez pas à produire vos preuves.

Pour le reste, nous avons déjà du mal à convaincre un nombre significatif d’avocats à venir en temps et heure assister les prévenus déférés, alors j’imagine d’avance l’ardeur qui animera (nombre de) vos confrères à assister à l’intégralité d’une garde à vue.

Eolas:
C’est notre problème, pas le votre. On nous disait déjà en 1993 qu’on ne pourrait pas assurer le service des gardes à vue. Et en 2000 qu’on ne pourrait s’organiser pour être là dès le début de la GAV. Alors donnez-nous ce nouveau droit. On ne pourra pas y arriver, mais promis, on le fera quand même. Comme d’habitude.

Salutations

Eolas:
Également.

55. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:01 par Yan

Le commentaire au dessus du mien fait preuve de beaucoup de nuances et montre d’une bonne compréhension du texte, je suis rassuré.

56. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:38 par MadPopple

cher Maître,

je me joins aux interrogations de plusieurs commentaires précédents : si la procédure pénale française en matière de garde à vue est à ce point contraire à la Convention EDH et à une jurisprudence constante de la Cour EDH, comment se fait-il qu’aucune condamnation de la France en la matière ne puisse être citée.

La faute à la longue procédure menant un litige devant la Cour de Strasbourg ?

Un quelconque manque d’entrain français à saisir le juge européen (mais je n’ose le croire) ?

Ou bien des arrêts condamnant la France existent mais les commentateurs ont préféré se contenter de ces arrêts récents et rechignent, tâche ingrate, à éplucher les recueils de décisions quant il s’agit uniquement d’interpeler les mékeskidis (ce que j’ai également du mal à croire, tant cette économie me paraît contre-productive) ?

Cordialement

Eolas:
je vous retourne la question : si la procédure française est conforme et approuvée par la cour européenne des droits de l’homme, comment se fait-il que Guillaume Didier ne puisse produire aucun arrêt de la cour le disant expressément ? Réponse : la question n’est pas encore arrivée devant la cour (qui il faut le dire juge les requêtes déposées en 2001…). 

Nos clients veulent oublier leurs affaires dès que la peine est purgée (et des fois même avant). Les embarquer dans 7 ans de procédure ne les intéresse pas. La plupart du temps, ils ne font même pas appel, ce qui empêche l’épuisement des voies de recours internes et fait obstacle à la saisine de la cour européenne. Ça arrivera un jour.

57. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:39 par GPS

Piqué dans Le Figaro, ce commentaire de Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint du syndicat Alliance, à propos de la garde à vue. Cela date d’hier ou avant-hier :

“Nous ne sommes pas contre l’intervention de l’avocat durant la garde à vue (…) mais, en vertu de notre système judiciaire, il ne faut pas lui laisser consulter le dossier par exemple”. “Il y aurait un mélange des genres et nous protégerions alors le droit des délinquants”, a-t-il estimé.

Mélange des genres ! Protéger le droit des délinquants ! C’est délicieux, non ?

Le même, dans la même déclaration, a d’ailleurs précisé : “Il ne faut pas confondre le système anglo-saxon et notre système basé sur l’aveu”.

Là, c’en est un, d’aveu, de la part de ce policier. Et de taille. L’aveu que tout est bon pour faire avouer.

Eolas:
Le Code de procédure pénale consiste pour une bonne part à limiter le pouvoir de la police. Voilà pourquoi.

58. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:40 par Thomas

@ parquezaco

Bien sûr que personne ici n’a de sympathie pour un braqueur armé.

Eolas:
Un braqueur désarmé, ça s’appelle une erreur judiciaire.

Je crois qu’on doit simplement se préoccuper d’une justice qui ne respecte elle-même pas la Loi ou la Convention, je ne sais plus très bien.

Eolas:
Les deux se confondent.

Et si les infâmes braqueurs s’en tiraient grâce à ce genre de vice de procédure?

Eolas:
Quelle horreur ! Une justice qui imposerait le respect de la loi à la police ?

Et puis, vous ne pouvez pas en vouloir à des avocats de vouloir augmenter leur marché de fait.

Eolas:
Tiens ? Mon détecteur de cliché s’affole. 

Plus de temps d’avocat possible, c’est plus d’honoraires, et ça, les bâtonniers l’ont bien compris (je ne parle pas spécifiquement des gens bénéficiant de l’aide juridique, mais de TOUS les gardés à vue)!

C’est donc du Win-Win, que voulez vous de plus?

Eolas:
Et voilà, le fusible a fondu. Parce que vous croyez qu’on va être grassement payé pour ce travail pour lequel nous serons commis d’office la plupart du temps ? Actuellement, une garde à vue, c’est 63 euros si c’est dans la ville où siège le tribunal (tarif unique à Paris donc) et environ 75 s’il y a un déplacement en dehors de cette ville (par exemple, votre cabinet est à Versailles et vous êtes appelé à Saint-Quentin en Yvelines, vous avez fait 100 km de route et gagné 12 euros de mieux, à vous le jet privé !)

59. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:44 par C

Démonstration magistrale s’il en est. On espère que Thionvillois (voir un billet précédent) sera un peu moins plein de morgue et comprendra enfin non pas l’intérêt mais l’obligation de recourir à la CEDH puisque ainsi qu’Eolas l’écrit, la France est peut-être croyante mais pas pretiquante en droits de l’Homme. A se demander si nos gouvernants ne deviendraient pas un peu incroyants en réalité.

Et le prix Busiris pour la voix de sa maîtresse le porte-parole de MAM, lequel raconte des énormités et ne sait même pas lire un arrêt de la CEDH ?

60. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:46 par Guisou

@ 56 Parquezaco :

Vous dites : Pour le reste, nous avons déjà du mal à convaincre un nombre significatif d’avocats à venir en temps et heure assister les prévenus déférés

Pourriez-vous me préciser :

- qui est le “nous” de votre phrase ?
- dans quel barreau constatez-vous l’insuffisance des avocats (ou de la garde pénale, si elle existe) pour assurer les GAV ?

61. Le lundi 23 novembre 2009 à 16:54 par ceriselibertaire

60 Thomas : win-win, est-ce que vous prononçez ouin-ouin ?

62. Le lundi 23 novembre 2009 à 17:47 par blabla

60 Thomas: win-win ! de la poche des contribuables directement dans les poches des avocats commis d’office !

Les finances publiques et le budget de la justice ne s’en porteront que mieux…

Eolas:
Votre souci des finances publiques est louable, et je le rejoins, en faisant fi comme vous des mauvais esprits qui diraient que l’avocat est un contribuable plutôt rentable, qui reverse d’emblée 20% du montant de ses honoraires à l’Etat, avant d’être imposé sur le reste. Et j’approuve votre demande d’abandonner séance tenante le recours à l’emprisonnement, le coût quotidien d’un prisonnier étant une charge insupportable pour le contribuable. On économisera en plus le salaire des surveillants. La réforme est en marche.

63. Le lundi 23 novembre 2009 à 17:53 par arbolito

Rions un brin
Qui a dit : «Nous ne sommes pas contre l’intervention de l’avocat durant la garde à vue (…) mais, en vertu de notre système judiciaire, il ne faut pas lui laisser consulter le dossier par exemple.» «Il y aurait un mélange des genres et nous protégerions alors le droit des délinquants» ?

réponse par le lien ci-dessus

64. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:03 par az

a plop comm 49 :

que l’arme ne soit pas chargée, à bille, en plastique… peu importe, cela reste une arme pour la qualification des faits. Mais lorsqu’elle est fausse, il y aura plus souvent requalification en vol avec violence, pour éviter la cour d’assises , comme dans le reportage

65. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:17 par vroummmmmmmm

et on me dit que les titulaires du permis de conduire qui ont obtenu ce précieux sésame avant l’instauration du permis à point, ne peuvent se voir retirer de points……. je suis perdu………

Eolas:
Vu le hors sujet, assurément.

66. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:20 par Teejee

Merci, Maître, pour ce billet.
J’ai lu attentivement ceux que vous avez consacrés à la GAV. Simple mesure de précaution : ce n’est pas parce que vous n’avez rien à vous reprocher que l’on n’a rien à vous reprocher. La Bruyère a écrit : “Je dirais presque de moi : ‘Je ne serai pas voleur ou meurtrier.’_ ‘Je ne serai pas un jour puni comme tel’, c’est parler bien hardiment.”
Il disait aussi, dans le même passage : “Un coupable puni est un exemple pour la canaille. Un innocent condamné est l’affaire de tous les honnêtes gens.”
C’était au XVIIème siècle…
Pas Encore Pendu, en 21, pose indirectement une question qui me paraît intéressante, aussi la posé-je directement : que se passe-t-il dans le cas où, à l’issue de sa garde à vue, un coup… un susp… un prév… un citoyen refuse de signer le procès-verbal ?
Merci d’avance, Maître, de NOUS répondre. Encore une fois, on ne sait jamais : les statistiques explosent en même temps que les têtes des suspects éclatent.

67. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:20 par K'lo

la loi disant “à l’issue de la 20e heure”, cela s’entend comme la 21e heure
En plus de cours de Droit, il faudrait au policiers des cours de maths ….

68. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:21 par vpo

@Cobab en 17: Merci, je tâcherai de m’en souvenir si je finis un jour en GAV :-) !

69. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:25 par Petit pois sournois

@ vroummmmmmmmmmmm etc (67)

Hoax !

70. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:37 par Antoine

Dans le reportage, nous voyons que le gardé à vue à le droit de fumer pendant l’interrogatoire (14’). Est-ce qu’un commissariat n’est pas considéré comme un lieux public ? Ou bien il y a une dérogation pour ce cas précis ?
Merci aux lecteurs ou au maître de ces lieux pour la précision.

Eolas:
Dans les commissariats, on respecte la loi Évin autant que le code de procédure pénale.

71. Le lundi 23 novembre 2009 à 18:50 par Whydalaz

Fin de lecture pour un billet très intéressant.

N’étant pas du tout au fait des agissements de notre pays (avant la découverte de ce site il y a quelques jours), j’ai trouvé vraiment ironique que la télé se faisait témoin sans le savoir d’un tel abus de la part de ceux sensés défendre l’ordre et la loi. J’imaginais que de nombreux dossiers dans ce genre comportaient des coquilles au point qu’on puisse en critiquer la construction. Là, le reportage de M6 est, malgré lui d’ailleurs, témoin d’un viol des droits de l’homme. Quelque chose qui devrait choquer l’opinion publique, faire scandale, entrainer des réactions appropriées de la part de ceux pour qui l’on vote…

Il y a des jours comme celui ci, je me dis qu’elle a une belle gueule notre identité nationale. En tout cas je remercie le rédacteur qui sait porter avec simplicité les faits pour que nous les comprenions d’un point de vue à la fois documenté et explicite. Je ferai suivre cette adresse.
bonne continuation.

72. Le lundi 23 novembre 2009 à 19:00 par Guile

Comme me le faisait remarquer un ami récemment, Thierry Henry est plus critiqué, humilié et villipendé à cause de sa main, que certaines violations manifestes des droits de l’Homme commise sur notre territoire.

C’est tellement vraie, que même les politiques y sont allés de leur petit commentaire contre Henry (ou pour mais ce fut très rare) alors que sur la garde à vue, le débat reste cantonné aux ministres concernés et à quelques maigres déclarations du PS.

Et ca se dit la patrie des droits de l’Homme… En fait, la France ne l’a jamais été, preuve est faite il me semble…

73. Le lundi 23 novembre 2009 à 19:20 par Solo

En passant, vive l’Europe ! (hin hin).

74. Le lundi 23 novembre 2009 à 19:29 par Quixotte

La garde à vue, c’est en quelque sorte la lettre de cachet républicaine sauf que, au lieu d’avoir un seul monarque nous avons des cohortes de policiers et certainement pas tous éclairés.

La monarchie, c’était peut-être le temps des libertés !!!!

Eolas:
La monarchie absolue n’était pas aussi despotique qu’on le pense, et notre république n’est pas aussi respectueuse des droits de l’homme qu’elle l’affirme.

75. Le lundi 23 novembre 2009 à 19:46 par parquezaco

A guisou en 62

il est fréquent que les permanences avocats soient tenues par les jeunes avocats débutants et que les anciens rechignent à assurer une telle permanence, notamment dans les Barreaux de province.

Eolas:
À leur décharge, la loi ayant vidé de substance cette intervention, on comprend que ça lasse avec le temps. Je suis un des plus anciens inscrits sur les listes de volontaires GAV à faire encore des permanences.

Et dans nos contrées, beaucoup de juges et d’avocats rechignent à venir le week-end, même pour un bref débat contradictoire.

Eolas:
À Paris, la question ne se pose pas, il y a des permanences bien remplies.

Je n’ai pas besoin de vous citer de nom de ville: la proximité des week-ends émousse généralement la préoccupation de protection des libertés publiques d’une partie de la magistrature et du Barreau.

Résultat des courses: dans les affaires le plus importantes les gardes à vues sont prolongées le samedi et/ou le dimanche, jusqu’au lundi, pour éviter tant que faire se peut de déranger juges, avocats et greffiers lesquels ont travaillé abondamment la semaine.

Eolas:
À Paris, 15 avocats sont de permanence jour et nuit. Le délai moyen d’intervention à compter de l’appel est inférieur à deux heures.

D’autant que le dimanche il est impossible d’obtenir un bulletin n° 1 du casier judiciaire, croyez-vous cela normal?

Eolas:
Le fonctionnement du CJN est antédiluvien. Le fax traité manuellement, à l’heure des réseaux sécurisés. Non ce n’est pas normal.

76. Le lundi 23 novembre 2009 à 19:47 par arbolito

@33 “sir yes sir”, substitut de procureur qui nous explique, en fin d’un message très intéressant sur sa pratique humaniste du déferrement, que “bon nombre de nos procédures n’aboutissent qu’après des GAV dans les conditions que vous décrivez”.
Si je résume : le respect des droits de la défense nuirait à la poursuite et à la répression des infractions. Or cette poursuite et cette répression constituent des objectifs de valeur constitutionnelle. Vous me voyez venir avec mes gros sabots : un contrôle de proportionnalité doit donc être effectué pour dire lequel des ces 2 principes doit l’emporter : défense ou répression ? L’appréciation des faits est alors importante : la garde à vue doit être placée sous le microscope du juge.
Dans quelle mesure les pressions exercées sur les gardés à vue sont-elles nécessaires pour parvenir à poursuivre efficacement les infractions ? Et dans les pays où l’avocat peut intervenir avant l’interrogatoire, comment ça se passe ?
OK, la CEDH a manifestement tranché. Mais dans les faits, est-ce que ça obstruera réellement le fonctionnement de la justice que de n’effectuer des interrogatoires de personnes soupçonnées qu’en présence de leur avocat ?

Eolas:
Les Etats-Unis le font depuis 1966. Ça ne les a jamais empêché d’exécuter des innocents. Soyez sans crainte pour l’efficacité de la répression. 

77. Le lundi 23 novembre 2009 à 20:09 par Z.

L’orientation de la CEDH est séduisante encore qu’on pourrait la surnommer “oui, non mais si, peut-être” dans la mesure où dans les arrêts John MURAY, SALDUZ et DAYANAN, elle n’exclut pas que l’accès à un avocat soit différé, toujours selon les principes de proportionnalité et d’opportunité.
En revanche, la présence plus importante de l’avocat en garde à vue, souhaitable à mon sens aussi bien dans l’intérêt de la personne que dans l’intérêt des policiers qu’on accuse souvent de plein de maux, m’inquiète pour l’avocat lui-même.
Je ne suis pas persuadé que l’organisation des Barreaux actuellement et à moyen terme, permette de répondre à la demande. Il y a des avocats qui ne veulent pas faire de pénal et beaucoup de ces auxiliaires de justice savent que les permanences garde à vue en l’état actuel de la législation, sont déjà éprouvantes.
Je n’ose imaginer la réforme des Barreaux lorsque les avocats assisteront aux interrogatoires dans l’hypothèse de 100 à 110 mesures de garde à vue simultanée sur le ressort d’un TGI important comportant de nombreux services de police et de gendarmerie éloignés les uns des autres.
Je crains que le ou les Conseils ne doivent faire des choix car j’imagine mal les associés hanter les couloirs des hôtels de police sauf exception. Cela reviendra plus aux collaborateurs et je ne parle pas des avocats salariés !
Sachant que le lendemain, il y a un cabinet à faire tourner (cf regardez comment cela se passe lorsqu’une avocate est enceinte, je n’en connais pas beaucoup qui prennent leur congé mat comme dans le public ou le privé…)
Je crains que les avocats ne doivent faire des choix dans certaines hypothèses car ils ne pourront matériellement pas honorer toutes les demandes d’assistance garde à vue.
Or la procédure, comme c’est le cas en cas de carence actuellement, se poursuivra. Et des éléments de preuve seront recueillis en leur absence alors qu’ils auraient pu (dû ?) être là au moment où ils ont été recueillis.
Je crains que cette réforme ne se retourne contre certains avocats qui risquent d’être mis en cause, sans compter le “oui, maître, vous pouviez assister votre client lors de l’interrogatoire, vous n’êtes pas venu et vous n’avez pas demandé à un confrère de vous substituer” du Président ou du Ministère Public à l’audience.
Il faudra être pédagogue avec le client.
La volonté de réforme, si elle est la volonté des princes de l’avocature, ne doit pas oublier qu’il y a également des petites mains besogneuses dans ce métier et qu’il est facile de réformer en shootant le boulot aux autres.
Il me semble que les Barreaux devront être vigilants aux nouveaux aspects de la garde à vue, histoire de limiter les déclarations de sinistre et d’éviter que la profession d’avocat ne soit exposée comme celle de médecin…

Eolas:
Si la seule chose qui fait obstacle à ce respect essentiel des droits de la défense, c’est le souci de notre bien-être, par pitié, cessez de nous ménager, choisissez les droits de la défense.

78. Le lundi 23 novembre 2009 à 20:15 par nicolas

j’ai fait mon mémoire de DEA (droit pénal) sur la privation de sommeil en garde à vue. Si ça vous intéresse, j’ai également publié un article sur ce thème à l’AJ pénal du mois d’octobre.

79. Le lundi 23 novembre 2009 à 20:32 par Fraglagla

En somme, c’est Florence Rey qui avait raison. Le petit tendron ne s’est pas laissé attendrir la viande. Évidemment, une viande anarchiste n’est pas du vulgus pecus, c’est plus coriace. Elle n’a pas dit un mot (Ali aurait pu s’en inspirer). Toutefois, je me demande si la “méthode Florence Rey” que vous semblez préconiser dans ces circonstances, c’est-à-dire se taire et laisser couler les questions, ne risque pas de se retourner contre le mis en examen. Au procès les enquêteurs frustrés par ce silence viendront décrire devant le jury un prévenu dur, insensible, voire pire calculateur. Le procureur aura beau jeu de voir dans cette absence d’aveux “spontanés” la preuve d’une absence de réel sentiment de culpabilité, voire une circonstance aggravante. On n’est pas aux États-Unis, où selon la formule consacrée “vous avez le droit de vous taire. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous”. En France même le silence peut être retenu contre l’accusé. Plus encore que les violences, c’est le jeu pervers utilisé par les interrogateurs qui pose question. Face à un être humain fragilisé, cela s’apparente à de la manipulation mentale. Lorsque la force ne suffit pas, ils jouent la carte de l’empathie pour mettre le client en “confiance”. Par exemple, Marc Machin a fini par faire de faux aveux parce que l’enquêteur avait joué copain-copain face à ce jeune drogué en manque. Il lui avait promis de venir le visiter en prison et de “l’aider” s’il lui disait ce qu’il avait envie d’entendre…. Résultat un innocent a fait des années de prison. Ce n’est pas digne de l’autoproclamée “patrie des droits de l’homme”.

Eolas:
Je crois que Florence Rey a été sévèrement condamnée non pas pour avoir gardé un silence obstiné au cours de sa garde à vue, mais pour avoir participé à une équipée qui a fait 5 morts  dont trois policiers. L’avocat à l’audience est là pour rappeler que le droit de se taire est un droit fondamental et la seule réponse rationnelle après une telle nuit de folie.

80. Le lundi 23 novembre 2009 à 21:05 par Ego

Tout simplement effarant !!

J’imagine que rien au sujet d’une modification des règles de garde à vue ne figurera dans la réforme de la procédure pénale. Croyante mais pas pratiquante… encore pour longtemps il faut croire.

81. Le lundi 23 novembre 2009 à 21:34 par Deilema

Je suis en train de visionner le reportage, après avoir lu votre article ce matin.
A vous lire, je m’attendais à une arrestation et des interrogatoires “musclés”.
Pas du tout, l’officier qui interroge le jeune Ali est même plutôt sympathique. Il ne hausse pas la voix, reste calme, détendu même s’il reste ferme.
Ce qui est choquant, c’est donc qu’une violation des droits les plus élémentaires d’un mis en cause peut tout à fait se produire alors qu’en apparence, pour le spectateur non averti, les choses se passent relativement “bien”.

Eolas:
Oui, les portes défoncées au bélier, les gonds qui sautent au fusil à pompe balles pleines, les hurlements des policiers qui font irruption pistolet au poing, c’est réservé à TF1.

82. Le lundi 23 novembre 2009 à 21:38 par Jérémy

Cher Maître,

Tout d’abord, merci pour vos papiers, toujours aussi intéressants.

Je me permets néanmoins d’apporter une précision sur le droit international public. Tout d’abord la ratification n’est pas un acte du Parlement, mais un acte du chef de l’Etat. L’art 52 de la constitution précise que “le président négocie et ratifie les traités”. Le Parlement n’intervient que dans les cas prévus par l’art 53 pour autoriser le président à ratifier. L’hypocrisie est d’ailleurs ici intéressante, puisque parfois la même autorité va signer le traité mais refuser de le ratifier alors qu’elle en a la possibilité.

Par ailleurs la conséquence de la ratification d’un traité n’est pas d’avoir effet en droit interne, mais de devenir opposable à l’Etat en droit international. L’effet en droit interne concerne la question de l’effet direct du traité, qui est une question récurrente en droit international.

Encore merci pour vos éclaircissements.

Eolas:
Mais la ratification doit être autorisé par une loi : séparation des pouvoirs, le parlement ne peut intervenir sur la négociation des traités, domaine de l’exécutif.

83. Le lundi 23 novembre 2009 à 22:01 par Cécile B.

Bonsoir à tous!

Qui pourrait me préciser sur le fondement de quel article de la Convention Européenne des Droits de l’Homme la CEDH estime que la Turquie a violé cette convention, à l’occasion de cette affaire?

En tous cas merci pour ce billet très instructif et dont j’attends la suite avec impatience!

En attendant, lire un tel billet le jour de mon anniversaire me remplit de joie :)

Eolas:
L’article 6, droit au procès équitable. Et joyeux anniversaire.

84. Le lundi 23 novembre 2009 à 22:06 par Lalael

Maître,

Merci pour ce billet fort instructif,

Je vous lis depuis maintenant quelques années, et je suis toujours aussi choqué de constater que de telles pratiques ont cours en France.

Mais qu’attend donc notre législateur pour intervenir… Suis-je donc le seul à avoir l’espoir que le législateur agisse pour le bien du Peuple (c’est son rôle, et j’inclus les personnes emprisonnées dans le Peuple) sans arrière pensée électoraliste mais seulement avec l’idée de faire ce qui est nécessaire au Bien commun?….

85. Le lundi 23 novembre 2009 à 22:10 par tom

même si je partage souvent vos analyses malgré ma condition si terrible d’être de l”autre côté de la barrière” (à savoir substitut du procureur), je voudrais toutefois ajouter qq chose non pas par corporatisme mal placé qui justifierait l’injustifiable issus de la politique de l’immédiateté, du chiffre et ses statistiques à présenter….toutefois je me permettrai d’ajouter (même si mon expérience est certainement moindre que la votre en ancienneté - n’y voyez là aucune perfidie sur votre âge-) qu’il existe certains substituts qui laissent leur porte ouverte aux avocats lorsqu’il déferrent à l’issue de la garde à vue….pour autant je n’ai quasiment jamais vu un avocat venir assister son “client” (serait ce la commission d’office qui limiterait les ardeurs?) à ce moment là. Peut être que les pratiques sont tellement installées qu’ils n’y pensent même plus, peut être qu’un barreau provincial est trop limité en nombre pour ce faire,…je ne sais pas….je ne vais tout de même pas faire une annonce pour qu’ils se déplacent… si certains de mes collègues ne sont sans doute pas assez attachés aux libertés individuelles envers lesquelles tout magistrat y compris (et surtout) du Parquet devrait être d’une vigilance à toute épreuve, il n’en demeurent pas moins que j’invite vos confrères à être davantage présents pour cela…combien de fois le droit à l’intervention de l’avocat dès le début de la garde à vue, n’est pas mis en oeuvre aussi parce que l’avocat ne daigne pas se déplacer et remet sa “visite” à plus tard pour des raisons diverses et variées

Eolas:
À Paris et dans les tribunaux périphériques (Bobigny, Créteil, Évry, Nanterre), comme on le voit dans ces images, ce n’est qu’en dernier qu’on propose un avocat, une fois les déclarations reçues et le tribunal saisi. Ce n’est qu’à ce moment là qu’on est saisi du dossier. Comme quoi, sans aller jusqu’à déranger le parlement avec des choses aussi saugrenues que les droits de l’homme, un simple changement de pratique pourrait apporter beaucoup. J’approuve votre pratique qui est aussi celle de vos collègues. N’oubliez pas de l’amener avec vous quand vous serez nommé procureur de la République de Paris.

86. Le lundi 23 novembre 2009 à 22:55 par Nichevo

Ah que cette garde à vue vous perturbe et vous fascine …

Eolas:
Techniquement, elle perturbe plutôt mes clients. Quant à me fasciner, elle me fascine autant que ce sac poubelle devant chez moi que les éboueurs tardent à ôter. Je ne vois qu’elle, mais quand elle sera partie, tout le monde se demandera pourquoi ça a pris autant de temps.

Elle fait l’objet d’au moins une réforme tous les deux ans, dès qu’un puissant, un avocat, un journaliste est attrapé et traité comme un membre ordinaire du petit peuple…

Eolas:
La dernière loi qui y a touché est la loi Perben II du 9 mars 2004, il y a plus de 5 ans. Et croyez-moi, elle n’a pas été faite pour les puissants, les journalistes et surtout pas pour les avocats.

Allez, admettons un instant que grâce à ces “personnalités” , les petits délinquants ont eu droit à un plat chaud et à une couverture.

Eolas:
Vivement qu’ils aient droit à leurs lunettes, leur montre et leur ceinture.

Quelle victoire pour le droit mais las… l’administration par manque de crédits, ou par intervention divine d’une LOLF, a interdit aux menus de varier tandis que les couvertures crasses ne résistaient aux mauvais traitements de ces pauvres erres.
Pas de budget non plus pour changer les matelas dont certains GAV trouvaient le moyen d’en bouffer le contenu pour ne pas avoir à répondre à “la question” de la grande identité, posée par le méchant OPJ.

Eolas:
L’homme est un animal qui ne supporte que très mal la captivité.

“Heu … je ne dirais rien; c’est mon avocat qui me l’a dit “.
“Sauf qu’on a des élements…”
“Heu ; je ne veux plus rien dire …
Bien défendu notre ami. Ah si l’avocat pouvait être là…

Eolas:
Pas défendu, la loi y veille. Et si vous avez des éléments, il a bien le droit d’attendre d’en prendre connaissance avec son avocat avant de faire des déclarations. Et s’il n’a pas envie d’avouer, qu’est-ce que ça peut vous faire, franchement ? C’est pas comme à la télé, il n’y a pas le ralenti avec la belle musique pendant que le coupable penaud s’en va menotté ? 

Il pourrait faire part de ses belles idées pour réformer la procèdure pénale, et en profiter aussi parler de ses honoraires. Il se ferait plein d’amis OPJ et ils discuteraient ensemble de l’affaire, entre midi et deux, au restau du coin (ou chez Maxim’s), tandis que leur client terminerait son “poulet basquaise” avec ses doigts. ( Certains ont voulu se blesser avec les couverts en plastique; juste pour emm…. l’opj).

Eolas:
Certains… Donc tous mangent avec les doigts. J’adore cette façon d’invoquer l’exception pour priver la règle de tout effet. Certains tentent de se suicider. Donc tous ont droit à la fouille intégrale et au retrait des objets personnels. Tout le monde suspect. Humiliation générale pour éviter que l’OPJ n’ait des troubles de la digestion. Sauf qu’en effet ,de temps en temps, ça tombe sur un de Filippis. Bien fait.

On jouerait au ministère public entre la poire et le dessert et on conviendrait d’un “accord”, comme aux states. Les plus riches seraient encore les meilleurs…

Eolas:
On disait ça pour la CRPC. Voyez le résultat. C’est Damien et son permis à zéro point, et Ginette qui prend le volant pompette. Justice de classe?

Eh bien, c’en est trop. Cette garde à vue qui vous obnubile … je vous la laisse. Elle me reste sur l’estomac.

Eolas:
Merci, mais les encombrants, c’est à la déchetterie.

Je la laisse tout d’abord à ceux qui ont tant vociferé pour qu’elle soit systèmatiquement prise dès qu’une personne était mise en cause “Pour le respect de ses droits”, diront ils la bouche en coeur.

Ne riez pas cher Maitre, vous en êtes…

Eolas:
Absolument. Merci de me donner l’occasion de dénoncer une autre formidable hypocrisie. La GAV est créatrice de droits, dixit la cour de cassation. Dès lors ,recevoir une personne pour l’interroger alors qu’elle est suspectée suppose qu’elle puisse exercer ces droits. Lui refuser l’accès à un médecin et à un avocat alors qu’on essaie de la faire parler est une atteinte à ses droits. Rien, vous m’entendez RIEN dans la loi ne dit que la garde à vue suppose nécessairement fouille à nue, menottage et placement en cellule. Une GAV peut parfaitement durer deux heures et se dérouler intégralement dans le bureau de l’OPJ, sans que la personne interrogée ne soit fouillée ou menottée. C’est le cadeau bonus des policiers, au nom de la loi de l’emmerdement minimum (pour eux, qui l’emmerdement maximum des autres, mais c’est eux qui tiennent la matraque, sur ce coup là) et bien sûr pour attendrir la viande. C’est un scandale sans nom que les policiers aient réussi à faire du placement en GAV une menace : “parle ou je te place en garde à vue”. Hallucinant : “parle où je te permets d’exercer les droits de la défense”. 

Je suis en guerre contre cette pratique, et j’en suis fier.

C’est un peu grâce à vous si nous avons du prendre plus de gardes à vue.

Eolas:
Ben voyons, les GAVs honteuses, c’est la faute des avocats. Et la grippe A, c’est la faute des médecins, pour faire du chiffre et aller manger chez Maxim’s avec leur avocat. La politique du chiffre, c’est pas nous, voyez Place Beauvau.


Parallèlement, tout se compliquait pour le petit OPJ qui n’avait toujours que deux mains et qui, du fait de ces réformes, en arrivait à jouer du clavier comme un Jean MIchel Jarre débridé au milieu d’un feu d’artifice procédural !

Songez qu’il fallait notifier la garde à vue de suite; tant pis si elle commençait à six heures trente, par un beau matin dans une cité, au milieu des cris, avec un molosse qui vous taquinait la jambe et une mégère qui vous mettait des coups de sein en simulant un malaise toutes les minutes…

Eolas:
Mon dieu. Vivement qu’un ingénieur invente les documents prérédigés sur traitement de texte ou qu’un geek mette en ligne des formulaires de notification des droits en plusieurs langues.

Une fois de plus l’avocat n’en manquait pas une, et il aurait eu tort de s’en priver. C’était du velours.
“Ah mais la simultanéité de l’acte veut que vous puissiez acter de suite, faire l’appel magistrat de suite, aviser le médecin , de suite et l’avocat de monsieur ou un autre commis d’office si ce dernier ne souhaite par arriver à l’heure des croissants”.
“Cet étranger en situation irrégulière et accessoirement vendeur de sommeil , n’a pas eu lecture de ses droits dans l’heure, en mandarin? Mais savez vous que vous risquez une plainte pour détention arbitraire mon jeune ami?”

Eolas:
Vous avez trois heures sauf circonstances insurmontables, la nécessité d’un interprète en étant une. Si vous croyez que devant les tribuanux, les procédures tombent comme à Gravelotte, allez assister à des audiences.

La hiérarchie désirait elle aussi que tout le monde soit placé en garde à vue, sinon procèdure administrative pour l’OPJ .
Tout allait donc pour le mieux …

Bref, le lecteur constatera que e motiver un OPJ à notre époque devient une véritable gageure.
Cette énième réforme ne va pas arranger les choses.

Eolas:
Vous avez raison. Qu’est ce que les droits de l’homme et de la défense, face à la motivation des OPJ ?

Les avocats ont mis un pied dans l’entrebâillement de la GAV, pour le respect des droits du mis en cause , bien entendu…

Eolas:
C’est la convention européenne des droits de l’homme, rédigée après quelques années pendant lesquelles plusieurs polices n’ont pas eu de pieds d’avocats pour gêner leur travail, qui l’exige. 

Qu’importe si cet avocat , appelé dans les temps , ne veut pas se déplacer car je cite “Je n’ai pas été payé par mon client”; qu’importe si un petit nombre d’entre eux , s’arrangeront avec la famille ou les proches pour demander d’évacuer le peu de preuves que les enquêteurs espéraient encore.

Eolas:
Là encore, l’exception (un petit nombre d’avocats malhonnêtes) est invoqué pour devenir la règle (plus d’avocats en garde à vue, hop !). Ce que j’appelle la logique policière. 

Les aveux du mis en cause?
Mais vous n’y pensez pas ! Tout cela est extorqué sous la menace psychologique d’avoir à passer une nouvelle nuit dans les locaux de police.
“Bon ça c’est fait …”
“Il me reste la victime à retourner et les témoins à discréditer”.

Eolas:
Comme dans l’affaire Richard Roman ?

A mon avis ce seront les prochaines cibles.

J’exagère vraiment?

La garde à vue est condamnée à disparaitre dans un énième fatras qui perturbera un peu plus l’institution judiciaire et augmentera la probabilité pour mes pauvres confrères OPJ, d’aller devant les boeufs, la CNDS, où quelques hautes autorités que l’on voudra bien constituer pour la forme, avec de solides budgets, pour dire au conseil de l’europe qu’on a pas les budgets pour la justice et la police mais qu’on a des idées…

L’avocat va s’immiscer dans la procédure, rendant toute perquisition plus difficile; les déperditions de preuves vont s’accelerer et les mis en cause vont se taire. Fini le violeur qui, confronté à sa courageuse victime, lui dira les yeux dans les yeux qu’il regrette ce qui s’est passé.
Pas vu pas pris et tant pis si le mis en cause a laisse trainer son ADN un peu partout , son avocat lui conseillera de déposer une plainte pour le vol de sa brosse à dent ou de son peigne…

Eolas:
En effet, en Espagne et en Allemagne où ce droit à l’assistance d’un avocat tout au long de la GAV existe depuis 1978 et 1948 respectivement, la police est impuissante, les délinquants rois et les prisons vides. Derrick, c’est de la science fiction.

Allez, cher Maitre, vous seul savez combien je respecte le droit, votre profession , et la procédure pénale mais là, j’en ai tout simplement assez vu et assez entendu, que ce soit en audio , en vidéo, en mondio- vision, ou par satellite.

J’arrête le judiciaire et je passe à autre chose…

L’addition et pas de café SVP !

Eolas:
Laissez, c’est pour moi, c’est pas dans vos moyens, chez Maxim’s.

87. Le lundi 23 novembre 2009 à 23:01 par Dr Tavuk

à DT

Merci pour les compléments de réponses. Bon, leçon bien enregistrée en espérant, comme je le disais, ne jamais avoir à en faire usage. Ma chance (statistiquement), c’est que je suis, somme toute, très peu en France et beaucoup ailleurs… D’un autre coté, les ailleurs où je suis ne sont pas beaucoup mieux de ce point de vue là je pense !

88. Le mardi 24 novembre 2009 à 00:49 par Jul Earthwalker

Merci maître pour cette analyse !

Et dommage que le commentaire 88 tombe aussi bas dans la mauvaise foi. Ce doit être un OPJ français pour qu’un renouveau de la GAV lui fasse peur à ce point…

89. Le mardi 24 novembre 2009 à 01:03 par jf mékeskidi

Qu’est-ce qui permet de plaider des “remords sincères”? Est-ce un énoncé de plaidoirie commun?
Si ce qui ne le permet pas est la négation des faits comme dans l’exemple de l’article, se taire obstinément (voir commentaire 81) ne semble pas le permettre non plus. Doit-on exprimer ses regrets avant même de connaitre les éléments à charge (ou avoir parlé à son avocat) pour que la démarche soit considérée “sincère”?

Ceci dit, vous m’avez convaincue de l’utilité juridique et morale d’une remise en question de la garde à vue française.

Eolas:
C’est très difficile de faire parler un silence. On peut lui faire dire tout (c’est le rôle du procureur) et son contraire (là, c’est le rôle de l’avocat).

90. Le mardi 24 novembre 2009 à 01:59 par zadvocate

@18:

Le seul souci avec le fait de garder le silence, c’est de pouvoir le faire lorsque vous restez entre les mains des services de police pendant 24, 48, 72 ou 96 heures.

Croyez bien qu’un gardé à vue qui à chaque question qu’on lui pose répond systématiquement qu’il ne répondra pas, ca peut enerver le policier qu’il a en face de lui. Il faut donc avoir du cran pour le faire et ceux des gardés à vue qui souffrent d’une personnalité peu affirmée ne pourront tenir le coup

Il faut avoir déjà visité un commissariat et une cellule de gav pour comprendre que même face à des policiers de bonne composition (ils existent ne me faîtes pas dire ce que je n’ai pas dit), une gav c’est une mesure de contrainte physique et morale.

Alors quand en plus, vous tombez sur des policiers qui veulent absolument des réponses à leurs questions (légitime attente me semble t’il) et qui mettent une pression réelle (et je ne parle pas de violence physique) sur le gardé à vue ….

@20:

La réalité c’est que dans la situation actuelle, on a plus l’impression de servir de caution au système que d’être vraiment utile en tant qu’avocat au stade de la GAV. Informer les gens sur ce qu’est la GAV, combien de temps ca peut durer, les issues possibles, c’est bien. Mais quand vous rencontrez des gens connaissant déjà la garde à vue, votre intervention devient très limitée et en aucun cas vous ne faîtes de l’assistance ou de la défense sauf à conseiller au client de rester silencieux.

91. Le mardi 24 novembre 2009 à 02:01 par Bob

Je suis un peu gêné par cette polémique (pas votre article, juste la polémique dans son ensemble).

Je vais juste me contenter d’un seul commentaire.

Je ne suis pas d’accord avec le fait qu’on doive à tout prix se taire en GAV. Dès lors qu’on est innocent ou qu’on est prêt à reconnaître la part de fait qu’on a commis exactement, il faut le dire et ne signer que ce qu’on a dit et rien d’autre.

De part mon travail d’éducateur justice, j’ai vu bien des adolescents se sortir de monceaux d’ennuis parce qu’ils avaient pu produire une version claire et cohérente, de la première heure de GAV aux dernières déclaration du TPE. Tandis que d’autres, silencieux en GAV et avec des défenses foireuses, ne faisaient que s’enfoncer.

Faudrait quand même sortir de l’idée du flic toujours manipulateur et hostile à l’honnête citoyen et de la justice qui se trompe forcément. A un moment donné, faire confiance aux institutions (qu’on soit coupable ou non) est une des meilleure chance qu’on ait de s’en sortir avec le moins de dommages possibles.

Eolas:
Voilà précisément ce contre quoi nous luttons obstinément. L’idée de “les innocents parlent, les coupables se taisent”. Richard Roman a parlé. Patrick Dils a parlé. Roland Agret a parlé. Tous trois étaient innocents. Tous trois ont été condamnés. Il faudra faire entrer dans le crâne des magistrats que se taire est une réaction rationnelle et un droit fondamental, qui ne doit pas être retenu à charge. Surtout s’agissant d’un mineur. C’est une évidence aux États-Unis. Vivement qu’on entre au XXe siècle. Oui, j’écrix bien 20e siècle. Le 21e, on en est loin.

92. Le mardi 24 novembre 2009 à 02:17 par zadvocate

@91

Personne n’a dit qu’un gardé à vue devait absolument se taire. Ce qui est souligné c’est qu’il serait peut-être bon de laisser l’avocat accéder au dossier dès le début de la GAV. Il pourrait alors expliquer en détail ce qu’on lui reproche et permettre ainsi au client de prendre position en toute connaissance de cause.

93. Le mardi 24 novembre 2009 à 04:35 par rusen

— “Par exemple, la Turquie a accordé le droit de vote aux femmes 15 ans avant la France. Croyante, non pratiquante, cher Jeannot…”

Exact…!

Sauf qu’il n’y avait qu’un seul parti… . Certes elles pouvaient voter avant les Françaises mais elle ne risquaient pas de se tromper..!! Les Kémalettes ne pouvaient voter que pour Kemal (Ataturk bien sur)

94. Le mardi 24 novembre 2009 à 08:29 par Passant

N’oublions jamais de louer, de Paris à Tarnac, l’excellence du travail et du dévouement de notre Police et notre Justice, sans laquelle, à l’évidence, nous sombrerions vers cet innommable chaos que serait une société modernisée, démocratique, et ouverte sur le monde.

Soutiers du système, à défaut de l’expression de mon opinion, agréez mes plus respectueuses bien que contraintes salutations.

95. Le mardi 24 novembre 2009 à 09:35 par mad

Il y a à peine une heure, sur France Info, un ministre en mission.
” … On ne veux pas de l’avocat dans la garde à vue parce qu’on a besoin de confidentialité, d’efficacité, un avocat pourrait informer des complices”.
Paf on insulte tranquillement 45 000 personnes, sans présenter d’exemples précis, juste “Une avocate à été mise en examen pour avoir révélé à son client les motifs de l’investigation contre lui”, probablement une mauvaise formulation, puisque la police aurait du informer le client de ces motifs, à peine de nullités de la procédure ..

5 minutes plus tard le même ministre repousse hautement de son bâton de pèlerin l’idée d’enregistrer toutes les GAV, pourquoi ? parce que ce serait insulter la probité des policiers.

Cher hôte, pensez vous que la conférence des bâtonniers de France pourrais se sentir suffisamment insulté pour lancer une procédure pour insulte ? diffamation ? …

Je cherche le lien, que vous puissiez en profiter aussi.

Eolas:
C’est de la diffamation, pas de l’injure. 

Ça fait longtemps qu’on sait que le salut viendra des juges de Strasbourg, et non de ce gouvernement.

96. Le mardi 24 novembre 2009 à 10:44 par clerouque

155 euros le kilos, attention au commentaire sur l’enrichissement des avocats avec les GAV…
Trèves de bêtises… J’adore ce billet et je m’en vais pleurer sur la DDHC, la DUDH et la CEDH. Votez mes frères et votez bien

97. Le mardi 24 novembre 2009 à 11:07 par chris

Oyez, braves gens, c’est sur France Info.com à la une : un Monsieur demande 1 millon d’euros pour une garde à vue très particulière. De l’eau au moulin de ce billet…

98. Le mardi 24 novembre 2009 à 11:10 par chris

correction : un million…

99. Le mardi 24 novembre 2009 à 11:29 par Braillard

Juste pour ceux qui sortent le “mais alors pourquoi diable la France n’a t’elle jamais été condamnée?”.

J’ai un prof dont la passion est de faire des plans sur la comète, aidé en cela par quelques abominables droits de l’hommiste agrégés ès droit (genre Sudre, un sale gauchiste) et qui nous serinait, depuis trois ans, sur la probable condamnation de la France au sujet des prérogatives du procureur de la république concernant la privation de liberté (article 5 de la Convention, je crois, mais c’est de mémoire et les partiels n’étant que dans deux mois, je n’ai pas encore révisé), il me semble que lui pensait que ce serait concernant le défaut d’impartialité. Vous auriez sûrement ricané, arguant que dans ce cas, la France l’aurait déjà été. Elle l’est, enfin il y a un arrêt qui doit tomber pour le confirmer ou l’infirmer, mais en tous cas il s’agit d’un sérieux avertissement. Il s’agit de l’arrêt Medvedyev et autres c France, de juin (ou juillet) 2008, et j’ai la flemme d’aller le chercher ^^. Notons qu’il s’agit de défaut d’indépendance, et non d’impartialité.

Ne perdez jamais de vue qu’il y a peu de requérants qui se sentent l’envie de monter jusqu’à Strasbourg, parce que c’est très long, et donc cher, que de plus ils ignorent généralement quel bénéfice ils pourraient en retirer, que les Français ont généralement une répugnance instinctive à tout ce qui est procédure, que les indemnités prononcées par la Cour sont généralement assez faibles, qu’il y a en France (dixit mes profs, donc ça vaut ce que ça vaut, ce sont des profs qui, par définition, pensent que les avocats sont des crétins) peu d’avocats réellement spécialistes du droit européen, et des questions relatives aux droits fondamentaux d’une façon générale…il y a d’autres arguments, encore, mais la CEDH n’est pas un TGI. Cela étant quand il existe des condamnations convergentes de plusieurs pays sur tel ou tel aspect, et que notre droit est similaire aux droits des pays condamnés, on ne bénéficie pas d’un régime d’exception.

Pour revenir à cette histoire de procureur, la Suisse avait été condamnée en 1990, ça a mis trèèèèèèès longtemps à arriver à la France, c’est arrivé quand même.

100. Le mardi 24 novembre 2009 à 12:42 par jalmad

je souscris à tout ce qui est dit dans votre billet, et j’entends bien que ce n’est pas parce que la CEDH n’a jamais été saisie sur ce point par un justiciable français que ça veut dire qu’il n’y a pas matière à la saisir. Cependant, sans aller jusqu’à épuiser les voies de recours pour pouvoir la saisir, je n’ai jamais vu soutenir devant moi ni devant aucun collègue, cette argumentation. Pourtant, il me semble que le juge national est le premier à pouvoir appliquer l’article 6-1 de la convention…..

sinon, juste une remarque : je sais bien que vous ne généralisez pas et avez une estime plutôt haute des magistrats que nous sommes, mais je ne peux m’empêcher de tiquer lorsque je lis : “Le système actuel est tout entier conçu pour écarter la défense et l’empêcher de faire son travail, et c’est tellement entré dans nos mœurs que ça ne nous choque même plus, à commencer par les magistrats, pourtant gardiens de la liberté individuelle.” et, à l’appui de cette allégation, d’y aller de votre exemple M6.
Vous savez pertinemment quelle valeur probante revêt un PV. Vous avez d’ailleurs souligné que l’avocat lui-même, sauf à disposer de la vidée avant l’audience, n’aurait pu utilement soulever une nullité; alors, que vous vouliez-vous que les magistrats fassent s’agissant de cette procédure en particulier ? pensez-vous que les policiers, lors de leur compte rendu téléphonique au Parquet soulignent qu’ils ont omis tel droit, etc

en fait, je crois que nous nous sommes engagés depuis trop longtemps dans un processus qui nous place dans une impossibilité de fait de contrôler la régularité des procédures (TTR, habitude, par confort allié à une surcharge de travail, de faire de la prolongation de la GAV par fax le principe). En cela, nous, magistrats, nous avons une responsabilité, c’est certain.

Egalement lorsque nous “cédons” en termes de rapports de force (cf : un Proc qui ne veut pas trop s’engager sur un dossier de violences policières, sous peine de voir certains OPJ, par représailles, lui saloper ou à tout le moins, retarder d’autres procédures….des juges du siège, qui, par souci de ne pas encombrer encore plus les tuyaux, ne vont pas au supplément d’info et condamnent sur la foi de PV qu’ils estiment peut-être un peu douteux….etc…). Tout cela, oui. Mais les avocats aussi portent une part de cette responsabilité, et je ne dis pas qu’eux ne subissent pas certaines contraintes susceptibles de l’expliquer. Mais, lorsque par exemple on me produit des attestations en correctionnelle pour rapporter la preuve contraire de constatations d’OPJ, lorsque je vois un avocat ne pas soulever une nullité pourtant grosse comme le bras mais que je ne peux soulever d’office….je me dis parfois que le combat pour les droits de la défense, il va falloir le faire sans eux (et juste après, je me dis qu’il ne faut pas généraliser de la sorte….).

et aussi, lorsque je lis dans votre commentaire sous 91 : il faudra faire entrer dans le crâne des magistrats que se taire est une réaction rationnelle et un droit fondamental, qui ne doit pas être retenu à charge. Surtout s’agissant d’un mineur.
euh…. moi ça va, merci….je le sais, je le pense depuis toujours, et il me semble que beaucoup de mes collègues (du siège comme du parquet) le pensent également. Malheureusement pas tous, certes ; et malheureusement pas tous les avocats non plus, qui, lorsqu’ils sont du côté de la partie civile, n’hésitent pas à reprendre aussi les arguments habituels du “voyez le mépris pour sa victime, des aveux du bout du lèvre, à la 28 ème heure de GAV….” etc….Bon certes, dans une logique de défense d’un client, ça me choque moins que dans la bouche d’un procureur qui est sensé représenter les intérêts de la société, en ce inclus DONC la volonté de promouvoir une procédure la plus respectueuse des droits de la défense.

Et enfin, j’ai été longue, mais j’indique que l’impulsion nécessaire à un changement de regard sur la procédure pénale ne pourra venir selon moi que de parquetiers courageux, et de formations plus poussées des OPJ ; je mesure chaque jour, en qualité de juge d’instruction, que les OPJ les plus respectueux des droits de la défense sont tout simplement ceux qui sont les plus calés en termes de procédure pénale, qui en comprennent les subtilités, qui s’y intéressent, qui ne la considèrent pas comme une “empêcheuse de tourner en rond” ou une mesure de défiance à leur endroit, et qui ont compris par conséquent que la qualité de leur enquête sera d’autant meilleure qu’aucune suspicion quant au respect des droits de chacun ne pourra être émise . En cela, je me réjouis des commentaires de Sir yes sir et de Tom ; en cela aussi, je me réjouis des contributions de certains OPJ qui trainent sur ce site. Mais je crains malheureusement que le système actuel n’est pas fait pour promouvoir ce type de parquetiers ou ce type de formations.

101. Le mardi 24 novembre 2009 à 13:12 par Patrick Handicap expatrié

Pour avoir appris plus d’un mois après mon hospitalisation en soins intensifs sous assistance respiratoire à la suite d’une sévère crise d’hypoglycémie sur la voie publique, que j’avais été placé simultanément à cette hospitalisation en garde à vue par les 4 policiers parisiens qui ont mis près d’une heure à me faire transporter par les pompiers appelés bien tardivement comme l’a reconnu ensuite le tribunal correctionnel qui m’a relaxé de leurs poursuites, j’ai quelques doutes sur la capacité des policiers à reconnaître les personnes en état de faiblesse et handicapées qui ne peuvent subir quelque contrainte sans risque pour leur vie. Et comme la jurisprudence semble toujours ne pas accabler les policiers qui ont failli, les garanties de surveillance et le formalisme, bien qu’imparfaits me semblent une garantie indispensable qui protège quelque peu la vie de tout un chacun pouvant se retrouver en garde à vue, pour un oui ou pour un non. Je suis transplanté hépatique pour CHC multinodal, insuffisant rénal chronique, cardiaque, diabétique insulino-dépendant et, depuis peu, trachéotomisé ayant subi l’ablation totale du larynx. J’ajoute que ces policiers, sans doute mécontents du jugement, m’ont poursuivi au civil où ils ont été condamnés à me verser 1500 euros, ont perdu en appel et n’ont pas été admis en cassation. Ayant fait ma crise cardiaque peu après l’audience correctionnelle, j’ai décidé de m’expatrier dans un pays européen plus respectueux des malades et handicapés et où la santé est de surcroît gratuite.
Récemment, lors d’un passage en France, j’ai subi des violences de policiers qui m’ont sorti de mon véhicule alors que je ne pouvais subir un contrôle d’alcoolémie car je respire par un trou à la base du cou. Interrogés sur la réglementation qui m’exonère explicitement de contrôle, un texte réglementaire de mars 1972 non abrogé et donc toujours valide, contrairement aux dispositions du code de la route publiées qui, elles, prévoient un dispositif discriminatoire à raison de mon handicap sans détailler les précautions prises, le ministère de l’intérieur, l’IGPN, l’IGS et la Présidence de la République n’ont toujours pas répondu à mes 20 relances.
Alors oui, je crains pour ma vie lorsque je croise le chemin de policiers quand je me rends en France.

102. Le mardi 24 novembre 2009 à 13:14 par Charly

En tant qu’admirateur de beaucoup d’aspects des USA et de leur droit (un peu comme Maitre Eolas), je ne peux penser qu’aux règles de Miranda, à 1966 et à l’assistance de l’avocat

103. Le mardi 24 novembre 2009 à 13:16 par Véronique

Juste une question.

Un OPJ qui décide d’une garde à vue est-il tenu de motiver sa décision ?

104. Le mardi 24 novembre 2009 à 13:47 par @chris 97

voici le lien dont il est question

105. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:10 par Clems

“Nos clients veulent oublier leurs affaires dès que la peine est purgée (et des fois même avant). Les embarquer dans 7 ans de procédure ne les intéresse pas. La plupart du temps, ils ne font même pas appel, ce qui empêche l’épuisement des voies de recours internes et fait obstacle à la saisine de la cour européenne. Ça arrivera un jour.”

Prenez en deux, trois et faites le gratuitement. C’est un investissement pour plus tard. Ils diront plus facilement oui.

106. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:13 par Petit pois sournois

@ Eolas sous 75

Qualifier le CJN d’antédiluvien, c’est le méconnaître (et avoir bien oublié ce qu’était auparavant la gestion, technique comme juridique, des casiers, c’est-à-dire il y a moins de trente ans) ! Je vous invite vivement, si votre métier vous amène un jour à une audience à Nantes, à demander à le visiter. Cela ne sera sûrement pas refusé à un personnage aussi éminent (compter une à deux heures, suivant votre intérêt et les questions que vous y poserez), et vous viendrez ensuite nous dire ce qui vous y paraîtrait antédiluvien.

107. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:18 par Dahlia

Maître, pourriez-vous, s’il-vous-plaît, remettre le lien vers une vidéo d’un prof de droit américain expliquant (en anglais) par A + B pourquoi il ne faut pas parler en garde-à-vue ?
J’avais adoré cette vidéo qui, il faut l’admettre, était franchement convaincante !
Merci !

108. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:23 par tschok

@ Jalmad, com 100,

Même diagnostic que vous:

“en fait, je crois que nous nous sommes engagés depuis trop longtemps dans un processus qui nous place dans une impossibilité de fait de contrôler la régularité des procédures (TTR, habitude, par confort allié à une surcharge de travail, de faire de la prolongation de la GAV par fax le principe)”.

L’enjeu que pose cette question n’est pas secondaire: le contrôle de la régularité fait partie du contrôle juridictionnel visé à l’article 66 de la constitution.

Vous êtes donc dans la position d’un dépositaire d’un service public qui est en train de nous dire qu’il n’est plus en mesure de remplir la mission qui lui a été confiée par la constitution de façon satisfaisante.

Dès lors, s’interroger sur le “processus” que vous évoquez est une priorité. Ce n’est pas une question secondaire, alternative ou autre, non, c’est la priorité.

Vous semblez fonder des espoirs sur la mobilisation de ressources en interne et en particulier des parquetiers “nouvelle vague” avec un profil psychologique axé sur une notion de courage et avec un sens moral qui inclut les droits de la défense au nom d’une justice républicaine. Vous visez également les OPJ dont vous notez qu’il faudrait leur offrir une formation plus poussée.

Et vous semblez par ailleurs assez lucide sur les facultés d’évolution du système tel qu’il est actuellement.

Tout cela, je suis d’accord.

Mais à mon avis vous ne pourrez pas vous dispenser de mobiliser d’autres types de ressources, car il me semble que le processus auquel vous êtes confrontés est trop complexe pour être combattu à partir d’une approche obsidionale.

Il va falloir sortir de la citadelle assiégée.

Pour ma part je pense que c’est vital. Tous ceux qui sont dans le même genre de situations que vous parviennent à cette conclusion.

J’ai à l’esprit des propos que j’ai entendus hier à la radio: un interviouve de Charles Henri Filippi, banquier de son état, auteur de l’Argent sans Maître, à ne pas confondre avec un journaliste devenu célèbre à son corps défendant (http://www.maitre-eolas.fr/post/200…).

Interrogé à propos de la crise des subprimes, sa propagation à l’ensemble du système financier et l’incapacité des banquiers, des autorités de contrôle et de tous les agents économiques impliqués à identifier les risques et prévenir la crise avant son déclenchement, il a répondu en substance ceci: quand on est dans un système, on a énormément de mal à évaluer les risques systémiques.

Si je rapproche cette considération de votre propre position, je pourrais en déduire que vous vivez une sorte de crise des subprimes, qu’elle s’est produite, que vous êtes dans la queue de la comète, que le sinistre s’est réalisé et consolidé et que vous aussi pourriez tenir exactement le même langage.

Pourtant, et c’est là l’objet de mon interrogation, vous continuez à tenir un discours de la maîtrise en interne, alors que vous venez vous mêmes de constater que le “processus” que vous évoquez conduit à une situation d’échec.

C’est parce qu’on est nul, nous les avocats?

Ou est ce plus globalement un problème complexe de manque de disponibilité de matière grise et de capacités d’organisation?

Ou plus simplement un problème culturel?

109. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:40 par The Lawyer

Une précision sur le droit au silence consacré par la Cour européenne. Dans l’arrêt MURRAY/GB, elle l’affirme tout en retenant que l’exercice de ce droit ne peut être sans conséquence.
Même pour la Cour, un gardé à vue qui se tait peut devenir plus suspect encore.

110. Le mardi 24 novembre 2009 à 14:48 par sevand

”Eolas:
On nous a sorti cet argument en 1993, lors de l’accès à la garde à vue à la 21e heure. On ne devait pas y arriver. On y est arrivé.
On nous l’a ressorti en 2000 avec la première heure. On ne serait pas disponible. On l’a été.
La même année, on nous a dit qu’on ne pourrait pas assurer la représentation au prétoire en prison. On l’a fait.
Donnez-nous des droits de la défense et laissez-nous nous démerder avec. On en fera bon usage, c’est promis.”

Ce n’est pas l’avis des avocats provinciaux que je connais…

111. Le mardi 24 novembre 2009 à 15:05 par Wolfram

Il est clairement dit dans les textes cités que tout “interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat” porte atteinte irrémédiable aux droits de la défense, donc de l’accusé.
Ne m’en voudrez pas, cher Maître, mais je crois bien que même ma faculté de théologique (protestante) ne m’a pas appris à tordre des textes tellement contre leur sens - et pourtant, les théologiens sont maîtres en cette matière, surtout s’ils se disent “libéraux” ! - que ce qu’en fait le porte-parole de la Chancellerie. Il est vraiment déplorable qu’on ne puisse pas demander à la Cour Européenne des Droits de l’Homme d’évaluer une norme nationale, sans qu’il y ait un homme ou une femme ayant subi des violations de ses droits mais disposant des moyens de porter son cas jusqu’à Strasbourg.

112. Le mardi 24 novembre 2009 à 15:11 par parquezaco

A petit pois sournois en 105 réfutant le qualificatif d’antédiluvien employé par Eolas à propos du Casier judiciaire.

Effectivement,

depuis quelques mois les Parquets obtiennent les casiers
au bout d’un quart d’heure, ce qui compte tenu de la masse des demandes est remarquable.

Le CJN (casier judiciaire national), largement automatisé et sûr, est donc tout sauf antédiluvien.

Mais il est toujours impossible d’obtenir un bulletin un dimanche ou jour férié, ce qui est difficilement acceptable quand l’alternative est de prolonger la GAV.

salutations

113. Le mardi 24 novembre 2009 à 15:19 par Kilohn

Info d’aujourd’hui : “La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), instance administrative indépendante, déclare que sa suppression au profit du nouveau Défenseur des droits présente de nombreux risques.”

Ca ne va pas en s’améliorant, dirait-on. Cher Maître Eolas, vous ferez-nous le plaisir de nous expliquer plus avant les accomplissements de cette Commission, et les arguments de ceux qui croient que la faire disparaître ne serait pas un pas de plus vers une impunité policière?

114. Le mardi 24 novembre 2009 à 15:36 par jalmad

@Tschok 107 : je suis complètement d’accord avec vous. Je ne pense pas que les seules “ressources” soient à trouver en interne ; et j’ai bien conscience que l’autocritique, quand on est au coeur de la machine, a ses limites…. à vrai dire, je parlais d‘“impulsion” de la part des parquetiers et des OPJ car je pense (peut-être à tort)que le système est en l’état surtout verrouillé à ce niveau là. Les autres acteurs du processus, dont le rôle n’est certes pas négligeable, auront beau faire ce qu’ils veulent, ils se heurteront fatalement à un moment ou un autre à la pratique policière et à l’absence de contrôle réel des procédures par les magistrats. Et, ce qui me désespère, c’est que je ne vois pas de changement s’amorcer dans sa globalité sur ces points, à l’initiative de leur hiérarchie respective. C’est pourquoi (mais j’admets que c’est naïf ; sûrement aussi histoire de me remonter le moral pour “tenir” et ne pas courir filer ma démission) je dis que l’espoir repose sur les individus qui composent le “système”.

Maintenant, bien sûr que les avocats ont un rôle à jouer, et notamment en poussant la France à la roue en brandissant la CEDH. Et la société civile, etc…Et bien sûr qu’il faudrait s’organiser et mettre en commun notre matière rise. Mais cela, c’est aussi assez difficile parce que tous les acteurs judiciaires n’ont pas la même vision des choses en termes de droits de la défense ; il y a des juges plus avant gardistes que certains avocats, des parquetiers plus que certains juges, des avocats civilistes qui ne se sentent pas concernés, des magistrats qui s’en contrefoutent ou considèrent encore qu’après tout “il n’y a pas de fumée sans feu”….

115. Le mardi 24 novembre 2009 à 15:40 par nat

Je proteste également contre ce dénigrement des stagiaires, du corps desquels j’ai le malheur de faire partie.
Le FLS (Front de Libération des Stagiaires).
ps : on a beau lire depuis des années votre blog avec admiration, on n’en a pas moins sa petite fierté.

116. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:00 par Roberto

@Maitre Eolas (48)

Ce n’est malheuresement pas un arret pilote de la CEDH.

Le lien pour la garde a vue des temoins a Versailles a 1 000 000 euros .

Pour ceux qui sont interesse par la description du commissariat de Versailles par le controleur des lieux de liberte.

@maitre eolas (26) :

Ne nous prenez pas trop pour daccordahoui. Si il y a une instruction, vous pouvez presenter vos nullites dans les 6 mois de la garde a vue et en meme temps faire votre requete a la CEDH (les recours a epuiser sont seulement ceux EFFECTIFS). En cas de rejet chambre d’accusation (6 mois) et cour de cassation (6 mois) puis CEDH.

Comme vous avez deja saisi la CEDH, elle transmet votre requete a la France 6 mois plus tard et on a un arret en 2011.

Vous dites que les procedures a la Cour europeene des Droits de l’Homme durent 7 ans.

Certaines oui, mais aujourd’hui de nombreuses procedures durent 1 ou 2 ans. De nombreux examples dans les arrets de cette semaine.

Les arrets importants ont priorite a la CEDH maintenant…

N’ayez pas peur Me Eolas! en avant!

117. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:15 par busiris

Euh… Je me trompe peut-être, mais les paroles de Guillaume méritent presque un Busiris non ?

Quel est l’avis de l’Académie sur le sujet ?

118. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:16 par blabla

Maitre,

- ne pensez-vous pas qu’un avocat qui serait présent tout au long de la garde à vue en assistance de son client, pourrait servir de “caution” procédurale aux OPJ, et validerait de fait la qualité et la recevabilité de la procédure judiciaire en question ?

- seriez vous favorable (comme M.BILGER) à une simplification de la procédure judiciaire (pour les policiers, s’entend) face à la présence de l’avocat tout au long de la procédure ?

Note: “Eolas:
C’est très difficile de faire parler un silence. On peut lui faire dire tout (c’est le rôle du procureur) et son contraire (là, c’est le rôle de l’avocat).”
Elle est bien chouette celle-la.

119. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:25 par busiris

J’ai lu les commentaires et relu le billet, cela ne fait aucun doute.

MAITRE EOLAS, JE PROTESTE ENERGIQUEMENT !

Vous qui détestez l’injustice à ce point, faîtes honneur à Guillaume Didier !

Voyez donc tous les efforts qu’il a déployé pour l’obtenir ! L’Acadméie a déjà décerné des Busiris pour moins que ça !

Tout y est ! La contradiction, la mauvaise-foi, et pour un tel lèche-… a-t-on vraiment besoin de démontrer catégoriquement l’opportunité politique ?

BUSIRIS POUR DIDIER !

120. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:34 par Styves recht

ce que je trouve interessant de mon point de vue d’étudiant, c’est de constater qu’en plus d’une illégalité de la procédure de GAV, on assiste à un détournement de son rôle (Cf l’article france inter sus-twitté).
la garde à vue devient une mesure de répression, à l’usage discrétionnaire des forces de polices peut regardantes…

va falloir que je songe à me ré orienter, je m’arrangerais bien pour faire passer 48h de simili prison à moi voisine.

c’est l’application de cordier, juge et flic, sauf que là, c’est plus le flic qui use de ses pouvoirs comme d’un juge…

121. Le mardi 24 novembre 2009 à 16:53 par Pikaciette

Un point de détail dans cette discussion fort intéressante mais qui me turlupine :

”54. Le Lundi 23 novembre 2009 à 15:45 par parquezaco
(…) je dis supposé parce que les journalistes disent présumé ce qui est une aberration de plus (…)
Eolas:
(…) et nous sommes d’accord sur l’inanité du terme présumé”

D’après le Trésor de la langue française informatisé :

  • supposé : “Qui est considéré comme possible, vraisemblable” (du moins c’est le sens qui correspond le plus au contexte) ;
  • présumé : “Qui est supposé par hypothèse, par conjecture.”

En quoi l’ajout du moyen (la conjecture) fait-il peser sur cet adjectif une accusation d’inanité ? Lorsqu’on parle de présumé coupable ça me semble totalement équivalent à dire que l’on soupçonne la personne d’un délit/crime/truc pas légal (rayez les mentions inutiles). Ai-je raté une subtilité du mot ? Ou c’est son usage qui lui a donné un sens plus sombre que ne fournit pas le dictionnaire ?

Merci d’éclairer ma lanterne (même si son faisceau est bien étroit pour le coup).

122. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:13 par Teejee

“Mais enfin, monsieur le commissaire, pour quelle raison met-on, à cause de simples peccadilles, des honnêtes gens en garde à vue ?
- Pour augmenter le taux des affaires élucidées.
- Et à quoi sert d’augmenter le taux des affaires élucidées ?
- A améliorer les statistiques.
- Mais à quelle fin voulez-vous améliorer les statistiques ?
- A fin de montrer que la police fait son travail.
- Et à quoi sert de montrer que la police fait son travail ?
- A rassurer les honnêtes gens !”

123. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:25 par tschok

@ Jalmad, com 133,

Ah oui! Je comprends mieux. Effectivement, peut être que l’impulsion est à rechercher dans la mobilisation d’une “élite” en interne. Son action progressiste sera d’autant plus efficace en faveur des droits de la défense que cette élite est du côté de l’accusation. Je dis cela sans ironie (c’est d’ailleurs assez étrange de dire une chose pareille…).

Mais avouez que c’est tout de même assez délicat. Et tellement français…

Côté capacité du système à évoluer dans un temps raisonnable en fournissant un résultat mesurable, j’ai abandonné toute vision consumériste: j’ai fait mon deuil du “tout, tout de suite”. Ce sera plutôt “petits pas”.

Si j’avais conservé un tel état d’esprit, j’aurais glissé vers l’amertume et le mental n’aurait pas tenu.

J’ai désormais conscience que toute évolution s’inscrit dans un temps quasi tectonique: les évolutions se mesurent en centimètres par an. Sauf en matière d’accroissement de la répression où on bascule d’un système à un autre, plus répressif encore, très vite.

Et pour me motiver, je me dis que je travaille pour nos enfants, petits enfants et arrières petits enfants qui, avec un peu de chance, récolteront les fruits des avancées juridiques dont nous parlons.

Évidemment, ça a moins de gueule qu’une bonne vieille défense de rupture…

Le réalisme a quelque chose de fade.

Mais de temps en temps je me lâche.

124. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:31 par DMonodBroca

J’ai l’impression d’assister à des sortes de duels :
- journal d’un avocat contre justice au singulier
- avocats contre police
- CEDH contre République
- etc
Cela ne me semble pas aller vers l’apaisement et l’amélioration de la justice.
Je sais bien que la France a signé la Convention européenne des Droits de l’Homme et que cela l’oblige.
Mais elle a aussi élaboré et voté la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, partie intégrante de la Constitution si je ne me trompe.
Il ne peut pas y avoir 2 sources de droit. Cette situation a quelque chose de bancal, irrémédiablement. D’ailleurs tout ce qui est fait pour l’améliorer la détériore un peu plus.
Il faut choisir : le droit repose soit sur la volonté du peuple, soit sur la jurisprudence de la CEDH, il ne peut pas reposer sur les deux à la fois.
Aussi théorique et abstraite (et maladroitement posée) que la question paraisse elle doit être tranchée, sous peine de difficultés toujours grandissantes

125. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:38 par le telespecteteur

Question: en admettant qu’une réforme voie le jour,les barreaux sont -ils capables d’assurer la présence des avocats pendant 48 heures,voire 96 heures ou même 6 jours?
combien de véritables pénalistes parmi les 21 000 avocats parisiens (200 au grand maximum et je pense être très optimiste) et je n’ose pas parler de la province ou le barreau local se confond avec le rotary club.

126. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:42 par Axonn

@ Pikaciette

Si on était en maths, “Qui est supposé par hypothèse, par conjecture.” pourrait signifier qu’on considère le fait comme vrai par hypothèse de travail : je présume A; avec cette hypothèse, je démontre B. Je n’ai pas démontré B, j’ai démontré “si A, alors B”.

Juridiquement, le sens est différent. “présumé” signifie “juridiquement vrai, sauf à prouver le contraire”. Autrement dit, un “coupable présumé” serait quelqu’un qui sera condamné si on n’apporte pas de preuve de son innocence. Or, les journaux parlent d‘“assassin présumé” pour un individu qui au contraire, sera libéré si on n’apporte pas de preuve de sa culpabilité.

Ce n’est pas pareil, car si personne n’apporte de preuve nouvelle, un “présumé coupable” au sens strict serait condamné, alors que justement un “présumé coupable” au sens des journaux est relâché.

127. Le mardi 24 novembre 2009 à 17:50 par elhana

Ah ben non, hein, Tschok, là il faut que je vous gronde ! Si chez tout le monde vous faites des remarques pertinentes qui vont en prime dans mon sens, on va finir par se croiser souvent !

Mais entre le réel, ces petits pas, selon la comptine de la bergère : trois pas en avant, trois pas en arrière”, et le besoin urgent d’une avancée rapide, on fait quoi ? On réduit la distance à parcourir ?

J’ai du mal à admettre le décalage entre ce que j’apprends en licence de droit et l’application dans la vraie vie d’une procédure… Ca m’inquiète dans un sens : j’avais envie de devenir avocat pour défendre des principes au moins autant que des gens, et je m’aperçois que cela même est contesté, voire parfois contestable…

Pour l’histoire d’Ali, je suis partagée : ça ne devrait pas se passer comme ça et pourtant, j’avoue que j’aurais sans doute enragé si la nullité avait pu être soulevée et acceptée. Au nom d’une conviction établie sur quelques minutes de reportage. C’est toujours aussi crevant de réunir théorie et pratique, et de récupérer les morceaux après ?

128. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:02 par Fantômette

@ Jalmad et tschok,

Il y a une désarticulation des intérêts généraux et particuliers, dans un procès pénal, qui rend difficile l’organisation d’une protection des intérêts généraux de la défense pénale dans le cadre de la défense particulière d’un prévenu.

Le ministère public a tendance à laisser aux avocats ce cheval de bataille, non sans quelques justifications. Mais l’intérêt général des droits de la défense ne peut fonder que subsidiairement la défense particulière de tel ou tel prévenu. Je renonce parfois à soulever des nullités qui me semblent caractérisées pour des raisons d’opportunité, lorsqu’elles ne pourront produire qu’un effet extrêmement limité ou nul.

Un président de Chambre d’Instruction, entendu un jour en conférence, expliquait très honnêtement accueillir sans état d’âme particulier des demandes d’annulation soulevées pour le principe par la défense, mais ironisait ensuite gentiment à ce sujet, en s’interrogeant à haute voix sur la façon dont un avocat parvenait à “vendre” à son client une nullité qui n’affecterait pas notablement le dossier, ou qui y laisserait en tout état de cause largement de quoi le condamner.

Et le fait est que ça n’a rien d’évident.

Personnellement, je l’avoue sans honte, je n’ai (jusqu’à présent) jamais soulevé la violation par la loi française de l’article 6-1 CEDH au motif que l’avocat était absent au moment de l’audition de son client en garde-à-vue, et très franchement, je n’y ai même jamais songé.

Y aurais-je songé - avant l’arrêt Danayan - qu’il m’aurait fallu de toute façon avertir mon client qu’un énorme aléa judiciaire pesait sur l’argument. Encore aujourd’hui, j’estime qu’il existe un aléa (bien moindre, naturellement) sur les chances de succès de telles demandes, au moins relativement aux effets qui seront attachés à une annulation en tout ou partie d’une mesure de garde à vue.

Je vous rejoins bien sûr tous deux sur le constat d’un mouvement, toujours à contrarier, qui va dans le sens d’une répression accrue. L’objectif est d’exercer une contrainte sur ce mouvement, et c’est exactement ce qu’est en train de faire la cour européenne, et c’est exactement ce que feront les confrères qui demanderont des annulations de garde à vue en cascade sur le fondement de ces arrêts, et c’est exactement ce que feront les magistrats qui feront droit à leurs demandes.

Je n’envisage pas qu’un état d’équilibre puisse jamais s’installer, le système est beaucoup trop complexe. Il y aura toujours des directions impulsées à des politiques pénales, que vous et moi choisirons tantôt d’appuyer, tantôt de contrarier. Envisager les choses sous cet angle permet - ou disons en tout cas, un peu plus modestement, me permet - d’éviter le syndrome Sisyphe.

Visualiser les choses sous cet angle permet également d’anticiper les correctifs du mouvement contrarié - cela dit sans vouloir vous démoraliser.

La commission Léger et son projet de “retenue” de six heures, pendant laquelle le retenu n’aura pas autant de droits que le gardé à vue, mais pendant laquelle il pourra être - et sera forcément - auditionné, offrira au mouvement répressif un judicieux plan B, jusqu’à ce que cette retenue soit à son tour (possiblement) retoquée par la cour européenne.

129. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:09 par jalmad

@ Tschok : ”j’ai abandonné toute vision consumériste: j’ai fait mon deuil du “tout, tout de suite”. Ce sera plutôt “petits pas”.
(…)
J’ai désormais conscience que toute évolution s’inscrit dans un temps quasi tectonique”

en d’autres termes, vous êtes un peu le Noam Chomsky de la procédure pénale (dans ma bouche, c’est un compliment : ce type, dont les analyses politiques démontrent le cynisme absolu de ceux qui nous gouvernent, est d’un optimiste incroyable, au motif qu’à l’échelle tectonique, justement, les droits de l’homme n’ont fait que progresser)…

j’admire…moi, je crois que je suis en train de m’enfoncer dans l’amertume….

130. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:28 par Petit pois sournois

@ Eolas sous 26

Donc, ce qu’espèrent désormais les avocats français, c’est que s’ils soulèvent devant les juridictions françaises la question de l’irrégularité de la garde à vue de leurs clients en invoquant les arrêts de la cour européenne, ils obtiendront gain de cause.
Mais si leurs arguments sont écartés, notamment au motif que la garde à vue en France n’est pas la garde à vue en Turquie, et qu’aucun arrêt de la cour européenne n’a dénoncé la non-conformité de notre procédure à l’article 6 de la CEDH, ils n’iront pas plus loin, parce qu’ils n’arriveront pas à persuader leurs clients ?

Et pourquoi le justiciable turc est-il plus procédurier que le justiciable français ? C’est dans les gènes ?

@ parquezaco
Ben oui, le CJN n’est pas disponible le dimanche et les jours fériés. C’est notamment parce que la sélection des dossiers n’est pas toujours automatique, il faut qu’un opérateur fasse une comparaison entre l’identité de question, transmise par la juridiction, et les identités déjà enregistrées à la suite de condamnations. Et puis si le dossier pose des problèmes de gestion juridique, que les programmes ne sont pas en mesure de résoudre, il faut qu’un “spécialiste” vérifie sa régularité et la légalité des informations qui y figurent, et le corrige le cas échéant.

Mais ce n’est pas un problème, il suffit d’en toucher un mot à Monsieur N.S., le père du stagiaire, qui est très partisan du travail le dimanche. Pas chez les fonctionnaires ? Ah bon ?

131. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:35 par reno

Bonjour maître éolas,

Une petite précision relative à la ratification tardive de la convention européenne des droits de l’homme.

Trois obstacles s’opposaient à cette ratification : la question de la laïcité (déjà), la survenance de la guerre d’Algérie (allez savoir pourquoi…) et l’articulation entre la convention et l’article 16 de la constitution de 1958.

132. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:43 par Gavot

@124 Telespecteur : et je n’ose pas parler de la province ou le barreau local se confond avec le rotary club.

Si vous n’osez pas pas parler tentez de vous renseigner et puis, si possible, de réfléchir ce qui vous évitera d’enfiler les clichés.

Personne ne prétend que la présence de l’avocat aux actes essentiels de la GAV (les interrogatoires) sera simple à mettre en place, mais je suis enclin à parier que les GAV seront dans ce cas moins nombreuses, moins longues et, paradoxalement, plus efficaces.

Bon, je vous laisse, je sors de chez Maxim’s pour rejoindre ma réunion d’un Rotary de province après m’être encanaillé avec vous au café du commerce.

133. Le mardi 24 novembre 2009 à 18:49 par Roucoulette

Brillante analyse (comme toujours) quoi qu’un peu longue.

134. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:02 par jacqueschi

et l’on ne remerciera jamais assez tous les petits pois , soi disant garant de la république , qui ne sont absolument pas choqués de tout cela !

bravo à eux !!!

des chèvres !

135. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:02 par Mike

Notre Bâtonnier adoré remet ça dans son dernier édito. Tenez c’est

136. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:03 par Joel

Désolé pour ce post presque totalement hors-sujet dans un très intéressant débat,
mais je voulais signaler cet article du New York Times d’aujourd’hui
qui pourrait intéresser beaucoup de lecteurs de ce blog, et leur hôte.

L’article parle d’une série de cas qui vont être jugés bientôt par la cour suprême et qui tous illustrent des dérives importantes de la justice américane, voire un abandon de
ses principes (par exemple, une loi d’un état equivalente à la retention de sûreté francaise, ou bien la possibilité de peine trop longe sans possibilitéde libération anticipée, ou encore l’existence de loi répressives trop vagues), et note une nouvelle alliance gauche-droite pour demander un retour à des principes plus sians.

137. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:41 par marsan

@ 75,

je ne sais pas ou vous avez trouvé vos renseignements mais ils sont erronés - les avocats comme les magistrats sont sur le pont tous les week-end de l’année - demandez donc aux juges des libertés de Paris et province s’ils ne sont pas dérangés les fins de semaines : dans ma petite ville de province le week-end dernier deux présentations avec avocats devant le JLD, l’une des deux avec ouverture d’information devant le juge d’instruction au criminel - et bien sur à des heures à la c…
Et pourquoi donc Monsieur (ou Madame) ? tout simplement parce que le délai de garde à vue à expirer durant le week end.

@ eolas, il y a de plus en plus de gens chagrins sur votre blog - ils ont l’art de voir les choses petitement et par le petit bout de la lorgnette -

138. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:44 par tschok

@ Jalmad, com 128,

Je vous remercie sincèrement pour le compliment et je souhaiterais vous le renvoyer avec d’autant plus de force que dans la gestion de mon amertume professionnelle les magistrats ont joué un rôle tout à fait positif.

Comme de nombreux avocats il m’est arrivé de sortir d’un palais de justice en me disant que je faisais vraiment un métier de merde, que les lois ça devenait n’importe quoi et que la justice était un système potentiellement déconnant.

Lorsque cela m’arrive, je songe aux magistrats qui ont posé des questions intelligentes, ont fait des suggestions opportunes, ont rendu des décisions qui me paraissent équilibrée, ont su voir des choses que je n’ai pas su voir, ont comblé mes propres insuffisances, etc.

Et là je me dis que ça vaut la peine de continuer à s’investir dans ce système judiciaire même s’il est déconnant.

D’un côté il y a les systèmes et de l’autre les êtres humains. Les seconds peuvent donner de très bonnes raisons de continuer, alors que les premiers donnent de très mauvaises raisons pour s’arrêter.

Mais je ne voudrais pas vous tenir un discours compassionnel. Après tout, goutez votre amertume, elle vaut son pesant d’or.

Sinon, je voulais vous dire que ce que vous avez dit précédemment m’a peut être aidé à comprendre mieux certains profils de magistrats.

En particulier, j’avais du mal à comprendre pourquoi des magistrats instructeurs devenaient des parquetiers (dans mon esprit, c’est descendre en gamme).

Et vous m’avez fourni des clés pour comprendre.

139. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:52 par Maxim's LLP

@ DmonodBrocas 123

le droit repose soit sur la volonté du peuple, soit sur la jurisprudence de la CEDH, il ne peut pas reposer sur les deux à la fois

???!

Cher ami,

Vous n’ignorez pas, comme nous le rappelle l’hote de ces lieux, que la CESDH a été ratifiée par notre bien aimée assemblée nationale en 1974 et qu’elle est d’application directe depuis 1981.

De surcroit, il ne vous aura pas non plus échappé que cette belle convention est, depuis quelques années maintenant partie intégrante de ce que savemment d’aucun appellent le “bloc de constitutionnalité”, c’est à dire plus vulgairement: notre constitution, loi suprême de notre pays.

Dès lors, si les petits pois de ce pays venaient à estimer que les conditions dans lesquelles se deroule la garde à vue étaient contraires à la CESDH et que cette transgression justifie l’annulation de l’ensemble des actes fondés sur celle-ci, ces derniers ne feraient rien d’autres que donner toute sa valeur à la volonté du peuple.

PS: Félicitation pour votre opiniatreté

140. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:54 par yteo

Juste un lien rapide vers le site de Courrier International qui publie un joli article issu de la presse turque à ce propos : Droits de l’homme : Paris peut mieux faire

yteo.

141. Le mardi 24 novembre 2009 à 19:59 par tomamico

Vous exagérez, Yannick Danio, policier de son état nous explique la recrudescence des GAV. C’est la faute de la Cour de cassation:

morceau choisi: “D’un point de vue plus technique, la Cour de cassation, répondant à la directive de la Cour européenne des droits de l’homme, a semble-t-il donné des instructions au parquet, au procureur de la République, pour placer plus facilement les gens en garde à vue, en arguant que cela leur ouvrait des droits, notamment ce fameux droit à l’avocat.”

http://abonnes.lemonde.fr/societe/c…

142. Le mardi 24 novembre 2009 à 20:06 par zadvocate

Mon cher confrère avez vous lu le communiqué diffusé par le Syndicat Synergie ?

Je le mets à disposition avec le courrier qu’il a suscité de la part de notre bâtonnier.

http://www.zadvocate.com/wp-content… NOVEMBRE SYNERGIE.pdf

143. Le mardi 24 novembre 2009 à 20:12 par zadvocate

j’ai modifié le lien qui ne fonctionnait pas

http://zadvocate.com/wp-content/upl…

144. Le mardi 24 novembre 2009 à 20:23 par *Celeborn

Je me souviens quand ma mère était de permanence pour les gardes à vue (au bout de la Xième heure, sauf pour les mineurs, à l’époque, ou alors mes souvenirs me trompent-ils ?). Les descriptions de certains commissariats du 9-5 valaient, à son retour, un sacré pesant de cacahuètes. Mais elles faisaient + peur que rire…

145. Le mardi 24 novembre 2009 à 21:31 par Confrère des champs

@124 le telespecteteur

Hier, je devais rédiger quelques jeux de conclusions. Mais le confrère de permanence m’a demandé de venir le renforcer sur une comparution immédiate impliquant 4 prévenus pour trafic de stups (il y avait une contradiction d’intérêts entre deux des prévenus). Etant de permanence le lendemain, le règlement de mon barreau me fait l’obligation de déférer à la demande du confrère .

A 12h20, je le rejoins, sandwich à la main. A 13h30, je parviens enfin à obtenir une copie exploitable de la procédure. Environ 200 pages de procédure. A 14h50, je vais voir le client pour lui dire que je reviendrai le voir dès que j’aurai déféré à la désignation de mon Bâtonnier qui m’a demandé de participer à 15 h à la session de formation des jurés d’assises.

Après une heure de questions au cours desquelles j’ai été sommé de m’expliquer sur le fait que les condamnés pouvaient bénéficier de remises de peines (Quel scandale !) et de réponses dans lesquelles j’ai échoué à convaincre mes interlocuteurs que les juges appliquent en général les lois votées par les politiques, quoiqu’ait pu prétendre le Ministre des Auvergnats surnuméraires, je rejoins mon client à 16 heures et lui explique que mon confrère et moi-même allons soulever une nullité de procédure tirée de l’article 6 de la CEDH puisque les prévenus, qui se sont accusés après deux jours et demi de dénégations et de ramollissement corrélatif de leur matière grise, n’ont pas bénéficié de l’assistance d’un avocat lors de la garde à vue. Pendant cet entretien, je suis régulièrement sommé de me presser par diverses ambassades présidentielles. Je résume, j’abrège, je limite, je synthétise et je me précipite en salle d’audience où le tribunal m’attend avec une impatience mal dissimulée.

In limine litis, je brandis les arrêts DANANYAN c Turquie et ses grands frères. Le procureur disconvient et le tribunal se retire pour délibérer sur l’incident. Une heure et quart plus tard, il revient nous annoncer… que l’incident est joint au fonds (Tu parles, Charles ! J’avais coté la nullité de la garde à vue et, en conséquence, réclamé la remise en liberté immédiate de mon client). Instruction du fond de l’affaire, réquisitoire (Je vais vous démontrer la culpabilité des prévenus sans avoir à faire état de leurs déclarations en garde à vue. Ah bon ? Mais alors, elle a servi à quoi, Monsieur le Procureur, cette garde à vue que vous avez en principe contrôlée, et prolongée une fois avant de demander au JLD d’en remettre une louche ?), plaidoiries (brillantes !) et délibéré… en 20 minutes : incident rejeté (j’attends la copie du jugement avec gourmandise) et peines très dissuasives d’appel, le tout sans mandat de dépôt à l’audience. Il est 20 heures. J’y suis depuis 12h30. Je vais toucher 200 € HT d’aide juridictionnelle dans deux mois, ce qui fait environ 80 € net avant impôt compte tenu des charges de mon cabinet. Il n’est plus temps d’aller conclure mais de filer embrasser les enfants avant qu’ils ne soient couchés.

Ce matin, je prends la permanence en espérant secrètement qu’on va me les lâcher. A partir de 9h, 45 mn d’attente avant de passer une conciliation de divorce et retour au Cabinet à 10h pour écluser le courier urgent pas fait la veille.

C’est qu’à 14h, je suis commis d’office devant le Tribunal Départemental des Pensions Militaires. Sache, oh lecteur ! que devant cette juridiction crée en 1919 pour traîter le contentieux des pensions d’invalidité des glorieux poilus, l’assistance d’un avocat en aide juridictionnelle est de plein droit pour le requérant, ceci indépendament de ses ressources. Il est en effet normal que le coût de la reconnaissance de la Nation à ses valeureux serviteurs pèse exclusivement sur la profession d’avocat qui, on le sait, est constituée de bâtonniers de province pleins aux as qui se font péter la panse dans les dîners du Rotary. Bien sûr, je ne suis pas en état car je dois digérer les 5 pages de mémoire du ministre et 18 décisions de justice inédites directement fournies par un client qui, pensionné de l’armée, dipose d’un revenu supérieur au mien et de quelques loisirs. je serai ensuite en mesure de rédiger de volumineuses conclusions que je plaiderai à une autre audience. Pour cette procédure, je toucherai 400 € HT.

A 16h après un passage en rase-motte au Cabinet, je file à la maison d’arrêt pour une commission de discipline. Ici encore, je défère à la commission d’office et cela me rapportera 88 € HT.

J’ajoute que, dans mon barreau, la commission d’office et la permanence sont des obligations qui pèsent sur tous les confrères. A défaut, il n’y aurait pas assez de volontaires. C’est vous dire à quel point c’est lucratif.

Je rentre enfin au Cabinet à 17h30 pour trouver sur mon bureau le fax d’un confrère du barreau d’à côté m’indiquant qu’il est chargé de me succéder dans le dossier de divorce de Monsieur X. Ah, oui, c’est ce monsieur à qui je promets un projet de conclusions depuis trois semaines. Un dossier de perdu, et les honoraires qui vont avec, morts au champ d’honneur de la commission d’office.

Et puis sous le fax, il y a la facture d’agios de la banque. Demain, je tournerai la tête pour ne pas croiser le regard, à travers la vitre, de la conseillère clientèle en charge de mes comptes.

Demain, j’essaierai de sortir un ou deux dossiers un peu rentables. Et je n’irai pas au Rotary parceque je n’ai pas les moyens de payer la cotisation.

Ce soir, après ce trop long mail, je vais rentrer à la maison dans ma ZX break qui affiche fièrement 318.000 km et essayer de ne plus penser au clichés débiles sur les avocats notables de province.

En attendant, cher le telespecteteur, je vous prie d’agréer, vos poncifs et vous-même, l’assurance de ma parfaite affliction.

146. Le mardi 24 novembre 2009 à 21:39 par Nichevo

Me voila donc devenu “petit OPJ français”. On sent au travers de la remarque d’un de vos lecteurs tout le mépris qu’il concentre sur le policier.

Je ne vais pas répondre en détail aux commentaires enflammés du maitre de ces lieux. Je sais au combien qu’il il aimerait voir disparaitre cette garde à vue pour la voir remplacée par je ne sais pas moi, “Une présentation judiciaire encadrée” ou un autre nom qui ferait moins “barbare”, avec un confrère à lui présent de bout en bout.

Eolas reste le meilleur avocat que je connaisse.

Disons que les attaques répétées contre la garde à vue visent tout simplement à introduire les avocats dans les commissariats sans régler les problèmes de fond; je veux parler des problèmes de personnels OPJ, des locaux dégradés et de nombreux problèmes matériels, des résultats à fournir, et une procédure visiblement de plus en plus compliquée.
Est ce que l’avocat tout au long de la garde à vue va résoudre cela ?

J’ai peur que non.

On pourrait également discuter à l’infini de la hiérarchie des normes en droit français, de la politique en la matière des autres pays européens comme l’Allemagne, mais à quoi bon …

Les OPJ sont tout sauf des êtres bornés. Ils ont passé un examen difficile; leurs correcteurs sont des magistrats. Ils respectent le droit mais entendons nous bien, celui du code de procédure pénale en vigueur.
Ils respectent également l’article 10 du code de déontologie car vous savez surement que les policiers sont les rares à posséder sur eux un tel code.

C’est vrai que les policiers sont responsables de la personne qu’il ont interpellé. Rien ne doit lui arriver et elle ne doit subir aucun traitement inhumain ou dégradant.
Eolas sous entend qu’enlever les lunettes d’un GAV pourrait être dégradant; mais si cet individu se taille les veines avec les verres?
Qui est responsable?
Je passe sur la fouille de sécurité qui ne fait plaisir à personne mais qui permet de vérifier si la personne n’a aucun objet dangereux sur elle.
Eh oui on peut se pendre avec une ceinture…
Je passe aussi sur l’ensemble des élements de la procédure que je devrais bientôt fournir à l’avocat du mis en cause.
Comme on dit chez nous “C’est abuser ! “

“Invoquer l’exception pour priver la règle de tout effet” est un art que vous maitrisez bien mieux que moi…

Au plaisir de vous revoir, ne serait ce que pour batailler ferme sur les droits des mis en cause et surtout, sur le devenir de notre système judiciaire.

Dire que la dépouille du Juge d’instruction n’est pas encore froide que vous bondissez déjà pour demander la suppression de la GAV .

Trop fort …

147. Le mardi 24 novembre 2009 à 23:05 par PEPITO

Maître EOLAS, vous voudrez bien pardonner à Guillaume DIDIER ses approximations, ça fait un moment qu’il ne fait plus de droit à proprement parler et qu’il a pris un peu de distance avec le métier de magistrat…

Par ailleurs avec tout le respect que je vous dois, personne n’est à l’abri d’une mauvaise interprétation, je me rappelle votre analyse erronée au sujet de la nullité accueillie par la cour d’assises de Saint Denis de la réunion (Quand je vous dit que le Droit et la morale..). La Cour de Cassation avait replacé l’église au centre du village.

148. Le mercredi 25 novembre 2009 à 00:14 par Berlin

@Nichevo (145)

On vous remercie pour vos excuses pour les 600 000 personnes qui en 2009 ont ete detenu pendant une garde a vue et ont subis :

-une violation des articles 6-1 et 6-3-C de la Convention du a l’absence d’un avocat pour les assister;

-une violation des articles 5-1-C et 5-4 de la Convention du a l’absence de controle de cette detention par une autorite judiciaire, et l’absence d’un recours a bref delai statuant sur la legalite de leur garde a vue;

-une violation de l’article 3 de la Convention du aux conditions de detentions et autres…;

-une violation de l’article 8 de la Convention du aux fouilles avec deshabillage integral;

Malheuresement vos excuses ne compensent pas pour le traumatisme psychologique de ces victimes et la perte de confiance dans la justice de notre pays.

Mais si la Turquie a reussi a introduire la presence de l’avocat, la France le pourra..

149. Le mercredi 25 novembre 2009 à 01:52 par rusen

“Par exemple, la Turquie a accordé le droit de vote aux femmes 15 ans avant la France. Croyante, non pratiquante, cher Jeannot…”

Bemol…C’était le système de parti unique. Les femmes pouvaient voter mais ne pouvaient pas se tromper. Bref, les Kemalettes ne pouvaient voter que pour Kemal…

150. Le mercredi 25 novembre 2009 à 03:02 par La Sasson

@ Nichevo 86 La garde à vue est condamnée à disparaitre dans un énième fatras qui perturbera un peu plus l’institution judiciaire et augmentera la probabilité pour mes pauvres confrères OPJ, d’aller devant les boeufs, la CNDS, où quelques hautes autorités que l’on voudra bien constituer pour la forme, avec de solides budgets, pour dire au conseil de l’europe qu’on a pas les budgets pour la justice et la police mais qu’on a des idées…
Bonne nouvelle pour vous : c’est la CNDS qui est condamnée à disparaître ! reste plus qu’à espérer que son solide budget vous sera alloué, peut être pourrez vous aller boire le 1/2 pression chez Maxim’s

151. Le mercredi 25 novembre 2009 à 03:21 par Defenseurdali

Concernant Ali le braqueur de coiffeur, si le prévenu n’avait pas avoué lors de sa garde à vue et devant le substitut, je pense que j’aurais pu obtenir la relaxe au bénéfice du doute.

En effet, tout le monde sait que les témoins ne sont pas fiables au bout de quelques jours, alors au bout de 3 ans n’en parlons pas. L’identification a été faussée par le fait de présenter le prévenu (de type Nord Africain) côte à côte avec une personne de type européen. Aussi les témoins penchaient forcément vers le type NA. Il eut fallu présenter plusieurs personnes de type NA de corpulence, taille et morphologie équivalente pour que l’identification puisse lever tout doute. Preuve en est que la cliente ne reconnaît pas le prévenu.

Ensuite, le prévenu aime bricoler, il utilise donc des gants de jardinages épais, comme ceux retrouvés chez lui pour se protéger les mains.
Le prévenu reçoit sa dotation de sacs poubelles annuelle en février. Cependant, les sacs noirs distribués ne sont pas assez grand à son goût et il préfère utiliser les sacs transparents (normalement réservés aux papiers et journaux) pour jeter divers détritus dans un seul gros sac plutôt que plusieurs petits. Les sacs étant transparents, n’importe qui a pu voir les différentes paires de gants qu’il a pu jeter dans ces sacs au fil des années. Il était donc très facile de récupérer ces gants et de le disséminer sur une scène de délit pour le véritable braqueur, qui est probablement du même quartier que le prévenu. Ceci afin d’initier une fausse piste ADN, ce qui a semble-t’il très bien fonctionné.

Enfin la procédure ne fait pas état du type d’ADN retrouvé dans les gants : ADN nucléaire ou ADN mt. L’ADN mt (mitonchondrial) provient des cellules mortes de la peau par exemple. Ce qui serait logique dans des gants de jardinage.
Or l’expertise de police scientifique n’indique pas la possibilité qu’une autre personne puisse avoir la même empreinte alors qu’avec l’ADN mt la probabilité est extrêment forte, dû au phénomène appelé coalescence.
Ainsi dans ce cas, il pourrait très bien s’agir de gants du même type que ceux que le prévenu utilisait et contaminés par de l’ADN venant d’une toute autre personne.

152. Le mercredi 25 novembre 2009 à 07:24 par jalmad

@ fantômette :
oui, je comprends bien que parfois, l’intérêt du client peut même s’opposer à l’utilité de soulever une nullité. Pas plus tard que ce mois-ci, j’ai eu un cas où, concrètement, le client s’est vu de fait “sanctionné” par une nullité soulevée par son conseil, finalement inopérante (mais, même opérante, le résultat eût été le même), et, qui, du fait du délai d’audiencement (opposition à OP) allié à la mise en délibéré (vu la nullité soulevée, j’ai dû mettre en délibéré pour vérifier le point de droit soulevé), a fait que la personne a finalement été condamné a une suspension de son permis de conduire d’une durée inférieure à la suspension administrative effectuée….bilan, il l’aurait récupéré plus vite en acquiesçant à l’OP…..
cependant, ce n’est pas la majeure partie des cas, et soulever une nullité n’est pas “risquée”, au pire, elle est rejetée, ou a un effet limité sur la procédure…mais ne vous empêche pas de présenter une défense au fond. Ceci étant, je dis cela, je sais bien aussi dans quelles conditions parfois rock n roll vous devez préparer une défense, notamment en CI.

et, sur une nullité de GAV, je ne sais pas comment c’est dans les grandes villes, mais dans nos petits/moyens tribunaux de Province, vous n’imaginez pas les remous que causent des décisions de magistrats qui sanctionnent des pratiques policières (évidemment, dans le cas précis de l’accès en GAV, il ne s’agit pas de sanctionner des “mauvaises pratiques”, nos policiers ne faisant qu’appliquer le CPP…je parle en général). Et, lorsque, comme c’est mon cas, vous avez un Parquet réactif sur ce type de difficultés, il fait passer les consignes pour qu’il y soit remédié si il pense qu’en effet la décision du Tribunal est fondée, ou fait appel, mais alors on verra ce qu’en dit la Cour et, selon la théorie tschokienne de la tectonique, ça peut quand même faire avancer le truc dans le bon sens…..

@tschok : c’est gentil de vous inquiéter de ma santé psychique, mais je vous rassure, ça va passer, et moi aussi, un jour, j’accéderai à la sérénité….quant au passage siège-parquet, s’abaisser, sûrement pas, mais aller au devant de l’emmerdement maximum, certainement ! perso, je l’ai déjà dit ici, je n’ai pas le courage.

@nichevo : le sujet n’a jamais été les mauvaises conditions matérielles de GAV, du manque de personnel, etc…….personne n’a jamais tenu responsable les policiers de cet état de fait qu’ils subissent eux-mêmes de plein fouet.
mais, je suis d’accord, tout est lié. Et justement, j’ai la naïveté de penser que lorsque les avocats auront un peu plus accès aux GAV et pourront faire remonter plus de choses sur ces points là, en nombre, avec peut-être une liberté de parole que nous magistrats et fonctionnaires de police n’avons ou ne prenons pas, un impact médiatique plus appuyé, susceptible d’affecter en masse la validité des procédures, nous verrons fleurir subitement des budgets pour tout cela…..

153. Le mercredi 25 novembre 2009 à 07:41 par Metryll

Cher Maître,

C’est toujours avec grand plaisir que je parcours vos billets et celui de Novembre 2009 comporte deux éléments qui méritent que les étudie d’un peu plus près :

1) A vous lire, le referendum de 2005 serait une inanité, voici l’article 3 de la Constitution :

« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum.

Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.
Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.
Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. »

Inanité que la démocratie ? Curieuse assertion.

2) La Turquie serait, selon vos dires, géographiquement et historiquement en Europe.

Las, la consultation d’un atlas géographique montre aisément que la Turquie est en Asie Mineure pas en Europe.

Et Istanbul me direz vous est bel et bien en Europe. Certes mais la minuscule portion de territoire Turque en Europe est le résultat de l’histoire.
Histoire qui montre le combat de peuples Européens (Chrétiens) contre un envahisseur Moyen-Oriental (Musulman). Tout comme le fût la Reconquista espagnole entre les VIIIéme et XVIéme siècles.

Ne faites pas l’erreur de me lire avec une perspective moderne mais considérez les mots Musulmans et Chrétiens dans leur perspective historique. En 1500, la signification de ces termes était fort différente de celle que nous vivons de nos jours en Europe et en Turquie.

A une époque où les nations n’existaient pas, le religion constituait le liant des divers peuples Européens. La Turquie fait elle donc partie de l’histoire européenne ? Indubitablement, mais en termes d’opposant pas d’élément constitutif.

154. Le mercredi 25 novembre 2009 à 07:46 par Nichevo

“Petit OPJ français et alcoolique”; (dixit La Sasson)
Comme quoi “le délit de sale gueule” est partout.
Petite précision, je ne formule pas d’excuses mais j’explique une situation paradoxale à savoir qu’il faut placer en GAV pour garantir les droits de la personne mise en cause; un peu comme la mise en examen pour avoir accès au dossier.

155. Le mercredi 25 novembre 2009 à 08:00 par Nichevo

Il ne serait pas faux de dire que les avocats ont contribué à ce “chiffre” des GAV, prenant leur honoraires au passage.
Une permanence pour un avocat commis d’office c’est 63 euros par X GAV….?
bonne journée à tous et bon courage aux collègues !

156. Le mercredi 25 novembre 2009 à 08:17 par Véronique

@ jalmad

Si je peux me permettre.

quant au passage siège-parquet, s’abaisser, sûrement pas, mais aller au devant de l’emmerdement maximum, certainement ! perso, je l’ai déjà dit ici, je n’ai pas le courage.

Mais alors on fait quoi ?

J’ai quand même du mal à comprendre pourquoi vous êtes aussi réticent à envisager de devenir un magistrat du parquet.

C’est quand même là où nous (je veux dire les simples justiciables) ne pouvons pas faire l’économie de courageux et d’indépendants dans leur tête.

157. Le mercredi 25 novembre 2009 à 08:26 par Maboul Carburod....z

Un petit hors sujet de la loi pénitentiaire promulguée ce matin :

L’article 132-24 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l’article 132-19-1, une peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; dans ce cas, la peine d’emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l’objet d’une des mesures d’aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28. »

Nos politiques tant aimés qui tapent sur les juges laxistes nous invitent à être indulgents. Quelle cohérence. J’invite les avocats à se saisir de cet article, qui était déjà une réalité dans beaucoup de cas. A voir pour les procédures de comparution immédiate.

158. Le mercredi 25 novembre 2009 à 08:34 par Maboul Carburod....z

Je ne résiste pas à l’envie de vous fournir une autre info intéressante qui tue l’application des peines si on n’y prend pas garde. Le nouvel article 723-19 et l’article 723-20 du CPP permettent de faire des aménagements de peine parquet à défaut de réponse des JAP, sans aucun recours.

Pour vivre heureux, chers JAP, ne faites plus rien. Le parquet aménagera les peines de moins de deux ans ramenées à exécution et en supportera les conséquences.

159. Le mercredi 25 novembre 2009 à 09:03 par DMonodBroca

@ 139 Maxim’s LLP

Vous faites une erreur grossière, la Convention européenne des Droits de l’Homme ne fait pas partie du “bloc de constitutionnalité.”

160. Le mercredi 25 novembre 2009 à 09:33 par jalmad

@ Veronique 156 :

vous avez raison, il faut que le Parquet soit investi par ce type de magistrats, et, je vous rassure, je crois réellement que c’est le cas…sauf que ce ne sont en général pas ceux-là qui sont aux manettes tout en haut….et, malheureusement, l’indépendance d’esprit et le courage, ça ne suffit pas toujours. C’est en cela que je dis que je n’ai pas le courage. Pas le courage de me porter volontaire pour lutter quasi-quotidiennement afin de conserver cette indépendance d’esprit.
Pas le courage de savoir que je vais devoir me farcir, ou, plus difficile encore, refuser de remplir des grilles statistiques sur les peines planchers prononcées en temps réel, ou sur les dernières infractions jugées à la mode par la chancellerie. Pas sûre d’avoir le courage de rester ferme sur mes positions de principe, en refusant par exemple de monter à une audience si je suis en désaccord total avec ce que souhaite mon chef, ou encore d’appliquer un élément de la politique pénale que je désapprouve. Sûre, pour le coup, d’avoir une charge de travail telle que je devrais ml’insérer, sans pouvoir avoir de prise dessus, dans ce processus que je décriais plus haut (impossibilité de fait, de contrôler le déroulement des GAV…) etc…, etc…
et franchement, je sais bien que tous les Proc ne sont pas des tyrans, et que les substituts ont une certaine marge de manoeuvre. C’est le cas dans mon Tribunal, où je considère réellement mon proc et tous les parquetiers comme des gens investis dans leur travail, soucieux de l’application de la loi et des libertés, etc….n’empêche qu’ils appliquent, et c’est leur rôle, une politique pénale de plus en plus drivée par le Procureur Général, et, en réalité, la chancellerie ; politique pénale dans laquelle je me reconnais de moins en moins.

on aura beau dire, au siège, on est quand même pénard, et notre indépendance, si elle est aussi parfois chahutée, l’est bien moins, à mon sens que la marge de manoeuvre des parquetiers. Ce qui nous permet parfois de filer (avec parfois, en off, “l’approbation” d’un parquet qui souhaite que ça change, mais qui ne veut pas se “griller” avec son commissariat…car pour cela aussi, il faut un certain courage, on sait qu’on part en guerre, et qu’on a peu de chance (du moins, c’est ce que mon expérience personnelle, limitée il est vrai, me laisse penser) d’avoir le soutien de sa hiérarchie) un coup de pied dans la fourmilière (récemment par exemple, ordonner un supplément d’information quand des prévenus pour des faits de rebellion contestent la régularité d’une interpellation et font état de violences policières ; saisir la Chambre de l’instruction pour des nullités liées à des pratiques policières révélées en cours de procédure par les mis en examen….)

Oui, c’est “courage fuyons”. Je l’admets. Et je salue au passage mes collègues parquetiers qui ont le courage que je n’ai pas. Et, juste pour info, vous n’imaginez pas le nombre de jeunes collègues du siège (disons, moins de 5 ans de fonction) que je connais et qui me disent “le Parquet, moi, ça m’a toujours intéressé, et j’hésitais en sortie d’école ; mais en l’état actuel, franchement, je n’y mettrai pas les pieds”, ou des collègues plus anciens qui ont connu le Parquet il y a 10 ans, en gardent un très bon souvenir, puis sont passés au siège, et, pour ce même type de raisons, ne souhaitent pas y retourner.

de fait (mais que des collègues me contredisent si je me trompe et généralise à tort), je crois que la disproportion entre les candidats pour le siège et le parquet est telle que, d’une part, plus ça va, et plus il y a de postes de parquetiers proposés en sortie d’école, et d’autre part, vous avez beaucoup plus de chance d’avoir votre avancement en grade rapidement au parquet plutôt qu’au siège (dans ma cour, au parquet, vous pouvez être inscrit dès la 7 ème année, quand au siège on sera plutôt sur une moyenne de 9 ans).

@Maboul 157 :
ça, c’est cohérent en effet. J’ai toujours trouvé cela louche quand le législateur se sent obligé de rappeler l’évidence : la liberté c’est la règle, la prison l’exception, la personnalisation des peines une priorité, et l’aménagement de peine à rechercher en priorité pour prévenir la récidive……

juste pour illustrer aux mekeskidisent :

1. un type qui comparait pour des violences correctionnelles très graves (disons qu’il démolit littéralement quelqu’un), mais pas en récidive, et encore accessible au sursis, complètement désinséré et qui, à l’audience dit qu’il va se venger dès que possible car c’est la faute de la victime si il est là, manifestement alcoolique mais niant son pb d’alcool, etc… (je caricature, mais ça existe). Et bien il va falloir motiver sa décision, au vu de ces éléments, qu’on l’envoit un petit peu quand même directement en prison (NB : en réalité, le législateur découvre l’eau tiède, c’était déjà le cas, et je trouve cela normal, et je crois que tous les magistrats aussi, de motiver la prison ferme quand on écarte un sursis possible….)

2. un type en récidive de vol simple : 19 ans, chez ses parents, en formation, avec un petit casier de mineur pour tout un tas de petites conneries type dégradations, avec un passé familial lourd, 1er vol comme majeur qui a pris 15 jours avec sursis pour une bouteille de whisky chez Lidl, 2ème vol : l’i-pod dont il rêve mais qu’il n’a pas les moyens de se payer (oui, c’est MAL). Et ben : peine plancher 1 an d’emprisonnement ferme, et les juges devront motiver (NB ici il y a de quoi) pour écarter cette peine ferme.

161. Le mercredi 25 novembre 2009 à 10:20 par PEB

Même un célèbre avocat général plussoie:
La garde à vue un enfer ?.

La péroraison est l’hommage de la robe rouge à la toge noire:

L’avocat ne deviendrait pas un trouble-fête mais plutôt un allié de la police qui permettrait à celle-ci de se vouer à l’essentiel, à l’enquête et à ses preuves, plutôt qu’à l’accomplissement d’un rituel superficiel. L’avocat deviendrait la garantie suprême alors qu’aujourd’hui l’amas de règles prétendument créateur de garanties étouffe plus qu’il ne protège.

En gros, ni la justice, ni la police, ni l’ordre public n’auraient à pâtir de la présence active de la défense. Le conseil du suspect pourrait même simplifier le travail de l’enquête.

162. Le mercredi 25 novembre 2009 à 10:22 par DAN40

A Nichevo.

Je comprends ta colère mon garçon. C’est vrai que c’est difficile d’être toujours l’âne des animaux malades de la Peste … Jeannot (LA FONTAINE pour les béotiens, pas le stagiaire de maitre EOLAS … ) aurait pu choisir un autre animal, mais, bon respectons son choix. ..
La colère est toujours mauvaise conseillère cependant. On peut avoir un débat sur la GAV ou même sur la présence de l’avocat dès le début. Ca ne me gêne pas.Ca ne doit pas nous gêner. Ni le débat sur l’opportunité de la mesure, ni le bouleversement que cela engendrait..

J’aimerai avant tout soulever un paradoxe. Pourquoi donc l’écrasante majorité des OPJ (pour ne pas dire la quasi-totalité)est elle favorable à la présence ou à la venue de l’avocat lors de la garde à vue ? Pour pouvoir torturer en toute liberté les gardés à vue ensuite ? Je sais…; la réponse appartient aux OPJ, pas aux avocats, pas au parquet…

Sérieusement. Si j’avais à donner Un avis de vieil OPJ retraité, (27 ans de banc de nage… des cauchemars souvent … mais ca n’intéresse personne…), je dirai que l’OPJ est l’agent du procès pénal qui passe autant de temps avec la personne gardée à vue. En dehors bien sur des gens de l’administration pénitentiaire . J’ouïs déjà du fond de ma forêt profonde les sarcasmes… c’est pour pouvoir extorquer des aveux … etc .. etc .. Oui. Aussi. Mais c’est surtout pour pouvoir apporter à la Justice un avis que je pense éclairé. En comparaison, combien de temps passe un magistrat ? un avocat ? Avec l’individu je veux dire… pas sur un dossier de papier …. Les parquetiers, les juges d’Instruction, ( Paix et gloire à leurs âmes, que la Paix du tout puissant garde des sceaux soit sur eux…) ne pourront pas nié que très souvent les OPJ leur ont parlé des gardés à vue. Et pas toujours pour relever les noirs desseins qui ont commandé les gestes affreux.

Maintenant, je suis convaincu que la Justice peut se passer des gardes à vue, des OPJ, même des juges d’instruction. De grands pays dont on ne peut pas nier la dimension démocratique s’en passent. Pourquoi pas nous ?

Mon ami NICHEVO, si la garde à vue disparaît (Ne crie pas si fort ta joie…); vous vous adapterez… Tu le sais bien. Et surveille bien l’herbe du pré des moines … Ce n’est pas parce qu’elle est rabougrie que le lion, le loup et le renard ne crieront pas Haro sur le baudet …

163. Le mercredi 25 novembre 2009 à 11:01 par parquezaco

A Jalmad

venez-donc au parquet,

ce que vous aimez au siège vous le pratiquerez sans plus d’inconvénients et puissance 10.

Salutations

164. Le mercredi 25 novembre 2009 à 11:05 par Maxim's LLP

@ Dmonodbroca

Mea culpa, dans la fougue, m’empressant à vous répondre, j’ai effectivement commis une effroyable confusion.

Toujours est-il que la CESDH a été ratifiée par les représentants du peuple français et que la constitution confère à ce texte une valeur supra législative (art.55).

Dès lors, si ma démonstration en 134 est entachée d’une erreur lamentable, digne d’un élève de 1ère année de droit, il n’en demeure pas moins que nos petits pois adorés ne peuvent qu’écarter une loi contraire à ce traité, en vertu d’un texte approuvé par les portes voix de la volonté générale et conformément à la constitution de notre beau pays, adoptée au suffrage universel par le peuple français.

Il ne s’agit ni de politique, ni de querelle police-avocats, gouvernement-avocats, magistrature-avocats, ou cekevouvoulé-avocats, mais de la simple application du droit positif, ou, tout du moins, ce quelle devrait être: “les traités régulièrement ratifiés (…) ont une valeur supérieure à à celle de la loi (…)”.

En outre, je comprends mal la réaction offusquée de certains membres de notre police nationale (cf synergie et 146) .

La démarche initiée par le barreau de Paris, dores et déjà relayée par beaucoup de barreaux de province, ne vise pas le travail d’icelle. Cette démarche ne vise qu’à faire respecter le principe du droit à un procès équitable auquel chaque intervenant du monde judiciaire devrait s’enorgueillir de participer.

L’intervention de l’avocat pendant la garde à vue ne devrait pas être perçue comme une menace planant sur l’enquête (dès lors que celle ci s’est déroulée dans des conditions conformes au droit) mais comme une garantie pour chacun.

Ainsi, les OPJ devraient se réjouïr du fait que les avocats se joignent à eux pour dénoncer le manque de moyens investis en la matière afin d’assurer la dignité des gardés à vue et de ceux qui les encadrent.

Cordialement

165. Le mercredi 25 novembre 2009 à 11:37 par DMonodBroca

“…mais de la simple application du droit positif,…” J’avoue ne pas comprendre ce que c’est que cette notion de droit positif. Pour moi elle est à ranger, avec laïcité positive notamment et avec discrimination positive et avec tolérance zéro, dans l’amoire aux astuces sémantiques suspectes. Qu’est-ce que “droit positif” ajoute à “droit” ?

“les traités régulièrement ratifiés (…) ont une valeur supérieure à à celle de la loi (…)” C’est bien ce que je dis, il y a 2 sources de droit, la loi de la République d’une part et les traités d’autre part, en l’occurrence la Convention européenne des Droits de l’Homme. Chacun prenant en compte celle qui l’arrange quand ça l’arrange. Je maintiens, quoi que vous puissiez dire de mon “opiniâtreté”, que cela crée une situation contraire au droit, contraire à la raison, contraire à la paix civile.

Je parlais de “duels” délibérément : comment ne pas sentir que mieux sont protégés par la loi les gardés à vue, plus les gardes à vue sont brutales, et que plus les gardes à vue sont brutales, mieux on cherche à protéger légalement les gardés à vue ? C’est bien une sorte de duel dont il s’agit, d’un engrenage infernal. Ni le droit ni la justice n’y trouvent leur compte.

166. Le mercredi 25 novembre 2009 à 12:37 par dura lex sed lex

@ DMonodBroca

Le droit positif, ce n’est en rien une astuce sémantique. Cela n’a même rien à voir avec la discrimination ou la laicité positive, qui là s’oppose à une notion négative de la chose. Le droit positif, c’est le droit posé. Le droit réel en somme. Ici positif découle du latin “positum”. C’est le droit tel que vu par un courant de pensée de la philisophie du droit, il s’oppose en quelque sorte au droit naturel.
Il y a par ailleurs plus de deux sources au droit, si l’on prend en compte le fait que le droit c’est l’ensemble des règles qui s’applique en un lieu donné dans une époque donnée. Il existe une hiérarchie dans ces sources qui permet de savoir laquelle s’applique en priorité, mais comme tout n’est pas si simple il arrive qu’il y ait des interrogations sur la place de la source concerné dans la hiérarchie des sources.

167. Le mercredi 25 novembre 2009 à 12:40 par Sous toutes réserves.

@DMonodBroca

Le droit positif est une notion juridique précise, que n’importe quel étudiant ou juriste comprend et conçoit clairement.

Il s’agit de l’ensemble des règles juridiques en vigueur : traités, consitution, lois, décrets, jurisprudence…

Reconnaître aux traités une valeur supérieure à la loi ne crée pas de confusion. Cela impose au législateur un cadre dans lequel il peut créer du droit. Au-delà de ce cadre, les normes nationales ne sont pas conformes au traité, et sont donc “illégales”.

Si le déroulement d’une garde à vue est conforme au droit français, elle ne le serait pas au regard de la CEDH.

Pour vous aider à comprendre, et pour que les choses vous apparaissent peut-être de façon moins abstraite, on peut prendre comme exemple les délibérations des conseils municipaux, lesquels peuvent édicter toute une série de règles en matière de stationnement ou urbanisme par exemple. Pourtant, même si les arrêtés des conseils municipaux sont valides au regard des règles d’adoption (domaine d’intervention, quorum, vote etc…), il se peut que ces arrêtés contreviennent à une norme supérieure : la loi pénale ou les règles d’urbanisme pour reprendre l’exemple.

Pour le surplus, je m’en remet à Maxim’s LLP dans le n°164, et à dura lex sed lex dans le n° 166.

168. Le mercredi 25 novembre 2009 à 12:42 par OlEB, juge debase

Mon cher DMonodBroca (#165), le droit positif n’est pas une astuce sémantique comme les autres notions que vous évoquez mais une formule reconnue avec un sens précis. En l’occurence je citerai le Vocabulaire Juridique de l’excellent doyen Cornu :

“Droit positif : ensemble des règles de Droit effectivement en vigueur par opposition à Droit idéal ou Droit naturel”.

J’ajouterai qu’on l’emploie également pour désigner le droit en vigueur par opposition à celui qui ne l’est plus (textes abrogés expressément ou implicitement, principes généraux contredits par un texte postérieur contraire, etc…).

Maxim’s n’essayait donc pas de vous enfumer par une formule creuse mais d’expliquer qu’actuellement, selon le droit en vigueur dans notre beau pays qui croit aux Droits de l’Homme, le traité a une valeur supérieure à la Loi (au sens d’acte délibéré par le Parlement) et que les juges ne font qu’appliquer ce principe énoncé dans la Constitution, laquelle est l’expression suprême de notre souveraineté.

169. Le mercredi 25 novembre 2009 à 13:17 par Véronique

@ Jalmad (post 160)

Disons que l’esprit d’indépendance est selon ma vision bien plus rudement mis à l’épreuve au parquet qu’au siège. Donc au fond l’expérience du parquet peut être aussi une grande école d’apprentissage de ses propres limites, mais aussi de ses propres capacités en matière d’autonomie intellectuelle.

Maintenant sans cesse devoir se heurter à des hiérarchies complaisantes ou frileuses peut en épuiser plus d’un.

Après il y a l’indépendance statutaire dont je ne maîtrise pas tous les éléments théoriques, très loin de là.

Pas sûre d’avoir le courage de rester ferme sur mes positions de principe, en refusant par exemple de monter à une audience si je suis en désaccord total avec ce que souhaite mon chef, ou encore d’appliquer un élément de la politique pénale que je désapprouve.

Disons que la loyauté impose selon moi d’appliquer la loi. Et puis assez simplement, si j’étais magistrat de parquet, j’essaierai toujours de clarifier vis-à-vis de moi-même ce qui est du ressort de la défense de l’intérêt social et ce qui est du ressort de la défense des intérêts seuls de l’exécutif. Je ne dis pas non plus que le partage soit toujours aisé à établir.

Ce qui nous permet parfois de filer (avec parfois, en off, “l’approbation” d’un parquet qui souhaite que ça change, mais qui ne veut pas se “griller” avec son commissariat…

C’est là où si je me réfère au sujet d’Eolas que les choses me font peur. Je peux comprendre qu’entre un parquet et un commissariat les relations de travail sont telles que les uns ménagent les autres et inversement. Au prix de devoir renoncer souvent à être trop regardant.

Aussi dans la phase GAV et présentation au procureur qu’explique Eolas, il est selon moi très necessaire d’introduire un tiers qui est l’avocat. Pour simplement fragiliser les connivences et les trop grandes prudences. Pour empêcher qu’elles ne deviennent des habitudes et des usages qui finissent par la longue à aller de soi. .

170. Le mercredi 25 novembre 2009 à 13:22 par draftbold

@ eolas /27

Eolas:
○ Non. La nullité aurait dû être soulevée devant le tribunal avant toute défense au fond. Si l’avocate commise d’office avait eu accès aux images, elle aurait pu le plaider. Mais elle est désormais forclose. Art. 385 du CPP.
○ Non. Ce ne sont pas des propos qui révèlent une partialité du tribunal.

Que la diffusion des images ne serve plus Ali c’est une chose.
Mais le policier et selon sa pratique mediatisée de plusieurs “irrespects” du code de procedure penale est il en simple hypothèse pénalement poursuivable ?

Je sais que les loups ne se mangent pas entre eux, mais le parquet ne devrait/pourrait il pas poursuivre si cela est encore pénalement répréhensible ?

171. Le mercredi 25 novembre 2009 à 13:22 par Dreamer Marie

Je dis peut-être des bêtises, mais il me semble que le renforcement des droits de la défense ne peut pas être une mauvaise chose pour l’ordre public. Vu que la plupart des émeutes ont l’air de commencer par des bavures policières, la présence d’un avocat ayant pris connaissance du dossier pendant une garde à vue, au moins pour les interrogatoires et la signature du PV, ne peut qu’inspirer les forces de police à se comporter correctement et à respecter les droits des prévenus.
Je ne prétends pas que les forces de police violent la loi de façon courante (en fait, je n’en sais rien), mais s’ils font leur boulot correctement, ils n’ont rien à craindre de la présence d’un avocat, non?

172. Le mercredi 25 novembre 2009 à 13:41 par Maxim's LLP

Le droit positif est l’ensemble des règles applicables dans un pays à un moment donné. Aucune astuce. Je parlerai donc de loi prise en sa conception extensive si le terme vous parait moins suspect.

A vous suivre la loi ne ferai qu’accroitre les phénomènes et dérives contre lesquels elle entend lutter. Pour assurer un bon déroulement de la garde, il conviendrait donc, selon votre raisonnement, d’abolir toute règle l’encadrant (!!?).

Si les gardes à vue sont de plus en plus brutales, ce qui reste à démontrer, ne serait-ce pas plutot parce que ceux qui sont chargés de la mettre en oeuvre ne disposent pas des moyens nécessaires

il y a 2 sources de droit, la loi de la République d’une part et les traités d’autre part

Une telle affirmation est inexacte, les sources du droit sont multiples mais doivent s’intégrer au sein d’une hiérarchie des normes qui est, elle, unique, chaque norme devant respecter celle qui lui est supérieure et s’imposant sur celle qui lui est inférieure.

En conséquence si un décret est contraire à une loi, le premier devra être écarté par le juge.

Le raisonnement tenu par ceux qui critiquent les conditions de l’intervention de l’avocat lors de la Garde à vue est le même.

Au sein de la hiérarchie des normes, la CEDH est supérieure à la loi française. Si la loi française lui est contraire cette dernière doit être écartée

Cela permet d’assurer le respect d’un traité approuvé par les représentants de la volonté générale, dans des conditions elles même approuvées par le peuple lui même.

S’il ya donc bien plusieurs sources de droit, le respect de la hierarchie des normes, par les juges, le législateur et le pouvoir réglementaire, permet de s’assurer que toutes vont dans le même sens.

Bien à vous

173. Le mercredi 25 novembre 2009 à 13:55 par DMonodBroca

@ dura lex sed lex

Merci de ces précisions. Mais je reste sur ma faim

Vous opposez droit positif à droit naturel, soit, mais je me suis toujours aussi demandé ce que pouvait bien être le droit naturel. Le droit, par nature, si j’ose dire, n’étant pas naturel.

Avec les différentes sources du droit et leur hiérarchie on en revient à la question que je soulevais. Rien n’est simple j’en conviens bien volontiers. Ce n’est pas une raison pour tout compliquer comme à plaisir. Mettre la CEDH au-dessus de tout complique les choses, introduit de l’ambiguïté, dévalorise la loi républicaine, alimente une polémique stérile.

L’objectif poursuivi, moins de gardes à vue et des gardés à vue mieux traités, s’éloigne au gré des effort faits pour s’en approcher…

174. Le mercredi 25 novembre 2009 à 14:03 par jalmad

@ DmonodBroca, OlEB, LLP Maxim’s, dura lex sed lex et Sous toutes reserves :

popopopopopop……M. DmonodBroca fait semblant de ne pas savoir ce qu’est le droit positif…c’est un peu lui faire insulte que de le soupçonner du contraire….je crois qu’il indique juste que c’est une expression qui, sous couvert de simplicité trompeuse, renvoit en réalité à un sacré foutoir de normes….et il n’a pas tort.

en revanche, je ne le suis pas du tout, lorsqu’il indique (165) que la multiplicité des sources du droit (aaaaahhhhhh, la notion de “source du droit”, n’a pas l’air, elle, de le déranger, alors que dans le genre fumeuse, elle est pas mal, celle-là….:)

crée une situation contraire au droit, contraire à la raison, contraire à la paix civile. Ah non, désolée, l’histoire montre justement à l’échelle tectonique chomsko-tschokienne que c’est en se dotant d’outils supranationaux que les Etats se sont un peu plus civilisés et ont dû renoncer, au moins de façon affichée, à l’usage de la violence. Là où il y a encore quelques décennies, on pouvait clairement partir en guerre pour élargir ses frontières, démettre un dirigeant pas à notre goût, récupérer des ressources naturelles, etc….on doit maintenant avancer masqué, et inventer tout plein de termes de novlangue ou invoquer de faux prétextes (par exemple, des armes de destruction massives, un corridor humanitaire etc…) destinés à faire passer la pilule. Cela montre quand même que la société civile est attentive au respect du droit, même si, dans la pratique, malheureusement, tout n’est pas parfait. Et bien, pour le droit, c’est pareil : la France, si fière de ses Lumières, et tellement donneuse de leçons qu’elle n’a pu que signer la CEDH (Eolas a rappelé dans quelles conditions elle y a mis une teeeeeeelllllllement bonne volonté), mais désormais engagée, ne pourra plus jamais dire “les droits de l’homme, on s’en tape, et la CEDH, qu’elle aille se faire voir, on fait ce qu’on veut chez nous”. Et il est justement raisonnable et lucide pour un Etat démocratique d’instituer au législateur, en matière de libertés publiques, des limites infranchissables. Avant, il y avait les Constitutions, ou équivalent, nationales ; maintenant, il y a juste AUSSI des barrières supranationales. Et ben moi, plus il y a de barrières, plus contente je suis, surtout lorsqu’on voit avec quelle légèreté on réforme la procédure pénale tous les 4 matins.

de même lorsqu’il indique comment ne pas sentir que mieux sont protégés par la loi les gardés à vue, plus les gardes à vue sont brutales, . Ah bah, moi, je ne le sens pas, non. C’est même sensé avoir l’effet inverse….à condition qu’on vive bien évidemment dans un monde où les OPJ considèrent que les droits de la défense ne sont pas une mesure de défiance à leur endroit ni une “protection” des délinquants, mais bien un DÛ dans une société démocratique et le SEUL moyen d’aboutir à une enquête à la fois efficace et équitable. Les exemples célèbres et paroxystiques d’aveux extorqués devraient suffire à tous nous en convaincre : pendant que M. DILS croupit 17 piges en prison, ce qui, en soi, est intolérable, le véritable auteur court lui toujours est assuré d’une impunité totale…..

si l’on prend l’exemple de l’enregistrement video des GAV criminelles et des interrogatoires criminels chez le Juge d’instruction, réforme très mal vécue par un certain nombre d’OPJ mais aussi de JI, c’est assez instructif. Pour les OPJ avec qui j’ai pu parler de cela, la totalité m’ont indiqué qu’au final, ça n’avait pas changé énormément leur pratique, seuleme,t à la marge, mais sur des points qui me paraissent révélateurs. par exemple, l’OPJ qui tutoie un gardé à vue va désormais lui poser la question devnat la caméra, et lui dire qu’il peut le tutoyer en retour. De fait, je pense que le tutoiement n’est pas, la plupart du temps, utilisé par les OPJ par souci de marquer leur supériorité, mais plutôt du fait du lien de proximité qui peut se créer lors d’une GAV (non, ce n’est pas le monde oui-oui, je sais, mais les GAV criminelles ne sont pas non plus représentatives de la GAV moyenne…) ; et souvent, le tutoiement sera réciproque. Et bien, moi, je préfère que cela soit transparent, acté, filmé ; c’est de nature à lever toute suspicion à l’égard du comportement de l’OPJ, et donc à renforcer la force probante des déclarations faites en GAV. Et, au final, l’OPJ aussi, il préfère.

pour la video chez le juge d’instruction : moi aussi, au début, ça m’agaçait un peu, encore que je trouvais cela bien plus défiant envers les avocats, dont on semble insinuer par cette mesure, que leur présence est là pour le decorum…et puis je me suis dit qu’après tout, je peux me tromper en retranscrivant et que cela échappe à la vigilance de ma greffière et de l’avocat présent, je peux aussi (même si j’évite) me laisser emporter face à un mis en examen qui m’agace et, dans mon aveuglement, ne retranscrire que ce que j’aurais bien voulu entendre…et bien, si tel est le cas, alors cela me RASSURE de savoir que l’enregistrement pourra peut-être rétablir un équilibre qui avait été rompu.

175. Le mercredi 25 novembre 2009 à 14:15 par pratiquepratique

Revenons un peu a la pratique :

1) Est ce que vous avez souleve cette semaine la nullite des pv d’interrogatoires du a l’absence de l’avocat ?

2) Est ce que vous avez obtenu des annulations?

Dans le proces des refugies Tamouls a Paris qui ont perdu au Sri Lanka donc c’est le moment de les enfoncer , la nullite a ete souleve d’apres le Monde.fr mais rejetee (ouf!!).

Merci de nous tenir au courant, confres des villes et des champs.

Le premier a droit de publier le jugement annulant la procedure.

176. Le mercredi 25 novembre 2009 à 14:50 par A.P.

@Eolas en 31 :

”Eolas:
précisément, on n’en sait rien, puisque l’avocat n’a pas accès au dossier. Mais se taire est un droit maintes fois consacré par la CEDH. Et il est difficile de s’enfoncer en se taisant.”

Cher Maître des Lieux,

Que pensez-vous des délits d’opposition à fonction des agents de l’administration qui existent dans certaines matières ?

Dans cette affaire, par exemple, une personne objet d’une enquête de concurrence (matière pénale au sens de la CEDH) a noirci certains passages de documents avant de les transmettre aux fonctionnaires. La Cour de cassation a confirmé le délit d’opposition à fonction.

Pour ma part, je suis très dubitatif quant à la compatibilité de cette infraction avec le droit de ne pas s’auto-accuser.

177. Le mercredi 25 novembre 2009 à 14:58 par DMonodBroca

@ OlEB, LLP Maxim’s, dura lex sed lex, Sous toutes reserves, Jalmad

Merci à tous pour vos réponses.

Pour changer de perspective, et à traits trop rapides, est-il raisonnable de mettre la Constitution de la République, et donc la Déclaration des Droits de 1789 rédigée “en présence et sous les auspices de l’Etre suprême”, sous la tutelle d’une déclaration européenne rédigée par un cénacle adhoc sous l’effet des circonstances ? Je le crois pas. Ni la raison ni la justice n’ont à y gagner.

Qu’est la situation ? : des lois et procédures en permanente révision et devenant incompréhensibles, des procédés policiers qu’on imaginerait révolus, des erreurs judiciaires à répétition… En clair : nous ne savons plus ce que nous faisons. Cette foi mal placée en la CEDH me semble être un des symptôme du mal.

178. Le mercredi 25 novembre 2009 à 15:26 par EPR

@DMonodBroca

La Constitution (et donc la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen) ne sont nullement sous la tutelle de la CEDH.
Les conventions internationales régulièrement ratifiées ont une valeur supra-législative, non supra-constitutionnelle.

Valeur supra-législative qui lui est reconnue…par la constitution.

Et c’est bien le Peuple Français qui a approuvé par référendum une constitution consacrant l’effet direct en droit interne des conventions internationales!
Ce sont les représentants de ce même Peuple qui ont ratifié la CEDH, puis qui ont levé la réserve relative au recours direct…

Vous pouvez regretter ces choix fait par vos concitoyens et par vos représentants. Mais opposer la CEDH à la volonté de la République (ou du Peuple, c’est pareil) est un non-sens.

179. Le mercredi 25 novembre 2009 à 15:26 par EPR

@DMonodBroca

La Constitution (et donc la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen) ne sont nullement sous la tutelle de la CEDH.
Les conventions internationales régulièrement ratifiées ont une valeur supra-législative, non supra-constitutionnelle.

Valeur supra-législative qui lui est reconnue…par la constitution.

Et c’est bien le Peuple Français qui a approuvé par référendum une constitution consacrant l’effet direct en droit interne des conventions internationales!
Ce sont les représentants de ce même Peuple qui ont ratifié la CEDH, puis qui ont levé la réserve relative au recours direct…

Vous pouvez regretter ces choix fait par vos concitoyens et par vos représentants. Mais opposer la CEDH à la volonté de la République (ou du Peuple, c’est pareil) est un non-sens.

180. Le mercredi 25 novembre 2009 à 15:51 par petit comique

Bon billet,

cela dit, grave question qui me turlupine depuis deux jours….
Bi Luo Chun ou bien Bi Lui Chun pour Jeannot et son bon maître ?

181. Le mercredi 25 novembre 2009 à 16:28 par Exceptio

C dans l’air sur la Garde à vue ce soir !
Le Maître de ces lieux pourra, espérons-le, nous dire si la situation aura bien été décrite.

182. Le mercredi 25 novembre 2009 à 16:30 par dura lex sed lex

@ DMonodBroca

Si l’on s’en fie à Hobbes ou à Rousseau, le droit naturel existe. Il s’agit du droit des hommes dans l’état de nature. De droits inaliénables que tous hommes à dès sa naissance par exemple. Cela ne vous rappelle rien ?
Concernant la hiérarchie des normes, il n’y a aucune complication. La Convention Européenne des Droits de l’Homme est un traité international, donc elle est au-dessus des lois en vertu de la Constitution elle-même au-dessus des lois. Cela ne dévalorise pas la loi républicaine, cela lui donne un cadre bénéfique aux citoyens.
Comme l’indique EPR, il n’y a pas de tutelle de la Convention Européenne des Droits de l’Homme sur la Constitution de 1958 ou la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. Il y a une coordination.
Vous parlez de la CEDH comme d’une “déclaration européenne rédigée par un cénacle adhoc sous l’effet des circonstances”. C’est curieux que si l’on excepte le côté européen, cela ressemble fort à ce qu’est la DDHC de 1789. Une déclaration rédigée par un cénacle adhoc, l’Assemblée nationale anciennement Etats généraux, sous l’effet des circonstances, en l’occurrence la Révolution de 1789.
La CEDH donne plus de garanties aux citoyens, mieux aux hommes dans le sens humain, des pays signataires de la convention contre l’arbitraire. Contrairement à vous, je n’y vois que des gains que cela soit pour la raison ou pour la justice.
Vous énumérez lois et procédures en permanente révision, procédés policiers censés révolus et erreurs judiciaires à répétition. La faute en revient-elle à la CEDH ? Il semble que non, puisque si cette dernière était respectée les éléments que vous citez ne seraient qu’anecdotiques. Rien qu’en ce qui concerne les lois et procédures, il est évident que ce n’est pas le respect de la CEDH qui anime le législateur dans sa production intensive.
L’objectif poursuivi, à mon sens, par les avocats du Barreau de Paris comme de tous les autres barreaux j’en suis sur n’est pas moins de GAV ; mais des GAV plus respectueuses de la CEDH et donc des droits des personnes concernées.

183. Le mercredi 25 novembre 2009 à 17:20 par reno

A l’appui de mes propos (commentaire n° 131), veuillez trouver en PJ un extrait des débats à l’Assemblée nationale, relatifs au projet de loi de ratification de la convention. http://archives.assemblee-nationale… (lire page 7259 du journal officiel).

184. Le mercredi 25 novembre 2009 à 17:22 par Elisabeth

Un bien beau débat… et des commentaires qui vont me poser encore plus de problèmes pour prendre la défense des institutions face à ma fille (12 ans, excellente élève et comportement exemplaire) pour qui les flics sont tous des pourris (culture locale d’un collège de banlieue).

Si on s’appuie sur le manque de moyens pour traiter les gens indignement, quels que soient les soupçons qui sont portés et les preuves afférentes, on devient une république bananière à tous les niveaux (et pas seulement qu’en haut).

Il ne peut pas y avoir de dictature sans collaboration active. Dans notre histoire, on a montré un savoir faire certain en la matière.

En cette période de débat sur l’identité nationale, je propose que collaboration y soit ajoutée, puisque je vois qu’il reste des volontaires et cela compensera les faux-jetons qui prétendent dans les sondages que l’identité française c’est les droits de l’homme.

Et je dis à ma fille d’éviter les flics.

Encore plus qu’avant.

185. Le mercredi 25 novembre 2009 à 18:58 par DMonodBroca

@ EPR, dura lex sed lex

Je reconnais que mes propos ont pu donner dans un certain simplisme juridique. N’empêche… Y quelque chose qui cloche. Comment dire ? “Nous” avons, en 1789, solennellement “exposé” quels étaient “les droits naturels, inaliénables et sacrés de l’homme”. Pourquoi avoir recommencé en 1950 ? C’est à la fois un aveu d’échec et une sorte d’engagement à faire mieux dans l’avenir. Mais c’est surtout un alibi. Et c’est devenu une arme sacrée, un talisman magique. Je crois que nous faisons fausse route. La situation n’est pas bonne, nous en sommes d’accord. Mais attendre de la CEDH que les gardés à vue soient mieux traités me semble illusoire.

186. Le mercredi 25 novembre 2009 à 19:25 par Quixotte

Ca serait bien qu’un ou une expert(e) compétent(e) réponde à la question N° 103 de Christine que je reproduis ci-dessous :
Un OPJ qui décide d’une garde à vue est-il tenu de motiver sa décision ?

Ce serait le seul moyen pour attaquer les GAV abusives, et il y en a certainement des paquets.

187. Le mercredi 25 novembre 2009 à 20:34 par rachello

@DMonodBroca (185)

Merci pour ces attaques contre la Cour europeene des Droits de l’Homme, sa jurisprudence et meme la Convention! Cela montre a quel point, elle gene les fonctionnaires de la Republique francaise qui violent les droits des citoyens. Merci pour cette demonstration.

Le debat est comment faire pour que la Convention soit applique en France en 2009 ?

La reponse est dans le prochain billet de Me Eolas, mais repose sur les citoyens et les avocats de se battre pour leur droit.

Le ministere de la justice ne comprends apparemment que les arrets de la Cour europeene des Droits de l’Homme qui lui sont adresse par la Cour.

Que des milliers d’arret condamnent donc les violations de la Convention par l’administration de la Republique francaise!

188. Le mercredi 25 novembre 2009 à 20:35 par marsan

@ DMonodBroca qui a écrit “Cette foi mal placée en la CEDH me semble être un des symptôme du mal”

Je pense que vous faites erreur en affirmant que cette convention soit un mal. Et pourquoi vous trompez vous ?
Par ce que ce texte est notre assurance européenne contre le retour des vieux démons qu’à connue la première partie du XXème siècle. Avec le traité de Rome c’est ce qui a fait lien entre les nations européennes.
Il est vrai que cinquante ans après on n’a plus toujours en tête le passé, on croit que tout a toujours été aussi radieux qu’aujourd’hui. C’est en réalité un peu plus compliqué.

Non le mal aujourd’hui (comme hier du reste) c’est la volonté des Etats de se dispenser de ses sécurités qu’offrent la convention à chaque citoyen européen et cela au nom du droit au pragmatisme sécuritaire.
Nos policiers ont en effet peur des “fuites” et des “mauvais conseils” durant la garde à vue et ils n’ont pas complètement tort s’agissant de certains délits et crimes.

Alors peut être pourrait on imaginer différentes sortes de garde à vue selon notamment la qualification qui pourrait être retenue dès le début de l’enquête en coordination avec le parquetier de permanence.
C’est peut être complètement idiot comme idée mais je pense sincèrement que l’on ne peut pas traiter une garde à vue pour une diffamation comme une garde à vue pour une association de malfaiteur en vue de commettre un ou plusieurs crimes crapuleux.

189. Le mercredi 25 novembre 2009 à 20:48 par Nichevo

Pas besoin de “motiver” ; il suffit d’avoir des élements laissant à supposer que la personne a commis une infraction.;
Prenons un exemple :
-Un opj dispose d’un élément audio qui lui laisse à penser qu’un avocat a informé un suspect qu’il était sur écoute.
Il convoque cette personne et la place en garde à vue. Il n’a pas à “motiver” sa décision ni a se justifier de toute fouille de sécurité même si la personne mise en cause le prend très mal, du fait de son statut et même si ses collègues le prennent très mal eux aussi , du fait de “l’odieux traquenard “dans lequel elle serait tombée. L’opj n’a pas pris cette garde à vue “à charge” même si il a pris “une charge” de la part de la personne mise en cause au cours de la GAV et de l’ensemble d’une corporation par dessus le marché.
J’ai confiance en notre OPJ; il a respecté les droits de cette personne qui reste innocente jusqu’à preuve du contraire. Il a fait son boulot, même si on a tenté de le déstabiliser.
Je sais qu’il n’a commis aucune erreur , surtout pas dans ce contexte…!
Le juge prend le relais pour la mise en examen. La justice est en marche. Nous verrons par la suite.
C’est un opj motivé , qui n’a pas eu à motiver.
C’est motivant.

190. Le mercredi 25 novembre 2009 à 20:53 par Fred H.

Dans cet article passionnant vous avez, cher Maître, fait plusieurs allusions à l’opposition supposée de notre Guide à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.
Il est vrai qu’en 2005, le futur président avançait un argument puissant : “Si la Turquie était en Europe, cela se saurait “.
Je vous livre un scoop : à présent, il le sait, que la Turquie est en Europe.
Et une preuve : le 9 juillet dernier, au cours d’une conférence de presse donnée à l’issue du sommet du G8 à L’Aquila, un journaliste du Figaro interroge le président sur le bilan de l’Union pour la Méditerranée. Réponse (je cite exactement) : “(…) Cela restera un grand souvenir de mon quinquennat (…). Parce que faire asseoir autour d’une table tous les pays arabes de la Méditerranée, tous les pays européens, plus Israël, c’est quelque chose au moins qu’on aura vu…”.
Décryptons ; il y a - selon l’Élu de la Nation- trois catégories de pays membres de l’UPM : Israël, les Arabes et les Européens. La Turquie (membre de l’organisation) ne peut évidemment faire partie des deux premiers groupes. C’est donc que Notre Président la range parmi les Européens. CQFD.
Dommage que personne à l’époque n’ait relevé. Mais peut-être se trouvera-t-il parmi les heureux lecteurs de ce blog des Turcs europhiles qui pourront vérifier l’exactitude des propos que je rapporte sur le site de l’Élysée :
http://elysee.fr/webtv/conference-d…

191. Le mercredi 25 novembre 2009 à 22:19 par OuvreBoîte

@Nichevo(189)

L’article que vous mettez en lien ne dit pas la même chose que vous ; il n’y a pas marqué que l’OPJ peut mettre en garde à vue toute personne soupçonnable, mais qu’il peut le faire pour les nécessités de l’enquête. Rien dans votre exemple n’explique pourquoi la conduite de l’enquête nécessite de la placer la personne suspecte en garde à vue. S’il y a l’élément à charge est un enregistrement audio, il ne va pas disparaître ou être altéré par le fait de ne pas mettre l’auteur supposé des propos en garde à vue.
En outre :

  • Il est dit que les éléments doivent être plausibles, ce qui est une formulation sensiblement plus forte que celle que vous avez adoptée.
  • Rien de tout cela n’explique la nécessité de la fouille.
  • L’expression le prendre très mal du fait de son statut est parfaitement révoltante. Une personne ayant un statut social considéré par vous comme inférieur est sensé bien prendre le fait de se faire visiter les orifices par un fonctionnaire de la police nationale ?
  • Je sais qu’il n’a commise aucune erreur : ou bien vous étiez sur place et vous avez tout vu et lu tout le dossier, ou alors on dépasse allègrement les frontières du corporatisme. Considérer à priori que quelqu’un du même corps ne fait pas d’erreur, on touche au mysticisme.
  • Je ne sais qui vous cherchez à convaincre avec une défense du type il n’a pas (…) à se justifier mais ça va être fortement contre-productif.

192. Le mercredi 25 novembre 2009 à 22:33 par Octave

@144 (Zadvocat) : les Secrétaires de la Conférence ont publié sur leur site une réponse aux propos du syndicat Synergie-Officiers mettant en cause ces fameux commerciaux dont les compétences sont proportionnelles au montant des honoraires perçus….

http://laconference.typepad.fr/conf…

193. Le mercredi 25 novembre 2009 à 22:39 par keramzec

A l’issue de la GAV, a t’on le droit d’obtenir une copie du PV que l’on a signé ? Si non, peut t’on le recopier?
Merci EOLAS de me répondre à ce sujet, au cas où…

194. Le jeudi 26 novembre 2009 à 07:38 par Philonous

@182 dura lex sed lex: “Si l’on s’en fie à Hobbes ou à Rousseau, le droit naturel existe. Il s’agit du droit des hommes dans l’état de nature. De droits inaliénables que tous hommes à dès sa naissance par exemple. Cela ne vous rappelle rien ?”

Euh, ma précision sera bêtement historique… Selon Rousseau, le droit naturel n’existe pas, il dit explicitement que le droit doit résulter d’une convention et que toute autre origine est factice. L’état de nature est pour lui un état hypothétique, hors de toute société, dans lequel il n’y a pas de droit du tout… Ce n’est guère mieux pour Hobbes: le “droit naturel” existant à l’état de nature est “le droit de préserver sa vie par tous les moyens dont on dispose”. En gros, en l’absence de règles communes, chacun a le “droit” (les guillemets ont de l’importance) de faire tout ce qui est en son pouvoir pour se protéger, les rapports entre les hommes étant essentiellement des rapports de force. La justice n’apparaît réellement que quand on se donne des lois par convention.

Le droit naturel au sens où on l’entend quand on parle de Droits de l’Homme est plutôt lié aux réflexions de Grotius, Locke, voire Strauss (pour n’en citer que quelques-uns) et repose sur:
- l’idée que l’autorité souveraine ne peut porter atteinte à certains droits fondamentaux, qu’on doit reconnaître à tout homme, quelle que soit son origine. Il s’agit donc de limiter le pouvoir de l’Etat quand il dégénère, en entament notamment la liberté de l’individu. Dans une démocratie, comme le droit doit protéger la liberté de l’individu, il s’agirait plutôt de rappeler l’Etat à ses devoirs,
- l’idée que le droit positif doit reposer sur certaines valeurs fondamentales s’il veut effectivement s’appliquer de manière équitable, sans quoi la “justice” définie par la loi aurait peu de chance d’être juste.

195. Le jeudi 26 novembre 2009 à 07:41 par Nichevo

Touché !

196. Le jeudi 26 novembre 2009 à 08:01 par Nichevo

Soyez fair-play et évitez de dresser un personnage de tortionnaire chilien à chaque fois qu’un OPJ place en garde à vue un de vos collègues; et svp, dites vous bien qu’il bénéficie lui aussi de la présomption d’innocence même si ce n’est pas lui qui est mis en cause au début de cet exemple.
Ce corporatisme plaide en votre défaveur et je suis sincère.

197. Le jeudi 26 novembre 2009 à 09:34 par Pas encore pendu

On m’a fait la fouille approfondie, le policier avait l’air sincèrement gêné. Je crois qu’il a bien fait quand même.

J’ai passé une partie de mes nuits en cellule de GAV le regard fixé sur une barre de ferraille (châssis de fenêtre) qui avait l’air mal scellée et bien pointue, me demandant si je pourrais la tordre et me jeter dessus pour m’empaler. Ce n’était qu’un fantasme, une façon peut-être de m’obnubiler l’esprit, mais…

Même parmi les fraudeurs du métro ou les délinquants routiers, il peut y avoir des suicidaires. Qui peut savoir quels drames se jouent par ailleurs dans leur vie, qui pourraient se cristalliser lors de ce stress de la GAV? Comment le policier peut-il savoir?

La procédure qui passe par une fouille approfondie, la confiscation des ceintures, etc, sert à protéger les mis en cause contre eux-même, mais aussi les policiers contre un éventuel suicide qui se produirait sous leur responsabilité.

L’avantage d’une procédure, c’est qu’elle s’applique à tout le monde, elle ne demande pas de jugement subjectif (celui-ci m’a l’air équilibré, celui-là m’a l’air fragile ou dangereux). Demandez même à un psy de vous garantir que quelqu’un ne va pas faire une tentative de suicide, vous verrez s’il va vous répondre.

De toutes façons, le débat de ce billet n’est pas sur les conditions pratiques de la GAV, mais bien sur la possibilité d’assurer une juste défense lors d’une GAV.

(faudrait que je pense à changer de pseudo, celui-ci -référence au billet “dépendons les pointeurs”- est vraiment trop glauque)

198. Le jeudi 26 novembre 2009 à 09:57 par blabla

@196 Mapics:

Votre histoire, sans mauvais jeu de mot, semble pleine de trous:

Je résume; pas de titre de transport = normalement une contravention par la SNCF ou la RATP.

Admettons que des policiers passent par là ou soient requis par la SNCF pour vous contrôler et relever votre identité = conduite au poste pour vérification d’identité et éventuellement fouille de sécurité.

Comment diable avez-vous atterri en garde à vue ?

199. Le jeudi 26 novembre 2009 à 10:10 par lapocompris

@ Fred H. #190
Malheureusement, l’explication la plus plausible est que, comme la plupart des policiers, il classe les Turcs parmi les Arabes.

200. Le jeudi 26 novembre 2009 à 11:28 par Bébert

Merci pour ce billet très utile à l’heure où l’on envisage de durcir les conditions de garde à vue et de les allonger pour les violeurs (elles sont déjà plus longues pour les suspects de « terrorisme »). Guillaume Dasquié, un journaliste du Monde, qui s’est retrouvé en garde à vue pour avoir publié un article, a écrit voici un ou deux ans a écrit un long témoignage sur cette expérience douloureuse dans le Monde. Il confirme en tout point cette pression et cette absence de droit pour obtenir l’aveu (ici le nom de sa source). On n’enlève d’ailleurs pas que les lunettes des gardés à vue, mais également les soutiens-gorge des femmes parce que les baleines peuvent servir… d’armes. Il faut se souvenir de toutes les affaires où des prévenus ont dit n’importe quoi juste pour échapper à une situation que l’on qualifiera pudiquement de « stressante ». Le phénomène des faux aveux est bien connu et plus courant qu’on le croit http://www.psychologicalscience.org… On connaît les cas célèbres de P. Dils ou de M. Machin. Un autre exemple troublant est celui d’Alexi de la tuerie de Louveciennes. Mineur à l’époque (y a-t-il des règles spéciales pour les mineurs ?) il était ensuite revenu sur ses aveux et aujourd’hui de grands doutes planent sur sa culpabilité. Le problème est que ces faux aveux vont être tirés comme un boulet tout au long de l’instruction. Pourquoi donc refuser l’assistance d’un avocat dans un moment crucial où tout se joue ? Je crois (dites-moi si je suis naïf) qu’un avocat conseillera toujours à son client de s’expliquer le plus clairement et le plus complètement possible, puis déterminera avec lui la stratégie la plus adaptée en fonction de sa version des faits, à condition que celle-ci lui paraisse assez crédible et soutenable.
Les déclarations, bribes de déclarations, absence de déclarations, déclarations confuses, obtenues en garde à vue dans un état de fragilité, sous la pression, sans les informations nécessaires, sans les conseils d’un professionnel, parfois au moyen de pièges, laissent la porte ouverte à toutes les erreurs et à des dossiers mal engagés dès le départ. Un avocat est de bon conseil et orientera son client dans la meilleure direction ce qui sera finalement profitable à une enquête qui doit se faire à charge et à décharge. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que bien des personnes en garde à vue ne maîtrisent pas parfaitement toutes les subtilités de l’expression orale dans un moment où chaque mot compte. Leurs déclarations maladroites pourront être mal interprétées. Par ailleurs ce sont souvent les innocents qui sont les moins convaincants… Donc oui mieux vaudrait se taire plutôt que dire des bêtises ou s’emmêler les pinceaux.

201. Le jeudi 26 novembre 2009 à 11:41 par Bébert

@Eolas, Fraglagla 79 et The Lawyer 109
La question du droit au silence et de ses conséquences m’intrigue. Est-ce que juridiquement une absence de déclaration est une déclaration ? Évidemment, on peut comprendre qu’un accusé qui refuse obstinément de parler paraisse suspect. Pour monsieur tout le monde, une telle attitude induira fatalement qu’il a quelque chose à cacher (même si c’est faux comme dans le cas de Julien Coupat ). Une absence d’aveux, des versions fluctuantes ou des rétractations dans les premiers moments de l’enquête auront probablement un effet néfaste au moment où les jurés se forgeront leur intime conviction. À l’opposé la reconnaissance de sa responsabilité, la pleine coopération avec les enquêteurs peut engendrer un a priori plus favorable et peut être l’indulgence en fin de compte.
@79
Le cas de Florence Rey est un assez mauvais exemple. Il a été prouvé que le silence de Florence Rey n’était pas tactique. Il était l’expression du désarroi de cette enfant dépassée par les faits atroces auxquels elle venait de participer. Les psychiatres ont expliqué ce blocage en montrant qu’il était lié au choc de la mort de son amant et à son enfance troublée par la maladie mentale de son père. Ses avocats ont tout fait pour la pousser à parler tant au cours de l’instruction qu’au procès. Me Leclerc lui a même dit qu’en ne s’exprimant pas elle lui rendait la tâche encore plus difficile (ils ont plaidé les remords sincères de l’adolescente). Certains observateurs jugent que si elle s’était mieux défendue et qu’elle était parvenue à dire devant la cour ce qu’elle ressentait sur les faits et qu’elle confiait à ses avocats en « coulisses » elle aurait probablement eu une peine plus légère.
Mais il s’agit là d’un tout autre débat qui ne concerne pas son silence obstiné durant la garde à vue (de toute façon elle a été prise en flagrant délit et il y avait assez de témoins et de preuves pour reconstituer les faits. Donc à ce stade qu’elle se taise ou non…). Ce qui a pu jouer contre elle c’est son mutisme au procès.
Dans le cadre d’une procédure orale, un accusé qui « présente bien », qui a le verbe facile, qui sait adopter le bon ton, choisir les bons mots, contourner les questions pièges est me semble-t-il naturellement favorisé. Les prévenus qui ont un niveau social élevé ou une meilleure éducation partent donc théoriquement avec un avantage. Si Marc Machin a été condamné c’est aussi parce qu’il ne s’est pas bien exprimé au procès en se montrant parfois cassant ou arrogant. Idem pour l’attitude de Ranucci ou de Dils. Quelqu’un qui a l’expérience de cette situation pourrait-il me dire si un avocat « entraîne » son client pour le préparer à son procès d’assises ? Comme tous les détails compte, est-ce qu’il lui donne des conseils par exemple sur la manière de s’habiller, de s’adresser au président, de répondre, d’éluder ? Est-ce qu’il répète avec lui les interrogatoires en fonction des questions probables ?

202. Le jeudi 26 novembre 2009 à 12:49 par tschok

@ Elhana, com 127 et @ Fantômette, com 128,

Navré, j’ai un peu loupé le coche je crois.

Mais nous auront l’occasion de revenir sur les questions que vous abordez. Il suffit d’attendre…

@ Pas encore pendu, com 198,

Vous remarquerez que votre pulsion suicidaire se produit alors que vous étiez en geôle de GAV, c’est à dire un endroit où la plupart du temps vous échappez à la vue de votre gardien.

De ce point de vue il est donc assez inutile de vous faire écarter les cuisses avant de vous faire entrer dans la geôle au motif de vous préserver d’un risque suicidaire qui aurait pu se concrétiser non pas avec l’aide d’un objet que vous auriez pu porter sur vous en le dissimulant dans les replis de votre corps ou ses orifices naturels, mais en employant un objet que vous vous procurez sur place, en raison du délabrement des lieux.

Au delà de cette considération matériel, on est toujours surpris de voir à quel point une mesure coercitive comme la fouille de sécurité est finalement acceptée en dépit de son caractère humiliant au nom de la sécurité, sans plus de réflexion.

Et vous en rajoutez même une couche: c’est bien parce que c’est une procédure objective applicable à tous.

Objectivement, il est tout à fait possible de mettre en oeuvre des processus objectif applicables à tous - donc justes, dans votre esprit - à des fins absolument terrifiantes.

Par exemple, il est possible de faire passer une visite médicale pour discriminer au sein d’un groupe humain ceux qui vont être orientés vers une filière de travail et ceux qui vont être orientés vers une filière d’élimination.

Cet examen médical en lui-même pourra très bien objectif et applicable à tous. Il pourra même être réalisé par des médecins consciencieux et doux avec les personnes examinées.

Pourtant, dans sa finalité, il sera abject.

Donc, le critère utilitariste (objectif et applicable à tous) n’est pas un bon critère pour distinguer ce qui est bien de ce qui est mal.

Sachant par ailleurs que ce que vous dites est faux: la fouille de sécurité est pratiquée à la tête du client et selon des modalités dont le caractère humiliant est très variable suivant les circonstances.

Donc, non seulement votre prédicat est branlant, mais en plus il ne correspond pas à la réalité.

Cela étant dit, si vous aimez écarter les cuisses, on ne voit pas pourquoi on vous priverait de ce plaisir. Mais permettez qu’on n’ait pas tous le même.

203. Le jeudi 26 novembre 2009 à 15:17 par pendragon

@200 lapocompris

ah la la ces jeunes qui causent pas la france,

on dit pas arabe, mais “individu de type auvergnat”, formule stylistique gouleyante de not’bon hortefeux

204. Le jeudi 26 novembre 2009 à 15:29 par lapocompris

Pour la fouille de sécurité, on doit baisser son pantalon, se pencher et tousser. Si le fait de tousser provoque un pet, y a-t-il outrage à agent ?

205. Le jeudi 26 novembre 2009 à 17:00 par tschok

Non, c’est bon signe: ça signifie que vous n’avez pas planqué un RPG 7 dans votre anus. Même par inadvertance (ce qui peut arriver). D’ailleurs, avant d’entrer en GAV on vous pose la question, comme avant l’embarquement dans un avion à propos des bagages: est ce bien vous qui avez fait votre anus? L’avez vous confié à un tiers? L’avez vous perdu de vue quelques instants? Vous a t’on confié un paquet que vous avez mis dedans sans vérifier son contenu? Etc.

Comprenez, l’imagination des criminels est sans borne. Ah! les enc…!

206. Le jeudi 26 novembre 2009 à 17:18 par Delio

Je suis légèrement hors sujet, mais une question me titille.

Treiber, présumé innocent mais soupçonné de meurtre, s’est évadé de la maison d’arrêt où il se trouvait en détention provisoire. Il a été repris il y a quelques jours. Des gens qui lui auraient apporté quelques secours au mois d’octobre, sont poursuivis pour “recel de malfaiteur”. Comment cela est-il possible puisque Treiber n’a pas été condamné ?

Erreur de journaliste ou de parquetier ?

207. Le jeudi 26 novembre 2009 à 17:47 par Pas encore pendu

@203 tschok
“la fouille de sécurité est finalement acceptée en dépit de son caractère humiliant au nom de la sécurité, sans plus de réflexion.”

Je vous donne mon ressenti, comme personne ayant fait l’expérience directe de la chose, et pour moi il y avait beaucoup plus en jeu que le simple fait de me montrer nu devant quelqu’un que je ne reverrai jamais.

Donc oui, je relativise le caractère humiliant de cette opération, qui me paraît beaucoup moins grave que l’objet initial de ce fil, à savoir si les droits (à la défense, pas à garder son caleçon ou son soutien-gorge) sont bien respectés.

Contrairement à ce que vous dites, j’ai eu pas mal l’occasion de réfléchir là-dessus, et le fait d’y avoir été exposé personnellement m’autorise sans doute à avoir un avis.

“Objectivement, il est tout à fait possible de mettre en oeuvre des processus objectif applicables à tous - donc justes, dans votre esprit - à des fins absolument terrifiantes.”

… et la suite de votre argumentation délirante frôle le point Godwin. Sans compter l’insulte finale qui vous discrédite l’ensemble.

C’est bien beau d’avoir des positions de principe, mais il y a un point où ça devient du fondamentalisme intransigeant, sans connection avec la réalité.

208. Le jeudi 26 novembre 2009 à 17:52 par Roberto

Alors la France va t’elle commencer a respecter la Convention ou cela sera pour 2050?

Des nouvelles des nullites souleves ? des procedures annules ?

Est ce que des avocats ont deja depose une requete a la CEDH sur les violations du 6-1 et du 6-3-C du a l’absence de l’avocat ? (avocats francais bien sur ;) ).

@Pas encore pendu (208)

On a compris. Vous n’irez pas a la Cour europeene des Droits de l’Homme pour violation de l’article 8 de la Convention du a la fouille integrale a nue ILLEGALE que vous avez subis.

Mais cela reste une violation de l’article 8 de la Convention.

209. Le jeudi 26 novembre 2009 à 18:00 par Fantômette

@ Delio,

S’évader est un délit.

Eolas:
Et scandaleusement, la loi Perben II l’a considérablement élargi : avant, il fallait que l’évasion se fît par effraction, violence ou corruption, la ruse étant impune car c’est à l’État de bâtir des murs assez hautes qu’on ne puisse les franchir. Depuis 2004, toute évasion, même avant condamnation (garde à vue, notamment) est punie. La loi exige un emprisonnement volontaire qui est contraire à la nature libre de l’homme. Et d’un point de vue de politique pénale, ça n’a aucun sens. Treiber ne mérite pas d’être puni pour s’être glissé dans ce carton. C’est le directeur d’établissement qui mérite de l’être pour laisser des cartons sortir sans contrôle. 

210. Le jeudi 26 novembre 2009 à 18:10 par roberto

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2…

Si la police ne peut meme plus donner des coups de tetes aux detenus…heuresement que du sursis et pas d’inscription au B2.

211. Le jeudi 26 novembre 2009 à 18:47 par Pas encore pendu

S’évader est un délit, oui, et il sera certainement poursuivi pour cela aussi. Mais tant qu’il n’en est pas jugé, il en est juridiquement présumé innocent (encore que les faits -d’évasion- semblent relativement indéniables).

A l’heure actuelle, en l’absence de jugement ni sur ce délit, ni sur le crime qui lui est reproché, l’appeler “malfaiteur” semble être impossible, donc l’infraction de “recel de malfaiteur” ne peut être encore caractérisée.

C’est, pour l’instant, un “recel de présumé innocent”… :-D

212. Le jeudi 26 novembre 2009 à 19:57 par Kapitan

@ Elisabeth : “Et je dis à ma fille d’éviter les flics.
Encore plus qu’avant.”
Et moi j’explique aux miennes que je ne torture pas durant mes heures de travail et que j’essaye d’appliquer du mieux que je peux les dispositions du CPP et du CP.

213. Le jeudi 26 novembre 2009 à 21:02 par Paul Boyer

Merci pour cette charge contre les injustices de la garde à vue française. Je me félicite chaque jour de ne pas avoir de télévision et d’éviter d’y voir les horreurs qui s’y succèdent décidément.

Je venais au départ sur votre blog pour voir si vous commentiez ce cas :
http://contreinfo.info/article.php3… (“Témoignage : mon fils Léo, 18 ans, condamné sans preuve pour l’exemple, par Georges Belenguier”). L’article dénonce une condamnation à de la prison avec sursis, sans preuve, voire avec des preuves d’innocence, suite à une comparution immédiate d’un jeune arrếté en marge d’une manifestation hostile à sa Très Gracieuse Sainteté, l’honorable Monseigneur Fillon.

J’ignore tout du cas relaté et de la comparution immédiate (pour ne pas dire du Droit en général). J’espère que le témoignage du père est totalement biaisé par un amour le rendant aveugle ou de mauvaise foi. Mais un doute sournois m’assaille et me laisse craindre que la (justice de) mon pays soit, sinon aveugle, du moins presbyte et manque de discernement sur les affaires qui la touchent de près.

Merci d’avance de votre réponse, ou de m’indiquer où vous lire si vous avez déjà traité de ce sujet, et de nous indiquer ce qu’il convient de faire si l’on est arrêté en marge d’une manifestation, ce qui, lorsqu’on est attaché à certaines valeurs républicaines, ne peut pas s’exclure en ce moment.

Par ailleurs, mais c’est totalement hors sujet, si vous avez un conseil pour se procurer un bon thé vert sur Internet, je suis certain que d’autres lecteurs vous seraient tout comme moi reconnaissants.

214. Le jeudi 26 novembre 2009 à 21:55 par Glomerol

Eolas : “À moins qu’un arrêt Coupat c. France ne me grille la politesse ?”
Elle est où la caisse de soutien pour financer le futur arrêt Coupat ?Je souhaite participer.

Sinon : la suite, la suite, la suite…!

215. Le jeudi 26 novembre 2009 à 23:29 par Quixotte

@ 214 Paul Boyer

Il faut faire appel en espérant que les magistrats de la cour d’appel seront plus professionnels et moins sensibles aux sirènes policières

216. Le vendredi 27 novembre 2009 à 01:48 par Delio

Je vous remercie de vos éclaircissements concernant le Code Pénal, chère Me Fantômette. Cependant, pour l’instant, que ce soit pour le fait d’occire la fille d’un talentueux comédien et/ou sa camarade de jeux comme pour le déménagement à la cloche de bois de carton de son studio de 7 m², Treiber n’est pas condamné, il ne peut donc être qualifié de malfaiteur (sauf par le Président de la République en déplacement à l’étranger). Si ?

217. Le vendredi 27 novembre 2009 à 02:43 par tschok

@ Pas encore pendu, com 208,

Je ne vous dénie aucun droit à avoir un avis sur la question, puisque c’est justement cet avis que je critique.

Et la critique est fort simple: votre droit à une défense implique que vous ayez le droit de garder votre caleçon. Tel n’est pas aujourd’hui le cas, ce qui vous amène à distinguer les deux (le droit de se défendre et le droit de conserver son caleçon) alors qu’il n’en font qu’un.

A vrai dire, la façon dont vous avez vécu votre GAV m’est assez indifférente, sans vouloir être désagréable.

Ce qui m’a fait tilter est que vous ayez établi une distinction entre votre défense en droit et le fait qu’on vous fasse subir une mesure coercitive, la fouille de sécurité, à l’intérieur de cette mesure coercitive qu’est la GAV et que vous avez bien supportée.

Votre position consiste à dire: ça ne m’a pas humilié, donc on n’a pas porté atteinte à mon droit.

Mais avez vous librement choisi de baisser votre froc pour vous exhiber nu devant des policiers ?

Si vous ne l’avez pas librement choisi, c’est que vous vous êtes soumis à une forme de domination.

Or le principe, y-compris en GAV, c’est pas la domination. Pas quand on se place sur le terrain du droit en tout cas.

Maintenant, je ne doute pas que les êtres humains puissent encaisser des contraintes de tous ordres, même extrêmement violentes,mais c’est autre chose.

Vous, moi, n’importe qui peut survivre à une mise à nu. Mais est ce une raison pour nous la faire subir de façon automatique, sans motif particulier et parfois de façon très humiliante?

Vous avez l’air de le penser. alors je pense que je ne suis pas aussi insultant que j’en ai l’air lorsque je vous dis que vous avez pris de mauvaises habitudes avec vos cuisses: on apprend très vite à se soumettre et plus lentement à oublier.

PS: sur le godwin point. Oui, je l’ai frôlé. Ca va? Pas trop secoué? Me dites pas que vous êtes une petite chose fragile, c’est juste des mots.

218. Le vendredi 27 novembre 2009 à 09:50 par Fantômette

@ Delio,

En fait, au temps pour moi, j’ai été beaucoup trop rapide dans ma réponse.

L’infraction dite de “recel de malfaiteur” est visée à l’article 434-6 du code pénal.

Vous noterez que le terme de “malfaiteur” n’y figure pas (il ne figure nul part dans le code pénal), mais il s’agit bien de la dénomination doctrinale classique de cette infraction.

Je crois volontiers que des poursuites aient pu être engagées sur ce fondement à l’encontre de personnes qui restent également (puisque nous n’en sommes bien qu’au stade des poursuites), présumées innocentes.

L’article 434-6 CP vise cependant bien “l’auteur… d’un crime ou d’un acte de terrorisme”, ce qui pourrait renvoyer à l’idée qu’il faudrait s’être d’abord assuré de sa culpabilité, et donc l’avoir préalablement condamné.

En terme de politique pénale, il faudrait cependant alors assumer qu’une personne ou des personnes protégeant en toute connaissance de cause des personnes soupçonnées de crimes, jusqu’au point de permettre qu’elles échappent définitivement à toutes poursuites ne pourraient elles-mêmes jamais être poursuivies.

Inutile de vous dire que ce ne fut pas la position retenue par la jurisprudence sur ce point, qui précise, depuis le milieu du XIXème siècle, que le recel de malfaiteurs s’applique au cas de recel des individus poursuivis, et non pas seulement au cas de recel des condamnés.

Il n’est même pas requis d’attendre la condamnation des “malfaiteurs” pour condamner leurs receleurs.

Si vous lisez attentivement l’article 434-6 CP, vous verrez d’ailleurs qu’il évoque expressément le fait de soustraire ce malfaiteur “aux recherches ou à l’arrestation”. L’intention du législateur est donc bien de viser les personnes poursuivies aussi bien que condamnées.

Toutefois si, après que des personnes aient été définitivement condamnées du chef de ce recel, l’individu recelé est acquitté, cela constitue un élément nouveau justifiant l’ouverture d’un recours en révision.

219. Le vendredi 27 novembre 2009 à 10:19 par Fantômette

@ pas encore pendu,

(Vous pourriez signer PEP, si vous vouliez, non ? Vous conservez la “traçabilité” du pseudo, et c’est effectivement moins glauque)

Je crois que vous n’y êtes pas. Il ne s’agit pas seulement de protéger les gardés-à-vue d’une expérience humiliante, et qui symbolise une forme de soumission, et ceci juste avant qu’ils ne soient interrogés.

Il s’agit de prévenir les abus de pouvoir.

Et j’ai la faiblesse de croire, sur ce point précis, que l’abus de pouvoir met en danger aussi bien celui qui le subit que celui qui y procède.

Comme l’a dit Eolas, aucun texte légal n’impose ce traitement. Or la police judiciaire ne tire la légitimité de ses actes que du seul droit qui les encadre. Cette pratique caractérise donc ce qu’il n’est pas disproportionné d’appeler un abus de pouvoir. Tout cela pour accomplir un acte qui, dans n’importe quel autre contexte, serait constitutif d’une agression sexuelle.

L’opposition de tschok, ou celle de n’importe quel avocat qui se respecte, à ce que ces pratiques soient perpétrées dans des conditions si littéralement “hors-la-loi” est une opposition à la fois plus juridique que vous ne l’imaginez, me semble t-il, mais également plus réaliste, plus “connectée à la réalité” que vous ne le pensez.

C’est intéressant d’ailleurs, à ce titre, que ce soit vous qui invoquiez, à la fin de votre dernier com, la nécessité d’être réaliste.

Je vous invite à vous pencher sur votre propre point de vue, à cet égard, qui me semble juché sur un pré-supposé dont je souhaiterais que vous preniez pleinement conscience.

Jusqu’à quel point est-il irréaliste de vouloir faire respecter les droits de la défense dans le contexte d’une politique pénale toujours plus répressive ?

Cela fait des années que l’on nous vend l’idée que les droits de la défense nuisent à l’efficacité d’une bonne politique pénale. Cette idée n’est pas si “connectée à la réalité” que ce que le discours ambiant prétend, croyez-moi.

Ne serait-ce que parce que, comme l’écrivait Jalmad plus haut, lorsque l’on a coincé un suspect dont on s’est trop facilement persuadé de la culpabilité, n’oubliez pas que l’on organise, avec la bénédiction du système, l’impunité du vrai criminel.

220. Le vendredi 27 novembre 2009 à 12:36 par tschok

Oui.

En fait c’est tout simple: le principe n’est pas la domination, c’est la maîtrise.

On dit d’ailleurs: “la police a maîtrisé le suspect”. Pas dominé.

Dominer c’est autre chose. Ce n’est plus une opération de police, c’est une action de guerre.

On mélange les deux, aujourd’hui. Coco Chanel, dit on, affirmait que les soldats américains étaient habillés comme des mécaniciens.

Regardez nos policiers.

Comment sont ils habillés? Comme des mécaniciens.

Et nos soldats sont aussi habillés comme des mécaniciens.

Au salon Milipol, on a mélangé les activités et les armes de police et de guerre. Le seul article que j’ai lu qui s’est ému de cette assimilation se trouve dans le monde, à propos de dispositifs automatiques de surveillance qui ne sont pas en l’état compatibles avec notre jurisprudence.

Réfléchissons à cela.

Si, en tant qu’exposant à un salon, je vend des marchandises qui ne sont pas compatibles avec la jurisprudence de la cour de cassation, je commercialise une marchandise qui encoure la critique d’être illicite.

Y-compris s’il s’agit d’un dispositif de surveillance.

Car si je commercialise du cannabis, j’injecte dans le commerce juridique une marchandise illicite.

Moi, flic, qui me donne les moyens d’épier mon prochain dans des conditions illicites au regard de l’état du droit actuel, je ne vaux guère mieux que le premier dealer venu. J’achète de la “cam” illicite. Mais je porte un uniforme et des armes.

Et je me martialise. C’est la guerre!

Qui veut la fin veut les moyens!

Et les autres l’acceptent (les autres c’est nous).

Allez sur Milipol et allez voir de quelle façon nous allons être dominés. Ils font leurs courses. Faites les vôtres.

Et vous verrez qu’après vous aurez une mentalité d’Afghans.

221. Le vendredi 27 novembre 2009 à 13:04 par Mangèle

@ Fantômette 219

Toutefois si, après que des personnes aient été définitivement condamnées du chef de ce recel, l’individu recelé est acquitté, cela constitue un élément nouveau justifiant l’ouverture d’un recours en révision.

Ne serait-ce pas plutôt le contraire ? Sauf revirement plus récent…

“le condamné pour recel de personnes ne pouvant fonder une demande de en révision sur le fait que l’individu qu’il a recélé a bénéficié d’une décision d’acquittement” (Crim. 2 mai 1946).

222. Le vendredi 27 novembre 2009 à 13:07 par Mangèle

@ Fantômette 219

Toutefois si, après que des personnes aient été définitivement condamnées du chef de ce recel, l’individu recelé est acquitté, cela constitue un élément nouveau justifiant l’ouverture d’un recours en révision.

Ne serait-ce pas plutôt le contraire ? Sauf revirement plus récent…

“le condamné pour recel de personnes ne pouvant fonder une demande de en révision sur le fait que l’individu qu’il a recélé a bénéficié d’une décision d’acquittement” (Crim. 2 mai 1946).

223. Le vendredi 27 novembre 2009 à 13:50 par PEB

Demander à la CEDH d’évaluer les législations nationales par la voie générale, cela s’appelle réintroduire l’arrêt de règlement de nos Parlement d’Ancien Régime. La CEDH a-t-elle vocation à devenir une Cour Souveraine?

La difficulté de la dialectique entre droits conventionnels et droits nationaux tient aussi à la Constitution. Notre loi fondamentale a tant et si bien évolué qu’elle donne un chèque en blanc à l’Union Européenne.

En ce qui concerne la CEDH, c’est plus subtil. Les droits de l’homme sont en principe imprescriptibles. La Cour les préserve sur la base d’une convention les définissant. Les droits de l’homme sont la version laïcisée des droits et trêves de Dieu qui forment ordinairement le droit naturel. Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. (Ac 5, 29) Ainsi, la dignité de la personne, reflet de la gloire du Créateur, se doit d’être gardée en toute circonstance mais selon l’équité. De ce fait, les instances suprêmes qui ont à connaître de ces questions ont un poids supérieur à celui des autres juridictions et magistratures civiles. Sous l’Ancien Régime, l’Empereur devait céder le pas au Souverain Pontife, défenseur de l’étranger, de la veuve et de l’orphelin.

224. Le vendredi 27 novembre 2009 à 13:50 par Patrick Handicap expatrié

A @206
Savez vous que lorsqu’on est trachéotomisé, mon cas, il est impossible de tousser et très difficile de parler, sauf avec une voix oesophagienne, lorsqu’on a subi une longue rééducation. Par contre, le trou que vous avez pour respirer à la base du cou est juste à hauteur des visages pour leur envoyer un bon gros molard sans le faire exprès lorsque vous éternuez…

225. Le vendredi 27 novembre 2009 à 14:00 par tschok

@ PEB,

Un chèque en blanc? Oh! Je tremble.

L’Europe dilapide les fonds du contribuable français!

Ouais.

Tenez, Sire, voilà quelques billets à ordre à signer.

Pour les frais de la république.

Enfin, ceux de ses hiérarques.

Quoi?! Vous les signez?

Mais, Sire, vous les signez et pourtant vous êtes le peuple!

Alors nous faites pas chier avec le CEDH qui ne se préoccupe pas de notre argent, mais de nos droits.

226. Le vendredi 27 novembre 2009 à 14:02 par tschok

@ Patrick,

Faut parler avec le cul.

En GAV, c’est devenu le principal orifice qu’on regarde.

On se demande encore pourquoi.

Défense nationale!

227. Le vendredi 27 novembre 2009 à 18:23 par Fantômette

@ Mangèle,

Hm, c’est surtout que le nouveau code pénal a modifié l’incrimination.

Avant, le recel de malfaiteur visait le recel de la personne que l’on savait avoir commis un crime, ou que l’on savait recherchée de ce fait par la justice.

Du coup, une interprétation rigoureuse de l’incrimination autorisait la jurisprudence que vous citez (qui reste néanmoins contestable à mon sens).

La nouvelle rédaction de l’article 434-6 CP n’autorise plus, d’après d’éminents auteurs, la sévérité d’une telle jurisprudence. Et l’interprétation faite par la cour de cassation de la notion de “fait nouveau” au sens de l’article 622 4° CPP porte à croire qu’elle pourrait trouver à s’appliquer dans ce cas d’espèce, quoique je n’ai pas trouvé d’arrêts rendus en ce sens.

228. Le vendredi 27 novembre 2009 à 22:12 par EPBG

@ EOLAS

Sonnez trompettes, résonnez haubois

J’ai été amené à plaider ce matin 27/11/09 devant mon Tribunal Correctionnel la nullité des auditions de mon Client et corrélativement sa relaxe sur le fondement des Conclusions qui circulent actuellement dans la Profession, Conclusions fondées sur la Jurisprudence CEDH “SALDUZ”.

Un appel a été interjeté dans la foulée puisque le Tribunal, suivant en cela les observations du Parquet, est entré en voie de condamnation.

Ce dossier me semble très intéressant dans la mesure où les seules preuves contre mon Client découlent de ses déclarations auto-incriminantes en garde-à-vue puisqu’il à - suivant en cela mes conseils - refusé de répondre aux questions de fond du Tribunal.

Au surplus, mon Client, compte-tenu d’un risque pénal plus que symbolique, et après avoir compris les enjeux de ce dossier “de principe”, est prêt à suivre le dossier jusqu’à la CEDH à travers la Cour d’Appel et la Cour de Cassation.

Compte-tenu de votre implication dans ce combat, j’ai estimé utile de vous en informer.

@125 : je suis de la province et je ne suis pas du Rotary

229. Le vendredi 27 novembre 2009 à 23:55 par PEB

@tschok: Quel pince-sans-rire êtes-vous!

Il s’agissait d’une métaphore pour dire que notre nation avait abandonné l’essentiel sinon une bonne part de sa souveraineté à l’UE.

Eolas:
Si vous lisiez le billet avant de réciter votre propagande pavnonienne, vous auriez remarqué cette phrase disant que la convention européenne des droits de l’homme « a été signée au lendemain de la Seconde guerre mondiale, dans le cadre du Conseil de l’Europe, une organisation internationale consacrée à la paix et aux droits de l’homme, totalement distincte de l’Union Européenne, notamment en ce qu’elle est beaucoup plus large (47 États membres, dont la Turquie, ce qui en 1950 n’a choqué personne), et qu’elle la précède de 7 ans. » Je vous laisse pleurer sur la souveraineté perdue de la France et la perte de l’Empire colonial. C’était le bon temps, disait mon oncle au moment d’embarquer à Marseille faire son service militaire en Algérie.

230. Le samedi 28 novembre 2009 à 16:08 par loaur

@EPBG (229)

Bravo! a vous et votre client! Si chaque avocat de France et de Navarre amene une requete a la CEDH pour la violation des articles 6-1 et 6-3 c) de la Convention, c’est 40 000 requetes qui vont taper a la porte de la CEDH qui devra pour arreter le flot, prendre un arret pilote condamnant la France et obliger la France a annuler des milliers de proces.

N’oubliez pas de saisir la CEDH par une lettre simple des maintenant car il n’est pas sur qu’elle estime que les conclusions de nullites devant le tgi/cour d’appel et le pourvoi en cour de cassation soit une voie de requete effective. Dans le doute, mieux faut saisir des maintenant et epuiser ses voies de recours internes apres.

Je vous conseille pour la requete a la CEDH le site HELP du Conseil de l’Europe pour les avocats :

http://moodle.stoas.nl/help/index.p…

Les Handbooks sont tres bien fait.

Et n’oubliez pas que tous la CEDH rembourse les frais pour epuiser les voies de recours internes en cas de victoire (dans la limite du raisonnable) ! Donc votre client ne doit pas s’inquieter.

Me Eolas, on attends votre 2nd billet.

231. Le dimanche 29 novembre 2009 à 16:49 par stufftoknow

Jugement de la CEDH a venir mardi 1er decembre 2009 :

Adalmış et Kıkıç c. Turquie (n° 25301/04)

Les requérants, Sedat Adalmış et Ercan Kılıç, nés respectivement en 1976 et 1974 et résidant à Istanbul. Ils furent arrêtés et condamnés pour appartenance à une bande armée. Invoquant l’article 6 § 1 et 3 c) (droit à un procès équitable), ils se plaignent de ne pas avoir bénéficié de l’assistance d’un avocat lors de leur garde à vue, d’avoir été condamnés sur des dépositions faites dans ces conditions, ainsi que de ne pas avoir fait l’objet d’un procès impartial.

Arikan c. Turquie (n° 14071/04)

La requérante, Hacer Arıkan, est une ressortissante turque née en 1966 et résidant à Balıkesir (Turquie). Le jugement prononçant sa condamnation à perpétuité pour attentat à l’ordre constitutionnel de l’Etat a été infirmé en cassation en 2006 et son affaire est à ce jour pendante devant la Cour d’assises d’Istanbul. Invoquant l’article 6 §§ 1 et 3 c) (droit à un procès équitable dans un délai raisonnable), elle se plaint de l’absence de conseiller juridique lors de sa garde à vue et de la durée de la procédure à son encontre.

232. Le dimanche 29 novembre 2009 à 19:44 par EPBG

@ 231 (et à EOLAS)

… et le + beau dans cette histoire, c’est que mon Client peut bénéficier de l’Aide juridictionnelle totale, ce qui veut dire qu’il n’aura rien à débourser.

Donc, c’est l’Etat qui va payer pour démolir ses GAV.

Si c’est pas beau, ça

Seul bémol, je devrai travailler pour des (très petites) queues de cerise (et l’éventuelle gloire), mais pourrai faire gérer le pourvoi sans qu’il en coûte rien au Client.

233. Le lundi 30 novembre 2009 à 15:23 par citoyen

@EPBG (233)

N oubliez pas d etablir un releve detaillee de vos honoraires pour la requete a la Cour europeene des Droits de l’Homme.

Si vous gagnez a la Cour europeene des Droits de l Homme (cela parait evident), elle vous rembourse l integralite de vos frais et honoraires.

Pour Medvedyev c. France, les honoraires demandes sont 5000 Euros et cela semble raisonnable.

74. Les requérants réclament 5 000 EUR pour leurs frais et dépens devant la Cour. Ils produisent une demande de provision portant sur un tel montant, établie le 25 septembre 2006 par leur conseil.

75. Le Gouvernement invite la Cour à rejeter les prétentions des requérants.

76. La Cour constate tout d’abord que les requérants ont produit un justificatif pertinent à l’appui de leur demande. Estimant ensuite que le montant réclamé n’est pas excessif, elle y fait droit et alloue 5 000 EUR aux requérants conjointement pour frais et dépens.

234. Le lundi 30 novembre 2009 à 15:53 par news

“Mardi par exemple, Pierre-Olivier Sur, avocat pénaliste, plaidera devant le tribunal correctionnel de Paris la nullité d’une procédure qui vise une dizaine de Guinéens placés en garde à vue à la suite de dégradations commises au cours d’une manifestation organisée après le coup d’État en Guinée. «Même là-bas, explique-t-il, l’avocat est présent tout au long de la garde à vue…»”

Source : Le figaro. http://www.lefigaro.fr/actualite-fr…

235. Le mardi 1 décembre 2009 à 18:45 par tschok

@ 235,

Ouais, mais chez nous on le met direct en garde à vue, l’avocat.

On peut pas faire mieux en matière de respect des droits de la défense.

Alors c’est pas les Guinéens qui vont nous donner des leçons.

(les Russes font mieux que nous cela dit: ils le flinguent)

(c’est contrariant que les Russes soient meilleurs que nous sur ce coup là)

236. Le mardi 1 décembre 2009 à 20:49 par Nichevo

Voila, c’est fini…
Des aveux, à l’issue d’une garde à vue , et puis la vérité, moche, crue, sans fard et sans effet de manche.
Thyfaine est morte, par la faute intentionnelle ou non de ses parents.
L’instruction peut prendre le relais.
Les OPJ ont été tenaces; ont ils soutiré ces aveux après d’insupportables pressions psychologiques?

J’aurais aimé qu’un lecteur engagé voir enragé puisse nous faire la démonstration que tout cela était en contradiction totale avec les droits de la défense; que poser les questions dérangeantes aux parents était inconcevable. Que les mettre devant leurs contradictions était une offense au droit.

Cette garde à vue que vous déclarez “illégale”, a permis de connaitre la vérité, dans le respect du droit français.
Si l’avocat, (au demeurant très surpris des aveux de sa cliente), avait d’emblée demandé à connaitre l’intégralité du dossier et à participer aux débats dès le début, que se serait il passé?
Aurions nous eu une nouvelle affaire Grégory?
Aurions nous progressé plus rapidement?

J’en doute, et laissez moi ce bénéfice je vous prie.

237. Le mercredi 2 décembre 2009 à 12:52 par ti_cyrano

@Nichevo (#237) :

Vous avez raison, c’est indiscutable.

Mais je vous trouve quand même un peu mou du genou. Elle aurait sûrement communié (ou avoué, mais nous sommes dans une religion de l’aveu) bien plus vite si on avait pu lui arracher les ongles. Tous ces droits-de-l’hommistes se font les complices des criminels-terroristes-pédophiles en voulant brider la nécessaire efficacité des forces de l’ordre.

238. Le mercredi 2 décembre 2009 à 13:24 par epbg

@237

Je crois que vous n’avez pas vraiment compris le débat : ce n’est pas la garde-à-vue qui est illégale, c’est le fait que la personne soit interrogée en GAV sans la présence d’un Avocat qui est contraire à la CEDH

239. Le mercredi 2 décembre 2009 à 16:21 par detentionillegale

@239 (EPBG)

Ben,c’est a dire que..enfin..les articles 5-1-C (controle du procureur ou du juge d’instruction sur la garde a vue, Medvedyev c. France) et 5-4 (pas de recours) de la Convention sont quand bien bafoue. Le 5-3 pour les gardes a vue de plus de 3 jours. L’absence d’avocat, c’est juste les articles 6-1 et 6-3-c de la Convention. Les fouilles a nue et les locaux, violation des articles 8 et 3 de la Convention…Il y a de quoi faire.

Actualite de la Cour europeene des Droits de l’Homme sur la garde a vue a la Turque

Adalmış et Kıkıç c. Turquie (n° 25301/04)
Invoquant l’article 6 § 1 et 3 c) (droit à un procès équitable), ils se plaignaient de ne pas avoir bénéficié de l’assistance d’un avocat lors de leur garde à vue, d’avoir été condamnés sur des dépositions faites dans ces conditions, ainsi que de ne pas avoir fait l’objet d’un procès impartial.
Violation de l’article 6 § 3 c) combiné avec l’article 6 § 1 (équité)
Satisfaction équitable : 1 000 EUR chacun pour dommage moral et 1 000 EUR, conjointement, pour frais et dépens

Ahmet Engin Şatır c. Turquie (n° 17879/04)
Yusuf Gezer c. Turquie (n° 21790/04)
Leurs requêtes concernent leur placement en garde à vue dans des affaires de meurtre. Ils se plaignent, sous l’angle de l’article 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) d’y avoir subi des violences, et, en outre pour M.Gezer, de l’impunité accordée aux policiers responsables de ces violences. Sur le terrain de l’article 6 (droit à un procès équitable), ils allèguent avoir été condamnés sur le fondement de preuves obtenues sous la contrainte. M. Gezer invoque également l’article 5 (droit à la liberté et à la sûreté).
Violations de l’article 3 (traitement et enquête)
(M. Şatır) Violation de l’article 6 §§ 1 et 3 c) (équité)
(M. Gezer) Violation de l’article 6 § 1 (équité)
Satisfaction équitable : la meilleure réparation serait d’offrir aux requérants un nouveau procès dans le respect des exigences de l’article 6 § 1

Arikan c. Turquie (n° 14071/04) :
Irrecevabilite de la violation des articles 6-1 et 6-3-C) car le proces est toujours en cours.


Ce qui tres interessant dans Adalmış et Kıkıç, c’est que le requerant avait dans le droit acces a un avocat et que le gouvernement pretend qu’il y a renonce. Malgre tout, il y a violation car la detention s’est deroullee avec une violation de l’article 3.

240. Le mercredi 2 décembre 2009 à 20:50 par agenda

Les droits doivent être respectés. soit. Mais j’entends malheureusement rarement évoquer les DEVOIRS qui en sont le corollaire. exemple récent:un avocat convoqué par un OPJ ne daigne pas venir…motif invoqué trop de travail, les horaires ne conviennent pas! Il faudrait peut-être déjà que tous les avocats fassent preuve de davantage de déontologie.

241. Le jeudi 3 décembre 2009 à 11:12 par Bébert

@237

Pourquoi faire de l’avocat l’ennemi de la vérité judiciaire. Le but de ce billet est de défendre un équilibre dès les premiers moments de l’enquête. Un avocat ne défend pas son client à n’importe quel prix. Il le conseille et je suppose que s’il se rend compte que sa version des faits est intenable, il le préviendra que nier les évidences ou s’enferrer dans des mensonges va immanquablement se retourner contre lui. Mieux vaut collaborer à l’enquête.

Le fait divers que vous évoquez est extrêmement douloureux et la médiatisation que l’on en fait est indécente. Elle a d’ailleurs probablement freiné les aveux. Cette affaire me rappelle celle d’Aline Lelièvre. Une très jeune mère, elle aussi, immature et isolée, qui a commencé par nier, ameuter les médias, parler d’enlèvement, avant de craquer. Verdict 25 ans de prison. Elle en avait 19 au moment des faits. L’avocate générale était également le procureur qui avait instruit la disparition inquiétante de l’enfant. Au procès elle n’avait pas oublié que l’accusée l’avait menée en bateau avec un apparent aplomb durant plusieurs jours.

242. Le jeudi 3 décembre 2009 à 11:52 par amis

Info de France Info :

Les articles 6-1 et 6-3-C de la Convention europeene des Droits de l’Homme sont respecte par un juge au TGI de Bobigny :

http://www.france-info.com/france-j…

On espere que les autres juges de la Republique francaise se decident a respecter la Convention.

243. Le jeudi 3 décembre 2009 à 13:33 par toutafait

@Bebert (242);

s’il se rend compte que sa version des faits est intenable, il le préviendra que nier les évidences ou s’enferrer dans des mensonges va immanquablement se retourner contre lui.

C’est ce que l’on repete toujours au procureur ou aux policiers pour les faire avouer qu’ils bluffent..ca marche rarement.. ;)

244. Le jeudi 3 décembre 2009 à 13:33 par OuvreBoîte

@Nichevo(237)

Bénéfice rejeté.
La démarche qui consiste à utiliser un cas rare pour justifier des moyens qui sont utilisés de manière constante dans des circonstances annodines me hérisse. C’est la même logique qui consiste à faire glisser des dispositions vendues initialement pour lutter contre le terrorisme pour courrir après des vendeurs de cannabis. Combien y-a-t-il d’infanticide par an en france, en tout ? rapporté au nombre de gardes à vue ?
Et de toute façon la fillette n’aurait pas été sauvée. C’est la même logique que le flic qui était passé sur france2 devant un Yves Calvi lamentable sur l’affaire Ilan H. pour s’indigner du fait que les opérateurs télécom mettent trop de temps à répondre, et qu’ils exigent la validation d’un juge et qu’ils font payer (imaginez le scandale, ils ne veulent pas travailler gratuitement pour la police) et que ça serait quand même vachement plus simple si la police avait des fichiers sur tout et pouvait taper dedans en temps réel.
Rappelez vous, la recherche de l’absolu en terme de sécurité est une utopie totalitaire.

Qu’est-ce qu’une affaire d’infanticide a comme rapport avec l’affaire de l’avocate dont il est question au départ ? En quoi ça justifie de fouiller tout le monde à corps ? De garder des gens pendant 48 heures alors qu’un entretien de 2h pour établir les faits. En fait plus ça se développe, plus on se rend compte que c’est une affaire d’égo ; le suspect peut avouer devant la police, devant le juge d’instruction, même à l’audience, mais non il faut que ça soit la police le chasseur qui ramène la dépouille du gibier. Pour des cas où de toute façon il existe des éléments à charge, aveux ou pas (écoutes téléphoniques, absence de la fillette depuis jours avant la disparition supposée), à quel point l’aveu en garde à vue est-il déterminant ?

245. Le jeudi 3 décembre 2009 à 14:26 par greluche

Fouille à Corps.

Bonjour à tous. Pardonnez moi d’intervenir de manière probablement un tout petit peu provocante et, en tout état de cause, béotienne, dans ce fil de professionnels de la justice, mais je me disais :

  • Halte au politiquement correct. Pourquoi utiliser le terme “fouille à corps” au lieu de “fouille anale et/ou vaginale” voire “doigt dans le cul et/ou dans la …” ?
  • Est-ce pour ne pas effrayer le citoyen qui ne veut pas savoir comment ça se passe ? Est-ce tout simplement du newspeak administratif ?
  • Dixit Robert badinter in ce lien “La fouille au corps interne doit être absolument épargnée. La pénétration du corps hors le consentement de la personne est un viol… Les fouilles au corps internes sont à proscrire à jamais.”. Quid de la plainte pour viol à l’encontre du fonctinonaire de police qui la pratiquerait ?

Merci de votre éclairage

246. Le jeudi 3 décembre 2009 à 15:30 par OuvreBoîte

Il ne s’agit pas d’une fouille à corps interne qui ne peut-être réalisée que par un membre du corps médical me semble-t-il ; c’est pas parce qu’ils ne font que regarder que c’est pas une atteinte à la dignité de la personne.

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