Par Dadouche
J’avais cet été assommé gratifié nos lecteurs d’un long banc d’essai des comptes rendu judiciaires, en prenant l’exemple d’une journée du procès de Véronique Courjault devant les assises d’Indre et Loire pour l’assassinat de trois nouveaux nés.
Il était alors question qu’un “docu-fiction” soit produit, à partir d’une retranscription verbatim du procès.
Eh bien c’est fait et Parcours meurtrier d’une mère ordinaire : l’affaire Courjault sera diffusé lundi 7 décembre à 20 h 35 sur France 3.
Il s’agit d’une reconstitution de moments du procès, filmée dans la salle de la cour d’Assises d’Indre et Loire, que la société de production Maha Production a investie au mois d’octobre avec 18 comédiens, une centaine de figurants et une équipe technique de 40 personnes, entrecoupée d’interviews de protagonistes de l’affaire et d’images d’archives. Le site de France 3 nous apprend que les comédiens ont été choisis pour “la justesse de leur jeu et leur ressemblance physique avec les vrais personnages”.
D’abord un petit rappel juridique : pourquoi reconstituer un procès qu’il aurait suffi de filmer ?
Parce qu’il est interdit de filmer les procès[1], même si la Chancellerie accorde parfois des autorisations hors de tout cadre légal.
La société de production a donc tourné le problème en faisant sa version du procès.
Au delà de problèmes de principe posés à mon sens par la mise à disposition d’une société privée d’une partie d’un tribunal le temps du tournage[2], on peut à la fois attendre le meilleur et le pire de ce film.
Le pire parce que la reconstitution la plus minutieuse ne parviendra jamais à retranscrire la réalité des émotions dans une salle d’audience, la longueur des débats, l’alternance de temps morts et de temps forts. Le procès, qui a duré une dizaine de jours, se trouve réduit à un film de 105 minutes. Le choix des angles de vue, du montage, donne forcément une vision de l’audience, que chacun des protagonistes (magistrats, jurés avocats, accusée, famille, public) a pourtant vécue différemment.
Parce que cette affaire a déjà donné lieu à de vrais dérapages télévisuels, notamment lors de deux numéros de Mots croisés sur France 2.
Parce qu’on peut aussi penser que l’examen serein d’une telle affaire demande un recul que seul le temps peut permettre, alors même que la désormais condamnée purge encore sa peine.
Mais aussi le meilleur parce que ce film est réalisé par Jean-Xavier de Lestrade, à qui l’on doit des films exceptionnels sur des procès américains, notamment le formidable Un coupable idéal, et produit par Maha productions, récemment responsable de Justice à Vegas, qui a passionné le maître des lieux, ou du plus discutable Justice sous tutelle.
En attendant de juger sur pièces demain soir[3], en voici la bande-annonce.
Notes
[1] pour des explications plus détaillées, on pourra utilement s’infuser mon billet du mois de juillet
[2] si parmi nos lecteurs certains ont vécu cet envahissement, qu’ils n’hésitent pas à le raconter
[3] je tenterai, si les mineurs déchaînés m’en laissent le temps, de “live blogger” durant le film